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23/05/2023 | FRANCE | N°21BX03030

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 23 mai 2023, 21BX03030


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Aljo a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice courant du 14 mai 2014 au 31 décembre 2015, pour un montant de 32 772 euros.

Par un jugement n° 1904486 du 4 mai 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémo

ire, enregistrés les 15 juillet 2021 et 3 mai 2022, la société civile immobilière Aljo, représentée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Aljo a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice courant du 14 mai 2014 au 31 décembre 2015, pour un montant de 32 772 euros.

Par un jugement n° 1904486 du 4 mai 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 juillet 2021 et 3 mai 2022, la société civile immobilière Aljo, représentée par Me Garcia, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904386 du tribunal administratif de Bordeaux du 4 mai 2021 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société requérante soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal n'a pas répondu sur le défaut de réponse du service à sa demande de transmission de tous les termes de comparaison des immeubles à usage de bureaux ni sur l'absence de précision dans la proposition de redressement que des documents avaient été présentés au cours du contrôle ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :

- la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable ne sont pas suffisamment motivées, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- le service ne lui a pas communiqué l'ensemble des pièces demandées, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

S'agissant du bien-fondé des impositions :

- la méthode retenue par le service pour l'évaluation de la valeur de l'immeuble situé 3 cours du Chapeau Rouge n'est pas probante, dès lors que les biens comparés sont des appartements à usage d'habitation et non des locaux à usage de bureaux ;

- l'administration n'établit pas l'existence d'une minoration de l'actif net de la société et commet une confusion avec la distribution de dividendes.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 mars 2022 et le 28 novembre 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur de 5 200 euros et au rejet du surplus de la requête.

Il fait valoir qu'il a prononcé un dégrèvement de 5 200 euros et que les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) Aljo, qui exerce une activité de gestion de tous biens immobiliers, a fait l'acquisition le 26 novembre 2014 d'un bien immobilier, situé 3 cours du Chapeau Rouge à Bordeaux, pour un prix fixé dans l'acte notarié à 190 000 euros, auprès de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Jiac, qui loue le bien. Ces deux sociétés ont pour gérant et principal associé, M. A.... L'EURL Jiac a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices des années 2014 et 2015, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a considéré que le bien immobilier situé 3 cours du Chapeau Rouge avait été sous-évalué et que sa cession avait été consentie à un prix minoré présentant ainsi le caractère d'une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion. Par voie de conséquence, après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire, le service a réintégré au résultat de la société Aljo de l'exercice clos le 31 décembre 2015, la somme de 125 000 euros correspondant à la différence entre le prix normal de la cession du bien et le prix de vente. La société a alors été assujettie des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2014 et 2015, pour un montant total, en droits et pénalités, de 32 772 euros. La société Aljo relève appel du jugement n° 1904486 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 18 mars 2022, intervenue postérieurement à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a accordé à la société Aljo un dégrèvement d'un montant de 5 200 euros au titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en litige. Les conclusions présentées par la société Aljo sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

Sur la régularité du jugement :

3. Il résulte des motifs même du jugement attaqué, exposés au point 9, que le tribunal administratif de Bordeaux, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par la société Aljo, a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la réponse aux observations du contribuable, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement sur ce point doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). ". Selon l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...). ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse aux observations, consécutive à un précédent contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

6. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 13 mars 2017 adressée au gérant de la société Aljo mentionne la nature de l'impôt concerné et le fondement légal des rectifications envisagées pour les exercices concernés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Elle mentionne que l'administration fiscale a considéré que l'EURL Jiac, qui a pour unique associé, le principal dirigeant et associé de la société requérante, s'était injustement pénalisée en cédant son unique actif immobilier situé 3 cours du Chapeau Rouge à Bordeaux, moyennant un prix de vente minoré, et que cette vente représente un avantage occulte pour la société Aljo, constitutif de revenus distribués en application des dispositions de l'article 111-c du code général des impôts. Le service a également détaillé les méthodes d'évaluation utilisées pour déterminer la valeur vénale du bien en litige, par comparaison à des ventes réalisées dans le même secteur géographique, à des dates proches de la vente en cause, et compte tenu d'une évaluation faite à partir de la rentabilité escomptée de ce bien. Enfin, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration fiscale de joindre la proposition de rectification adressée le 14 févier 2017 à l'EURL Jiac à la proposition de rectification en litige. Dans ces conditions, la proposition de rectification en litige a suffisamment précisé l'origine et la teneur des éléments qu'elle a utilisés, et a permis à la société requérante de discuter utilement des rehaussements envisagés ce qu'elle a d'ailleurs fait en formulant des observations postérieurement à la notification de cette proposition, et a ainsi respecté le principe du contradictoire. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification du 13 mars 2017 doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Il résulte de ces dispositions que l'exigence de motivation de la réponse aux observations du contribuable qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié s'apprécie au regard de l'argumentation développée par celui-ci dans ses observations.

