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31/01/2019 | FRANCE | N°16DA00448

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 31 janvier 2019, 16DA00448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Entreprise Villemonteil a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry à lui verser la somme 233 814 euros hors taxes, soit 279 641,54 euros toutes taxes comprises, au titre des travaux supplémentaires réalisés dans le cadre du lot n°6 du marché de construction de l'extension nord-est du centre hospitalier.

Par un jugement n° 1205779 du 28 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 février 2016, et un mémo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Entreprise Villemonteil a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry à lui verser la somme 233 814 euros hors taxes, soit 279 641,54 euros toutes taxes comprises, au titre des travaux supplémentaires réalisés dans le cadre du lot n°6 du marché de construction de l'extension nord-est du centre hospitalier.

Par un jugement n° 1205779 du 28 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 février 2016, et un mémoire en réplique, enregistré le 11 octobre 2018, la SAS Entreprise Villemonteil, représentée par Me C...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'arrêter le montant total du décompte général définitif à la somme de 1 285 420,35 euros hors taxes, soit 1 537 362,74 euros toutes taxes comprises ;

3°) de condamner le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry à lui verser la somme de 233 814 euros hors taxes, soit 279 641,54 euros toutes taxes comprises, au titre des travaux supplémentaires réalisés dans le cadre du lot n°6 du marché de construction de l'extension nord-est du centre hospitalier ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me D...A..., représentant le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement du 13 novembre 2008, le centre hospitalier de Béthune a confié à la SAS Entreprise Villemonteil le lot n° 6 " Plâtrerie " du marché relatif à l'extension nord-est du centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry pour un montant total de 1 168 335, 92 euros toutes taxes comprises. L'exécution du marché a débuté le 16 janvier 2009 à la suite de la notification de l'ordre de service n° 1. Par un courrier du 4 juillet 2011, la SAS Entreprise Villemonteil a formé une réclamation préalable auprès de la maîtrise d'oeuvre de l'opération portant sur des travaux supplémentaires s'élevant à la somme de 233 814 euros hors taxes, soit 279 641,54 euros toutes taxes comprises. Par un courrier notifié le 19 juillet 2011 à la SAS Entreprise Villemonteil, la maîtrise d'oeuvre a rejeté ladite réclamation. Par un nouveau courrier recommandé du 11 octobre 2011, la SAS Entreprise Villemonteil a adressé la même réclamation directement au centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry, maître d'ouvrage de l'opération, qui n'y a pas répondu. Le 9 juillet 2012, la SAS Entreprise Villemonteil a adressé au maître d'oeuvre et au maître d'ouvrage une nouvelle réclamation ayant le même objet que les précédentes, également restée sans suite. La SAS Entreprise Villemonteil relève appel du jugement du 28 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry à lui verser la somme 233 814 euros hors taxes, soit 279 641,54 euros toutes taxes comprises, au titre des travaux supplémentaires réalisés dans le cadre du marché précité.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry :

2. Aux termes du paragraphe 11 de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction applicable au présent litige, auquel renvoie l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières : " Si un différend survient entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur sous forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, l'entrepreneur doit remettre au maître d'oeuvre un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses réclamations ". Aux termes du paragraphe 12 du même article : " Après que ce mémoire a été transmis par le maître d'oeuvre, avec son avis, à la personne responsable du marché, celle-ci notifie ou fait notifier à l'entrepreneur sa proposition pour le règlement du différend dans un délai de deux mois à compter de la date de réception par le maître d'oeuvre du mémoire de réclamation. L'absence de proposition dans ce délai équivaut à un rejet de la demande de l'entrepreneur ", et aux termes du paragraphe 21 du même article : " Lorsque l'entrepreneur n'accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion dans un délai de trois mois à compter de cette proposition ou à l'expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission au maître de l'ouvrage, un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus ".

3. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 18 juillet 2011 notifié à la SAS Entreprise Villemonteil le 19 juillet 2011, le maître d'oeuvre a rejeté la réclamation que cette société lui avait adressée par un courrier du 4 juillet 2011 et lui a transmis une proposition pour le règlement du différend en application des dispositions du paragraphe 12 de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales. En application des dispositions du paragraphe 21 du même article, la SAS Entreprise Villemonteil disposait alors d'un délai de trois mois à compter de la réception de cette proposition, pour faire connaître au centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry son refus d'accepter cette proposition en lui faisant parvenir un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus, ce qu'elle a fait par un courrier du 11 octobre 2011, soit dans le délai imparti. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la réclamation formée par la SAS Entreprise Villemonteil auprès du centre hospitalier Germont et Gauthier de Béthune-Beuvry manque en fait et doit être écartée.

Sur l'indemnisation des travaux supplémentaires :

4. Le titulaire d'un marché à prix forfaitaire a droit au paiement des travaux supplémentaires qui, bien qu'ils aient été réalisés sans ordre de service du maître d'ouvrage, ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art.

5. En premier lieu, il résulte des termes de l'article 6.3 du cahier des clauses techniques particulières (" CCTP ") que la localisation des puits de lumière est " En circulation (...) En locaux (...) suivant indications des plans ". En outre, aux termes de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières : " Les plans et le CCTP définissent l'ouvrage et ses performances. (...) Toute éventuelle discordance existant entre les différentes pièces constituant le dossier devra avoir été confirmée par une note annexe, signalant les éventuelles contradictions, jointe à la soumission de l'entreprise. (...) S'il subsistait, après signature du marché, quelques omissions ou erreurs dans le CCTP, l'entrepreneur sera tenu de les réparer et d'exécuter sans supplément de prix, les travaux indispensables à la finition des bâtiments, par analogie avec ce qui est décrit, en accord avec le maître d'oeuvre. Les cotes, dimensions, sections, quantités et références sont données à titre indicatif dans les pièces et documents du dossier Marché. Elles doivent être vérifiées par l'entrepreneur et précisées dans les documents, plans et calepins d'exécution établis par l'entreprise pendant la période de préparation. ". La SAS Entreprise Villemonteil sollicite l'octroi d'une somme de 33 539 euros hors taxes au titre de la réalisation de puits de lumière supplémentaires situés dans une zone de faux-plafonds démontables et sur des ouvrages non repérés sur les plans, et se borne à faire valoir à nouveau en cause d'appel, à l'appui de sa réclamation, que l'article 6.3 du cahier des clauses techniques particulières ne prévoyait pas les puits de lumière dans les zones de faux-plafonds démontables. Toutefois, il résulte des stipulations précitées qu'il appartenait à la SAS Entreprise Villemonteil, qui reconnaît n'avoir chiffré dans son offre technique que " les remontées au droit des plafonds prévus en BA 13, considérant que les remontées au droit des zones prévues en 600 x 600 étaient dans le lot faux-plafond ", de faire valoir en temps utile toute discordance éventuelle entre le CCTP et les plans, ce qu'elle n'a pas fait, alors, au demeurant, qu'elle s'était également portée candidate pour le lot n° 9 relatif aux faux-plafonds. En outre, elle n'apporte en cause d'appel, pas plus qu'en première instance, aucune information sur la date de réalisation de ces travaux ni aucune pièce utile pour en démontrer la consistance ou le coût alors que le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry persiste à les contester tant dans leur principe que dans leur quantum en défense. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que lesdits travaux n'auraient pas déjà été inclus dans les prestations que la SAS Entreprise Villemonteil était tenue de fournir pour l'exécution du lot n° 6. La SAS Entreprise Villemonteil n'est, par suite, pas fondée à demander l'indemnisation de ces travaux.

