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23/04/2019 | FRANCE | N°16DA01285-16DA01293

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 16DA01285-16DA01293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Brenouille a demandé au tribunal administratif d'Amiens, par deux requêtes distinctes, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 73 297 euros, majorée des intérêts de droits à compter du jugement à intervenir, à raison du préjudice financier qu'elle a subi du fait de la mauvaise évaluation de la taxe foncière de la station d'épuration située sur son territoire pour les années 2009 à 2014.

Par un jugement commun n° 1400243 et 1502136 du 12 mai 2016, le tribunal administratif

d'Amiens a joint les deux requêtes et a renvoyé la commune de Brenouille devant l'ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Brenouille a demandé au tribunal administratif d'Amiens, par deux requêtes distinctes, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 73 297 euros, majorée des intérêts de droits à compter du jugement à intervenir, à raison du préjudice financier qu'elle a subi du fait de la mauvaise évaluation de la taxe foncière de la station d'épuration située sur son territoire pour les années 2009 à 2014.

Par un jugement commun n° 1400243 et 1502136 du 12 mai 2016, le tribunal administratif d'Amiens a joint les deux requêtes et a renvoyé la commune de Brenouille devant l'administration des finances publiques pour le calcul de l'indemnisation du préjudice de ne pas avoir perçu la taxe sur les propriétés bâties pour les années 2009 à 2014 qui aurait dû être mise en recouvrement conformément aux motifs du jugement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet 2016 et 22 mars 2019, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, sous le n° 16DA01285, la commune de Brenouille, représentée par Me Lequillerier, avocat demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 mai 2016 en tant qu'il a limité le montant de son indemnisation en retenant pour le calcul des cotisations de taxe foncière dont elle a été privée un prix de revient de la station d'épuration de 6 065 350 euros et non 11 795 000 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II. Par une requête enregistrée le 13 juillet 2016 sous le n° 16DA01293, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 mai 2016 ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Brenouille tendant à ce que l'Etat lui verse une somme de 73 297 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lequillerier, représentant de la commune de Brenouille.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 16DA01285 et 16DA01293, dirigées contre le même jugement, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. En conséquence, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

2. La station d'épuration située sur la commune de Brenouille (Oise) dont le syndicat intercommunal pour le transport et le traitement des eaux usées et des réseaux (SITTEUR) est propriétaire a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les années 2009 à 2014. La commune de Brenouille, estimant que le bassin d'orage, le bassin dessableur-dégraisseur, les deux bassins d'aération et les deux bassins de décantation de cette station d'épuration avaient été exclu à tort de l'assiette de la taxe foncière, a contesté, par des lettres des 10 mai 2011, 23 janvier 2012, 11 mai 2021 et 28 octobre 2013, auprès de l'administration fiscale cette exclusion et a demandé à être indemnisée du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la perte de recettes fiscales au titre des années 2009 à 2014 née du refus de l'administration fiscale de réintégrer les bassins litigieux dans l'assiette de la taxe foncière. L'administration fiscale n'a répondu à aucune de ces demandes. En conséquence, la commune de Brenouille a saisi le tribunal administratif d'Amiens de deux demandes tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 73 297 euros en réparation du préjudice financier qu'elle estime avoir subi du fait de l'évaluation erronée des cotisations de taxe foncière des années 2009 à 2014 pour la station d'épuration située sur son territoire. Par jugement du 12 mai 2016, le tribunal a reconnu que les services fiscaux avaient commis une faute dans l'évaluation de la taxe foncière de la station d'épuration située sur le territoire de la commune de Brenouille et a renvoyé cette commune devant l'administration pour le calcul de l'indemnisation du préjudice résultant de l'absence de perception par la commune de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les années 2009 à 2014 qui aurait dû être mise en recouvrement, dont le montant a été fixé par le jugement selon des modalités différentes de celles présentées par la commune. La commune de Brenouille, sous le n° 16DA01285 et le ministre des finances et des comptes publics, sous le n° 16DA01293, relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne leur a donné pas satisfaction.

