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27/09/2022 | FRANCE | N°20BX02347

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 27 septembre 2022, 20BX02347


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1301030 du 26 mai 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2020, M. et Mme D... représentés par Me Drié, demandent à la cour

:

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 26 mai 2020 ;

2°) de prono...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1301030 du 26 mai 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2020, M. et Mme D... représentés par Me Drié, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 26 mai 2020 ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle n'a pas indiqué l'origine et la teneur des informations recueillies dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL " Dom Tom Défiscalisation " (DTD) et ne leur a pas davantage communiqué les documents qu'elle a demandés et qui auraient été, le cas échéant, de nature à prouver que ces documents ne concernaient pas des éléments qui ont fondé les rehaussements ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dès lors que l'administration n'a pas fait état des éléments recueillis dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL " DTD " ; le service a également manqué à son devoir de loyauté ;

- la SEP dans laquelle ils sont associés n'est pas identifiée dans la proposition de rectification qui leur a été adressée, viciant ainsi l'ensemble de la procédure d'imposition ;

- le droit de communication de l'administration a été exercé auprès d'EDF en méconnaissance des dispositions de l'article L. 85 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle a demandé à EDF la communication d'informations techniques et non de documents comptables ; en l'absence de réponse du service, il est impossible de savoir si l'installation photovoltaïque de la SEP dont ils sont associés a bien fait l'objet de ce droit de communication et si la réponse d'EDF la concerne ;

- alors que la charge de la preuve pèse sur le service vérificateur, celui-ci n'apporte pas la preuve que les investissements qu'ils ont réalisés sous couvert de la SEP ne seraient pas productifs ; c'est à tort que le service estime que l'investissement doit être productif au titre de l'année d'imposition à laquelle il se rattache dès lors que selon la doctrine administrative 5 B- 2-07 au n° 22 dans la section libellée " investissements ouvrant droit à réduction ", la réduction est acquise l'année où l'investissement est livré et non l'année où il peut entrer en production ; les critères d'éligibilité à la réduction d'impôt, définis par les articles 199 undecies B du code général des impôts et 95 K de l'annexe II de ce code et la doctrine administrative 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 sont remplis ; ces dispositions n'imposent pas, comme le prétend le service, que l'investissement ait obtenu l'agrément du Consuel, ni qu'il ait fait l'objet d'une demande d'autorisation préalable, ni qu'il soit raccordé au réseau EDF ; le droit à la réduction d'impôt est né à compter de la livraison de l'investissement et l'absence de raccordement au réseau EDF n'est pas du fait de la SEP mais de ce que EDF a mis, durant la période en litige, plus d'un an en moyenne pour raccorder les centrales à partir du dépôt de la demande, en raison d'une grève générale aux Antilles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... C...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., associés de plusieurs sociétés en participation (SEP) gérées par la SARL " Dom Tom Défiscalisation " (DTD), ont imputé au titre des années 2009 et 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt puis un report de réduction du fait d'investissements outre-mer réalisés par ces SEP, consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à d'autres sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique. A l'issue d'un contrôle sur pièces, cette réduction d'impôt a été remise en cause par l'administration fiscale au motif qu'en l'absence de raccordement des installations au réseau électrique géré par la société Electricité de France (EDF) à la date du 31 décembre 2009, les investissements en cause n'étaient pas réalisés et ne pouvaient en conséquence ouvrir droit à une réduction d'impôt au titre de cette année. M. et Mme D... relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 26 mai 2020 qui a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Sur la régularité de la procédure :

