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11/12/2018 | FRANCE | N°17DA00706

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 17DA00706


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, avec son épouse, au titre de l'année 2007 et de la période du 1er janvier au 30 septembre 2008 ainsi que la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti séparément pour ses revenus du 1er octobre au 31 décembre 2008.

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n jugement n° 1401860 du 23 février 2017, le tribunal administratif de Rouen a pronon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, avec son épouse, au titre de l'année 2007 et de la période du 1er janvier au 30 septembre 2008 ainsi que la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti séparément pour ses revenus du 1er octobre au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1401860 du 23 février 2017, le tribunal administratif de Rouen a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 avril 2017 et 26 octobre 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 février 2017 en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2°) de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2007 et 2008 ;

3°) de moduler le taux de la pénalité qui a été appliquée sur le fondement des dispositions de l'article 1728 du code général des impôts aux suppléments de droits à l'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre de l'année 2008 en ramenant ce taux de 40% à 10%.

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rodolphe Féral,

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à la suite de la vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mars 2006 au 28 février 2010 dont a fait l'objet la société Air Vibration Services (AVS) dont il détient 40% des parts. M. et Mme B...se sont vus adresser une proposition de rectification en date du 10 décembre 2010 portant sur les revenus des années 2007 à 2009. Par une décision du 31 janvier 2013, l'administration fiscale a admis partiellement la réclamation par laquelle ils sollicitaient leur imposition séparée à compter du 1er octobre 2008. En conséquence, l'administration fiscale a prononcé un dégrèvement de l'imposition commune pour l'année 2009 et la période du 1er octobre au 31 décembre 2008. Une nouvelle proposition de rectification en date du 14 décembre 2012 a été adressée à M. B...concernant ses revenus personnels de l'année 2009. Par une nouvelle réclamation du 2 octobre 2012, M. B...a contesté les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti pour ses seuls revenus au titre de la période du 1er octobre au 31 décembre 2008 et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre de l'année 2007 et de la période du 1er janvier au 30 septembre 2008. Cette réclamation ayant été rejetée par décision du 28 mars 2014, M. B...a saisi le tribunal administratif de Rouen d'une requête tendant à la réduction des impositions visées dans sa réclamation du 2 octobre 2012. Par un jugement du 23 février 2017 le tribunal administratif de Rouen a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B...à hauteur du dégrèvement d'un montant de 19 936 euros intervenu en cours d'instance correspondant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti séparément pour ses seuls revenus au titre de la période du 1er octobre au 31 décembre 2008 et a rejeté le surplus de ses conclusions. M. B...relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 23 juin 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur général des finances publiques a prononcé un dégrèvement d'un montant de 1 399 euros en droits et 728 euros de pénalités au titre de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. B...a été assujetti au titre de l'année 2007, un dégrèvement de 1 293 euros en droits et 753 de pénalités au titre des prélèvements sociaux de l'année 2007 et un dégrèvement d'un montant de 564 euros en droits et 266 euros de pénalités au titre des prélèvements sociaux de l'année 2008. Ces dégrèvements correspondent d'une part à la non application de la majoration d'assiette de 25% pour l'établissement des contributions sociales assises sur les rémunérations et les avantages et, d'autre part, à l'admission de la facture du 31 janvier 2007 d'un montant 2 798,64 euros comme dépense exposée dans l'intérêt de la société AVS et ne pouvant, en conséquence, être qualifiée de revenu distribué entre les mains de M.B.... Les conclusions de la requête de M. B...sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... 1° les frais généraux de toute nature (...) 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : (...) / e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; (...) /Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués... 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices... ". Enfin, aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

4. Ces dispositions font obligation à l'administration fiscale, lorsqu'elle estime devoir imposer un associé qui, comme en l'espèce, n'a pas accepté le redressement de son imposition à l'impôt sur le revenu, d'apporter la preuve de l'appréhension par l'intéressé des sommes qu'elle a regardées comme distribuées par la société, ainsi que la preuve de l'existence et du montant des distributions. Lorsque les sommes en cause proviennent de la remise en cause, au niveau de la société, du caractère déductible du montant de charges comptabilisées comme des cadeaux d'entreprises, l'administration fiscale apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis justifiant du caractère personnel de ces dépenses pour l'associé. Dans l'hypothèse ou l'administration fiscale s'acquitte de cette obligation, il incombe alors à l'associé, s'il s'y croit fondé, d'apporter des éléments contraires de nature à justifier que ces dépenses ont été exposées non dans son intérêt personnel, mais dans celui de la société.