Sur la régularité du jugement :

3. Le tribunal, après avoir reconnu l'existence d'une faute commise par l'administration fiscale pour ne pas avoir retenu certains bassins de la station d'épuration située sur le territoire de la commune de Brenouille dans l'assiette des cotisations de taxe foncière auxquelles le SITTEUR a été assujetti au titre des années 2009 à 2014, a déterminé les modalités de calcul du montant des cotisations de taxe foncière auxquelles le SITTEUR aurait dû être assujetti au titre de ces années et a renvoyé la commune de Brenouille devant l'administration fiscale pour que soit déterminé " le préjudice éventuellement subi " en tenant compte de ce calcul. Ce faisant, ainsi que le fait valoir le ministre des finances et des comptes publics, le tribunal a méconnu son office pour ne pas s'être assuré de l'existence d'un préjudice pour la collectivité en retenant les modalités de calcul qu'il avait arrêtées, d'autant que le ministre soutenait que, même en intégrant les cuves et bassins litigieux dans l'assiette des cotisations de taxe foncière, la commune n'avait en réalité subi aucun préjudice. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué du tribunal administratif d'Amiens du 12 mai 2016 et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par la commune de Brenouille devant le tribunal administratif.

Sur la responsabilité des services fiscaux :

4. Aux termes de l'article 1380 du code général des impôts : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Enfin, aux termes de l'article 1382 du même code: " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : ... 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ".

5. Il résulte de l'instruction que le bassin d'orage, le bassin dessableur-dégraisseur, les deux bassins d'aération et les deux bassins de décantation de la station d'épuration situés sur le territoire de la commune de Brenouille constituent des ouvrages de maçonnerie réalisés en béton. Ces bassins de diamètres compris entre 6,5 m et 32 m disposent de parois de hauteurs comprises entre 4 et 6 m, pour des contenances variant entre 555 m3 et 4 150 m3 et ont été construits sur le site sans être simplement posés à même le sol. Ainsi, compte tenu de la nature de ces ouvrages, de leur importance et de leur fixité au sol, les bassins en cause doivent être regardés comme une véritable construction entrant dans le champ d'application du 1° de l'article 1381 précité du code général des impôts. En conséquence, et quand bien même ces bassins seraient directement intégrés dans le cycle de transformation des eaux usées comme le soutient l'administration fiscale, ils sont néanmoins exclus de l'exonération prévue par le 11° de son article 1382. Par suite, en n'intégrant pas les bassins en cause dans l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2009 à 2014, alors que la commune de Brenouille lui en avait fait la demande dans le délai de reprise, les services de l'administration fiscale ont commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

Sur le lien de causalité :

6. Il résulte de l'instruction que le préjudice invoqué par la commune de Brenouille, qui correspond à la différence entre le montant des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles le SITTEUR a été assujetti au titre des années 2009 à 2014 à raison de la station d'épuration située sur le territoire de la commune de Brenouille et le montant des cotisations auxquelles le SITTEUR aurait dû être assujetti si ces impositions avaient été établies sans une application erronée de la loi fiscale, trouve sa cause directe et certaine dans la faute de l'administration relevée au point 5.

Sur le préjudice :

7. Aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat ... ". L'article 1500 du même code prévoit toutefois que " Par dérogation à l'article 1499, les bâtiments et terrains industriels qui ne figurent pas à l'actif d'une entreprise industrielle ou commerciale astreinte aux obligations définies à l'article 53-A sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498 ". Enfin, selon cet article 1498 : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. (...) / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. ".

8. Il résulte de ces dispositions que, dès lors que le propriétaire ou l'exploitant de bâtiments et de terrains industriels passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est soumis aux obligations déclaratives définies à l'article 53 A du code général des impôts et que ces immobilisations industrielles figurent à l'actif de son bilan, la valeur locative de ces immobilisations est établie selon les règles fixées à l'article 1499 du code. En outre, dans l'hypothèse où l'absence d'inscription des immobilisations industrielles à l'actif du bilan du propriétaire ou de l'exploitant procède d'une méconnaissance, par celui-ci, de ses obligations comptables, l'administration fiscale est fondée, après avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis le redevable de la taxe foncière à même de présenter ses observations, à corriger de cette omission les éléments déclarés en application des dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, puis à établir la taxe foncière selon les règles fixées à l'article 1499 du même code.

9. Il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que la station d'épuration située sur la commune de Brenouille présente le caractère d'un établissement industriel. Par ailleurs, il est constant que le SITTEUR, établissement public de coopération intercommunale, propriétaire des installations en cause, n'est pas astreint aux obligations de l'article 53 A du code général des impôts. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que les immobilisations industrielles de la station d'épuration figurent ou auraient dû figurer au bilan de la société Lyonnaise des eaux dès lors que les ouvrages nécessaires à l'exploitation de la station d'épuration ont été financés par le SITTEUR, l'Agence de l'eau Seine-Normandie et le conseil général de l'Oise et non par la société Lyonnaise des eaux à qui ils ont seulement été remis dans le cadre d'une convention à charge pour cette société de les exploiter. En conséquence, les immobilisations industrielles de la station d'épuration située sur la commune de Brenouille devaient être évaluées dans les conditions prévues par l'article 1498 du code général des impôts. Par suite, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est pas allégué par les parties que l'ensemble immobilier en litige peut être évalué par comparaison avec des immeubles similaires ou de même nature donnés en location à des conditions de prix normales à la date de référence, il convient, de retenir comme méthode d'évaluation de la station d'épuration la méthode de l'appréciation directe prévue par le 3° de l'article 1498 du code général des impôts et dont les modalités d'application sont précisées par les articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III au même code.

