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16/12/2022 | FRANCE | N°22BX01555

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 16 décembre 2022, 22BX01555


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle la préfète de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour déposée le 31 janvier 2020 ainsi que l'arrêté du 20 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2104373 et 2106697 du 9 mars

2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle la préfète de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour déposée le 31 janvier 2020 ainsi que l'arrêté du 20 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2104373 et 2106697 du 9 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 juin 2022, M. A..., représenté par Me Jouteau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 mars 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer le titre de séjour sollicité, à défaut de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ajoutant une condition à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplit les critères posés par la circulaire du 28 novembre 2012, ce qui constitue la circonstance exceptionnelle justifiant la régularisation de sa situation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 octobre 2022, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissant d'un Etat membre de l'Union Européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération Suisse ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né en 1986, déclare être entré en France le 20 octobre 2013. Le 31 janvier 2020, il a demandé son admission exceptionnelle au séjour. Par deux requêtes, il a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision de rejet implicite née du silence gardé sur cette demande ainsi que l'arrêté du 20 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il relève appel du jugement du 9 mars 2022 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes.

2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1(...) ".

3. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.

4. D'une part, si M. A... soutient résider en France depuis 2013 et être hébergé par sa tante et se prévaut de la présence de nombreux membres de sa famille ainsi que de son cercle amical, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant, qu'il a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de 27 ans et que ses parents et sa fratrie y résident toujours. En outre, il ne justifie que d'une activité professionnelle de 13 mois, en qualité d'ouvrier saisonnier agricole, sur l'ensemble de cette période. Ainsi, le requérant, quand bien même il aurait obtenu des promesses d'embauche, ne peut se prévaloir d'aucun élément particulier d'intégration et ne peut être regardé comme ayant fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux en France. En outre, il ne peut utilement se prévaloir des orientations fixées par la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, qui se bornent à énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation. Par suite, en considérant que les éléments de la vie privée et familiale de M. A... ne caractérisaient pas des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour, la préfète de la Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

5. D'autre part, le requérant se prévaut d'une promesse d'embauche en qualité d'enduiseur établie le 15 septembre 2021 et de son expérience dans ce domaine de 2007 à 2012 au Maroc. Toutefois, ces éléments ne sauraient, à eux seuls, justifier l'admission au séjour de l'intéressé en tant que salarié au titre du pouvoir de régularisation du préfet, la réalité de son expérience n'étant au demeurant pas établie par les seuls bulletins de salaire qu'il produit. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la préfète en refusant de faire usage de son pouvoir de régularisation au titre du travail doit être écarté.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, l'arrêté litigieux ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... au regard des motifs du refus de séjour et des buts poursuivis par la mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2021. Sa requête d'appel doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.

La rapporteure,

Christelle D...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX01555 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01555
Date de la décision : 16/12/2022
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-12-16;22bx01555 ?
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