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02/02/2023 | FRANCE | N°22BX02438

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 02 février 2023, 22BX02438


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2021 par lequel le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°2101342 du 5 juillet 2022, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistr

ée le 2 septembre 2022, Mme A..., représentée par la Selarl Kouassigan, demande à la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2021 par lequel le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°2101342 du 5 juillet 2022, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 septembre 2022, Mme A..., représentée par la Selarl Kouassigan, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe 5 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 16 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer un titre de séjour sans un délai de quinze jours sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; à défaut de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme qu'il lui appartiendra de fixer en équité au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la gravité de sa pathologie et son caractère évolutif nécessitent un traitement de longue durée qui n'est pas disponible dans son pays d'origine ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en violation des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle n'aura pas accès aux soins nécessaires à son état de santé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... A..., ressortissante de La Dominique née en 1989, déclare être entrée sur le territoire français en 2013. Elle a déposé une demande de titre de séjour pour raison de santé en mars 2014 et a obtenu des autorisations provisoires de séjour puis un titre de séjour en septembre 2014, qui a été renouvelé jusqu'en 2019. Sa dernière demande de renouvellement déposée en novembre 2019, a été rejetée par un arrêté du préfet de la Guadeloupe du 16 septembre 2021, lui faisant également obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 5 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 16 septembre 2021 :

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise les textes dont il est fait application, mentionne les faits relatifs à la situation personnelle et administrative de Mme A... notamment la date de son entrée en France, le fait qu'elle a bénéficié de plusieurs titres de séjour pour raison de santé, l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 23 mars 2020 ainsi que la teneur de cet avis et les circonstances qu'elle est célibataire et mère d'un enfant de trois ans, et indique les raisons pour lesquelles le préfet de la Guadeloupe a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français. Ces indications, qui ont permis à Mme A... de comprendre et de contester les mesures prises à son encontre, étaient suffisantes. Par suite, le moyen tiré de la motivation insuffisante de l'arrêté contesté doit être écarté.

3. En deuxième lieu aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que par un avis rendu le 23 mars 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration a estimé que l'état de santé de Mme A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle pouvait voyager sans risque. Mme A... soutient que la maladie de Blount dont elle souffre, qui ne pouvait être traitée dans son pays d'origine, présente un caractère évolutif qui nécessite un traitement au long cours en France. Le certificat médical établi par un médecin généraliste le 15 juin 2021 fait état de la quasi-guérison de ses troubles locomoteurs, et s'il atteste du caractère évolutif de sa pathologie et de la nécessité d'une surveillance active pour éviter de réduire à néant les résultats obtenus, il n'évoque pas de conséquences d'une exceptionnelle gravité. De même, le certificat établi le 9 juillet 2021 par un chirurgien se borne à faire état d'une intervention en 2015 ainsi que de son suivi médical depuis 2013 et de ce que son état de santé justifie une prolongation de son séjour, sans aucune autre précision, alors que les derniers documents médicaux attestant d'actes de prise en charge remontent à 2016. Ces éléments ne sont ainsi pas de nature à infirmer l'avis du collège de médecins quant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité d'un défaut de soins. Dès lors, la préfet a pu refuser à Mme A... la délivrance du titre sollicité sans commettre d'erreur d'appréciation.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger (...) qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".

6. Mme A... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis 2013, de la naissance de son fils en 2018 et de la présence de sa sœur en situation régulière. Toutefois, alors que son séjour en France était justifié par des raisons de santé, Mme A..., qui est célibataire, ne fait état d'aucun élément d'intégration particulier, et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dénuée de liens à la Dominique où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans. Ainsi, elle ne peut être regardée comme ayant fixé, à la date de l'arrêté en litige, le centre de ses intérêts privés sur le territoire national. Par suite, la décision de refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A... au regard des motifs de ce refus, et les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

7. En quatrième lieu, le refus de séjour n'a pas pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de son fils. Par suite, cette décision ne méconnaît pas l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

8. En cinquième lieu, pour les motifs exposés aux points précédents, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un défaut de traitement de la pathologie de Mme A... entraînerait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la décision fixant le pays de destination de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de l'absence de soins dans son pays d'origine doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 16 septembre 2021. Par suite sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 12 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 février 2023.

La rapporteure,

Christelle C...L'assesseur le plus ancien,

Birsen Sarac-Deleigne

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX02438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02438
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme BROUARD-LUCAS
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL RICOU ET KOUASSIGAN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-02-02;22bx02438 ?
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