10. Aux termes de l'article de l'article 324 AB de l'annexe III au code général des impôts : " Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. / Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires ". Aux termes de l'article 324 AC de la même annexe : " En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes situés dans la commune même ou dans une localité présentant du point de vue économique une situation analogue à celle de la commune en cause. / La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien. ".

11. Il résulte de l'instruction que, pour établir les cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties dues par le SITTEUR au titre des années 2009 et 2014, l'administration fiscale a retenu comme évaluation des constructions la somme de 11 795 000 euros qui correspond au coût de construction de la station d'épuration située sur le territoire de la commune de Brenouille, cette construction ayant été réalisée entre 2006 et 2008. Dans le calcul de détermination de son préjudice, la commune de Brenouille retient également ce montant de 11 795 000 euros au titre de l'évaluation des constructions de la station d'épuration. L'administration fiscale fait cependant valoir que la valeur à retenir devrait être de 6 065 350 euros et indique qu'en décembre 2011, le SITTEUR a produit " une décomposition du prix global et forfaitaire des installations de la station d'épuration " établie par France Assainissement, cette décomposition retraçant les éléments de chiffrage des coûts des installations foncières et des matériels retenus. Toutefois, le chiffrage établi par France Assainissement, au demeurant non produit par l'administration, qui indique par filière (eaux, boues, odeurs...) un coût des installations présenté comme une " décomposition d'un prix global et forfaitaire ", ne constitue cependant pas une estimation de la valeur des immobilisations industrielles de la station d'épuration et ne saurait suffire à remettre en cause le chiffrage de 11 795 000 euros qui correspond au coût de construction de la station d'épuration en 2008. Par suite, il y a lieu de retenir comme valeur des immobilisations industrielles de la station d'épuration située sur la commune de Brenouille la somme de 11 795 000 euros.

12. Aux termes de l'article 1518 A du code général des impôts : " Les valeurs locatives qui servent à l'établissement des impôts locaux sont prises en compte à raison de deux tiers de leur montant pour les aéroports ainsi que pour les installations destinées à la lutte contre la pollution des eaux et de l'atmosphère faisant l'objet d'un amortissement exceptionnel au titre des articles 39 quinquies E et quinquies F. / A compter du 1er janvier 1991, les valeurs locatives des installations destinées à la lutte contre la pollution des eaux et de l'atmosphère visées au premier alinéa sont prises en compte à raison la moitié de leur montant. (...) / Pour les installations visées au premier alinéa et les matériels visés au troisième alinéa acquis ou créés à compter du 1er janvier 2002, et qui sont éligibles à l'un des modes d'amortissement exceptionnel mentionnés aux alinéas précités, la condition relative à la comptabilisation de cet amortissement exceptionnel est supprimées pour l'application du présent article (...) ". Aux termes de l'article 39 quinquies E du CGI prévoit que " Les entreprises qui construisent ou font construire des immeubles destinés à l'épuration des eaux industrielles, en conformité des dispositions de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 modifiée, peuvent pratiquer, dès achèvement de ces constructions, un amortissement exceptionnel égal à 50 % de leur prix de revient. /La valeur résiduelle des immeubles est amortissable sur leur durée normale d'utilisation. / Les dispositions du présent article s'appliquent aux constructions achevées avant le 31 décembre 1990 à condition qu'elles s'incorporent à des installations de production existant au 31 décembre 1980. / Les constructions répondant aux critères définis au premier alinéa et achevées avant le 1er janvier 2011 peuvent faire l'objet d'un amortissement exceptionnel sur douze mois à condition qu'elles s'incorporent à des installations de production. ".

