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30/03/2000 | FRANCE | N°96DA01176

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1e chambre, 30 mars 2000, 96DA01176


Vu, l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R.5, R.7 et R.8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Y... Vitrant demeurant ..., par Me A..., avocat ;
Vu, la requête, le mémoire ampliatif et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel

de Nancy respectivement les 11 avril, 2 mai et 30 mai 1996 par l...

Vu, l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R.5, R.7 et R.8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Y... Vitrant demeurant ..., par Me A..., avocat ;
Vu, la requête, le mémoire ampliatif et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy respectivement les 11 avril, 2 mai et 30 mai 1996 par lesquels M. B... demande à la Cour :
1 ) d'annuler l'ordonnance n 95-4886 en date du 18 mars 1996 par lequel le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lille a prononcé un non-lieu à statuer sur sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 1995 par laquelle le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Lille a prononcé sa rétrogradation ainsi que la décision du 12 mai 1995 par laquelle le directeur du CROUS de Lille a pronon cé sa mutation d'office ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3 ) de condamner le CROUS de Lille à lui payer la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4 ) d'enjoindre au CROUS de le réintégrer dans son emploi antérieur et de reconstit uer sa carrière ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 95-884 du 3 août 1995 ;
Vu le décret n 82-451 du 28 mai 1982 modifié ;
Vu le décret n 84-961 du 25 octobre 1984 ;
Vu le décret n 86-83 du 17 janvier 1986 modifié ;
Vu le décret n 87-155 du 5 mars 1987 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2000
le rapport de M. Yeznikian, premier conseiller,
les observations de Me Z..., avocat, substituant Me A..., avocat, pour M. X... ristian Vitrant,
et les conclusions de M. Bouchier, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 87 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel" la requête concernant toute affaire sur laquelle le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel est appelé à statuer doit contenir l'exposé des faits et des moyens, les conclusions, nom et demeure des parties. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ; que s'il ressort des pièces du dossier que la demande présentée à la Cour par laquelle M. B... a interjeté appel de l'ordonnance rendue par le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Lille
le 18 mars 1996, ne contenait l'exposé d'aucun moyen ni même l'énoncé d'aucun fait susceptible de permettre à la cour d'en apprécier le bien fondé, les moyens figurant dans le mémoire enregistré le 2 mai 1996 ont été présentés dans le délai du recours contentieux et étaient dès lors recevables ; qu'il en résulte que le CROUS de Lille n'est pas fondé à soutenir que la requête de M. B... ne serait pas recevable faute de contenir l'exposé de conclusions ou de moyens identifiables ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
Considérant, en premier lieu, que, postérieurement à l'introduction de la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Lille dirigée contre la décision du 7 avril 1995 par laquelle le directeur du CROUS de Lille a prononcé sa rétrogradation, le CROUS de Lille a déclaré, par une décision en date du 10 novembre 1995, que cette sanction, ayant été amnistiée par application de la loi n 95-884 du 3 août 1995, avait été retirée du dossier de l'intéressé ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article 20 de cette loi : "L'amnistie n'entraîne de droit la réintégration ni dans les offices publics ou ministériels ni dans les fonctions ou emplois, grades ou professions, publics ou privés. En aucun cas, elle ne donne lieu à reconstitution de carrière" ; qu'ainsi l'amnistie intervenue après l'introduction de la demande n'a pas fait disparaître totalement les effets de la mesure attaquée ; que, dès lors, la demande de M. B... contre la décision du 7 avril 1995 n'était pas devenue sans objet ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 12 mai 1995 par laquelle le directeur du CROUS de Lille a affecté M. B... au restaurant Pariselle qui a reçu exécution, n'a jamais été retirée ; que, dès lors, la demande de M. B... contre la décision du 12 mai 1995 n'était pas devenue sans objet ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lille a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande de M. B... ; que, par suite, son ordonnance du 18 mars 1996 doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... contre ces deux décisions devant le tribunal administratif de Lille ;

