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20/09/2022 | FRANCE | N°22BX02362

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 20 septembre 2022, 22BX02362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier Ouest Réunion et l'établissement public de santé mentale de La Réunion ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, suivant la procédure d'occupation temporaire de terrain privé de la loi du 29 décembre 1892, de désigner un expert aux fins de procéder au constat contradictoire d'état des lieux de la parcelle cadastrée section AD n°402 appartenant à l'association Tennis club de l'Oasis.

Par une ordonnance n°2200699 du 16 août 2022, la jug

e des référés du tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande, ainsi que ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier Ouest Réunion et l'établissement public de santé mentale de La Réunion ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, suivant la procédure d'occupation temporaire de terrain privé de la loi du 29 décembre 1892, de désigner un expert aux fins de procéder au constat contradictoire d'état des lieux de la parcelle cadastrée section AD n°402 appartenant à l'association Tennis club de l'Oasis.

Par une ordonnance n°2200699 du 16 août 2022, la juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande, ainsi que des conclusions reconventionnelles de l'association Tennis club de l'Oasis tendant à la suspension de l'arrêté préfectoral d'autorisation d'occupation de sa parcelle.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er septembre 2022, le centre hospitalier Ouest Réunion et l'établissement public de santé mentale de La Réunion, représentés par la Selarl Dugoujon et associés (Me Doulouma), doivent être regardés comme demandant au juge des référés de la cour :

1°) de réformer l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'elle n'a pas fait droit à la demande de désignation d'un expert ;

2°) d'ordonner l'expertise sollicitée.

Ils soutiennent que :

- en raison du chantier de construction d'un nouveau bâtiment logistique et tertiaire, leur personnel n'aura plus accès au parking utilisé précédemment, et un parking provisoire a dû être aménagé sur la parcelle AD n°52 dont ils sont locataires, avec un accès autorisé par la Région sur le chemin du Grand Pourpier. Toutefois, il est apparu qu'une partie de ce chemin appartenait à l'association Oasis Club. Celle-ci n'était pas opposée à l'aménagement du chemin en terre, mais demandait une redevance déraisonnable pour son occupation, si bien que l'aménagement a été réalisé sans son accord. Ils ont souhaité régulariser la situation, mais l'association a refusé de signer un constat contradictoire d'état des lieux ;

- c'est à tort que le premier juge a estimé qu'il pouvait apprécier l'utilité de la mesure demandée, comme dans un référé-constat ordinaire, alors que la loi spéciale du 29 décembre 1892 le place en situation de compétence liée pour désigner l'expert quand l'administration le sollicite. S'agissant d'une procédure coercitive d'exécution de travaux publics sur un terrain privé, la désignation de l'expert est un préalable à la finalisation de la procédure et donc à la prise de possession des lieux ;

- à titre subsidiaire sur le fondement de l'article R.531-1 du code de justice administrative, un constat d'état des lieux serait utile pour régulariser la situation, alors que l'usage du chemin désormais goudronné est toujours en cours.

Le président de la cour a désigné, par une décision du 1er septembre 2022, Mme Catherine Girault, présidente de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier Ouest Réunion et l'établissement public de santé mentale de La Réunion ont souhaité réaliser un nouveau bâtiment tertiaire et administratif, dont le chantier devait être installé sur le parking des bâtiments existants. Ils ont prévu d'aménager un parking provisoire pour leurs personnels, sur une parcelle prise en location dont l'accès se ferait par le chemin du Grand Pourpier, voie de terre sur laquelle la région Réunion leur avait donné une autorisation d'aménagement. Cependant, un bornage a révélé que ce chemin n'appartenait pas intégralement à la région, et qu'une partie était la propriété de l'association riveraine Tennis club de l'Oasis. Des pourparlers amiables pour une autorisation d'aménagement n'ayant pu aboutir, les deux établissements ont obtenu du préfet de La Réunion un arrêté du 9 décembre 2021 portant autorisation de pénétrer et d'occuper temporairement une propriété privée, qui leur rappelait la procédure prévue par la loi du 29 décembre 1892 et notamment le constat d'état des lieux à effectuer avant les travaux. Néanmoins les travaux ont été exécutés et à l'issue, les établissements ont tenté de faire procéder à un constat amiable, que l'association a refusé de signer au motif qu'il n'était pas préalable à l'exécution des travaux et ne pouvait donc décrire l'état des lieux avant travaux. Les deux établissements ont alors saisi le tribunal administratif, et relèvent appel de l'ordonnance du juge des référés du 16 août 2022 qui a refusé de désigner un expert.

