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22/01/2019 | FRANCE | N°17DA00325

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 22 janvier 2019, 17DA00325


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Swisslife assurances de biens a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner solidairement la Métropole européenne de Lille et son assureur, la compagnie Generali à lui rembourser la somme de 39 478 euros qu'elle a versée à la SARL Café du stade, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2008 et capitalisation de ces intérêts pour deux sinistres causés par l'insuffisance d'absorption des eaux pluviales par le réseau de voirie et réseaux divers (VRD) sur le

domaine public et de mettre à la charge solidaire de la Métropole européenne de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Swisslife assurances de biens a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner solidairement la Métropole européenne de Lille et son assureur, la compagnie Generali à lui rembourser la somme de 39 478 euros qu'elle a versée à la SARL Café du stade, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2008 et capitalisation de ces intérêts pour deux sinistres causés par l'insuffisance d'absorption des eaux pluviales par le réseau de voirie et réseaux divers (VRD) sur le domaine public et de mettre à la charge solidaire de la Métropole européenne de Lille et de la compagnie Generali une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1306445 du 16 décembre 2016 le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2017 et le 22 octobre 2018, la société Swisslife assurances de biens, représentée par Me B...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner solidairement la Métropole européenne de Lille et son assureur, la compagnie Generali IARD, à lui rembourser la somme de 39 478 euros qu'elle a versée à la SARL Café du stade, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2008 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 2 juin 2009 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la Métropole européenne de Lille et de la compagnie Generali une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des assurances ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant la société Swisslife assurances de biens et de MeC..., représentant la Métropole européenne de Lille (MEL) et de la Compagnie Generali lard.

Considérant ce qui suit :

1. La société Swisslife assurances de biens, assureur de la SARL Café du stade qui a subi un premier sinistre le 20 juillet 2007 puis un second le 2 juin 2008, causés par l'eau résultant d'un " refoulement d'égout ", relève appel du jugement du 16 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes de condamnation solidaire de la Métropole européenne de Lille et de son assureur, la compagnie Generali lard en réparation des dommages subis.

Sur l'absence d'acquiescement aux faits :

2. En vertu de l'article R. 612-6 du code de justice administrative, la partie défenderesse qui n'a produit aucun mémoire, malgré une mise en demeure, est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. En l'espèce, si les défendeurs n'ont pas produit, devant la cour, de mémoire en réponse dans les délais fixés par la mise en demeure qui leur a été adressée à cet effet, ils ne peuvent pour autant, être réputés avoir acquiescé aux faits dès lors qu'ils ont produit des observations en défense. Ainsi, la Métropole européenne de Lille (MEL) et la Compagnie Generali lard ne sauraient être regardées comme ayant acquiescé aux faits exposés dans les écritures de la requérante.

Sur la régularité du jugement attaqué en tant qu'il a statué sur les conclusions en indemnisation du sinistre du 2 juin 2008 :

3. Aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. / (...) ". Il en résulte qu'il incombe à l'assureur qui entend bénéficier de la subrogation prévue par l'article précité du code des assurances d'apporter la preuve du versement de l'indemnité d'assurance à son assuré et ce, par tout moyen.

4. La société Swisslife assurances de biens a produit un relevé bancaire permettant de vérifier que la somme de 19 905,05 euros versée par chèque bancaire du 22 juin 2011 à son assurée, au titre du sinistre du 2 juin 2008, a bien été décaissée de ses comptes au profit de celle-ci. Elle démontre ainsi, avoir versé à la SARL Café du stade une indemnité. Dès lors, la demande de la société Swisslife assurances de biens est recevable et elle est fondée à soutenir, par les pièces qu'elle produit en appel, que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle ne justifiait pas de sa qualité de subrogée de la SARL Café du stade dans les droits de son assurée s'agissant du sinistre du 2 juin 2008 et a rejeté comme irrecevable sa demande de condamnation de la Métropole européenne de Lille et de son assureur au titre de ce sinistre.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Métropole européenne de Lille et de son assureur dans cette mesure, la cour étant pour le reste saisie par la voie de l'effet dévolutif de l'appel.

Sur l'exception de prescription quadriennale s'agissant du sinistre du 20 juillet 2007 :

6. Aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ;/ Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; / Toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a pas été exactement désigné./ Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption (...). " ". Aux termes de l'article 3 de la loi précitée : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968 que la connaissance par la victime de l'existence d'un dommage ne suffit pas à faire courir le délai de la prescription quadriennale. Le point de départ de cette dernière est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine de ce dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l'administration.