6. En deuxième lieu, la SAS Entreprise Villemonteil sollicite à nouveau en cause d'appel l'octroi d'une somme de 137 797,78 euros hors taxes au titre de la pose de gaines " Promat " sur la totalité des ouvrages réalisés. Elle soutient que le cahier des clauses techniques particulières prévoyait pour les gaines verticales un carreau de plâtre, recouvert d'une plaque avec un procédé pour ce type d'utilisation, alors que pour les gaines horizontales, il était prévu un système de plaques de plâtre d'épaisseur 25 mm et qu'elle a, en conséquence, été contrainte d'exécuter l'ensemble des liaisons en gaine " Promat " dès lors qu'elle a rencontré un problème pour " la liaison de la gaine verticale gaine horizontale car il n'existe pas de PV pour une liaison entre ces deux matériaux différents ". Elle en déduit une différence de coût entre les matériaux décrits et les matériaux posés, qu'elle chiffre à la somme précitée. Toutefois, il résulte de l'instruction, en particulier des termes du compte rendu de la réunion de chantier du 16 juillet 2009, que la SAS Entreprise Villemonteil " passe tous les DF (conduits et gaines) en Promat ", que, par un avenant n° 2 du 13 septembre 2010, le centre hospitalier de Béthune a notamment intégré la " mise en conformité de la gaine AF existante en circulation D21 par la réalisation d'une gaine 4 faces en Promat -cf FTM 49 - suite à l'avis du contrôleur technique ", dans la zone des urgences, et que, par un avenant n° 3 du 29 novembre 2011, la prestation de " TM214 Dévoiement gaine Promat RDC Radio " a aussi été intégrée au marché. Il résulte de ces éléments que la SAS Entreprise Villemonteil a accepté de réaliser l'ensemble des prestations dues au titre du marché en gaines " Promat " et qu'elle a déjà été indemnisée des travaux supplémentaires effectués à ce titre par les deux avenants précités, ce qu'elle ne conteste pas utilement. En outre, en se bornant à faire valoir qu'il y aurait " clairement une erreur de conception de la maîtrise d'oeuvre dans sa description " et qu'il lui était " absolument impossible dans le délai d'étude de détecter de telles erreurs ", elle n'établit pas non plus les erreurs alléguées. Par suite, les prétentions de la SAS Entreprise Villemonteil à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.

7. En troisième lieu, la SAS Entreprise Villemonteil sollicite l'octroi d'une somme de 32 476,50 euros hors taxes, au titre de travaux supplémentaires issus de modifications des plans par zone n'ayant pas fait l'objet d'une fiche de travaux modificatifs. Toutefois, il résulte de l'instruction que la SAS Entreprise Villemonteil n'a pas fourni à l'appui de sa réclamation sur ces travaux supplémentaires les plans détaillés les faisant apparaître, alors, au demeurant, que ces plans ont été demandés par le maître d'oeuvre dès son courrier du 18 juillet 2011. Elle n'établit pas davantage que les travaux réalisés dans la zone " hémodialyse " et la zone " galeries " n'étaient pas prévus dans le cahier des clauses techniques particulières. Enfin, la SAS Entreprise Villemonteil ne démontre pas plus en cause d'appel la réalisation de ces travaux supplémentaires. Dès lors, les prétentions de la SAS Entreprise Villemonteil à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.

8. En quatrième lieu, la SAS Entreprise Villemonteil demande à nouveau en cause d'appel l'octroi d'une somme de 20 000 euros hors taxes au titre du compte prorata et la somme de 10 000 euros hors taxes au titre d'études qui seraient induites par les travaux supplémentaires précités. Toutefois, elle se borne à solliciter une indemnisation globale et ne fournit aucun élément permettant d'établir la réalité de ces prestations, alors que celles-ci sont contestées, tant dans leur principe que dans leur quantum, par le centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry en défense. Par suite, les prétentions de la SAS Entreprise Villemonteil à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.

9. En dernier lieu, s'agissant des autres demandes de la SAS Entreprise Villemonteil, celle-ci se borne à énumérer des devis qui n'auraient pas été acceptés en totalité par la maîtrise d'oeuvre et ne détaille, pas plus en cause d'appel qu'en première instance, ni la nature ni l'étendue des différents chefs de préjudice dont elle se borne à solliciter l'indemnisation. Par suite, les prétentions de la SAS Entreprise Villemonteil à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Entreprise Villemonteil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SAS Entreprise Villemonteil demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Entreprise Villemonteil la somme de 2 000 euros à verser au centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Entreprise Villemonteil est rejetée.

Article 2 : La SAS Entreprise Villemonteil versera au centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Entreprise Villemonteil et au centre hospitalier Germon et Gauthier de Béthune-Beuvry.

N°16DA00448 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00448
Date de la décision : 31/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Indemnités. Travaux supplémentaires.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MAURY CHAGNAUD CHABAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-01-31;16da00448 ?
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