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07/12/2017 | FRANCE | N°16DA00761

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 07 décembre 2017, 16DA00761


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 mars 2015 par laquelle le directeur de l'Institut départemental de l'enfance, de la famille et du handicap pour l'insertion (IDEFHI) a prononcé sa révocation, d'enjoindre à l'IDEFHI de lui verser les indemnités auxquelles elle a droit à compter de sa révocation, dans le délai de quinze jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de condamner l'IDEFHI à la somme de 10 000 euros en répa

ration du préjudice subi.

Par un jugement n° 1501449 du 25 février 2016, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 mars 2015 par laquelle le directeur de l'Institut départemental de l'enfance, de la famille et du handicap pour l'insertion (IDEFHI) a prononcé sa révocation, d'enjoindre à l'IDEFHI de lui verser les indemnités auxquelles elle a droit à compter de sa révocation, dans le délai de quinze jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de condamner l'IDEFHI à la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1501449 du 25 février 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 avril 2016 et 14 novembre 2017, Mme A..., représentée par la Selarl Normandie Juris, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 mars 2015 ;

3°) d'enjoindre à l'IDEFHI de procéder à la reconstitution de sa carrière et de la rétablir dans ses droits à pension et sociaux, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'IDEFHI à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi ;

5°) de mettre à la charge de l'IDEFHI la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...D..., représentant l'IDEFHI.

1. Considérant que, par une décision du 11 mars 2015, le directeur de l'Institut départemental de l'enfance, de la famille et du handicap pour l'insertion (IDEFHI) a infligé à MmeA..., agent d'entretien qualifié, la sanction disciplinaire de révocation ; que la requérante relève appel du jugement du 25 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'indemnisation du préjudice subi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire contre lequel est engagée une procédure disciplinaire doit être informé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. Il doit être invité à prendre connaissance du rapport mentionné à l'article 83 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 12 janvier 2015, l'IDEFHI a informé Mme A...de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre et l'a invitée à prendre connaissance de son dossier, le 30 janvier 2015 ; qu'après un report de cette date à la demande de MmeA..., l'intéressée a consulté le vendredi 6 février 2015 les pièces de son dossier numérotées de 456 à 733, soit celles postérieures à 2009 ; qu'elle a demandé le même jour la communication de certaines pièces antérieures à 2009 ; que l'établissement lui a proposé, le 9 février 2015, de lui transmettre l'intégralité des pièces de son dossier numérotées de 1 à 455 ; qu'elle en a reçu communication le 11 février 2015 ; que, dans ces conditions, Mme A... a disposé d'un délai suffisant pour préparer utilement sa défense en vue du conseil de discipline fixé le 16 février 2015 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 7 novembre 1989 : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline, quinze jours au moins avant la date de la réunion de ce conseil, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Il peut, devant le conseil de discipline, présenter des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix " ; que selon l'article 5 de ce même décret : " le report de l'affaire peut être demandé par le fonctionnaire poursuivi et est décidé à la majorité des membres présents " ;

5. Considérant que, par lettre du 19 janvier 2015 lui rappelant ses droits, Mme A...a été convoquée à comparaître devant le conseil de discipline le 16 février 2015 ; que, par une télécopie émise le jour même du conseil de discipline, à 12h57, le conseil de la requérante a sollicité un report de l'affaire invoquant l'état de santé de Mme A...et le délai insuffisant pour préparer sa défense ; que cette instance, qui n'était pas tenue de renvoyer l'affaire à une séance ultérieure, a pu légalement écarter cette demande et émettre un avis hors la présence de l'intéressée et de son conseil, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point précédent, cette dernière, régulièrement convoquée, avait disposé d'un délai suffisant pour se faire représenter ou adresser des observations écrites ;

6. Considérant que la contestation, par un fonctionnaire, de la sanction disciplinaire qui lui a été infligée n'est relative ni à un droit ou une obligation de caractère civil, ni au bien-fondé d'une accusation en matière pénale ; qu'un tel litige n'entre donc pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit dès lors être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " ; qu'aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) quatrième groupe (...) la révocation (...) " ;

8. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

9. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...a présenté le 12 mars 2013 auprès de l'IDEFHI une demande de formation en vue de la préparation au diplôme de " mandataire judiciaire à la protection des majeurs ", à l'Institut du Développement Social de Canteleu, dans le cadre d'un congé de formation professionnelle ; cette demande a été rejetée en raison du dépôt tardif de son dossier ; que ce refus lui a été réitéré par l'IDEFHI le 2 avril 2013 à la suite d'une nouvelle demande de sa part ; que, toutefois, Mme A... s'est inscrite sans l'accord préalable de sa hiérarchie, et a suivi cette formation, comprenant 650 heures de cours, du 14 janvier 2013 au 27 novembre 2013 en dépit des refus successifs qui lui ont été opposés ; que Mme A...n'a apporté aucune justification à ses absences aux entretiens des 3 et 9 septembre 2013 ainsi qu'à celui du 13 octobre 2014 et a refusé de renseigner son employeur sur sa formation en dépit de ses demandes ; qu'elle ne peut utilement se prévaloir de ce que la formation en cause a été suivie en dehors de son temps de travail et à ses frais, alors qu'elle se trouvait, au cours de la période en litige d'abord en congé de maladie ordinaire, puis, à compter du 29 avril 2013, en congé de longue maladie, suite à sa demande présentée auprès du comité médical et que ces congés sont exclusifs de tout congé de formation professionnelle ; que ses allégations selon lesquelles son employeur lui refusait, par principe, toute formation ne sont pas établies ;

10. Considérant, en second lieu, que Mme A...n'a pas justifié, en dépit des demandes de son employeur, de nombreuses absences à son poste de travail, notamment du 14 au 18 janvier 2013, ainsi que les 11, 18 et 19 février 2013 ; que si elle a transmis, le 24 avril 2013, un certificat d'arrêt de travail antidaté au 2 janvier 2013, censé couvrir la période d'absence du 2 janvier 2013 au 31 octobre 2013, il ressort des pièces du dossier qu'après vérification effectuée auprès du médecin prescripteur, ce dernier a reconnu l'avoir rédigé " à la demande de Mme A...et de son médecin psychiatre " afin de " récapituler tous les arrêts antérieurs de 2013 permettant à Mme A...(à ses dires) d'être prise en charge en longue maladie " ; que la requérante ne peut utilement soutenir que son employeur aurait violé le secret médical en prenant l'attache de son médecin généraliste ; qu'elle a également présenté une prolongation d'arrêt de travail rédigée par un nouveau médecin généraliste pour la période du 29 avril 2013 au 30 juin 2013, alors même que son précédent arrêt courait jusqu'au 19 avril ; que, placée rétroactivement en congé de longue maladie du 29 avril 2013 au 28 octobre 2013, puis jusqu'au 28 janvier 2014, elle a fait parvenir, le jour programmé de sa reprise, soit le 28 janvier 2014, un nouvel arrêt de travail daté du même jour et prescrit jusqu'au 31 juillet 2014 ; qu'alors même qu'elle avait manifesté sa volonté de reprendre ses fonctions à cette date et avait été reconnue apte à l'exercice de ces dernières, et qu'elle avait au surplus obtenu un temps partiel de droit, Mme A... a, le 26 août 2014, jour programmé de sa reprise, fait savoir qu'étant souffrante, elle ne pourrait se rendre sur son lieu de travail ; qu'elle n'a fait parvenir son nouvel arrêt de travail, couvrant la période du 1er août 2014 au 31 janvier 2015, que le 1er septembre 2014, alors qu'elle avait saisi, dès le 26 août, son administration d'une demande de transformation de son congé de longue maladie en congé de longue durée ; que, compte tenu des précédents abus de production d'arrêts de travail, et nonobstant l'avis du comité médical départemental du 1er octobre 2014, l'IDEFHI a pu estimer que ce dernier arrêt n'avait été établi par l'agent que dans le but de se soustraire à ses obligations professionnelles et en tenir compte pour caractériser ses absences injustifiées et ses manquements répétés à l'obligation de servir ; qu'enfin, les quelques faits épars dont elle se prévaut relatif notamment à une affectation, contre son gré, en 2011 dans un internat ou le retrait du suivi d'un projet culturel ne sont pas suffisants pour laisser présumer l'existence du harcèlement moral dont elle prétend avoir fait l'objet ;

11. Considérant qu'il résulte du point précédent que l'autorité disciplinaire ne s'est pas fondée sur des faits matériellement inexacts ; que ces faits révèlent de graves manquements à son obligation de servir et à son obligation de loyauté à l'égard de son employeur ; qu'ils étaient de nature à justifier légalement une sanction ; qu'alors que depuis plusieurs années Mme A...s'était déjà fait défavorablement remarquer de sa hiérarchie, l'autorité disciplinaire n'a pas commis d'erreur d'appréciation en décidant de lui infliger la sanction de révocation ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'IDEFHI, que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions à fins d'annulation ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions indemnitaires :

13. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive de la décision du 11 mars 2015, Mme A... ne peut prétendre à la réparation du préjudice que lui aurait causé cette décision ; que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'IDEFHI, ses conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'IDEFHI, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au bénéfice de MmeA..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'IDEFHI présentées sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'IDEFHI au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et à l'Institut départemental de l'enfance, de la famille et du handicap pour l'insertion.

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N°16DA00761

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00761
Date de la décision : 07/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : Mme Petit
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELAS NORMANDIE-JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-12-07;16da00761 ?
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