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27/06/2023 | FRANCE | N°22BX02688

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 27 juin 2023, 22BX02688


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'assurer l'exécution du jugement n° 2000120-2000543 du 24 juin 2021 du même tribunal ayant, d'une part, enjoint au recteur de la Guyane de lui verser les deux premières fractions de l'indemnité de sujétion géographique dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et d'assortir ces deux sommes des intérêts aux taux légaux à compter de la date de réception par le rectorat des demandes de paiement du 3 décembre 2019 et, d'autre part, mis à la charge de l'État

le versement au requérant d'une somme de 1 200 euros au titre de l'artic...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'assurer l'exécution du jugement n° 2000120-2000543 du 24 juin 2021 du même tribunal ayant, d'une part, enjoint au recteur de la Guyane de lui verser les deux premières fractions de l'indemnité de sujétion géographique dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et d'assortir ces deux sommes des intérêts aux taux légaux à compter de la date de réception par le rectorat des demandes de paiement du 3 décembre 2019 et, d'autre part, mis à la charge de l'État le versement au requérant d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2200493 du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de la Guyane a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande tendant au versement de la somme de 19 150,92 euros, d'autre part, enjoint à l'État de verser à M. B... l'ensemble des intérêts dus à la date du jugement dans le délai de huit jours suivant sa notification et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 octobre 2022, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 10 novembre 2022, le 22 décembre 2022, le 26 février 2023 et le 16 mai 2023, M. B..., représenté par Me Weyl, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 29 septembre 2022 ou, à titre subsidiaire, de le réformer ;

2°) d'assurer l'exécution intégrale du jugement du 24 juin 2021 ;

3°) de fixer à la somme de 4 993,60 euros et subsidiairement 2 500,54 euros le montant des sommes restant dues à la date du 15 octobre 2022 en prononçant une astreinte de 100 euros par jour de retard pour assurer l'exécution de la décision à l'expiration d'un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 1 500 euros au titre de l'appel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé sur le montant de la somme de 2 416,01 euros retenue au titre des intérêts dus à la date du 8 août 2022 ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas assorti l'injonction prononcée d'une astreinte seule à même d'assurer l'exécution complète du jugement du 24 juin 2021 ;

- le tribunal devait déterminer le montant des intérêts dus et distinguer les intérêts dus sur le principal et les frais d'instance ;

- c'est à tort que le tribunal a appliqué les dispositions du II l'article L. 911-9 du code de justice administrative dès lors que le calcul de la somme d'argent à payer soulève une difficulté sérieuse ;

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas fait droit à sa demande de paiement de frais irrépétibles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2023, le recteur de la Guyane conclut au rejet de la requête.

Le recteur fait valoir que le jugement du 24 juin 2021 a été intégralement exécuté en principal et intérêts et que la demande de M. B... est devenue sans objet

Vu :

- le jugement du tribunal administratif de la Guyane n° 2000120-2000543 du 24 juin 2021 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de M. Romain Roussel-Cera, rapporteur public,

- et les observations de Me Taulet représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 24 juin 2021, le tribunal administratif de la Guyane a enjoint au recteur de la Guyane de verser à M. B... les deux premières fractions de l'indemnité de sujétion géographique dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et d'assortir ces deux sommes des intérêts aux taux légaux à compter de la date de réception par le rectorat des demandes de paiement du 3 décembre 2019. Par le même jugement, le tribunal administratif de la Guyane a également mis à la charge de l'État le versement au requérant d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Saisi d'une demande d'exécution de ce jugement, le tribunal administratif de la Guyane, par jugement du 29 septembre 2022, a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande tendant au versement de la somme de 19 150,92 euros, d'autre part, enjoint à l'État de verser à M. B... l'ensemble des intérêts dus à la date du jugement dans le délai de huit jours suivant sa notification et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Si M. B... soutient que le jugement n'est pas suffisamment motivé en tant qu'il retient au point 4 une somme de 2 416,01 euros au titre des intérêts dus à la date du 8 août 2022, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas déterminé le montant des intérêts dus mais se sont bornés à reprendre le chiffre avancé par l'administration pour ensuite constater qu'aucune somme n'avait été versée au titre de ces intérêts avant d'enjoindre à l'État de verser les intérêts dus sur le principal et les frais d'instance. Dans ces conditions, ce jugement n'est pas entaché de l'insuffisance de motivation invoquée.

