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30/10/2007 | FRANCE | N°06DA01293

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 30 octobre 2007, 06DA01293


Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Florence Y épouse X, demeurant ..., par Me Titran ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303085 du 20 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices résultant de la sclérose en plaques qu'elle estime imputable à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B dont elle a fait l'objet ;

2°) de condamner l'Etat à réparer l

esdits préjudices ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000...

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Florence Y épouse X, demeurant ..., par Me Titran ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303085 du 20 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices résultant de la sclérose en plaques qu'elle estime imputable à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B dont elle a fait l'objet ;

2°) de condamner l'Etat à réparer lesdits préjudices ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Elle soutient qu'à la suite de sa vaccination contre l'hépatite B, elle a présenté les symptômes d'une affection démyélinisante ; qu'une sclérose en plaques a été diagnostiquée au mois de mars 1999 ; qu'elle a effectué une demande d'indemnisation, mais que le ministre a rejeté sa demande le 22 mai 2003 ; que la doctrine de l'administration consiste à remplacer la certitude par la possibilité ; qu'il convient de respecter le principe d'égalité face à la doctrine de l'administration ; que si le Tribunal a déduit qu'elle avait pu développer spontanément la maladie, une telle déduction procède d'une rupture d'égalité dans l'appréciation du faisceau d'indices concordants, dès lors que, pour d'autres requérants, la même appartenance a justifié une indemnisation ; qu'aucun membre de la famille de l'exposante n'a développé une maladie comme la sclérose en plaques de sorte que l'on peut douter de son déclenchement spontané chez la requérante ; que l'exposante n'a pas bénéficié d'une information pertinente quant aux risques connus de la vaccination ; que l'évolution des connaissances en la matière a confirmé la réalité d'un lien significatif entre le vaccin et la sclérose en plaques ; que, dans deux séries d'études, le délai séparant l'injection de vaccin et la survenance d'une sclérose en plaques était de trois ans ; que les signes incontestables de la maladie sont apparus chez l'exposante à moins de deux ans après les vaccinations ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2006, présenté par le ministre de la santé et des solidarités ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requérante présentait des antécédents médicaux vasculaires sous forme de varicose des membres inférieurs ; qu'elle a été atteinte en 1998 de rachialdies ; que le premier expert a conclu que la sclérose dont souffrait Mme X n'était pas imputable à la vaccination à laquelle elle avait été soumise ; que, dans la mesure où les premiers troubles de santé de la requérante à caractère neurologique et médicalement constatés sont apparus deux ans et sept mois après la dernière injection de vaccin, le lien de causalité ne saurait être retenu ; que, s'agissant de la seconde expertise, la responsabilité sans faute de l'Etat ne saurait être mise en oeuvre sans preuve formelle du lien de causalité entre les troubles observés et la vaccination incriminée bien que l'expert fasse valoir que ce lien est possible ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 janvier 2007, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Lille, par Me Dragon ; la caisse conclut à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 148 839,87 euros représentative de ses débours assortie des intérêts à compter de la première réclamation, ainsi que la somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient qu'elle est parfaitement fondée à réclamer le remboursement de ses débours par imputation sur les droits de la victime si la décision rendue par le ministre est annulée ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 26 février 2007, présenté par le ministre de la santé et des solidarités qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance en date du 8 mars 2007 fixant la clôture d'instruction au 30 avril 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 10 avril 2007, présenté par le ministre de la santé et des solidarités qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 avril 2007, présenté pour Mme X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance en date du 14 mai 2007 reportant la clôture d'instruction du 30 avril au 29 juin 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu la décision du 14 juin 2007 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai prononçant l'admission à l'aide juridictionnelle totale de
Mme X ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de la santé publique :

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;

- les observations de Me Titran, pour Mme X ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X, secrétaire médicale-hôtesse à l'hôpital Saint-Philibert de Lomme relevant du groupe hospitalier de l'université catholique de Lille a été vaccinée les 26 octobre 1995, 4 janvier et 9 juillet 1996 contre l'hépatite B dans le cadre de son activité professionnelle ; qu'elle fait appel du jugement du 20 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité de la sclérose en plaques dont elle est atteinte à la vaccination obligatoire dont elle a fait l'objet ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 3111-4 du code de la santé publique : « Une personne qui, dans un établissement ou un organisme public ou privé de prévention de soins ou hébergeant des personnes âgées, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la grippe » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la décision rejetant la demande d'indemnisation de la requérante : « Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l'Etat » ;
Considérant que si Mme X soutient que la responsabilité sans faute de l'Etat du fait des vaccinations obligatoires est engagée, il résulte des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique qu'il incombe au demandeur souhaitant obtenir réparation d'un dommage sur le fondement de ces dispositions d'apporter la preuve de l'imputabilité directe de son préjudice à la vaccination obligatoire ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Florence X a été vaccinée contre l'hépatite B les 26 octobre 1995, 4 janvier et 9 juillet 1996 ; qu'elle indique qu'à la suite des injections, elle a commencé par ressentir une grande fatigue en octobre 1996, puis un picotement du membre supérieur gauche est apparu en juillet 1997 et elle a éprouvé des douleurs dans les régions lombaires, les épaules et le rachis en février 1998 ; qu'en 1999, une IRM a été réalisée et a fait suspecter une affection démyélinisante ; que le diagnostic de sclérose en plaques a été définitivement retenu en mars 1999 ; qu'il résulte également de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif que, s'il est extrêmement difficile d'établir un lien entre les premiers troubles ressentis par Mme X en 1996 et la sclérose en plaques, lesdits troubles pouvant se rencontrer dans d'autres pathologies, les éléments évocateurs et probants de poussées de sclérose en plaques peuvent être situés en juin 1998, soit plus de deux ans après la dernière injection de vaccin ; qu'eu égard à la prédisposition génétique de Me X, qui fait partie d'un groupe génique à risques et avait au moment des faits un âge privilégié d'apparition de la maladie, ce délai ne permet pas d'établir l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'apparition de la sclérose en plaques et sa vaccination contre l'hépatite B ; qu'il suit de là que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille doivent être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, les sommes que Mme X et la caisse primaire d'assurance maladie de Lille demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;



DÉCIDE :


Article 1er : La requête de Mme Florence X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille sont rejetées.



Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Florence X, à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

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N°06DA01293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01293
Date de la décision : 30/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : TITRAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-30;06da01293 ?
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