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14/02/2013 | FRANCE | N°12DA01123

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 14 février 2013, 12DA01123


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 25 juillet 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 juillet 2012, présentée pour l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY, dont le siège social est 22 route de Dieppe à Deville-les-Rouen (76250), représentée son directeur général, par la Selarl Enard-Bazire, avocat ; l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001495 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du

marché de travaux publics " Lot n° 2 Charpentes ", passé entre le départ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 25 juillet 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 juillet 2012, présentée pour l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY, dont le siège social est 22 route de Dieppe à Deville-les-Rouen (76250), représentée son directeur général, par la Selarl Enard-Bazire, avocat ; l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001495 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du marché de travaux publics " Lot n° 2 Charpentes ", passé entre le département de la Seine-Maritime et la société Gallis, signé le 29 avril 2010, ayant pour objet la restauration des toitures du château du parc de Clères et, d'autre part, à la condamnation du département de la Seine-Maritime à l'indemniser du préjudice que lui cause son éviction irrégulière du marché, à hauteur d'une somme de 40 000 euros assortie des intérêts légaux à compter de l'enregistrement de sa demande ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 35 euros au titre du remboursement du timbre ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Agnès Eliot, premier conseiller,

- et les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public ;

1. Considérant que, le 6 janvier 2009, l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY s'est vu attribuer le lot n° 2 (charpentes) de l'appel d'offres relatif à la restauration des toitures du château du parc de Clères ; qu'à la suite de la résiliation de ce marché, un nouvel appel d'offres a été lancé par un avis publié au Bulletin officiel des annonces des marchés publics le 11 décembre 2009 ; que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY s'est à nouveau portée candidate mais a vu son offre rejetée comme irrégulière par la commission d'appel d'offres réunie le 23 mars 2010 ; que ce rejet lui a été notifié le 29 mars 2010 ; que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du marché finalement passé le 29 avril 2010 entre la société Gallis et le département de la Seine-Maritime, et, d'autre part, à la condamnation du département de la Seine-Maritime à lui verser une indemnité de 40 000 euros au titre de la perte de chance sérieuse de remporter le marché que lui a causée son éviction irrégulière, dès la phase de la recevabilité des candidatures ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient la société appelante, le tribunal administratif a répondu aux moyens tirés de ce que la notification du rejet de son offre était entachée d'irrégularités et de ce que le marché attaqué avait méconnu l'article 80 du code des marchés publics ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'omission à statuer ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces de première instance que le département de la Seine-Maritime n'avait formulé, dans ses différents mémoires, d'autres conclusions que celles tendant au rejet de la requête de l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les mémoires en défense produits par le département de la Seine-Maritime étaient irrecevables n'est, en tout état de cause, pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué qui s'est borné à répondre aux moyens soulevés par l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY ;

Sur le fond :

4. Considérant qu'aux termes du III de l'article 53 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au 11 décembre 2009, date de la publication de l'avis d'appel d'offre dont il s'agit : " Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L'offre la mieux classée est retenue " ; qu'aux termes de l'article 35 du même code : " Une offre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation " ;

5. Considérant que le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 2 (charpentes) de novembre 2009 mentionne dans la description des ouvrages que les échafaudages verticaux seront mis à disposition des entreprises intervenantes par le lot n° 1 (maçonneries pierre de taille) et devront être conçus par le maçon en coordination avec le charpentier ; que le CCTP du lot n° 2 indique également que : " dans le cas où l'entreprise du présent lot envisage la pose de la charpente par grutage, il lui revient de prendre en compte la charge financière de la dépose et repose partielle du parapluie (parties verticales uniquement, à l'exclusion des parties inclinées, pour garantir une étanchéité parfaite du parapluie, le bâtiment restant en service pendant la durée totale des travaux) " ;

