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02/04/2008 | FRANCE | N°07DA00463

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 02 avril 2008, 07DA00463


Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Jean-Charles X, demeurant ..., par la SCP Braut, Antonini, Hourdin et Hanser ; M. X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500136 du 8 février 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2000 et 2001 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°)

de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intér...

Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Jean-Charles X, demeurant ..., par la SCP Braut, Antonini, Hourdin et Hanser ; M. X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500136 du 8 février 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2000 et 2001 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Il soutient que la non-application de l'abattement de 20 % constitue une sanction dès lors qu'il n'a fait que reporter sur sa déclaration d'impôt sur le revenu les mentions figurant sur le bulletin de paie établi par son employeur ; qu'il n'est pas de mauvaise foi car il ignorait l'erreur commise par son employeur ; que l'indemnité transactionnelle qu'il a reçue est une indemnité de licenciement non imposable ; qu'il a été licencié et qu'il n'a pas démissionné et qu'il n'était pas dirigeant de la société Salome Rökona ; qu'à supposer qu'il ait été un mandataire social, l'indemnité est exonérée à hauteur de 360 000 euros ; que l'administration a commis une faute en retenant qu'il a démissionné de ses fonctions ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 août 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'indemnité est imposable car l'intéressé avait la qualité de dirigeant ; que la cessation des fonctions n'était pas forcée mais résultait de sa démission ; qu'il ne peut bénéficier de l'abattement de 20 % réservé aux revenus déclarés spontanément ; que la mauvaise foi est établie ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 septembre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il demande que M. X soit condamné à verser à l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que la demande de dommages et intérêts est irrecevable car elle n'a pas été précédée d'une demande préalable et qu'elle n'est pas présentée dans une requête distincte ; qu'aucune faute ne peut être imputée à l'administration et qu'il n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct du désagrément inhérent au contrôle fiscal ;

Vu l'ordonnance du 8 octobre 2007 portant clôture de l'instruction au

10 décembre 2007 ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 novembre 2007, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; il ajoute qu'une conciliation ne peut intervenir que postérieurement à un licenciement ; qu'il a sollicité une réponse de l'administration sur sa demande de dommages et intérêts ; que l'administration a commis une faute et que le préjudice est établi ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2008 à laquelle

siégeaient M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Alain de Pontonx, premier conseiller :

- le rapport de M. Alain de Pontonx, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre en ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision (...) » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours contre une décision ; que M. X ne justifie d'aucune décision lui ayant refusé l'indemnité de 15 000 euros qu'il demande à titre de dommages et intérêts, ni même d'aucune demande à l'autorité administrative, à l'effet d'obtenir cette indemnité ; qu'ainsi, faute de décision préalable, ses conclusions à fin d'indemnité ne sont pas recevables et qu'il y a lieu d'accueillir la fin de non-recevoir opposée, à titre principal, par le ministre ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'imposition de l'indemnité transactionnelle :

Considérant qu'aux termes de l'article 80 duodecies du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : « 1. Sous réserve de l'exonération prévue au 22° de l'article 81, constitue une rémunération imposable toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, à l'exception des indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan social au sens des articles L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail, des indemnités mentionnées à l'article L. 122-14-4 du même code ainsi que de la fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite qui n'excède pas le montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi. (...) La fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite exonérée en application du premier alinéa ne peut être inférieure ni à 50 % de leur montant ni à deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de la moitié ou, pour les indemnités de mise à la retraite, du quart de la première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune fixé à l'article 885 U. (...) 2. Constitue également une rémunération imposable toute indemnité versée, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions, aux mandataires sociaux dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter. Toutefois, en cas de cessation forcée des fonctions, notamment de révocation, seule la fraction des indemnités qui excède les montants définis au deuxième alinéa du 1 sont imposables. » ; qu'aux termes de l'article 80 ter du même code : « (...) b. Ces dispositions sont applicables : 1° Dans les sociétés anonymes : Au président du conseil d'administration ; Au directeur général (...) 4° Dans toute entreprise : à toute personne occupant un emploi salarié dont la rémunération totale excède la plus faible des rémunérations allouées aux dirigeants de cette entreprise (...) » ;

Considérant que M. X a été engagé par la société Salome Rökona à compter du 1er juillet 1998 en qualité de directeur d'exploitation de l'usine de la société Tasq lorsque cette société a repris en juin 1998 les actifs de la société Tasq ; qu'à la suite de son licenciement, M. X a perçu de la société Salome Rökona une indemnité transactionnelle d'un montant de 850 000 francs à raison d'un versement de 340 000 francs en 2000 et de 77 749 francs en 2001 ; que M. X soutient que cette indemnité présente un caractère indemnitaire et à ce titre est exonérée d'impôt sur le revenu ;