13. Il résulte de ces dispositions que le dispositif dérogatoire d'amortissement exceptionnel prévu par l'article 39 quinquies E précité est réservé aux seuls immeubles dont l'objet est l'épuration des eaux industrielles. En outre, la mention d'une incorporation à des installations de production vise à réserver le dispositif légal aux équipements intégrés au processus de production et en conséquence à en exclure les stations d'épuration autonomes. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir qu'il y aurait lieu d'appliquer sur la valeur locative des immobilisations de la station d'épuration située sur la commune de Brenouille l'abattement de 50% prévu par les dispositions de l'article 1518 A du code général des impôts lesquelles renvoient au dispositif d'amortissement exceptionnel prévu par l'article 39 quinquies E du même code.

14. Il résulte de l'instruction que l'indice de la construction 1970/2008, d'ailleurs retenu par l'administration fiscale et la commune de Brenouille est de 0,15. Par ailleurs, la commune de Brenouille ne conteste pas l'application pratiquée par l'administration fiscale d'un abattement de 50% pour tenir compte de la spécialisation du bien en application des dispositions de l'article 324 AC de l'annexe III citées au point 10 sur les valeurs vénales 1970 des immeubles. Enfin, il convient également de retenir un taux de 5%, que les parties admettent toutes les deux, au titre du taux d'intérêt prévu par les dispositions de l'article 324 AB de l'annexe II citées au point 10. Par suite, la valeur locative des immobilisations industrielles de la station d'épuration située sur la commune de Brenouille à retenir pour le calcul des cotisations de taxe foncière dues au titre des années 2009 à 2014 doit être déterminée en prenant en compte ces éléments et en les appliquant à la valeur des immobilisations telle que définie au point 11, soit 11 795 euros.

15. Toutefois, dans ses écritures en appel, la commune de Brenouille demande que les éléments de calcul précisés au point précédent soient appliqués sur une valeur des immobilisations industrielles de 8 690 323 euros, et que sur une somme de 3 104 677 euros, soit appliqué en plus l'abattement de 50% prévu par les dispositions de l'article 1518 A du code général des impôts. En conséquence, alors que cet abattement ainsi qu'il a été dit au point 13 n'est pas applicable aux stations d'épuration autonomes, la valeur locative des immobilisations industrielles revendiquée par la commune de Brenouille est inférieure à celle qui résulterait de l'application des principes retenus aux points 11 à 13. En conséquence, il y a lieu, pour déterminer le préjudice subi par la commune de Brenouille, de retenir une valeur locative des immobilisations dans la limite du montant revendiqué.

16. L'application des éléments mentionnés au point 14 sur une valeur des immobilisations industrielles de 8 690 323 euros conduit à une valeur locative de 32 589 euros. L'application des mêmes éléments sur une somme de 3 104 677 euros conduit à une valeur locative de 11 642 euros. Toutefois, la commune ayant limité ses prétentions sur cette dernière somme en demandant l'application de l'abattement de 50% prévu par les dispositions de l'article 1518 A du code général des impôts, il y a lieu de retenir une valeur locative de 5 821 euros. Par suite, pour calculer le préjudice de la commune de Brenouille, il y a lieu de retenir une valeur locative des immobilisations industrielles de 32 589 euros plus 5 281 euros soit 38 410 euros.

17. Il est constant que la valeur locative des immobilisations de la station d'épuration située sur la commune de Brenouille retenue pour établir les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2009 à 2014 s'élevait à 19 019 euros. En conséquence, le montant à retenir devant être de 38 410 euros, cette différence dans le montant de la valeur locative constitue un préjudice pour la commune de Brenouille. Par suite, il y a lieu de renvoyer la commune de Brenouille devant l'administration pour le calcul du montant de son indemnisation qui correspond, au titre de chacune des années en litige, à la différence entre le montant de la cotisation de taxe foncière déterminée en prenant une valeur locative de 38 410 euros et le montant de la cotisation de taxe foncière à laquelle le SITTEUR a été assujetti sur la base d'une valeur locative de 19 019 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Brenouille sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400243, 1502136 du 12 mai 2016 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La commune de Brenouille est renvoyée devant l'administration des finances publiques afin qu'il soit procédé à l'évaluation de son préjudice financier du fait de la mauvaise évaluation de la taxe foncière sur les propriétés bâties de la station d'épuration située sur son territoire pour les années 2009 à 2014, conformément à la modalité de calcul définie au point 16 du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la commune de Brenouille une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Brenouille et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°16DA01285,16DA01293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01285-16DA01293
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances - Taxes foncières - Taxe foncière sur les propriétés bâties.

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances - Taxes foncières - Taxe foncière sur les propriétés bâties.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : LEQUILLERIER ; LEQUILLERIER ; LEQUILLERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-23;16da01285.16da01293 ?
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