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10/11/2008 | FRANCE | N°08DA01229

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 10 novembre 2008, 08DA01229


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le

31 juillet 2008 par télécopie et confirmée le 1er août 2008, présentée pour la Société à responsabilité limitée X, dont le siège est ..., représentée par son dirigeant en exercice, par Me Lefebvre, membre de la SCP Frison-Decramer et associés ; la Société X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0801480 du 10 juillet 2008 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif d'Amiens, statuant en référé, après avoir

condamné l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens à verser à la Société...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le

31 juillet 2008 par télécopie et confirmée le 1er août 2008, présentée pour la Société à responsabilité limitée X, dont le siège est ..., représentée par son dirigeant en exercice, par Me Lefebvre, membre de la SCP Frison-Decramer et associés ; la Société X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0801480 du 10 juillet 2008 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif d'Amiens, statuant en référé, après avoir condamné l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens à verser à la Société Y une provision de 40 000 euros à valoir sur le paiement de travaux supplémentaires, l'a condamnée à garantir intégralement l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens de cette condamnation ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande de provision présentée par la Société Y devant le président du Tribunal administratif d'Amiens et les conclusions d'appel en garantie dirigées à son encontre par l'Office public d'aménagement et de construction

d'Amiens ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la Société OTH Nord Picardie à la garantir intégralement de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre au profit de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ;

La Société X soutient :

- que l'expert a mis en évidence que le mur de soutènement retenant les maisons riveraines endommagées avait bougé à la suite des travaux de démolition de l'usine et que ce mur était déjà très instable, sous l'action des efforts de la seule poussée des terres, avant l'exécution desdits travaux ;

- que la Société Y, chargée du chantier de démolition de l'usine, a une part de responsabilité dans la survenance des désordres affectant lesdites maisons, situées rue Octave Tierce ; qu'en effet, l'article 1.2 du cahier des clauses techniques particulières applicable au marché de travaux en cause lui faisait interdiction de démolir les ouvrages participant à la stabilité des voiries et des bâtiments avoisinants et lui imposait de les maintenir en place jusqu'à l'intervention de l'entreprise responsable du lot « gros oeuvre » et de les consolider par tout moyen d'étaiement ; qu'il ressort du rapport d'expertise que ladite société n'a pas établi, avant l'engagement des travaux, de plan de démolition, ni de plan de confortation ; que l'expert a estimé que la Société Y avait commis une erreur en démolissant le sol d'un ancien bâtiment qui participait à la stabilité du mur de soutènement ; que cette société a, en outre, comme l'a relevé l'expert, manqué à son devoir de conseil en ne tirant aucune conséquence de l'existence d'anciennes fissures sur les murs pignons et de soutènement des immeubles endommagés ; que la Société Y a donc participé à l'apparition des désordres, ce qui a pour effet de rendre sérieusement contestable la demande de provision qu'elle avait formulée devant le président du Tribunal administratif d'Amiens ;

- que les conclusions d'appel en garantie présentées par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens devaient être rejetées par le premier juge ; qu'en effet, ledit office, maître d'ouvrage et qui ne saurait être considéré comme un profane compte tenu de son expérience, ne pouvait ignorer l'instabilité originelle du mur de soutènement et les fissures constatées de date ancienne et n'a cependant attiré l'attention d'aucun constructeur sur cet élément pourtant d'importance ; que la faute du maître d'ouvrage ayant ainsi concouru à la survenance des dommages, son action en garantie repose sur une obligation sérieusement contestable ;

- que l'exposante a sous-traité une partie de sa mission à la Société OTH Nord Picardie ; qu'il s'agissait, ainsi d'ailleurs que l'a constaté l'expert, d'une sous-traitance de maîtrise d'oeuvre technique, ladite société ayant été chargée de l'établissement des notes de calcul, mais aussi de l'ensemble de la mission de diagnostic qui a été regardée par l'expert comme ayant été défaillante ; que l'expert a en effet relevé que la plus grande part d'imputabilité des désordres résultait d'un vice de conception au niveau de l'élaboration du projet par la maîtrise d'oeuvre technique ; qu'il conviendra ainsi de constater que seule la responsabilité de la Société OTH Nord Picardie est susceptible d'être recherchée dans la survenance des désordres et que celle-ci doit être condamnée à garantir intégralement l'exposante, si toutefois la Cour retenait le caractère non sérieusement contestable de l'obligation invoquée par la Société Y ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 août 2008, présenté pour l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens, dont le siège est situé 1 rue du Général Frère à Amiens (80084) Cedex 2, représenté par son directeur en exercice, par la SCP Marguet-Hosten ; l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens conclut, à titre principal et par la voie de l'appel provoqué, à l'annulation de l'ordonnance attaqué et au rejet de la demande de provision présentée devant le président du Tribunal administratif d'Amiens par la Société Y, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la Société X une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens ;

