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25/03/2008 | FRANCE | N°06DA01569

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 25 mars 2008, 06DA01569


Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE, représentée par son maire en exercice, par Me Dannay ; la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400085 en date du 28 septembre 2006 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Desgrippes SATP et de la société à responsabilité limitée Area à lui verser une somme de 178 132,24 euros en réparation des d

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Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE, représentée par son maire en exercice, par Me Dannay ; la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400085 en date du 28 septembre 2006 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Desgrippes SATP et de la société à responsabilité limitée Area à lui verser une somme de 178 132,24 euros en réparation des désordres affectant les travaux d'aménagement d'espaces publics réalisés par ces sociétés et a limité à 33 903,50 euros la somme mise à ce titre à la charge de la société à responsabilité limitée Area ;

2°) de condamner solidairement la société Desgrippes SATP et la société à responsabilité limitée Area à lui verser une somme de 178 132,24 euros, réévaluée à compter du 13 novembre 2003 jusqu'au jour du paiement en fonction des indices applicables ;

3°) de mettre à la charge solidaire desdites sociétés, la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de les condamner aux dépens ;

Elle soutient que la demande de la commune à l'encontre de la société Desgrippes SATP était recevable, comme l'ont estimé les premiers juges, alors même que cette société a bénéficié par un jugement du 8 juillet 1997 d'un plan de redressement par voie de continuation d'un délai de dix ans, le commissaire au plan et le représentant des créanciers n'étant pas concernés par l'exécution d'un marché conclu postérieurement à ce plan ; que par un engagement du 26 juin 1998, conclu alors que le processus de dégradation apparaissait, la société Desgrippes SATP s'est engagée à étendre la garantie de parfait achèvement sur deux hivers, 1998/1999 et 1999/2000 ; que les lettres dénonçant les désordres ont été adressées dans ce délai ; que le Tribunal ne pouvait estimer que cet engagement était sans valeur contractuelle ; que l'expertise démontre que les travaux n'ont pas été réalisés dans les règles de l'art ; que les sociétés étaient informées du passage de lourds véhicules sur une partie des aménagements ; que le préjudice déterminé par l'expert, qui n'est pas allé au delà de sa mission, n'est pas sérieusement critiqué par les sociétés ; que la société à responsabilité limitée Area, qui n'a pas relevé la mauvaise exécution des travaux, a participé à la réalisation des dommages ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 février 2007, présenté pour la société Desgrippes SATP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité 12 rue Jean Moulin à Mauregny en Haye (02820), par Me Le Pivert ; elle conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à ce qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE au titre des frais irrépétibles, subsidiairement à ce que le montant des travaux de reprise soit fixé au maximum à 24 750,50 euros ; elle soutient que la demande présentée par la commune devant le tribunal administratif sans mettre en cause le commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société et le représentant des créanciers n'est pas recevable alors que l'action est susceptible d'avoir des incidences sur les créances de la société ; que le Tribunal s'est mépris en estimant que ces circonstances étaient sans incidence sur la recevabilité de la demande ; que la responsabilité de la société ne peut être recherchée sur le terrain de la garantie de parfait achèvement, son action étant prescrite ; que la société ne s'est engagée par la lettre du 26 juin 1998 que sur l'adhérence des agrégats de surface et qu'au surplus, la commune qui a procédé à une réception sans réserves en juillet 1998 et qui a restitué en novembre 1999 la retenue de garantie, a considéré qu'il n'y avait pas de désordres ; que la responsabilité de la société ne peut être recherchée sur le terrain de la responsabilité contractuelle dès lors que la réception sans réserve de l'ouvrage a été prononcée avec effet au 12 juin 1998 ; que la responsabilité de la société ne peut être engagée sur le fondement de la garantie décennale dès lors que le maître de l'ouvrage tolère fréquemment des conditions d'utilisation de l'ouvrage non conformes à ses caractéristiques ; que les non conformités constatées par l'expert ne sont pas en lien de causalité avec les désordres ; que le chiffrage des travaux de remise en état établi par l'expert est excessif ; qu'il n'y a pas lieu de reprendre les travaux sur les parties ne présentant aucun désordre ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 février 2007, présenté pour la société à responsabilité limitée AREA, dont le siège social est 25 bis avenue de Compiègne à Soissons (02200), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Lebègue-Pauwels-Derbise, tendant au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE au titre des frais irrépétibles et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du Tribunal administratif d'Amiens en date du 28 septembre 2006 en tant qu'il l'a condamnée à verser diverses sommes à la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE et au rejet de la demande présentée par ladite commune devant le Tribunal administratif d'Amiens, à titre subsidiaire de limiter le montant des travaux de reprise à une somme maximale de 24 750,50 euros ; elle soutient que sa responsabilité sur le terrain de la garantie décennale ne peut être recherchée pour le secteur 2 dans lequel l'expert a fait réaliser des sondages alors qu'il n'est affecté d'aucun désordre ; que les demandes de la commune concernant cette zone et se chiffrant à 35 550 euros devront donc être écartées ; que les dégâts concernant la zone 1 sont modestes et leur réparation ne saurait excéder la somme de 24 750,50 euros ; que la société à responsabilité limitée AREA doit être mise hors de cause ; que sa responsabilité ne peut en effet être recherchée si les dommages proviennent de causes étrangères ; que tel est le cas en l'espèce dès lors que l'épaisseur du béton a été déterminée en fonction de l'usage qui a été décrit du futur ouvrage qui ne devait pas supporter de véhicules ; que postérieurement, un changement d'usage constituant une cause exonératoire de responsabilité a eu lieu justifiant la mise hors de cause de la société ; qu'en dépit de ce changement, les prescriptions initiales du maître d'oeuvre concernant l'épaisseur du béton se sont avérées suffisantes ; que les désordres constatés en zone 1 ne sont pas suffisants pour engager la responsabilité décennale ; que le Tribunal aurait dû prendre en compte la proposition de reprise de la société Desgrippes ; que la société Desgrippes devrait garantir la société à responsabilité limitée AREA d'éventuelles condamnations dès lors qu'elle n'a pas manqué à ses obligations de contrôle général des travaux, effectués hebdomadairement et qu'elle ne pouvait déceler facilement que la société Desgrippes rajoutait de la grave sur la couche de grave préalablement mise en place afin de limiter l'épaisseur de béton ; qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir produit les comptes rendus de chantier qui ne lui ont jamais été réclamés ; que les incidents isolés d'exécution entraînent une responsabilité à 100 % de l'entreprise ; que l'expert a procédé à une évaluation forfaitaire et arbitraire du montant des travaux ; que le Tribunal a retenu un montant excessif représentant 65 % du montant global du marché de travaux qui prévoyait également d'autres postes ;