7. Il résulte de l'instruction que la SARL Café du stade a eu connaissance de l'existence et de l'étendue du risque dès le 20 juillet 2007, et qu'elle a été informée de l'origine du sinistre, dès le dépôt du procès verbal et du rapport d'expertise, les 5 octobre et 21 novembre 2007, les deux experts commis par la SARL Café du stade et son assureur la société Swisslife assurances de biens ayant relevé que les dégâts causés par l'eau résultent du " refoulement d'égout " par la cuvette des toilettes par mise en charge en raison de pluies diluviennes. Dès lors, dès cette dernière date, la société Swisslife assurances de biens disposait d'indications établissant suffisamment l'imputabilité de ce dommage au fonctionnement du réseau d'assainissement public relevant de la Métropole européenne de Lille maître d'ouvrage du réseau. Ainsi, le délai de prescription quadriennale a commencé à courir à compter du 1er janvier 2008 et a expiré le 31 décembre 2011. Par suite, l'exception de prescription quadriennale, opposée par la présidente de la Métropole européenne de Lille par lettre du 27 juillet 2016, doit être accueillie.

Sur la responsabilité s'agissant du sinistre du 2 juin 2008 :

8. Même sans faute de sa part, le maître de l'ouvrage est intégralement responsable des dommages causés aux tiers par les ouvrages publics dont il a la garde, en raison tant de leur existence que de leur entretien ou de leur fonctionnement. Il n'en va différemment que si ces dommages sont, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure. La SARL Café du stade étant un tiers par rapport aux ouvrages publics en cause le régime juridique précité lui est applicable.

9. La société Swisslife assurances de biens fait valoir qu'un rapport établi à sa demande le 6 mars 2009 par le cabinet Gab Robbins relève que l'eau a été refoulée malgré l'existence d'un clapet anti retour sans doute bloqué, l'eau provenant de la chaussée par les soupiraux.

10. Il résulte toutefois de l'instruction que le cabinet Equad a relevé dans son rapport du 11 août 2008 que, malgré ses demandes répétées, aucun dispositif de clapet anti retour n'a été présenté, de telle sorte que les dommages doivent être entendus comme résultant de la faute que l'intéressée a commise en ne munissant pas son installation intérieure d'un dispositif de protection, alors qu'elle avait déjà subi, le 20 juillet 2007, un premier sinistre dû à cette absence de protection et qu'elle avait ainsi disposé du temps nécessaire pour prendre les mesures nécessaires, en dotant son installation intérieure d'un tel clapet, comme le prévoient le règlement d'assainissement de la Métropole européenne de Lille et le règlement sanitaire du département du Nord. S'agissant de l'eau qui serait provenue de la chaussée par les soupiraux, ce que contestent les défendeurs, si le rapport précité du 6 mars 2009 affirme que cet écoulement serait imputable à la modification par la Métropole européenne de Lille de ces soupiraux lors de travaux de réfection de la chaussée, il résulte des productions photographiques annexées à ce rapport, que ces soupiraux étaient posés directement au niveau du sol, en dehors du domaine public, au droit de la voirie publique de telle sorte qu'en l'absence de batardeaux, rendus pourtant nécessaires pour éviter une inondation, ils risquaient de servir d'exutoire à l'eau de ruissellement de la voie publique. Il appartenait ainsi, en tout état de cause, à la SARL Café du stade de se prémunir de toute pénétration d'eau en rehaussant le niveau des soupiraux par rapport à la chaussée. Si la société requérante affirme qu'il existait des dispositifs de protection des soupiraux qui auraient été supprimés lors des travaux de réfection de la chaussée, ce qui est contesté en défense, elle ne l'établit pas. Par suite, la société Swisslife assurances de biens ne peut utilement invoquer un prétendu défaut dont le réseau d'assainissement serait affecté.

11. Il résulte de ce tout qui précède que la société Swisslife assurances de biens n'est pas fondée à demander auprès de la Métropole européenne de Lille et de son assureur, l'indemnisation de ses préjudices résultant des sinistres de 2007 et 2008.

Sur les frais liés au litige :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

13. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par la société Swisslife assurances de biens doivent dès lors être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Swisslife assurances de biens une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la Métropole européenne de Lille (MEL) et la Compagnie Generali lard, et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1306445 du 16 décembre 2016 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande s'agissant du sinistre du 2 juin 2008.

Article 2 : La demande de la Société Swisslife assurances de biens présentée devant le tribunal administratif de Lille et tendant à la réparation du préjudice subi par la SARL Café du Stade à raison du sinistre du 2 juin 2008 et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : La société Swisslife assurances de biens versera à la Métropole européenne de Lille (MEL) et à la Compagnie Generali lard une somme globale de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Swisslife assurances de biens, à la Métropole européenne de Lille (MEL) et à la Compagnie Generali lard.

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N°17DA00325


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