Sur la demande d'exécution :

En ce qui concerne les intérêts dus sur la somme déterminée par l'article 2 du jugement du 24 juin 2021 :

3. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement (...), la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement (...) dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ".

4. Il résulte des dispositions précitées que le juge n'est pas tenu de prononcer une astreinte même en cas d'inexécution établie. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal n'a pas assorti l'injonction prononcée d'une astreinte.

5. M. B... fait valoir également que si le rectorat lui a versé, le 28 juin 2022, une somme de 21 168,32 euros, soit 19 150,92 euros nets, correspondant aux deux premières tranches de l'indemnité en litige, dont le montant n'est pas contesté, correspondant à l'indemnité que le tribunal l'a condamné à payer par l'article 2 de son jugement du 24 juin 2021, il n'a perçu aucun intérêt sur cette somme, alors que la pleine exécution du jugement emporte nécessairement le versement de tels intérêts.

6. Il résulte des articles 1237-1 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier que l'indemnité allouée à M. B... par le jugement du 24 juin 2021, et dont le montant net de 19 150,92 euros, calculé postérieurement par l'administration, n'est pas contesté, était productive d'intérêts, à taux légal puis à taux majoré à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision juridictionnelle est devenue exécutoire.

7. Le rectorat ne soutient pas avoir procédé spontanément au paiement de ces intérêts lors du versement du principal. Toutefois, il fait valoir qu'il a mis en paiement, le 18 avril 2023, une somme de 3 175,99 euros correspondant aux intérêts dus. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la somme ainsi versée ne correspondrait pas aux intérêts calculés comme dit au point 6. Dans ces conditions, le jugement doit être regardé comme exécuté, postérieurement à l'ouverture d'une procédure juridictionnelle sur les conclusions de M. B... tendant au versement des intérêts dus sur la somme déterminée par l'article 2 du jugement du 24 juin 2021.

8. Il résulte de ce qui précède que la demande d'exécution sur ce point est devenue sans objet et qu'il n'y a plus lieu d'y statuer.

En ce qui concerne les intérêts dus sur la somme de 1 200 euros mise à la charge de l'Etat au titre des frais irrépétibles :

9. Aux termes de l'article L. 911-9 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision passée en force de chose jugée a prononcé la condamnation d'une personne publique au paiement d'une somme d'argent dont elle a fixé le montant, les dispositions de l'article 1er de la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980, ci-après reproduites, sont applicables. / " Art. 1er. - I. - Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné l'État au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice. / Si la dépense est imputable sur des crédits limitatifs qui se révèlent insuffisants, l'ordonnancement est fait dans la limite des crédits disponibles. Les ressources nécessaires pour les compléter sont dégagées dans les conditions prévues par l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. Dans ce cas, l'ordonnancement complémentaire doit être fait dans un délai de quatre mois à compter de la notification. / À défaut d'ordonnancement dans les délais mentionnés aux alinéas ci-dessus, le comptable assignataire de la dépense doit, à la demande du créancier et sur présentation de la décision de justice, procéder au paiement (...) ".

10. Les dispositions précitées de l'article L. 911-9 du code de justice administrative, permettaient à M. B... d'obtenir le mandatement d'office de la somme mise à la charge de l'État par l'article 3 du jugement du 24 juin 2021. Par suite, et ainsi que l'a jugé le tribunal, il n'y avait pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit enjoint à l'État d'exécuter, sur ce point, le jugement du 24 juin 2021.

Sur les frais liés au litige :

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en rejetant la demande de condamnation de l'État que M. B... a présentée au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif de la Guyane a fait une inexacte application de ces dispositions. En revanche, il y a lieu de condamner l'État à verser à M. B... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant au paiement des intérêts dus sur la somme déterminée par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de la Guyane du 24 juin 2021.

Article 2 : L'État versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.

Le président-rapporteur,

Jean-Claude Pauziès

La présidente-assesseure,

Christelle Brouard-Lucas

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX02688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02688
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : WEYL TAULET ASSOCIES (WTA AVOCATS)

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-27;22bx02688 ?
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