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18/07/2023 | FRANCE | N°21BX03693

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 18 juillet 2023, 21BX03693


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016.

Par un jugement n° 1903134 du 7 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Pimont, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903134 du

tribunal administratif de Poitiers du 7 juillet 2021 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pén...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016.

Par un jugement n° 1903134 du 7 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Pimont, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903134 du tribunal administratif de Poitiers du 7 juillet 2021 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales afférentes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- l'administration, qui a motivé l'ensemble des rehaussements sur les mêmes considérations, était tenue de lui indiquer les motifs ayant conduit à l'abandon du chef de rectification portant sur la remise en cause du caractère déductible des charges foncières au titre de l'année 2016 ;

- la reprise de la déduction spécifique de 30 % prévue dans le cadre du dispositif " Scellier intermédiaire " n'est pas motivée dans la proposition de rectification et constitue une dérogation à l'ensemble des principes gouvernant les règles en matière de prescription du droit de reprise ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

- il a accompli toutes diligences nécessaires afin de remettre en location le logement dont il est propriétaire, dès le départ de l'ancien locataire ;

- le délai de dix-neuf mois qui s'est écoulé avant la remise en location du logement est dû à des circonstances indépendantes de sa volonté ;

- l'application des pénalités de 10 % pour insuffisance ou omission de déclaration prévue à l'article 1758 A du code général des impôts est insuffisamment motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pauline Reynaud,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est propriétaire d'un logement acquis le 30 décembre 2010 dans le cadre du dispositif Scellier situé 41-13 avenue Anatole France à Choisy-le-Roi (Val-de-Marne). Ce logement étant demeuré vacant pour la période courant de mai 2015 à janvier 2017, le service a remis en cause, par une proposition de rectification du 20 novembre 2017, la réduction d'impôt relative à l'investissement locatif, la déduction spécifique associée ainsi que le déficit foncier. A l'issue d'un recours hiérarchique, le chef de rectification portant sur la remise en cause du déficit foncier a été abandonné à titre gracieux. La réclamation préalable formée par M. B... le 29 mars 2019 a été rejetée par une décision de l'administration fiscale du 22 octobre 2019. M. B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2016 pour un montant total de 56 465 euros. M. B... relève appel du jugement n° 1903134 du 7 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) ". Selon l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 28 février 2018, l'administration fiscale a indiqué à M. B..., s'agissant des frais et charges déduits des revenus fonciers pour l'année 2016, avoir décidé " de faire preuve d'indulgence " en abandonnant les rectifications envisagées et d'admettre la déduction du déficit foncier généré pour un montant de 5 954 euros. Le dégrèvement ainsi accordé par l'administration, qui ne comporte aucune motivation particulière, ne constitue pas une prise de position formelle par le service sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal de nature à entraîner, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, une décharge des impositions en litige mais une mesure gracieuse. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales précitées pour demander la décharge de l'imposition litigieuse.

4. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Selon l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article. ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. En cas de motivation par référence, l'administration doit, en principe, annexer les documents auxquels elle se réfère dans la proposition de rectification ou en reprendre la teneur.

5. D'autre part, l'article 199 septvicies du code général des impôts prévoit que : " I. - 1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu à condition qu'ils s'engagent à le louer nu à usage d'habitation principale pendant une durée minimale de neuf ans. (...) / VII. - La réduction d'impôt obtenue fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle intervient : / 1° La rupture de l'engagement de location ou de l'engagement de conservation des parts mentionné aux I, IV ou VIII ; / 2° Le démembrement du droit de propriété de l'immeuble concerné ou des parts. Toutefois, aucune remise en cause n'est effectuée lorsque le démembrement de ce droit ou le transfert de la propriété du bien résulte du décès de l'un des membres du couple soumis à imposition commune et que le conjoint survivant attributaire du bien ou titulaire de son usufruit s'engage à respecter les engagements prévus au I et, le cas échéant, au VIII, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, pour la période restant à courir à la date du décès (...) ". L'article 31 du code général des impôts prévoit que : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : (...) / l) Une déduction fixée à 30 % des revenus bruts (...) provenant des logements au titre desquels la réduction d'impôt prévue à l'article 199 septvicies a été acquise lorsque le contribuable respecte les engagements prévus aux I ou V de cet article et pendant la durée de ceux-ci (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 20 novembre 2017 précise à M. B... les impositions rectifiées, leur montant, l'année d'imposition concernée et leur fondement légal, à savoir les dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts. La proposition de rectification comporte également un exposé détaillé des faits qui ont conduit le service à remettre en cause le bénéfice de l'avantage fiscal en litige, résultant de ce que la condition de location effective et continue n'avait pas été respectée sur une durée de dix-neuf mois. La circonstance que la proposition de rectification ne mentionne pas les dispositions de l'article 33-I 1°-I du code général des impôts, relatives à la déduction spécifique appliquée aux revenus fonciers de l'immeuble, n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation dès lors que la remise en cause du dispositif de réduction d'impôt conduit nécessairement à la remise en cause de cette déduction spécifique, qui en constitue l'accessoire. Enfin, le requérant ne précise pas en quoi la reprise de déduction spécifique de 30 % constituerait une " dérogation sérieuse à l'ensemble des principes qui gouvernent les règles en matière de prescription du droit de reprise ". Dans ces conditions, cette motivation a permis à M. B... de formuler des observations en application des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Il résulte des dispositions précitées de l'article 199 septvicies du code général des impôts qu'en cas de vacance du logement, du fait du départ du locataire au cours de la période d'engagement de location de neuf ans qu'elles prévoient, le maintien de l'avantage fiscal est subordonné à la condition que le contribuable justifie avoir accompli sans délai toutes les diligences nécessaires pour que son bien puisse être reloué.