L'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens soutient :

- à titre principal, qu'ainsi qu'il l'avait fait valoir devant le premier juge, la Société Y n'a pas rempli ses obligations contractuelles résultant du paragraphe 1.2 du cahier des clauses techniques particulières du lot démolition du marché ; qu'en effet, alors que ces stipulations précisaient que les travaux ne concernaient pas la démolition des ouvrages participant à la stabilité des bâtiments avoisinants, la Société Y a démoli le sol de l'usine jusque tout contre la fondation du mur de soutènement placé à l'arrière des immeubles sinistrés ; que cette démolition a déstabilisé lesdits bâtiments, ce qui constitue une faute contractuelle ; qu'en outre, la Société Y n'a pas rempli son devoir de conseil, alors pourtant que les fissures importantes constatées au droit du pignon de l'immeuble n° 95 étaient bien visibles avant l'engagement des travaux ; que si l'expert a estimé qu'il n'incombait pas à l'entreprise de vérifier la stabilité des murs de soutènement avoisinants, celle-ci devait néanmoins prendre toutes les dispositions pour éviter tout désordre ; qu'il n'appartenait pas au juge des référés du Tribunal administratif d'Amiens de procéder à un partage de responsabilités, son office ayant vocation à se limiter au constat d'une contestation sérieuse de l'obligation invoquée, ce qui ne pouvait le conduire qu'à rejeter la demande de provision ;

- à titre subsidiaire, que la responsabilité de la Société X est complète ; qu'en effet, celle-ci devait, en tant que maître d'oeuvre, remplir sa mission de diagnostic, qui impliquait la vérification de la stabilité des murs périphériques assurant le soutènement des terrains, ce qu'elle n'a d'ailleurs pas contesté, ainsi qu'en témoigne le courrier qu'elle a adressé à son sous-traitant le 10 juillet 2007 ; que cette vérification n'a pas été effectuée, en méconnaissance de l'arrêté du 21 décembre 1993 ; que si cette obligation contractuelle avait été remplie par la Société X, les désordres auraient pu être évités ; que celle-ci ne peut arguer de l'existence de fissures antérieures aux travaux, dès lors qu'elle se devait, en tant que maître d'oeuvre, de connaître la situation et d'en tirer toutes les conséquences ; qu'elle n'a formulé aucune remarque lors de l'établissement des plans et des calculs ; que ladite société a donc été condamnée à juste titre à garantir intégralement l'exposant de la condamnation mise à sa charge ; que l'exposant ne peut que s'en rapporter à justice sur le mérite de l'appel en garantie formulé par la Société X à l'encontre de la Société OTH Nord Picardie ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2008 par télécopie et confirmé le 4 septembre 2008 par courrier original, présenté pour la Société par actions simplifiée Y, représentée par son dirigeant en exercice, par Me Cabanes, membre de la SELARL Cabinet Cabanes-Cabanes Neveux associés ; la Société Y conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Office public d'aménagement et de construction sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Société Y soutient :

- que l'ordonnance attaquée devra être confirmée en ce qu'elle fait droit à la demande de provision formulée par l'exposante, dès lors l'obligation de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens à son égard n'est pas sérieusement contestable ; qu'en effet, les travaux supplémentaires qu'elle a réalisés résultent d'un ordre de service donné par le maître d'oeuvre et confirmé par courrier recommandé du maître d'ouvrage et étaient de surcroît indispensables à la viabilité de l'ouvrage, s'agissant en particulier de la mise en place d'un butonnage provisoire des murs en maçonnerie ; que le caractère non sérieusement contestable de ladite obligation est, en outre, clairement établi à la lecture du rapport de l'expert, qui indique notamment que le démolisseur n'avait pas à sa charge l'établissement des notes de calcul et des études destinées à s'assurer de la stabilité des murs de soutènement et qu'il ne pouvait laisser en place des zones importantes de bâtiments pour assurer le maintien des murs périphériques ; que l'exposante ne peut donc raisonnablement être tenue pour responsable des désordres subis par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ;