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

3. Il résulte de l'examen de la proposition de rectification du 4 novembre 2011 adressée à M. et Mme D... que le service y mentionne les bases des rappels d'impôts sur le revenu dont ils ont fait l'objet au titre des années 2009 et 2010 et indique que la rectification proposée procède de la remise en cause, sur le fondement de l'article 199 undecies B du code général des impôts, d'une réduction d'impôt accordée au titre d'opérations d'investissements portant sur des matériels photovoltaïques, prétendument réalisées par les SEP dont ils sont associés et dont la gestion est confiée à la société DTD. Cette proposition de rectification détaille le mécanisme de défiscalisation mis en œuvre, rappelle la législation applicable et précise, à partir des constats réalisés par l'administration à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de différentes institutions publiques et de transitaires en douane antillais précisément identifiés, les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour opérer la remise en cause de l'avantage fiscal ainsi que le montant concerné. Elle indique ainsi que l'investissement dont s'agit ne répond pas aux conditions légales prévues par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts dès lors, notamment, que son prix de revient n'est pas justifié, qu'il n'est pas corrélé au montant de l'investissement total allégué et que les investissements réalisés au titre de l'année 2009 n'étaient pas en capacité de fonctionner de manière autonome et n'ont revêtu aucun intérêt économique ou environnemental pour la Martinique. Dès lors, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le nom des SEP, nécessairement connues des requérants en leur qualité d'associés, ne soit pas mentionné, la proposition de rectification indique les motifs de fait et de droit à l'origine des rehaussements envisagés de manière suffisamment précise pour permettre à M. et Mme D... de présenter utilement leurs observations, ce qu'ils ont d'ailleurs fait le 20 décembre 2011. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration se serait fondée sur des informations recueillies dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la société DTD a fait l'objet et qu'elle aurait omis de mentionner dans la proposition de rectification. Dès lors, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales auquel le tribunal a suffisamment et complètement répondu ne peut qu'être écarté. En tout état de cause, le manquement du service fiscal à une obligation de loyauté n'est pas établi.

En ce qui concerne l'absence de contrôle sur place de la SEP :

4. M. et Mme D... qui ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces de leurs déclarations, soutiennent que l'administration les a privés des garanties attachées à la vérification de comptabilité des sociétés en participation dont ils sont associés en ne recourant pas à cette procédure afin de déterminer de manière précise la nature et le nombre des investissements réalisés. Toutefois, il résulte de l'instruction que les suppléments d'impôt mis à la charge de M. et Mme D... résultent exclusivement de la remise en cause de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts dont ils ont entendu bénéficier à titre personnel à raison d'investissements productifs réalisés en Martinique. L'imposition en litige ne procède pas du rehaussement du résultat de ces sociétés, taxable entre les mains de leurs associés au prorata de leurs parts en application des dispositions de l'article 8 du code général des impôts relatif au régime d'imposition des sociétés de personnes. Dès lors, l'administration fiscale n'était pas tenue de procéder à la vérification de comptabilité des SEP dont M. et Mme D... sont associés préalablement au contrôle sur pièces dont ils ont fait l'objet. De plus, aucune disposition législative ou règlementaire ne fait obligation à l'administration de procéder à un contrôle sur place avant de remettre en cause le bénéfice d'une réduction d'impôt sur le revenu dont se prévaut un contribuable à raison d'investissements réalisés dans les départements d'outre-mer. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition ne peut en conséquence qu'être écarté.

En ce qui concerne l'exercice du droit de communication :

5. D'une part, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...) ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contenaient ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

6. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. ". Aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'État, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'État, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel (...) ".

7. De première part, il résulte de l'instruction que les rectifications litigieuses procèdent notamment de la constatation par le service, à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès des services douaniers, d'EDF et des transitaires en douane Géodis Wilson et Pompière SA, d'une disproportion entre les fonds collectés et les investissements effectivement importés, de l'absence de certificat de conformité des panneaux photovoltaïques par le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (Consuel) ainsi que de l'absence de raccordement au réseau des centrales utilisant l'énergie solaire. La proposition de rectification du 4 novembre 2011 a informé les requérants que ces éléments avaient été obtenus grâce au droit de communication exercé auprès desdites entreprises et administration susmentionnées, avec une précision suffisante pour leur permettre de demander que les documents contenant ces renseignements soient mis à leur disposition. De plus, s'il n'est pas contesté que le service a procédé à une vérification de comptabilité de la société DTD, gérante des SEP, il ne résulte pas de l'instruction que les renseignements obtenus dans le cadre des opérations de contrôle de cette société auraient fondé les rectifications contestées, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

8. De seconde part, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration n'a pas exercé son droit de communication auprès de la société Électricité de France (EDF) sur le fondement des dispositions de l'article L. 85 du livre des procédures fiscales mais sur celui des dispositions de l'article L. 83 du même livre. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le droit de communication de l'administration a été exercé auprès d'EDF en méconnaissance des dispositions de l'article L. 85 du livre des procédures fiscales est inopérant.

