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11/12/2018 | FRANCE | N°17DA00907

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 17DA00907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...E..., représentante légale de sa fille mineureD..., a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1604158 du 16 mars 2017 le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 mai 2

017, le 1er décembre 2017, le 28 février 2018 et le 15 novembre 2018, Mme B...E..., tant en son no...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...E..., représentante légale de sa fille mineureD..., a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1604158 du 16 mars 2017 le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 mai 2017, le 1er décembre 2017, le 28 février 2018 et le 15 novembre 2018, Mme B...E..., tant en son nom propre qu'en tant que représentante légale de sa fille mineureD..., représentée par Me Weber, avocat demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 mars 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités afférentes ;

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public ;

- les observations de Me Weber, représentant Mme B...E....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de vérifications de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 dont ont fait l'objet les sociétés SEPRA, TECHNIMAT, et TRANSLOC, filiales de la SAS Sirmione Participation dirigées par la requérante, Mme B...E..., l'administration fiscale a réintégré dans le bénéfice de ces sociétés des sommes respectives de 246 386 euros, 246 696 euros et de 800 550 euros, soit une somme totale de 1 293 632 euros. Cette somme correspond à la remise en cause d'une charge exceptionnelle passée en raison de la non-perception d'une indemnité d'assurance-vie exigible du fait du décès en 2003 de M. A...C..., à l'époque dirigeant de ces sociétés, alors que celles-ci avaient versé les primes d'assurance lors de la souscription du contrat en 1994. Cette charge exceptionnelle a été comptabilisée en 2009, dès lors que ce n'est que par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 22 octobre 2009 que D...Le Foll, fille de Mme B...E..., a été définitivement désignée comme bénéficiaire de ce contrat d'assurance, souscrit par son père M. A...C...au bénéfice des trois sociétés en 1994, celui-ci ayant ensuite désigné sa fille mineure, D...C..., comme seule bénéficiaire et un litige opposant les sociétés à cette dernière ayant été engagé devant les juridictions judiciaires à compter de 2004. L'indemnité d'assurance a finalement été versée à D...Le Foll, fille mineure de Mme B...E...en mars 2010 par la compagnie d'assurance Aviva. Estimant que le versement à D...Le Foll, tiers vis-à-vis des entreprises, d'une indemnité résultant de primes acquittées par les sociétés constituait un acte anormal de gestion de ces sociétés, l'administration a regardé les sommes en question comme un avantage occulte au profit de D...Le Foll, rattachée fiscalement à Mme B...E..., sa mère, et les a taxées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, le supplément d'imposition en résultant étant de 1 272 137 euros. Mme B...E...relève appel du jugement du 16 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 31 juillet 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme B...E...a été assujettie au titre de l'année 2010, à concurrence d'une somme de 39 779 euros, en droits, et 18 935 en pénalités soit un total de 58 714 euros. Les conclusions de la requête relatives à cette imposition sont, ainsi dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics :

3. Si, tout au long de la procédure contentieuse, Mme B...E...a indiqué agir en qualité de représentant légal de sa fille mineureD..., elle a néanmoins toujours précisé, d'une part, demander la décharge des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales " mis à sa charge " au titre de l'année 2010 et, d'autre part, contester la réponse apportée à la réclamation préalable qu'elle avait présentée en son nom propre en tant que contribuable. Dans ces conditions, aussi bien en appel que devant le tribunal, la requérante, en utilisant la formule " en qualité de représentant légal de sa filleD... ", doit être regardée comme ayant en réalité entendu agir en son nom propre mais pour contester les rehaussements concernant des sommes qu'elle estime perçues par son foyer fiscal pour le compte de sa fille mineure. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics tirée du défaut de qualité pour agir de Mme D...C...à l'encontre des impositions supplémentaires mises à la charge de sa mère doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

5. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Pour l'impôt sur le revenu (...), le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) ". Aux termes de l'article 47 de l'annexe II au code général des impôts : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. ".

6. En vertu des dispositions combinées des articles 39 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale, opérations que, par suite, l'administration peut remettre en cause sans méconnaître la liberté de gestion de l'entreprise.

7. Ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, prenant acte de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 22 octobre 2009, les sociétés SEPRA, TECHNIMAT, et TRANSLOC ont inscrit en charge exceptionnelle, au titre de leurs exercices clos en 2009, les sommes respectives de 246 386 euros, de 246 696 euros, et de 800 550 euros, soit une somme totale de 1 293 322 euros. La passation de ces écritures correspond à la traduction comptable de la renonciation par ces sociétés à la perception du capital décès qu'elles comptaient jusque-là percevoir si avait été confirmé le jugement du 4 juillet 2008 par lequel le tribunal de grande instance de Nanterre les avait reconnues bénéficiaires de l'assurance-vie souscrite par leur ancien dirigeant, décédé en 2003. Le rehaussement des bases d'imposition de la société Sirmione Participation, société mère de ces trois sociétés, effectué au titre de 2009 résulte de la constatation, par l'administration, du fait que ces abandons de créance ont été effectués au profit de Mme D...C..., tiers aux trois entreprises et non dans l'intérêt d'une gestion normale de ces sociétés. Or, si c'est en 2010 que Mme B...E...a perçu au nom de sa fille les capitaux décès, versés par la société Aviva, résultant du dénouement des trois contrats d'assurance-vie souscrits par les sociétés mentionnées ci-dessus, toutefois, le fait générateur des revenus regardés comme distribués à la requérante en tant qu'avantage occulte, sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts n'est pas constitué par la perception, en 2010, de l'indemnité d'assurance mais par la renonciation, en 2009, des trois sociétés à la créance représentative de cette indemnité. Dès lors, ces abandons de créance ayant été comptabilisés dans les exercices clos le 31 décembre 2009, les dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales faisaient obstacle à ce qu'ils puissent être remis en cause par la proposition de rectification reçue par Mme B...E...le 30 janvier 2013, après expiration du délai de reprise, le 31 décembre 2012. Il suit de là que Mme B...E...est fondée à soutenir que le fait générateur de l'imposition étant intervenu au cours d'une période prescrite, l'administration ne pouvait exercer son droit de reprise.

8. Il résulte tout de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, Mme B...E...est fondée à soutenir que c'est à tort que, s'agissant des sommes demeurant....

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B... E...à concurrence du dégrèvement, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2010, pour un montant total de 58 714 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif du 16 mars 2017 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 3 : Mme B...E...est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités afférentes.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...E...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°17DA00907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00907
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CABINET WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-11;17da00907 ?
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