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31/10/2018 | FRANCE | N°16DA01991

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2018, 16DA01991


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme G...I...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir le certificat d'urbanisme négatif qui leur a été délivré le 5 juillet 2013 par le maire de la commune de Cucq pour leur projet de construction d'une maison individuelle sur un terrain situé rue Paul Lemaître.

Par un jugement n° 1305391 du 13 septembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, e

nregistrés les 10 novembre 2016 et 10 novembre 2017, M. D... A...et Mme G...I..., représentés ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme G...I...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir le certificat d'urbanisme négatif qui leur a été délivré le 5 juillet 2013 par le maire de la commune de Cucq pour leur projet de construction d'une maison individuelle sur un terrain situé rue Paul Lemaître.

Par un jugement n° 1305391 du 13 septembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 novembre 2016 et 10 novembre 2017, M. D... A...et Mme G...I..., représentés par Me J...C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ce certificat d'urbanisme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cucq le versement des sommes de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me B...H..., représentant M. A...et MmeI..., et de Me E...F..., représentant la commune de Cucq.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...et Mme I...ont présenté une demande de certificat d'urbanisme portant sur leur projet de construction d'une maison individuelle sur un terrain dont ils sont propriétaires, situé rue Paul Lemaître, sur le territoire de la commune de Cucq. Le maire de cette commune leur a délivré, le 5 juillet 2013, un certificat d'urbanisme négatif reposant sur trois motifs de refus tirés, en premier lieu, de la situation du terrain en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, en deuxième lieu, de la situation du projet de construction qui n'est pas en continuité de l'agglomération existante, en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 146-4 du même code et, en troisième lieu, de l'atteinte à un espace remarquable du littoral protégé par l'article L. 146-6 de ce code. M. A...et Mme I... ont saisi le tribunal administratif de Lille d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre ce certificat d'urbanisme négatif. Par un jugement du 13 septembre 2016, le tribunal administratif de Lille, après avoir jugé que les deux premiers motifs de refus utilisés par le maire de Cucq dans sa décision étaient entachés d'illégalité, a considéré que le troisième était néanmoins de nature à justifier, à lui seul, la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif et a rejeté la demande dont il était saisi. M. A...et Mme I...relèvent régulièrement appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves. / Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements qui incluent, selon leur importance et leur incidence sur l'environnement, soit une enquête publique, soit une mise à disposition du public préalablement à leur autorisation (...) ". La protection instituée par l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme implique par elle-même l'inconstructibilité des espaces caractéristiques du littoral, sous réserve de l'implantation d'aménagements légers prévus au deuxième alinéa du même article.

3. La décision en litige relève que la situation du terrain d'assiette du projet dans une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type 1, dite des " prairies humides péri-urbaines de Cucq ", impose une " obligation de protection par l'interdiction de construction " afin de préserver son intérêt biologique. Il ressort des motifs de cette décision et des écritures de la commune que celle-ci a entendu se fonder sur les dispositions, citées au point précédent, de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le terrain de M. A...et Mme I... se situe à la frontière de la ZNIEFF des prairies humides de Cucq, laquelle épouse les limites de l'urbanisation existante de ce secteur de la commune. Les intéressés produisent, devant la cour, une notice d'impact de leur projet sur l'environnement réalisée à leur demande par un ingénieur écologue, dont il résulte, d'une part, que le terrain dont ils sont propriétaires ne présente pas les caractéristiques d'un espace remarquable du littoral et, d'autre part, que leur projet n'est pas de nature à exercer une influence sur la ZNIEFF voisine. La commune de Cucq ne produit, pour sa part, aucun élément de nature à démontrer que le terrain des appelants présenterait par lui-même une valeur particulière, ni que leur projet serait susceptible d'exercer une influence néfaste sur la ZNIEFF voisine. Dès lors, au regard des éléments d'information produits par les parties, M. A...et Mme I...sont fondés à soutenir qu'en s'appuyant, pour leur délivrer un certificat d'urbanisme négatif, sur les dispositions citées au point 2, le maire de Cucq a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

4. Toutefois, d'une part, l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises aux articles L. 111-3 et L. 111-4 du même code, interdit en principe, en l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, les constructions implantées " en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune ", c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il en résulte qu'en dehors du cas où elles relèvent des exceptions expressément et limitativement prévues par l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, les constructions ne peuvent être autorisées dès lors que leur réalisation a pour effet d'étendre la partie actuellement urbanisée de la commune. Pour apprécier si un projet a pour effet d'étendre la partie actuellement urbanisée de la commune, il doit être tenu compte de sa proximité avec les constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune ainsi que du nombre et de la densité des constructions projetées.

5. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée AT 45 appartenant à M. A...et Mme I... se situe au sud de la rue Paul Lemaître, à l'arrière d'un rang d'une douzaine de constructions édifiées le long de cette voie, et à l'est de la rue de la Jaquette, en deuxième ou troisième rideau par rapport aux quelques constructions éparses édifiées à l'angle formé par cette rue et la précédente. Ce terrain, à l'état naturel, n'est pas directement desservi par la voie publique, ni par le réseau public d'assainissement. Il s'ouvre au sud sur une vaste zone vierge de toute construction et incluse dans le périmètre de la ZNIEFF des " prairies humides péri-urbaines de Cucq ", évoquée au point 3. Si les constructions existantes en front à rue peuvent être regardées comme relevant d'un secteur actuellement urbanisé, à faible densité, le terrain d'assiette du projet, en dépit de sa proximité avec ces quelques parcelles bâties, appartient, par sa situation et ses caractéristiques, à un compartiment de terrain distinct s'ouvrant sur une vaste zone à l'état naturel dont il n'est pas nettement séparé par sa rangée d'arbres. Dans ces conditions, une construction implantée sur le terrain en litige, même le plus en bordure des parcelles déjà bâties comportant des jardins derrière lesquels il se situe, conduirait à étendre les parties actuellement urbanisées de la commune de Cucq. Dès lors, en estimant que le projet des appelants méconnaît les dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, au motif, notamment, que " le terrain objet de la demande est situé à l'arrière des habitations existantes qui se trouvent le long de la rue Paul Lemaître " et que " le projet, compte tenu de son éloignement depuis la voie publique principale de desserte, ne participe pas à la densification du quartier ", le maire de Cucq n'a commis ni erreur de droit, ni erreur d'appréciation au regard des critères rappelés au point 1.

6. D'autre part, aux termes du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement (...) ".

7. Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées. En revanche, la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi.

8. S'il se situe à proximité de plusieurs constructions existantes implantées, en particulier, le long de la rue Paul Lemaître, le terrain d'assiette du projet de M. A...et Mme I...se trouve, ainsi qu'il a été dit au point 5, à l'état naturel, à l'arrière des constructions existantes le long de cette rue et de leurs jardins et se prolonge vers le sud par une vaste zone naturelle. Dans ces conditions, alors même qu'il porte sur une maison individuelle, le projet des appelants constitue une extension de l'urbanisation au sens des dispositions citées au point 6.

9. Il résulte des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, citées au point 6, que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions ; en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.

10. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de M. A...et Mme I... se trouve en deuxième rideau par rapport à un groupe d'une douzaine de constructions édifiées le long de la rue Paul Lemaître, et en troisième, voire en quatrième rideau par rapport à un groupe d'une dizaine de constructions implantées à l'ouest et desservies à partir de la rue de la Jaquette. Toutefois, même si ces groupes de constructions présentent une densité significative de nature à les faire regarder comme appartenant à une zone déjà urbanisée au sens et pour l'application des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, la construction projetée, ainsi qu'il a déjà été dit, n'est pas située en continuité de ces groupes d'habitation mais dans un compartiment de terrain nettement distinct. Dès lors, en se fondant, pour délivrer un certificat d'urbanisme négatif aux appelants, sur le fait que leur projet ne se situe pas en continuité de l'agglomération existante, le maire de Cucq n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de ces dispositions.

11. Il résulte de l'instruction que le maire de Cucq aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur les deux motifs évoqués aux points 4 à 10, qui justifient à eux seuls le certificat d'urbanisme négatif délivré à M. A...et à Mme I.... Dès lors, et malgré l'erreur d'appréciation, relevée au point 3, affectant le dernier motif de cette décision, fondé sur les dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que celle-ci est entachée d'illégalité.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...et Mme I...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Cucq, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A...et à Mme I...de la somme qu'ils demandent sur ce fondement.

14. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... et de Mme I...le versement à la commune de Cucq de la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de cet article.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...et Mme I...est rejetée.

Article 2 : M. A...et Mme I...verseront la somme globale de 1 500 euros à la commune de Cucq au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., à Mme G...I...et à la commune de Cucq.

N°16DA01991 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01991
Date de la décision : 31/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles générales d'utilisation du sol - Règles générales de l'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Charles-Edouard Minet
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : BODART

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-31;16da01991 ?
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