Sur la charge de la preuve :

9. Il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si le contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 199 undecies B du code général des impôts.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

10. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". L'article 95 K de l'annexe II au code général des impôts prévoit que : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article. ", alors que l'article 95 Q de la même annexe précise que : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée (...) au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 199 undecies B et 95 Q du code général des impôts que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue par ces dispositions est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. S'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et, par suite, productives de revenus qu'à compter de cette date.

11. Il résulte de l'instruction que les apports de M. et Mme D... avaient vocation à être investis par la SARL DTD, en sa qualité de gérante de la SEP au sein de laquelle ils sont associés, pour acquérir, auprès de la société Lynx Industries du matériel photovoltaïque permettant la création d'une centrale productrice d'énergie solaire devant être louée à la société Solar, créée par la société Lynx Industries, qui devait en confier l'exploitation effective à une société sous-traitante, l'EURL Lynx Industries Caraïbes, elle-même filiale de la société Lynx Industries. La réception de ce matériel devait être assurée par la société Lynx Industries Caraïbes, également chargée de son stockage avant son installation et de l'interface avec EDF. Toutefois, l'exercice du droit de communication auprès de l'administration des douanes et des droits indirects et de deux transitaires en douanes, les sociétés Géodis Wilson et Pompière, a mis en évidence l'absence d'importation en Martinique de matériel photovoltaïque en 2007 par les sociétés parties au programme d'investissement. En 2008, seule la SARL Lynx Industries Caraïbes avait importé, sous couvert du numéro " siren " de la société DTD, du matériel photovoltaïque, et en 2009, des importations de ce type de matériel ont également été effectuées par la SARL DTD. Or le total des importations de matériel photovoltaïque effectuées par ces sociétés n'a atteint qu'une valeur déclarée en douane de 465 718 euros en 2008 et de 220 972 euros en 2009, alors que le montant des investissements déclarés par les associés des différentes SEP destinataires de ce matériel atteignait 65 858 000 euros en 2008 et 76 884 000 euros en 2009. Outre cette discordance entre le montant total des importations de matériel photovoltaïque réalisées par la SARL DTD et celui des investissements déclarés par les associés des différentes SEP gérées par la SARL, il résulte aussi de l'instruction et notamment des renseignements obtenus auprès d'EDF, qu'aucune des centrales photovoltaïques au titre de laquelle a été pratiquée la réduction d'impôt litigieuse n'avait fait l'objet au cours de l'année 2009 d'une demande complète de raccordement au réseau électrique permettant un raccordement effectif avant le 31 décembre, condition pourtant nécessaire à l'exploitation des installations selon 1'usage prévu par les investisseurs en vue de bénéficier de 1'avantage fiscal correspondant. Si les requérants font valoir que l'absence de raccordement au réseau électrique résulterait du retard pris par EDF dans le traitement des demandes de raccordement en raison d'une grève ou encore du moratoire institué par le décret susvisé du 9 décembre 2010, l'exercice du droit de communication exercé auprès d'EDF a permis de constater qu'aucune demande de raccordement au réseau de distribution n'a été présentée avant 2010 de sorte que le défaut de raccordement leur est entièrement imputable. Au surplus, aucun certificat de conformité n'avait été délivré à la même date par l'organisme agréé que constitue le Comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité. Par suite, l'administration a pu, à bon droit remettre en cause la réduction d'impôt pratiquée par M. et Mme D... au titre des années 2009 et 2010.

S'agissant du bénéfice de la doctrine administrative :

12. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales: " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été à 1'époque, formellement admise par 1'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ".

13. Les termes de l'instruction fiscale BOI 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, qui se bornent à expliciter la notion de livraison de l'immobilisation, ne donnent pas du dispositif légal une interprétation différente de celle mentionnée au point 10 du présent arrêt en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, subordonné, ainsi qu'il a été dit, à la condition tenant à l'exploitation effective de l'immobilisation.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Nicolas Normand premier conseiller,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.

Le rapporteur,

Nicolas C...

La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02347
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SELARL KIHL-DRIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-27;20bx02347 ?
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