- que l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens soutient vainement que l'exposante aurait commis une faute en plaçant un tas de gravats à l'arrière du mur de soutènement, alors qu'elle n'a fait que se conformer à un ordre exprès du maître d'oeuvre ;

- qu'il ressort clairement du rapport d'expertise et n'est d'ailleurs pas contesté que les désordres trouvent leur origine dans une carence de la mission de diagnostic incombant à la maîtrise d'oeuvre ;

- qu'enfin, l'expert inclut expressément le montant des travaux supplémentaires effectués par l'exposante dans le calcul du montant du sinistre subi par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 septembre 2008, présenté pour la Société X et par lequel celle-ci conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

La Société soutient, en outre, que la Société Y ne saurait utilement se prévaloir de l'existence d'un ordre de service et du caractère indispensable des travaux qu'elle a effectués pour prétendre à la confirmation de la provision accordée par le premier juge, les jurisprudences qu'elle invoque à cet égard n'étant pas transposables au cas d'espèce, qui est caractérisé par l'apparition de désordres à la suite de la réalisation de travaux par elle-même ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 octobre 2008, par lequel l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2008 par télécopie au greffe de la Cour et confirmé le 22 octobre 2008 par courrier original, présenté pour la Société IOSIS Nord, venant aux droits de la Société OTH Nord, par Me Dechelette ; la Société IOSIS Nord conclut, à titre principal, au rejet des conclusions d'appel en garantie dirigées à son encontre, à titre subsidiaire et par la voie de l'appel provoqué, à l'annulation de l'ordonnance attaquée et au rejet de la demande de provision présentée par la Société Y, en tout état de cause, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la Société X sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Société IOSIS Nord soutient :

- à titre principal, que les conclusions d'appel en garantie présentées à son encontre par la Société X sont irrecevables comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; qu'en effet, l'exposante a agi en exécution d'un contrat de sous-traitance, qui, même s'il a été conclu pour l'exécution d'un marché public, constitue une convention de droit privé ; que peu importe à cet égard que le principe de son intervention à l'opération ait fait l'objet d'une acceptation de la part du maître d'ouvrage, avec lequel elle n'est pas liée contractuellement ;

- que ces conclusions devront en tout état de cause être rejetées comme irrecevables, dès lors qu'elles sont présentées pour la première fois en appel ;

- à titre subsidiaire, que la demande de provision présentée par la Société X devant le juge des référés du Tribunal administratif d'Amiens devait être rejetée comme irrecevable, faute pour ladite société d'avoir justifié du respect de la procédure prévue par les stipulations de l'article 50.11 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de travaux ; que l'ordonnance dont appel encourt dès lors l'annulation ;

- à titre infiniment subsidiaire, que la société exposante entend faire siennes les observations formulées par la Société X tendant à démontrer que la Société Y a une part de responsabilité non négligeable dans la survenance des désordres à l'origine de la nécessité des travaux dont elle demande le paiement ; qu'elle entend tout particulièrement retenir le manquement de l'entrepreneur à son devoir de conseil ; que la Société Y est, en effet, un professionnel des travaux de démolition, qui ne peut donc ignorer les contraintes liées à la proximité de bâtiments à conserver ; que ce devoir de conseil, qui joue à tous les stades de l'exécution du marché qui lui est confié et nonobstant la présence d'un maître d'oeuvre, est à rapprocher des prescriptions imposées à l'entrepreneur par le cahier des clauses techniques particulières applicable au marché en cause ; que, dans ces conditions, le premier juge ne pouvait considérer que la responsabilité de l'entreprise n'était que marginale, mais aurait dû, au contraire, rejeter la demande de provision présentée par la Société Y ;