5. Il est constant qu'en application des dispositions précitées, le service vérificateur a imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers entre les mains de M.B..., les sommes de 20 069 euros et 13 531 euros, comptabilisées par la société AVS en charges au compte 6234 " cadeaux à la clientèle ", au titre respectivement des années 2007 et 2008. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale, qui ne conteste pas l'existence même de ces cadeaux, se borne à faire valoir, pour démontrer que ces dépenses présentaient un caractère personnel pour M.B..., que dans leur majorité elles correspondent à des produits d'équipement ménager, de téléphonie, de télévision ou d'informatique, produits sans lien direct avec l'activité de la société AVS, et que lorsque M. B...a quitté le domicile conjugal et a déménagé, différentes factures portant sur ces produits ont été comptabilisées alors qu'elles présentaient un caractère intrinsèquement personnel. Toutefois, la circonstance que les produits en cause soient sans lien avec l'activité de l'entreprise ne permet pas d'établir qu'ils n'auraient pas néanmoins constitué des cadeaux offerts par l'entreprise à des clients et qu'ils constitueraient des dépenses personnelles de l'un des associés. En outre, la circonstance que M. B...ait quitté le domicile conjugal en 2008 ne suffit pas à elle seule à démontrer le caractère personnel des dépenses en litige pour l'ensemble des années 2007 et 2008. Au contraire, M. B...produit la copie des factures afférentes à ces dépenses et un tableau détaillé dans lequel apparaît le nom des bénéficiaires de chacune d'elles, leur fonction au sein de leur entreprise cliente de la société AVS ainsi qu'un document sur lequel figure l'évolution du chiffre d'affaires entre la société AVS et ces sociétés clientes. Ainsi, au regard de ces éléments suffisamment précis et détaillés, alors que l'administration fiscale n'apporte aucun élément suffisamment probant permettant d'établir que les dépenses auraient été exposées dans l'intérêt personnel de M. B..., cette dernière ne peut être regardée comme apportant la preuve dont elle a la charge de l'appréhension par l'intéressé des sommes qu'elle a regardées comme distribuées. Par suite, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a imposé entre ses mains les sommes de 20 069 euros et 13 531 euros comme revenus distribués en application des dispositions citées au point précédent.

Sur les pénalités :

6. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration entraine l'application d'une majoration de " (...) / b. 40% lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée sous pli recommandé, d'avoir à produire dans ce délai ; ".

7. Il est constant que M. et Mme B...ont déposé leur déclaration de revenus de l'année 2008 plus de trente jours après l'envoi d'une mise en demeure de déposer ladite déclaration. Ainsi, l'administration fiscale a pu légalement appliquer la majoration de 40% prévue par les dispositions citées au point précédent. Par ailleurs, le juge de l'impôt exerce un plein contrôle sur les faits invoqués par l'administration fiscale pour appliquer la pénalité prévue par ces dispositions et décide, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir cette pénalité, sans pouvoir en moduler le taux, soit d'en prononcer la décharge. Par suite, M. B...n'est pas recevable à demander au juge de l'impôt de moduler la pénalité qui a été appliquée sur le fondement du b de l'article 1728 du code général des impôts en raison des circonstances particulières qu'il invoque.

8. Compte tenu de ce qui a été dit au point 5, les pénalités pour manquement délibéré afférentes aux rehaussements des années 2007 et 2008 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers doivent être déchargées, par voie de conséquence, de la décharge ainsi prononcée.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.

Sur les frais liés au litige :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B...d'une part, en ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007, à concurrence de la somme de 1 399 euros en droits et 728 euros de pénalité, et d'autre part, en ce qui concerne les cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008, à hauteur respectivement de 1 293 euros en droits et 753 euros de pénalité et 564 euros en droits et 266 euros de pénalité.

Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles M. et Mme B...ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 sont réduites respectivement d'une somme de 20 069 euros et 13 531 euros.

Article 3 : Il est accordé à M. et Mme B...une décharge en droit et pénalités correspondant à la réduction de base définie à l'article 2.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 23 février 2017 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°17DA00706


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00706
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Divers.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MAUBANT SARRAZIN VIBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-11;17da00706 ?
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