Considérant qu'un relevé de frais généraux de la société Salome Rökona mentionne que M. X occupait les fonctions de directeur général ; que toutefois, il ressort de l'instruction et notamment de l'extrait K bis produit par l'administration que M. X était directeur général, non de la société Salome Rökona qui était son employeur et qui lui a versé l'indemnité, mais de sa filiale, la société Tasq ; que l'administration soutient également que M. X est le bénéficiaire de la seconde meilleure rémunération de la société et qu'il relève de la liste des personnes mentionnées à l'article 80 ter du code général des impôts qui comprend toute personne occupant un emploi salarié dont la rémunération totale excède la plus faible des rémunérations allouées aux dirigeants de cette entreprise et se réfère au relevé de frais généraux établi par la société Salome Rökona afférent à l'exercice du 1er août 1999 au 31 juillet 2000 ; que toutefois, il ne ressort pas de ce document que les autres personnes mentionnées, qui ont une rémunération inférieure à celle de M. X, sont des dirigeants de la société Salome Rökona ; que, par suite, l'administration n'établit que M. X relève des personnes mentionnées à l'article 80 ter précité ; que M. X n'ayant

pas la qualité de mandataire social, de dirigeant et n'étant pas visé à l'article 80 ter,

le régime fiscal de l'indemnité transactionnelle qu'il a reçue relève non des dispositions

du 2 de l'article 80 duodecies du code général des impôts, mais du 1 dudit article, en sa qualité de salarié de la société Salome Rökona ; qu'en application de ces dernières dispositions est imposable toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, sous certaines exceptions limitativement énumérée et notamment les indemnités de licenciement dans certaines limites fixées par la loi ou conventionnellement ;

Considérant que l'administration soutient, à titre subsidiaire, que l'exonération prévue pour les indemnités de licenciement prévue, dans certaines limites, audit article, n'est pas applicable dès lors que le départ de la société était volontaire ; qu'il résulte de l'instruction que M. X a été licencié de la société Salome Rökona par lettre du 24 mai 2000 ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes le 16 juin 2000 et que l'indemnité en litige a été fixée à titre transactionnel le 7 septembre 2000 ; que les circonstances que M. X, à la suite de son licenciement, a démissionné de ses fonctions de directeur général de la société Tasq et qu'un accord soit intervenu après la saisine du conseil de prud'hommes n'ont pas pour effet de conférer à son départ un caractère volontaire ; que toutefois que M. X ne donne aucun élément permettant de fixer le montant de l'indemnité de licenciement susceptible de donner droit à une exonération en application des dispositions du 1 de l'article 80 duodecies précité et qui serait inclus dans l'indemnité transactionnelle susmentionnée ;

Considérant que M. X, qui n'a pas produit le protocole transactionnel du 7 septembre 2000 et ne donne aucune indication sur la justification de la somme qui lui est allouée en vertu de ce protocole, n'établit pas que cette somme aurait un caractère purement indemnitaire ;

En ce qui concerne la perte de l'abattement de 20 % sur les salaires :

Considérant qu'aux termes de l'article 158 du code général des impôts : « (...) 5. a. Les revenus provenant de traitements publics et privés, indemnités, émoluments, salaires et pensions ainsi que de rentes viagères autres que celles mentionnées au 6 sont déterminés conformément aux dispositions des articles 79 à 90 (...) Le revenu net obtenu en application de l'article 83 et, en ce qui concerne les pensions et retraites après application des dispositions des deuxième et troisième alinéas ci-dessus, n'est retenu dans les bases de l'impôt sur le revenu que pour 80 % de son montant déclaré spontanément (...) » ;

Considérant que l'administration a réintégré dans les bases d'imposition de

M. X au titre des années 2000 et 2001 des salaires pour un montant correspondant à la différence entre la somme que son employeur a déclaré lui avoir versée et celle qu'il a déclarée ; que M. X ne conteste pas le redressement dans son principe et dans son montant ; que toutefois il demande le maintien du bénéfice de l'abattement de 20 % applicable aux salaires ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'une omission de déclaration fait perdre à due concurrence du montant des revenus non déclarés le bénéfice de l'abattement de

20 % en cas de redressement ; qu'il n'est pas contesté que l'imposition des salaires en cause n'a été effectuée qu'à la suite de la mise en oeuvre par l'administration d'une procédure de contrôle ; que si M. X soutient qu'il n'a fait que reporter sur sa déclaration d'impôt sur le revenu les mentions figurant sur le bulletin de paie établi par son employeur, il lui appartenait toutefois de vérifier ces mentions alors que, par ailleurs, cet écart était, en l'espèce, important ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à demander l'application de l'abattement de 20 % aux salaires en litige ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplet, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi du contribuable est établie (...) » ;

Considérant que pour établir la mauvaise foi de l'intéressé, l'administration se fonde à titre principal sur l'importance du redressement par rapport au montant des sommes imposées à titre de salaires ; que toutefois ce seul élément n'est pas suffisant pour démontrer que M. X a tenté volontairement de se soustraire à l'impôt ; que, dans ces conditions, l'administration n'établit pas la mauvaise foi de l'intéressé qui est ainsi fondé à demander la décharge des majorations qui lui ont été infligées sur le fondement des dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander la décharge des pénalités de mauvaise foi qui lui ont été infligées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ne justifie pas de frais exposés et non compris dans les dépens ; que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent donc être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X est déchargé des majorations de 40 % pour mauvaise foi qui lui ont été infligées au titre des années 2000 et 2001.

Article 2 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 0500136 du 8 février 2007 du Tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant à la condamnation de M. X au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Charles X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera transmise au directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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N°07DA00463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA00463
Date de la décision : 02/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Stortz
Rapporteur ?: M. Alain Poydenot de Pontonx
Rapporteur public ?: Le Garzic
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BRAUT - ANTONINI - HOURDIN - HANSER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-04-02;07da00463 ?
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