8. Il résulte de l'instruction que M. B... a acquis le 30 décembre 2010 un appartement situé sur le territoire de la commune de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) dans le cadre du dispositif d'investissement locatif Scellier. Cet appartement a été loué jusqu'au mois de mai 2015, et le bail suivant n'a été établi que le 28 janvier 2017, soit dix-neuf mois plus tard. M. B... soutient qu'il a mis en œuvre toutes les diligences nécessaires afin de relouer son bien dès le départ du dernier locataire. S'il se prévaut à cet égard du fait qu'il a publié une annonce sur le site internet " Le bon coin " le 11 mai 2015 et que plusieurs visites ont eu lieu le 25 juin 2015, le requérant n'établit toutefois pas avoir fait paraître d'autres annonces afin de trouver un nouveau locataire pour son bien. Si M. B... allègue également avoir pris contact par courriel le 16 septembre 2015 avec une agence immobilière, il n'établit pas avoir donné suite à ce contact. Il soutient enfin que le délai pour retrouver un locataire résulte de l'éloignement géographique de sa résidence principale, située à Poitiers, ainsi que des conditions imposées par le dispositif Scellier, liées aux ressources des locataires. Toutefois, eu égard à la durée de la vacance de dix-huit mois du bien en litige, M. B... ne peut être regardé comme ayant accompli les diligences nécessaires qui auraient permis une nouvelle location plus rapide de son bien, alors qu'il n'a confié un mandat de location à une agence immobilière que le 29 novembre 2016 et que celle-ci a trouvé de nouveaux locataires en moins de deux mois.

9. Le requérant, qui ainsi qu'il vient d'être dit, n'est pas fondé à se prévaloir de la loi fiscale, se prévaut également, sur le terrain de la doctrine administrative, de l'instruction référencée BOI-IR-RICI-230-20-20 qui prévoit des mesures de tolérance plus favorables aux contribuables mais dans les prévisions de laquelle il n'entre pas dès lors que la relocation effective du logement en litige n'est pas intervenue dans le délai de douze mois suivant la date de réception de la lettre recommandée par laquelle le précédent locataire a signifié son congé à M. B.... Par suite, ce moyen tiré de l'invocation de la doctrine administrative doit également être écarté.

Sur les pénalités :

10. Aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. (...) ".

11. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 20 novembre 2017 mentionne le fondement légal de la pénalité appliquée, détaille les trois chefs de rectification, dont les deux maintenus à l'issue du recours hiérarchique, à savoir la remise en cause de la réduction d'impôt et la déduction spécifique associée. La proposition de rectification comporte enfin l'assiette de la majoration appliquée et son taux. Est sans incidence sur l'appréciation de la motivation de la majoration appliquée la circonstance que M. B... n'ait pas été en mesure de reconstituer la base de 43 925 euros indiquée dans les conséquences financières de la proposition de rectification. Dans ces conditions, l'administration a motivé en droit et en fait la pénalité prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. Le moyen doit, par suite, être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2016. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.

La rapporteure,

Pauline ReynaudLa présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX03693 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03693
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SELARL DMITROFF PIMONT ROSE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-18;21bx03693 ?
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