Vu l'ordonnance en date du 29 août 2007 fixant la clôture d'instruction au 3 octobre 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un marché conclu en 1997, la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE a confié à la société à responsabilité limitée AREA la maîtrise d'oeuvre et à la société Desgrippes SATP la réalisation de l'aménagement des espaces publics et des abords de son pôle institutionnel et culturel ; qu'ayant constaté des désordres, la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE a saisi le Tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés à lui verser une indemnité en principal de 178 132,24 euros ; qu'elle relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a limité à la somme de 33 903,50 euros l'indemnité accordée à la commune et l'a mise à la charge du seul maître d'oeuvre ; qu'elle demande à la Cour de prononcer la condamnation solidaire des sociétés à lui verser la somme initialement demandée ; que par la voie de l'appel incident, la société à responsabilité limitée AREA demande à être déchargée de toute condamnation ;

Sur l'appel principal et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société Desgrippes SATP à la demande de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réception définitive et sans réserve des travaux a été prononcée en juillet 1998 avec effet au 12 juin 1998 ; que cette réception a mis fin aux rapports contractuels et a fait courir la garantie de parfait achèvement fixée à une durée d'un an par les stipulations de l'article 8-4 du cahier des clauses administratives particulières ; que si la commune de ROSIERES EN SANTERRE se prévaut d'une lettre de la société Desgrippes SATP en date du 26 juin 1998 qui constituerait une extension de garantie pour couvrir les hivers 1998/1999 et 1999/2000, cette lettre, dont il n'est pas établi par l'exemplaire non signé figurant au dossier qu'elle revêtirait un caractère contractuel, définit, en tout état de cause, un champ d'extension de la responsabilité limitée à l'adhérence des agrégats de surface ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par le tribunal administratif que les désordres allégués par la commune consistaient en des descellements de pavés au niveau de la ligne de pavés du parking édifié devant la boulangerie et ses abords et à la présence de fissures dans le béton désactivé qui ne relevaient pas des réserves mentionnées dans la lettre précitée ; qu'ainsi, la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE, qui ne conteste pas en appel le rejet de sa demande sur le fondement de la garantie décennale, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Desgrippes SATP et de la société à responsabilité limitée AREA au titre de la responsabilité contractuelle ;

Sur l'appel incident de la société à responsabilité limitée AREA :

Considérant que par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la société à responsabilité limitée AREA était engagée sur un terrain contractuel pour ne pas avoir révélé au maître d'ouvrage les manquements de la société Desgrippes SATP dans la réalisation de l'ouvrage qui, par leur ampleur, n'étaient pas difficiles à déceler et ont ainsi retenu la responsabilité de la société pour manquement à ses obligations de conseil lors de la réception des ouvrages ; que par la voie de l'appel incident, la société à responsabilité limitée AREA demande à être déchargée des condamnations prononcées à son encontre en soutenant que la garantie décennale ne peut être engagée à son encontre dès lors que les désordres sont dus à une cause extérieure ; que cette argumentation est inopérante compte tenu du fondement de la responsabilité retenu par les premiers juges, que la société à responsabilité limitée AREA ne critique pas en appel ; que par ailleurs, le manquement aux obligations de conseil lors de la réception étant exclusivement imputable au maître d'oeuvre, celui-ci n'est pas fondé à demander à être garanti par la société Desgrippes SATP des condamnations prononcées sur ce fondement à son encontre ; qu'enfin, si la société à responsabilité limitée AREA demande la réduction des sommes mises à sa charge au motif qu'elles devraient être limitées à la seule zone où des désordres sont apparus, il résulte de l'instruction que les manquements à son obligation de conseil ont affecté l'ensemble des travaux et que le Tribunal a fait une exacte appréciation de l'évaluation du préjudice subi à ce titre par la commune de ROSIERES EN SANTERRE ; que dès lors, elle n'est pas fondée par la voie de l'appel incident, à demander la décharge ou la réduction des condamnations prononcées à son encontre, ni à ce que la société Desgrippes SATP la garantisse desdites condamnations ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Desgrippes SATP, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE, de la société à responsabilité limitée AREA, les sommes qu'elles demandent respectivement au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens, ni de mettre à la charge de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE la somme que la société Desgrippes SATP demande au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE et l'appel incident de la société à responsabilité limitée AREA sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions de la société Desgrippes SATP tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE ROSIERES EN SANTERRE, à la société Desgrippes SATP et à la société à responsabilité limitée AREA.

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N°06DA01569


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01569
Date de la décision : 25/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : DANNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-03-25;06da01569 ?
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