La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2001 | FRANCE | N°97DA02018

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre, 28 juin 2001, 97DA02018


Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Omer B... domicilié ... (Nord), par Me Y..., avocat ;
Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 1997 au greffe de la cour administrative d'appel de Nan

cy, par laquelle M. Omer B... demande à la Cour :
1 ) d'annul...

Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Omer B... domicilié ... (Nord), par Me Y..., avocat ;
Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 1997 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, par laquelle M. Omer B... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 24 juin 1997 par lequel le tribunal administratif de Lille a, par ses articles 1er , 2, 3 et 9, rejeté ses demandes tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé de Lommelet, de l'Etat, des communes de Verlinghem, Saint-André-lez-Lille et Marquette à lui verser diverses sommes en réparation du préjudice subi à la suite de son internement comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 20 octobre 1987 et du 5 novembre 1987 du directeur du centre hospitalier spécialisé de Lommelet, rejeté les interventions de l'association Groupement information asiles ainsi que le surplus de ses conclusions ;
2 ) de faire droit à ses demandes d'annulation de la décision du 20 octobre 1987 du directeur du centre hospitalier spécialisé de Lommelet l'admettant et le maintenant dans son établissement jusqu'au 5 novembre 1987 et de condamnation du centre hospitalier spécialisé de Lommelet, de l'Etat, des communes de Verlinghem, Saint-André-lez-Lille et Marquette à lui verser diverses sommes d'un montant global de 6 940 000 francs assorties des intérêts et des intérêts des intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de son internement ;
3 ) de condamner le centre hospitalier spécialisé de Lommelet, l'Etat, les communes de Verlinghem, Marquette et Saint-André-lez-Lille à lui verser respectivement les sommes de 50 000 francs, 70 000 francs, 30 000 francs, 20 000 francs et 20 000 francs au titre des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4 ) de condamner le centre hospitalier spécialisé de Lommelet, l'Etat, les communes de Verlinghem, Marquette et Saint-André-lez-Lille à exécuter la décision à intervenir de la Cour sous une astreinte de 500 francs par jour de retard apporté à verser les sommes allouées à compter d'un délai de 15 jours après la notification de la décision de la Cour ; ---- ---- -- Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2001
- le rapport de M. Rivaux, président-assesseur,
- les observations de Me X..., avocat, pour la commune de Marquette-lez-Lille et pour l'établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise, les observations de Me Z..., avocat, pour la commune de Verlinghem et de Me A..., avocat pour la commune de Saint-André,
- et les conclusions de M. Mulsant, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Omer B... fait appel du jugement en date du 24 juin 1997 du tribunal administratif de Lille en tant que celui-ci a, par les articles 1, 2, 3 et 9 dudit jugement, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de décisions du directeur du centre hospitalier spécialisé de Lommelet et à la réparation du préjudice subi à la suite de son placement d'office tandis que la commune de Verlinghem demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation de l'article 5 du même jugement annulant la décision du maire de la commune en date du 20 octobre 1987 ordonnant le placement provisoire de l'intéressé au centre hospitalier spécialisé de Lommelet ;
Sur l'intervention du Groupe information asiles :
Considérant que le Groupe information asiles a intérêt à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il concerne les décisions administratives litigieuses ; qu'ainsi, son intervention au soutien des conclusions de la requête dirigées contre ces décisions est recevable ; que, toutefois, son intervention au soutien des conclusions indemnitaires présentées par M. B... n'est pas recevable dès lors que le Groupe information asiles ne se prévaut pas d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ;
Sur les demandes de M. Omer B... :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par la commune de Saint-André-lez-Lille et le centre hospitalier spécialisé de Lommelet ainsi que sur la prescription quadriennale opposée par la commune de Saint-André-lez-Lille :
En ce qui concerne la légalité de la prétendue décision du 20 octobre 1987 du directeur du centre hospitalier spécialisé de Lommelet :
Considérant que la circonstance que M. Omer B... n'ait pas eu à la date de son admission dans l'établissement notification de l'arrêté en date du 20 octobre 1987 par lequel le maire de la commune de Verlinghem l'a placé en hospitalisation provisoire au centre hospitalier spécialisé de Lommelet, devenu établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise, n'a pas pour effet, contrairement à ce que soutient l'intéressé, de priver cette décision de son caractère exécutoire ; qu'il suit de là qu'en admettant M. Omer B... dans son établissement le 20 octobre 1987 et en le maintenant dans son établissement jusqu'au 5 novembre 1987, le directeur du centre hospitalier spécialisé de Lommelet s'est borné à exécuter l'ordre du maire de la commune de Verlinghem et n'a pas pris lui-même une nouvelle décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de ces prétendues décisions comme irrecevables ;
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

