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13/11/2007 | FRANCE | N°06DA01645

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 13 novembre 2007, 06DA01645


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 décembre 2006 et régularisée par la production de l'original le 13 décembre 2006, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Madame Marie-Thérèse X, demeurant ..., par la SCP Huglo Lepage et associés ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301424 du 28 septembre 2006 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a limité à la somme de 41 696,72 euros le montant de la condamnation de la commune de Nibas en réparation du préjudice résultant de l'effondrement du mur d'en

ceinte de sa propriété et en tant qu'il a mis à sa charge la réalisation d...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 décembre 2006 et régularisée par la production de l'original le 13 décembre 2006, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Madame Marie-Thérèse X, demeurant ..., par la SCP Huglo Lepage et associés ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301424 du 28 septembre 2006 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a limité à la somme de 41 696,72 euros le montant de la condamnation de la commune de Nibas en réparation du préjudice résultant de l'effondrement du mur d'enceinte de sa propriété et en tant qu'il a mis à sa charge la réalisation de travaux sur un talus communal ;

2°) de condamner la commune de Nibas à lui verser la somme de 51 696,72 euros, assortie des intérêts légaux à compter de la date d'enregistrement de la demande de première instance ;

3°) d'enjoindre à la commune de Nibas de procéder aux travaux nécessaires sur le talus d'assise du mur effondré sous astreinte de 1 000 euros par jour ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Nibas une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Elle soutient que le préjudice qu'elle a subi n'a pas été intégralement indemnisé et qu'elle peut prétendre à l'indemnisation des troubles de jouissance ; que la commune est seule à pouvoir exécuter les travaux de consolidation du talus ; qu'une injonction sous astreinte doit être prononcée à son encontre pour lui imposer la réalisation desdits travaux ;

Vu l'ordonnance, en date du 21 décembre 2006, du président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai fixant au 29 juin 2007 la clôture de l'instruction ;

Vu la lettre en date du 7 juin 2007 du président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai adressée à la commune de Nibas en application de l'article
R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai en date du 7 juin 2007 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2007, présenté pour la commune de Nibas, représentée par son maire en exercice, par la SCP Montigny et Doyen ; elle conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident à l'annulation du jugement attaqué et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le Tribunal l'a à tort déclarée responsable de la chute du mur alors que la cause du préjudice de Mme X réside dans le mauvais entretien du mur très ancien clôturant sa propriété ; que l'évaluation du préjudice est excessive, la somme accordée ne correspondant pas au montant des travaux strictement nécessaires à la remise en place d'une clôture qui peut être réalisée par des moyens moins coûteux qu'une réfection à l'identique ; qu'en tout état de cause un abattement devrait être pratiqué pour tenir compte de la vétusté de l'ouvrage ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 17 septembre 2007 et confirmé par la production de l'original le 18 septembre 2007, présenté pour Mme X tendant aux même fins que sa requête par les mêmes moyens et, en outre, par les motifs que l'expertise établit que la cause exclusive de l'effondrement du mur réside dans l'absence de renforcement des pieds de talus ; que la responsabilité sans faute de la commune est engagée envers Mme X, tiers par rapport à l'ouvrage public en cause ; qu'elle a droit à la réparation intégrale de son préjudice dont l'évaluation n'est pas affectée par la plus-value qu'apporterait la réparation à l'immeuble ; que les solutions techniques avancées par la commune ne correspondent pas à une remise en état du bien ; qu'un abattement de vétusté n'est pas justifié, le caractère ancien du mur étant d'ailleurs un élément de sa valeur ;

Vu la lettre en date du 15 octobre 2007 par laquelle le président de la formation de jugement a informé les parties de ce que l'arrêt à intervenir paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 23 octobre 2007 et confirmé par la production de l'original le 24 octobre 2007, présenté pour Mme X en réponse à la communication du moyen d'ordre public, précisant qu'elle ne sollicite pas la condamnation de la commune de Nibas à lui verser les sommes correspondant au coût des travaux à accomplir sur le talus communal mais à ce qu'une injonction de réaliser les travaux soit ordonnée par la Cour sous astreinte ;

Vu la note en délibéré présentée pour Mme X, enregistrée le 12 novembre 2007 ;
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse An VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- les observations de Me Lerat, pour Mme X et de Me Brochard, pour la commune de Nibas ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Sur la responsabilité de la commune de Nibas :