- que la responsabilité du maître d'ouvrage se trouve également engagée, dès lors qu'il n'a fourni aucune information sur les conditions de construction du mur en cause ni sur ses sollicitations et n'a pas attiré l'attention des constructeurs sur l'instabilité de celui-ci ; que ce mur avait fait l'objet d'agrandissements dans des conditions inadaptées ; qu'il appartenait également au maître d'ouvrage de fournir les plans des pavillons existants, ce qu'il n'a pas fait ; que si l'exposante avait eu connaissance de ces éléments d'information, elle n'aurait pas manqué d'attirer l'attention du maître d'oeuvre et du maître d'ouvrage même en l'absence de désordre ; que, dans ces conditions, les conclusions d'appel en garantie présentées par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens devaient être rejetées ;

- qu'il ne peut être reproché la moindre faute à l'exposante dans l'exécution de sa mission ; que les conclusions présentées par la Société X à son égard, à les supposer recevables, doivent dès lors être rejetées ;

- qu'enfin, l'article 6-2 du cahier des clauses administratives particulières limite expressément la minoration de la rémunération du maître d'oeuvre , en cas d'augmentation du montant des marchés de travaux, à 15% de la rémunération correspondant aux éléments de mission postérieurs à l'attribution des marchés ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 octobre 2008 par télécopie au greffe de la Cour, par lequel la Société Y conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ;

Vu les pièces du dossier desquelles il ressort que les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'ordonnance à intervenir était susceptible d'être fondée sur des moyens relevés d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant que, par acte d'engagement du 26 février 2003, l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens a confié à la Société X la maîtrise d'oeuvre d'une opération de construction de 96 logements locatifs dans l'emprise d'une friche industrielle dite des « Etablissements Frémaux » située entre les rues Octave Tierce, Delahaye, des Teinturiers et Alfred Manessier à Amiens ; que cette opération impliquait la démolition des bâtiments de l'ancienne usine textile située dans cette emprise ; que la Société OTH Nord-Picardie est intervenue en tant que sous-traitante du maître d'oeuvre, au titre de la maîtrise d'oeuvre technique de cette démolition ; que, par acte d'engagement du 8 juillet 2004, les travaux de désamiantage et de démolition ont été confiés à la Société Y ; que ces travaux ont été exécutés de novembre 2005 à janvier 2006 ; que, le 16 janvier 2006, d'importants désordres affectant le gros oeuvre de maisons d'habitation avoisinantes, situées rue Octave Tierce et propriété de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens, ont été constatés ; qu'estimant avoir dû effectuer des prestations supplémentaires non prévues au marché afin d'éviter une aggravation de ces désordres, la Société Y a adressé le 13 juillet 2008 à l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens un mémoire en réclamation, qui a été implicitement rejeté par celui-ci ; que la Société X forme appel de l'ordonnance en date du 10 juillet 2008 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif d'Amiens, après avoir condamné l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens à verser à la Société Y une provision de 40 000 euros à valoir sur le paiement de travaux supplémentaires, l'a condamnée à garantir intégralement l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens de cette condamnation et demande, à titre principal, le rejet de la demande de provision présentée par la Société Y devant le président du Tribunal administratif d'Amiens et des conclusions d'appel en garantie dirigées à son encontre par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens, à titre subsidiaire, de condamner la Société OTH Nord Picardie à la garantir intégralement de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre au profit de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ; que l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens demande, à titre principal et par la voie de l'appel provoqué, le rejet de la demande de provision présentée par la Société Y devant le président du Tribunal administratif d'Amiens, à titre subsidiaire, le rejet de la requête de la Société X et la confirmation de l'ordonnance attaquée ; qu'enfin, la Société IOSIS Nord, qui vient aux droits de la Société OTH Nord, demande, à titre principal, sa mise hors de cause, à titre subsidiaire et par la voie de l'appel provoqué, à l'annulation de l'ordonnance attaquée et au rejet de la demande de provision présentée par la Société Y ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : « Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés » et qu'aux termes de l'article R. 541-1 du même code : « Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. » ;

Sur le bien-fondé de la provision mise à la charge de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens :

Considérant, d'une part, que la Société X, qui a été condamnée, par l'ordonnance attaquée, à garantir l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens de l'intégralité de la somme mise à la charge de celui-ci à titre provisionnel par la même ordonnance est sans qualité et, par suite, irrecevable à contester la condamnation prononcée à l'égard de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ; que, dès lors, les conclusions de sa requête d'appel qu'elle présente à titre principal doivent être rejetées ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que l'appel principal formé par la Société X contre l'ordonnance attaquée, n'est recevable qu'en tant qu'il est dirigé contre sa condamnation à garantir l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ; que, par suite, les conclusions d'appel provoqué présentées après l'expiration du délai d'appel par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens et qui tendent à l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle l'a condamné à verser une provision à la Société Y et au rejet de la demande de provision présentée par cette dernière, soulèvent un litige distinct de l'appel principal et sont, dès lors, irrecevables ;

Sur les appels en garantie :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif d'Amiens que les désordres dont ont été affectées plusieurs maisons d'habitation situées rue Octave Tierce, à proximité immédiate du chantier de réhabilitation de la friche industrielle des « établissements Frémaux », à la suite de l'exécution des travaux de démolition des bâtiments industriels désaffectés par la Société Y, ont été causés par un mouvement d'ensemble du mur de soutènement situé à l'arrière desdites maisons et dont l'instabilité initiale a été accentuée par l'exécution desdits travaux de démolition à sa proximité ; que, si l'expert a mis en évidence une erreur du démolisseur, la Société Y, qui a démoli le sol de l'usine jusque tout contre les fondations dudit mur, ce qui a pu pour partie participer à l'apparition des désordres, il a estimé que ces derniers trouvaient leur origine principale dans un vice de conception du projet imputable à la maîtrise d'oeuvre technique, qui n'a procédé à aucune étude de la stabilité dudit mur de l'usine formant soutènement périphérique au nouveau bâtiment, alors que cette étude aurait permis selon lui d'inclure dans le projet la définition des mesures de confortation provisoires et définitives à mettre en oeuvre et d'éviter ainsi la survenance desdits désordres ; que, dans ces conditions, le premier juge a jugé à bon droit et sans excéder sa compétence qu'il y avait lieu, après avoir réduit le quantum de la provision demandée par la Société Y en conséquence de sa part de responsabilité et condamné l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens à payer à celle-ci ladite provision, de condamner en l'état de l'instruction le maître d'oeuvre, la Société X à garantir l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens de l'intégralité de la condamnation ainsi prononcée à son encontre ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction et notamment des éléments versés au dossier par la Société IOSIS Nord, qui vient aux droits de la Société OTH Nord, que la mission de maîtrise d'oeuvre confiée à la Société X a fait l'objet d'un acte spécial n° 1, signé le 25 mai 2004, conclu entre cette dernière société et l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens ; que la Société OTH Nord a accepté d'exécuter la mission correspondante en qualité de sous-traitante de la Société X, à laquelle elle était liée par un contrat n'ayant pas le caractère d'un contrat administratif ; qu'il en résulte que les conclusions d'appel en garantie présentées par Société X à l'encontre de la Société OTH Nord doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif d'Amiens, statuant en référé, l'a condamnée à garantir intégralement l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens de la condamnation provisionnelle mise à sa charge par la même ordonnance et n'est pas recevable à appeler en garantie la Société OTH Nord, aux droits de laquelle vient la Société IOSIS Nord ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a lieu, en application de ces dispositions et dans les circonstances de l'espèce, ni de mettre à la charge de la Société X les sommes que l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens, d'une part, et la Société IOSIS Nord, d'autre part, demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens, ni de mettre à la charge de l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens la somme que la Société Y demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er : Les conclusions d'appel en garantie présentées par la Société X à l'égard de la Société OTH Nord sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la Société X et les conclusions présentées par l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions présentées par la Société Y et par la Société IOSIS Nord et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la Société X, à la Société Y, à la Société IOSIS Nord venant aux droits de la Société OTH Nord-Picardie, ainsi qu'à l'Office public d'aménagement et de construction d'Amiens.

Copie sera transmise au ministre du logement et de la ville.

3

N° 08DA01229 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 08DA01229
Date de la décision : 10/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP FRISON - DECRAMER ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-11-10;08da01229 ?
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