Considérant que l'article 21 du décret n 87-155 du 5 mars 1987 modifié relatif aux missions et à l'organisation des oeuvres universitaires dispose : " Les personnels ouvriers, lesquels participent directement à la mission de service public de l'établissement, sont des agents contractuels de droit public. Ils sont recrutés, gérés et rémunérés par les centres régionaux. Les dispositions qui leur sont applicables sont fixées par le directeur du Centre national et approuvées par le ministre chargé de la fonction publique, le ministre chargé des universités et le ministre chargé du budget" ; qu'aux termes de l'article 2 des dispositions applicables aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires : "Sous réserve des dispositions qui leur sont spécifiques, sont applicables aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires : les dispositions du décret n 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions
générales applicables aux agents de l'Etat ( ...)" ; qu'aux termes de l'article 36 des mêmes dispositions applicables aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires : "Dans chaque CROUS, il est institué, pour l'ensemble des agents du personnel ouvrier, une commission paritaire régionale placée auprès du directeur de l'établissement. Cette commission est créée et sa composition est fixée par décision du directeur du CROUS. La désignation des membres de la commission paritaire régionale et ses conditions de fonctionnement sont conformes aux dispositions des titres II et IV du décret n 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires. La commission paritaire régionale connaît des questions d'ordre individuel concernant le personnel, sans préjudice des dispositions de l'article 31, deuxième alinéa, ci-dessus" ; qu'aux termes de l'article 39 de ces dispositions : "Le pouvoir disciplinaire appartient au directeur du CROUS. les sanctions des deuxième, troisième et quatrième groupes, mentionnées à l'article 40, sont prononcées par le directeur du centre régional, après avis de la commission paritaire régionale" ; qu'en vertu de l'article 40, les sanctions disciplinaires, réparties en quatre groupes, sont, notamment, au titre du deuxième groupe, le déplacement d'office au sein du centre régional et, au titre du troisième groupe, la rétrogradation ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 7 avril 1995 :
Considérant que les dispositions du dernier alinéa de l'article 2 du décret n 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat n'ayant pas été rendues applicables aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires, M. B... ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que le rapport en date du 16 mars 1995 adressé à la commission paritaire régionale, siégeant en conseil de discipline, qui s'est réunie le 3 avril 1995, ne serait pas conforme aux exigences de ce texte ; qu'en outre, M. B... a été mis à même de s'expliquer sur l'ensemble des faits soumis à l'appréciation du conseil de discipline, qui avaient fait l'objet d'un rapport circonstancié du 30 juin 1993 figurant à son dossier et auquel renvoyait le rapport précité du 16 mars 1995 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 32 du décret n 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires, rendu applicable aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires par l'article 36 susmentionné des dispositions particulières: "En cas de partage des voix l'avis est réputé avoir été donné ou la proposition formulée" ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'au terme de sa délibération du 3 avril 1995, la sanction de rétrogradation a fait l'objet d'un partage égal des voix, les autres sanctions ont été écartées à l'unanimité et la proposition d'absence de sanction a également fait l'objet d'un partage égal des voix ; que, dans ces conditions, l'avis de la commission paritaire régionale siégeant en conseil de discipline est, sur le fondement de l'article 32 précité, réputé avoir été donné ; que, par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait été prise sur le fondement d'un avis rendu de manière irrégulière ;
Considérant qu'eu égard à la gravité des faits reprochés à l'intéressé dont il n'est pas établi qu'ils seraient matériellement inexacts, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision disciplinaire serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Mais considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille a prononcé la rétrogradation de M. B... à compter du 4 avril 1995 a été prise le 7 avril et notifiée le 10 avril 1995 ; que, par suite, ladite décision est entachée de rétroactivité illégale et doit être, dans cette mesure, annulée ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 12 mai 1995 :
Considérant qu'il n'est pas sérieusement contesté que, par une décision du 12 mai 1995, le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille a décidé de muter d'office M. B... du restaurant universitaire Châtillon au restaurant universitaire Pariselle en raison de l'absence de place vacante en qualité de second de cuisine au sein du premier restaurant ; que, dans ces conditions, cette mesure prise compte tenu des nécessités du service, ne présente pas le caractère d'une nouvelle sanction disciplinaire prononcée à raison des mêmes faits ;
Mais considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille a prononcé la mutation d'office de M. B... à compter du 4 avril 1995 a été prise le 12 mai 1995 et notifiée le 17 mai 1995 ; que, par suite, ladite décision est entachée de rétroactivité illégale et doit être, dans cette mesure, annulée ;
Sur les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille à payer à M. B... la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de M. B... tendant à l'application des articles L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que le présent arrêt qui annule la décision du 7 avril 1995 par laquelle le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille a prononcé la rétrogradation de M. B... en tant qu'elle comporte une entrée en vigueur antérieure à la date de sa notification, implique nécessairement que le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille procède à la reconstitution de la carrière de M. B... pour la période comprise entre le 4 avril 1995 et le 10 avril 1995, date de notification de la décision ;
Considérant que le présent arrêt qui annule la décision du 12 mai 1995 par laquelle le directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille a muté d'office M. B... en tant qu'elle comporte une entrée en vigueur antérieure à la date de sa notification, n'implique pas nécessairement de mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées en tant qu'elles concernent cette décision ;
Article 1er : L'ordonnance du président de la troisième chambre du tribunal administratif de Lille en date du 18 mars 1996 est annulée.
Article 2 : Les décisions du directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille en date du 7 avril 1995 et du 12 mai 1995 sont annulées en tant qu'elles comportent une date d'entrée en vigue ur antérieure à leur date de leur notification.
Article 3 : Il est enjoint au directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille de reconstituer la carrière de M. B... pour la période comprise entre le 4 avril et le 10 avril 1995.
Article : Le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille versera à M. B... la somme de 5 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. B..., au directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Lille et au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96DA01176
Date de la décision : 30/03/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - SANCTIONS.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - EFFETS DE L'AMNISTIE.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES.

PROCEDURE - INCIDENTS - NON-LIEU - ABSENCE.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - EFFET DEVOLUTIF ET EVOCATION - EVOCATION.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R87, L8-1, L8-2
Décret 82-451 du 28 mai 1982 art. 32
Décret 84-961 du 25 octobre 1984 art. 2
Décret 87-155 du 05 mars 1987 art. 21, art. 2, art. 36, art. 40, art. 32
Loi 95-884 du 03 août 1995 art. 20


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Bouchier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2000-03-30;96da01176 ?
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