Considérant que le mur d'enceinte de la propriété de Mme Marie-Thérèse X sise à Nibas (Somme) s'est partiellement effondré le long du chemin communal où il prenait assise sur un talus surplombant ledit chemin ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que ce talus est propriété communale et que l'effondrement du mur d'enceinte de la propriété à cet endroit trouve son origine dans l'absence de consolidation du talus à la suite de travaux d'arasement entrepris le long de la voie communale alors que l'expert n'a pas constaté de défaut d'entretien du mur, de charges particulières ou de poussées anormales de terre qui pouvaient avoir favorisé lesdits effondrements ; que par ailleurs, l'effondrement d'autres parties du mur en d'autres endroits et son caractère ancien ne sont pas de nature, compte tenu des constatations auxquelles l'expert a procédé, qui ne sont pas sérieusement contestées, à caractériser une faute de la victime susceptible d'exonérer la commune de sa responsabilité ; que, par suite, la commune de Nibas n'est pas fondée à soutenir que l'ouvrage public ne serait pas la cause de l'effondrement du mur et que le Tribunal administratif d'Amiens aurait retenu à tort que sa responsabilité était engagée à l'égard de Mme X, tiers par rapport à l'ouvrage public ;

Sur le préjudice :

Considérant que les premiers juges ont condamné la commune de Nibas à verser à
Mme X une somme globale de 77 380,72 euros correspondant à une somme de 41 696,72 euros au titre des frais de réparation de la portion de mur effondrée, une somme de 34 684 euros au titre des travaux de renforcement du talus et une somme de 1 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

Considérant, en premier lieu, que la somme de 41 696,72 euros correspond au coût non contesté de réfection à l'identique du mur ; que, compte tenu de l'usage que Mme X fait de son bien, l'amélioration de ce mur ancien ne justifie pas un abattement de vétusté ; qu'il résulte cependant de l'instruction que d'autres procédés de clôture moins onéreux existent, en particulier par la pose d'une clôture en béton ; que si Mme X soutient que ce procédé ne lui apporterait pas une réparation intégrale du préjudice subi, il résulte de l'instruction que les pans de mur qui se sont effondrés à d'autres endroits de l'enceinte pour des raisons étrangères à la réalisation de travaux publics n'ont pas conduit Mme X à procéder à une réfection à l'identique du mur de clôture qui a notamment été remplacé par des éléments en béton ; que, dans ces conditions, la commune de Nibas est fondée à soutenir que les sommes accordées au titre de la réparation du mur ne correspondent pas aux travaux les moins onéreux pour le rétablir dans sa fonction ; qu'il sera fait une juste appréciation en allouant à ce titre une somme de 20 000 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le talus surplombant la voie est communal ; que Mme X n'a pas qualité pour procéder aux travaux nécessaires à son renforcement ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges lui ont accordé une indemnité de 34 684 euros couvrant le coût desdits travaux ;

Considérant, en troisième lieu, que si Mme X soutient que les premiers juges ne l'ont pas indemnisée au titre de son préjudice de jouissance, il résulte cependant de l'instruction que le Tribunal administratif d'Amiens lui a accordé à ce titre la somme de 1 000 euros qu'elle demandait ;

Considérant enfin que si la requérante demande qu'une somme complémentaire de 10 000 euros lui soit accordée, elle n'apporte aucune précision pour justifier sa demande ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la somme de 76 380,72 euros que les premiers juges ont accordée à Mme X est ramenée à la somme de 21 000 euros de laquelle il convient de déduire la provision d'un montant équivalent accordée par une ordonnance du président du Tribunal administratif d'Amiens en date du 4 septembre 2003 ; que l'appel incident de la commune de Nibas doit dans cette mesure être accueilli ; qu'en revanche, Mme X n'est pas fondée à demander la majoration de l'indemnité qui lui avait été accordée ;

Sur les intérêts :

Considérant que la somme de 21 000 euros portera intérêts à compter du 30 juin 2003, date d'enregistrement de la demande de Mme X devant le tribunal administratif jusqu'au paiement de la provision qui lui a été accordée par l'ordonnance du 4 septembre 2003 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet » ;

Considérant que la présente décision, qui condamne la commune de Nibas à verser une indemnité à Mme X, n'implique pas nécessairement qu'il soit enjoint à la commune de Nibas de procéder à la consolidation du talus ; que les conclusions susmentionnées doivent dès lors être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nibas, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant d'autre part, que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme X, la somme de 1 500 euros que la commune de Nibas demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :

Article 1er : L'indemnité que la commune de Nibas a été condamnée à verser à
Mme Marie-Thérèse X est ramenée à la somme de 21 000 euros de laquelle il convient de déduire la provision d'un montant équivalent accordée par une ordonnance du président du Tribunal administratif d'Amiens en date du 4 septembre 2003. Cette somme portera intérêts à compter du 30 juin 2003 jusqu'à la date du versement de la provision accordée par l'ordonnance du 4 septembre 2003.

Article 2 : Le jugement n° 0301424 du Tribunal administratif d'Amiens du 28 septembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Mme Marie-Thérèse X versera une somme de 1 500 euros à la commune de Nibas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Marie-Thérèse X et de l'appel incident de la commune de Nibas est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Thérèse X et à la commune de Nibas.

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N°06DA01645


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 06DA01645
Date de la décision : 13/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte (AC) Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SCP MONTIGNY et DOYEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-11-13;06da01645 ?
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