Considérant que si le juge administratif est compétent pour connaître de la régularité des mesures prises sur le fondement des dispositions de l'article L. 343 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable au litige, il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire d'apprécier la nécessité de ces mesures et de statuer sur les conséquences dommageables de l'ensemble des irrégularités commises à l'occasion ou à la suite de la mesure de placement d'office ;
Considérant, d'une part, que si M. B... demande que soit réparé le préjudice résultant, à les supposer d'ailleurs établis, du défaut de notification des arrêtés de placement provisoire du maire de Verlinghem du 20 octobre 1987 et du préfet délégué pour la police du Nord en date du 30 octobre 1987 ordonnant le placement d'office de l'intéressé au centre hospitalier spécialisé de Lommelet, du défaut d'information des motifs du placement d'office, du retard apporté par le maire de Verlinghem à transmettre son arrêté au préfet et celui apporté par le préfet à prendre son arrêté et à le renouveler et, d'autre part, s'il fait valoir que, à les supposer également établis, la carence des maires de Saint-André-lez-Lille, de Marquette-lez-Lille, de Verlinghem et de l'Etat à assurer le contrôle du fonctionnement du centre hospitalier spécialisé de Lommelet ainsi que l'ensemble des irrégularités commises par l'établissement l'auraient contraint à une détention arbitraire et à un travail forcé, les conclusions et moyens ainsi soulevés se rapportent aux conditions d'exécution de la mesure de placement d'office dont il a fait l'objet et à la nécessité et au bien-fondé de son internement ou de son maintien dans l'établissement dont il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de connaître des conséquences dommageables ; qu'au demeurant, M. B... n'entend pas se prévaloir, indépendamment du préjudice né du caractère abusif de son internement, de préjudices distincts qui pourraient être considérés comme résultant de fautes médicales ou de fautes dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier ;
Considérant que la seule circonstance que M. B... aurait reçu tardivement communication des documents administratifs demandés au préfet par suite de l'absence alléguée de transmission en temps utile de sa demande au préfet par les autorités à qui il s'était adressé par erreur ne suffit pas, alors que l'intéressé n'allègue ni n'établit l'existence d'une obligation en ce sens qui s'imposerait auxdites autorités ni ne justifie de ce qu'il aurait été, par suite, privé de ses droits à saisir le juge de l'excès de pouvoir ou de plein contentieux de l'appréciation des mesures critiquées, à établir l'existence d'un quelconque préjudice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes comme irrecevables, non fondées ou comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre l'Etat du fait de la loi du 17 juillet 1978 :

Considérant que, comme le soutient, M. Omer B..., le jugement susvisé du 24 juin 1997 du tribunal administratif de Lille, n'a pas statué sur la demande d'indemnité présentée par M. B... à l'encontre de l'Etat du fait de la rédaction fautive, selon lui, de la loi du 17 juillet 1978 sur la communication des documents administratifs ; que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il est entaché de cette omission à statuer ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée sur ce point par M. B... devant le tribunal administratif de Lille ;
Considérant qu'en raison de la généralité du champ d'application de la loi du 17 juillet 1978 sur la communication des documents administratifs, le préjudice invoqué par M. B... et tiré de la rédaction même de la loi, à le supposer d'ailleurs établi, ne présente pas, en tout état de cause, un caractère grave et spécial de nature à engager à son égard, dans le silence de la loi, la responsabilité sans faute de l'Etat ; qu'il y a, dès lors, lieu de rejeter les conclusions ainsi présentées ;
Sur les autres conclusions de M. B... :
Considérant que si M. B... demande à la Cour que soient retirés des débats certains passages des mémoires produits par la commune de Verlinghem ainsi que le procès-verbal d'audition de son épouse, il ne résulte pas de l'instruction que les propos qu'ils contiennent présentent un caractère de nature à entraîner leur retrait ;
Considérant que si M. B... demande l'annulation du jugement en tant que celui-ci a, par son article 3, rejeté certaines interventions du Groupement information asiles, il ne développe aucun moyen à l'appui desdites conclusions ; que, par suite et en tout état de cause, elles ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'appel incident de la commune de Verlinghem :
Considérant que la commune de Verlinghem demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement susvisé en tant que, par son article 5, il a annulé l'arrêté en date du 20 octobre 1987 du maire de la commune décidant du placement provisoire de M. B... au centre hospitalier spécialisé de Lommelet ; que le litige soulevé présente un caractère distinct de l'appel principal de M. B... ; que, par suite, les conclusions de la commune de Verlinghem ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation." ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner M. B... à verser à la commune de Verlinghem, à la commune de Saint-André-lez-Lille, à la commune de Marquette-lez-Lille et à l'établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise, chacun, une somme de 5 000 francs au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement susvisé du 24 juin 1997 est annulé en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Lille a omis de statuer sur la demande d'indemnité présentée par M. Omer B... au titre de la responsabilité de l'Etat du fait de la loi du 17 juillet 1978.
Article 2 : La demande de M. Omer B... présentée devant le tribunal administratif de Lille tendant à la condamnation de l'Etat du fait de la loi du 17 juillet 1978 et le surplus des conclusions de la requête de M. Omer B... sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions incidentes de la commune de Verlinghem sont rejetées.
Article 4 : M. Omer B... est condamné à verser à la commune de Verlinghem, à la commune de Saint-André-lez-Lille, à la commune de Marquette-lez-Lille et à l'établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise, chacun, la somme de 5 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Omer B..., à la commune de Verlinghem, à la commune de Saint-André-lez-Lille, à la commune de Marquette-lez-Lille, à l'établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise, au groupement information asiles, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'emploi et de la solidarité. Copie sera transmise au préfet de la région Nord Pas-de-Calais, préfet du Nord.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 97DA02018
Date de la décision : 28/06/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - LIBERTE INDIVIDUELLE - PROPRIETE PRIVEE ET ETAT DES PERSONNES - LIBERTE INDIVIDUELLE - ALIENES.

SANTE PUBLIQUE - LUTTE CONTRE LES FLEAUX SOCIAUX.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de la santé publique L343
Loi du 17 juillet 1978


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rivaux
Rapporteur public ?: M. Mulsant

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2001-06-28;97da02018 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award