Sur la demande présentée à titre principal :

2. Aux termes de l'article 3 de la loi du 29 décembre 1892 visée ci- dessus : " Lorsqu'il y a lieu d'occuper temporairement un terrain, soit pour en extraire ou ramasser des matériaux, soit pour tout autre objet relatif à l'exécution de projets de travaux publics, civils ou militaires, cette occupation est autorisée par un arrêté du préfet, indiquant le nom de la commune où le territoire est situé, les numéros que les parcelles dont il se compose portent sur le plan cadastral, et le nom du propriétaire tel qu'il est inscrit sur la matrice des rôles. (...). Aux termes de l'article 5 de la même loi : " Après l'accomplissement des formalités qui précèdent et à défaut de convention amiable, le chef de service ou la personne à laquelle l'administration a délégué ses droits, fait au propriétaire du terrain, préalablement à toute occupation du terrain désigné, une notification par lettre recommandée, indiquant le jour et l'heure où il compte se rendre sur les lieux ou à s'y faire représenter. Il l'invite à s'y trouver ou à s'y faire représenter lui-même pour procéder contradictoirement à la constatation de l'état des lieux. En même temps, il informe par écrit le maire de la commune de la notification par lui faite au propriétaire. (...). Entre cette notification et la visite des lieux, il doit y avoir un intervalle de dix jours au moins. ". Aux termes de l'article 7 de la même loi : " A défaut par le propriétaire de se faire représenter sur les lieux, le maire lui désigne d'office un représentant pour opérer contradictoirement avec celui de l'administration ou de la personne au profit de laquelle l'occupation a été autorisée. Le procès-verbal de l'opération qui doit fournir les éléments nécessaires pour évaluer le dommage est dressé en trois expéditions (...). Si les parties ou les représentants sont d'accord, les travaux autorisés par l'arrêté peuvent être commencés aussitôt. Dès le début de la procédure ou au cours de celle-ci, le président du tribunal administratif désigne, à la demande de l'administration, un expert qui, en cas de refus par le propriétaire ou par son représentant de signer le procès-verbal, ou en cas de désaccord sur l'état des lieux, dresse d'urgence le procès-verbal prévu ci-dessus. Les travaux peuvent commencer aussitôt après le dépôt du procès-verbal ; en cas de désaccord sur l'état des lieux, la partie la plus diligente conserve néanmoins le droit de saisir le tribunal administratif sans que cette saisine puisse faire obstacle à la continuation des travaux. ".

3. Pour rejeter la demande de désignation d'un expert, la première juge a relevé qu' " il résulte de l'instruction et notamment des procès-verbaux d'huissier dressés en avril et août 2021 à la demande de l'association Tennis club de l'Oasis que les travaux d'aménagement d'une voie de passage sur la parcelle cadastrée AD n° 402 menant à un parking public provisoire ont été réalisés pour le compte du CHOR et de l'EPSMR avant que le préfet ne prenne, le 9 décembre 2021, un arrêté autorisant les agents de ces deux établissements à occuper cette parcelle. Il résulte par ailleurs, d'une part, de l'acte de vente du 11 février 1977 et du plan de bornage de 2022 produits par l'association, d'autre part, du relevé de propriété produit par les requérants que l'association Tennis club de l'Oasis est le propriétaire apparent de la parcelle AD n° 402. Il ne résulte en revanche pas des documents versés à l'instance que les deux établissements aient sollicité l'association préalablement à la réalisation des travaux pour procéder à la constatation contradictoire de l'état des lieux. Dans ces conditions, alors que la saisine du président du tribunal administratif d'une demande de désignation d'un expert pour dresser l'état des lieux constitue un préalable à la prise de possession des terrains, la demande apparaît tardive, au stade actuel de la procédure, et ne présente pas, dès lors, un caractère utile.

4. Le centre hospitalier Ouest Réunion et l'établissement public de santé mentale de La Réunion ne contestent nullement que les travaux étaient déjà réalisés lorsqu'ils ont sollicité un constat contradictoire, et a fortiori lorsqu'ils ont saisi le tribunal. Dès lors que la procédure susrappelée a pour objet de présenter l'état des lieux préalable à des travaux publics sur une propriété privée, leur demande au juge des référés était, en tant qu'elle se fondait sur ces dispositions particulières, sans objet et par suite irrecevable. Ils ne sont donc pas fondés à se plaindre que le tribunal l'ait rejetée.

Sur la demande présentée à titre subsidiaire :

5. Il ne ressort pas des écritures de première instance que les établissements publics aient présenté leur demande sur un autre fondement que la loi spécifique du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics. Par suite, ils ne sont pas recevables à solliciter pour la première fois en appel un constat sur le fondement de l'article R.531-1 du code de justice administrative, aux termes duquel : " S'il n'est rien demandé de plus que la constatation de faits, le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d'avocat et même en l'absence d'une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction. Il peut, à cet effet, désigner une personne figurant sur l'un des tableaux établis en application de l'article R. 221-9. Il peut, le cas échéant, désigner toute autre personne de son choix. Avis en est donné immédiatement aux défendeurs éventuels. Par dérogation aux dispositions des articles R. 832-2 et R. 832-3, le délai pour former tierce opposition est de quinze jours. ".

6. Il résulte de ce qui précède que la requête du centre hospitalier Ouest Réunion et de l'établissement public de santé mentale de La Réunion ne peut qu'être rejetée.

ORDONNE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier Ouest Réunion et de l'établissement public de santé mentale de La Réunion est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au centre hospitalier Ouest Réunion et à l'établissement public de santé mentale de La Réunion. Copie en sera adressée à l'association Tennis Club de l'Oasis.

Fait à Bordeaux, le 20 septembre 2022.

La juge d'appel des référés,

Catherine Girault

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 22BX02362 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 22BX02362
Date de la décision : 20/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SELARL DAVID HOARAU - MATHIEU GIRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-20;22bx02362 ?
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