8. Par courrier du 10 mai 2017, le gérant de la société Aljo a présenté des observations suite à la proposition de rectification du 13 mars 217, en informant l'administration fiscale de son désaccord avec les rectifications envisagées et les pénalités appliquées, qu'il estime incompréhensibles, les évaluations ne correspondant selon lui à aucune réalité. Il a alors également sollicité la copie des actes et des jurisprudences citées. Par courrier du 23 mai 2017, l'administration fiscale a adressé à la société une réponse aux observations du contribuable, l'a informée du maintien des rectifications et pénalités envisagées, et lui a transmis les 21 copies des actes de vente ayant servis de termes de comparaison pour évaluer la valeur vénale du bien en litige. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration a bien répondu à l'argumentation relative à l'absence de transmission des termes de comparaison cités. Cette réponse a permis de comprendre pour quel motif les observations de la société Aljo étaient rejetées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la réponse aux observations du contribuable ne peut qu'être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

10. L'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée. Les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé. Toutefois, d'une part, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie. D'autre part, cette obligation ne s'étend pas aux jugements rendus publiquement, qui sont mis à disposition des parties ou leur sont expédiés à leur demande et sont librement accessibles au public en vertu d'une obligation légale.

11. Par courrier du 8 décembre 2017, la société Aljo a demandé à l'administration de lui communiquer huit documents, à savoir l'acte de vente du 26 novembre 2014 du bien cédé par l'EURL Jiac, l'acte de vente du 15 juillet 2008 de cet immeuble par l'EURL Jiac, les justificatifs du compte n° 775200 de l'EURL Jiac, les justificatifs de la commission sur vente qui aurait été annulée, l'ensemble des jurisprudences citées dans la proposition de rectification, la copie des diverses attestations notariées présentées au vérificateur, la copie du compromis de vente d'immeuble, signé le 7 août 2014 entre elle-même et l'EURL Jiac et la copie du nouveau bail commercial à effet du 1er décembre 2014.

12. Il résulte d'une part de l'instruction qu'en réponse à la demande de la société, l'administration a communiqué dans la réponse aux observations du contribuable la copie des 21 actes de ventes d'immeubles ayant servi comme termes de comparaison pour établir la valeur vénale du bien en litige. D'autre part, les six autres documents dont la copie a été sollicitée ne sont pas des documents obtenus auprès de tiers ni dont le service aurait détenu une copie. Il résulte en effet de l'instruction que les actes de ventes et le bail commercial conclu concomitamment à la vente intervenue le 26 novembre 2014 entre la société Aljo et l'EURL Jiac, constituent des contrats auxquels la société requérante était partie et que son gérant, M. A..., également gérant associé et principal dirigeant de l'EURL Jiac, pouvait ainsi avoir accès aux documents comptables de cette société. Les dispositions précitées de l'article L. 76. B du livre des procédures fiscales n'imposaient par ailleurs pas à l'administration fiscale de transmettre l'ensemble des jurisprudences citées dans la proposition de rectification, laquelle au demeurant mentionnait leurs dates et numéros et en reprenait des extraits. Dans ces conditions, la société Aljo n'a pas été privée de la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Le moyen doit par suite être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

13. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés (...) ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition (...) ".

14. Il résulte de ces dernières dispositions que, dans le cas où le prix de l'acquisition d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation, comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit, laquelle, au demeurant, correspond, si le vendeur est une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés, à un revenu distribué imposable entre les mains de l'acquéreur en vertu du c) de l'article 111 du code général des impôts.

15. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués (...) / c) les rémunérations et avantages occultes (...) ". Lorsqu'une société se porte acquéreuse pour une valeur que les parties ont délibérément minoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts. La preuve d'une telle libéralité doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé et, d'autre part, d'une intention, pour le cédant d'octroyer, et, pour la société bénéficiaire, de recevoir une libéralité du fait des conditions de la cession. Cette intention est présumée lorsque les parties sont en relation d'intérêts.

16. L'administration fiscale a estimé que la cession le 26 novembre 2014 par l'EURL Jiac à la société Aljo, qui disposent du même gérant et principal associé, M. A..., d'un bien immobilier situé 3 cours du Chapeau Rouge à Bordeaux à un prix très inférieur au prix du marché constituait un avantage qui devait être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens du c) de l'article 111 du code général des impôts.

17. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a déterminé la valeur vénale du bien en litige par la combinaison de deux méthodes. Elle a ainsi, d'une part, déterminé un prix moyen à partir de l'analyse de 21 ventes, conclues entre le 1er janvier 2014 et le 30 juin 2015, d'appartements d'une surface comprise entre 80 et 130 m² dans un périmètre géographique proche, compris entre le cours de l'Intendance, le cours Clémenceau et le cours Xavier Arnozan, dans le centre de Bordeaux, et, d'autre part, estimé la rentabilité annuelle escomptée de ce bien à partir de sa valeur locative. Le service a alors retenu la valeur médiane de 485 000 euros, au lieu de la somme de 190 000 euros inscrite dans l'acte de vente, ramenée à 175 000 euros, au regard de la valeur comptabilisée en produit le même jour au compte " produit cession d'actif " de l'EURL Jiac. Suite à l'avis de la commission départementale des impôts émis le 2 décembre 2017, l'administration a ramené l'évaluation du bien en cause à la somme de 300 000 euros, en s'appuyant sur la valeur médiane pouvant découler du rapport de l'expert judiciaire présenté par l'EURL Jiac, amendée de la rentabilité attendue d'un tel immeuble.

18. Pour contester l'évaluation faite par l'administration, l'EURL Jiac soutient que les termes de comparaison utilisés par le service ne sont pas probants dès lors qu'ils ne portent pas sur des biens immobiliers similaires à celui en litige, qui constitue un local professionnel à usage de bureaux et non un appartement à usage d'habitation. La société se prévaut à ce titre d'une expertise réalisée par un expert foncier le 15 mai 2017, lequel estime la valeur vénale du bien à 271 000 euros, après avoir constaté que le bien est à usage de bureaux, situé dans un entresol, avec une hauteur sous plafond de 2,47 mètres, une surface de 96,75 m², et dont les caves sont exposées aux inondations, et reprenant certains termes de comparaison retenus par l'administration, en ciblant des appartements cédés avant le 26 novembre 2014 situés, dans certains des quartiers retenus, en étage avec des hauteurs sous plafond supérieurs.

19. Il résulte de l'instruction que le bien en litige, d'une surface de 102,86 m², qui ne comporte ni cuisine, ni salle d'eau, est à usage de bureaux, et comprend la jouissance exclusive d'une terrasse, selon le descriptif de l'acte notarié du 26 novembre 2014. Si la société conteste les termes de comparaison retenus par l'administration, il résulte toutefois de l'instruction que les ventes analysées ont été conclues au cours de la même période, pour des biens d'une surface équivalente, situés dans le même secteur géographique que le bien en litige. La circonstance que les biens évalués constituent des appartements à usage d'habitation, en l'absence d'autres éléments de comparaison pertinents, ne s'oppose pas à ce qu'ils soient pris en compte pour l'évaluation de la valeur réelle du bien en cause, ainsi que l'a d'ailleurs fait l'expert diligenté par la société requérante. En outre, il n'est pas utilement contesté, ainsi que l'a observé le service, que les locaux commerciaux se négocient sensiblement plus chers que les appartements.

20. Si l'expert foncier propose dans son rapport du 15 mai 2017 de retenir quatre autres termes de comparaison au sein du même immeuble pour évaluer un prix moyen de 3 643 euros/m², il résulte toutefois de l'instruction que les modalités d'évaluation des valeurs de ces biens ne sont pas précisées et qu'ils concernent des biens dont la description ou la date de vente ne permettent pas de les retenir comme pouvant être rapprochés de la valeur du bien en litige. L'abattement préconisé par l'expert afin de tenir compte de la situation du bien en entresol, avec une hauteur sous plafond de 2,47 mètres et du caractère inondable des caves de la copropriété, n'est par ailleurs pas justifié alors qu'il résulte de l'instruction que le caractère inondable des caves de l'immeuble était connu dès 2007 et que le bien en litige, qui donne sur la rue, comporte une terrasse à usage exclusif, pouvant ainsi constituer un élément de confort en hyper-centre. La société requérante n'apporte par ailleurs aucun autre terme de comparaison que ceux proposés par l'administration fiscale ou par l'expert foncier. Enfin, la société Aljo ne peut utilement se prévaloir du faible écart existant entre l'estimation finalement retenue par l'administration et celle retenue par l'expert, seul l'écart entre le prix de cession convenu entre les parties et la valeur vénale du bien devant être pris en compte.

21. Il résulte de ce qui précède que la société requérante n'apportant aucun élément de nature à remettre en cause l'évaluation de la valeur vénale du bien en cause par l'administration fiscale, cette dernière doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'existence d'un écart significatif entre le prix de vente convenu et la valeur vénale du bien cédé et a pu, sans commettre de confusion entre actif net et distribution de dividendes, procéder au redressement en litige.

22. Il résulte de tout ce qui précède que la société Aljo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Sur les frais liés au litige :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la société Aljo de la somme qu'elle demande sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Aljo à concurrence du dégrèvement de 5 200 euros prononcé le 18 mars 2022.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Aljo est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Aljo et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2023.

La rapporteure,

Pauline C...La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX03030 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03030
Date de la décision : 23/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : GARCIA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-23;21bx03030 ?
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