6. Considérant qu'il résulte des termes dépourvus d'ambiguïté du CCTP du lot charpente, mis à disposition des candidats lors de l'appel d'offres, et qui ont été confirmés lors des différents échanges entre la société appelante et le département, que les candidats au lot " charpentes " avaient la possibilité de présenter dans leur offre, parmi d'autres solutions, le grutage comme procédé permettant l'opération sur la charpente ; que toutefois, il résulte de ces mêmes documents que l'emploi de cette méthode était subordonné au respect de certaines contraintes liées aux caractéristiques de l'échafaudage dont la mise en place relevait du lot maçonnerie et notamment du " parapluie " destiné à protéger de manière permanente le bâtiment historique ; qu'en particulier, l'entrepreneur du lot " charpentes " avait l'obligation de ne pas porter atteinte aux parties inclinées du parapluie mais pouvait seulement intervenir sur ses parties verticales ; que les dimensions de l'échafaudage dans sa partie verticale, bien que mentionnées de manière approximative par l'article 3.2 du CCTP du lot maçonnerie, étaient fixées à cinq mètres environ de hauteur pour les ailes Est et Ouest et à trois mètres environ pour les tours d'escaliers ; que ces dimensions ont été confirmées dans un courrier du 7 janvier 2010 de l'architecte, maître d'oeuvre, qui a répondu aux demandes de précisions présentées par l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY au cours de la procédure de consultation ; que ce même courrier a également indiqué que le CCTP du lot n° 2 interdisait de déposer les parties inclinées du parapluie et de procéder à des ouvertures destinées à faire passer des éléments entiers de charpente ;

7. Considérant que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY soutient que le dossier de consultation est entaché de contradictions et se prévaut à ce titre d'un plan d'exécution des échafaudages du 16 février 2009, présenté en mars 2009 par l'attributaire du lot n° 1, que le département de la Seine-Maritime aurait validé et qui portait la hauteur des échafaudages verticaux à douze mètres au lieu de cinq mètres ; qu'il résulte cependant de l'instruction que ce plan a été élaboré dans le cadre du premier appel d'offres, remporté par la requérante mais dont le marché a été résilié ultérieurement ; que si ce plan de février 2009 indiquait " plan valable pour exécution ", il est constant qu'il a été validé avant le lancement du second appel d'offres et qu'il ne faisait pas partie des documents de la consultation organisée pour la réattribution du lot n° 2 " charpentes " ; que ces documents s'avéraient d'ailleurs incompatibles techniquement avec le plan initial ; que, par suite, l'entreprise appelante, qui ne pouvait ignorer les contraintes de taille et d'ouverture posées par le CCTP du lot n° 1, ne saurait invoquer l'existence de ce plan préparatoire et non définitif de février 2009, non joint au règlement de la consultation et probablement inconnu des autres candidats au marché, pour soutenir l'existence d'une contradiction entre ce plan et les documents de la consultation ;

8. Considérant que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY soutient également que les documents de la consultation sont entachés d'incohérence en ce qu'ils autorisent en principe le grutage mais qu'ils le rendent en pratique impossible du fait de l'étroitesse des ouvertures praticables et du maintien imposé des parties inclinées du parapluie ; que, toutefois, elle n'établit pas une telle incohérence par les pièces produites ; qu'en tout état de cause, la méthode par grutage n'était pas imposée aux entreprises candidates mais constituait uniquement une solution alternative et restreinte ; qu'il appartenait ainsi à l'entreprise de proposer le procédé qui lui semblait à la fois le plus conforme aux exigences du dossier de consultation et le plus opportun ;

9. Considérant qu'en proposant une offre présentant des dimensions supérieures de plus de trois mètres à celles prévues par les pièces du dossier de consultation des entreprises, lesquelles avaient nécessairement pour effet de toucher aux parties inclinées du parapluie, et en indiquant, en réponse aux demandes de précisions supplémentaires du maître d'ouvrage, d'une part, que les ouvertures devront être de deux mètres cinquante en largeur et de dix mètres en hauteur, et, d'autre part, que des parties horizontales du parapluie devront être démontées sur quatre niveaux de deux mètres afin de permettre d'intégrer les éléments pré-assemblés de la charpente à la toiture et apportés par une grue, l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY n'a pas respecté les exigences formulées par le dossier de consultation ; que la commission d'appel d'offres n'a dès lors pas commis d'erreur d'appréciation en jugeant que l'offre de la société appelante était irrégulière au sens de l'article 35 du code des marchés publics ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation du lot " charpentes " attribué à la société Gallis et, par voie de conséquence, sa demande indemnitaire ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Maritime, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY le versement au département de la Seine-Maritime d'une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par lui ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY est rejetée.

Article 2 : L'ENTREPRISE GEORGES LANFRY versera la somme de 1 500 euros au département de la Seine-Maritime au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ENTREPRISE GEORGES LANFRY et au département de la Seine-Maritime.

Copie sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime et à l'entreprise Gallis.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01123
Date de la décision : 14/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-02-03 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats. Appel d'offres.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : SCP SEBAN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-02-14;12da01123 ?
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