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01/10/2020 | FRANCE | N°18DA01734

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 octobre 2020, 18DA01734


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Vente Réparation Automobile Lille Est (VRALE) a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des amendes qui lui ont été infligées par l'administration sur le fondement à l'article 1759 du code général des impôts à hauteur, respectivement, de la somme de 124 881 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et de la somme de 129 131 euros au titre de l'exercice clos en 2012.

Par un jugement n° 1509578 du 21 juin 2018, le tribunal admin

istratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Vente Réparation Automobile Lille Est (VRALE) a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des amendes qui lui ont été infligées par l'administration sur le fondement à l'article 1759 du code général des impôts à hauteur, respectivement, de la somme de 124 881 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et de la somme de 129 131 euros au titre de l'exercice clos en 2012.

Par un jugement n° 1509578 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 août 2018 et 3 avril 2019, la SAS VRALE, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2)° de la décharger des amendes qui lui ont été infligées ;

3°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées, en droits et pénalités, à hauteur, respectivement, de la somme de 63 246 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et de la somme de 63 704 euros au titre de l'exercice clos en 2011 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par action simplifiée (SAS) Vente Réparation Automobile Lille Est (VRALE) constitue un groupe fiscalement intégré avec la SAS ZF Holding. A l'issue d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, l'administration a remis en cause, par une proposition de rectification du 16 décembre 2014, la déduction en charges des frais de garantie financière exposés par la SAS VRALE en faveur de sa filiale de droit belge, la société Premium, qu'elle a regardés comme des revenus distribués, et l'a invitée, en application de l'article 117 du code général des impôts à désigner le ou les bénéficiaires de cette distribution. La SAS VRALE a présenté des observations le 13 février 2015, en contestant l'existence de distributions sans désigner leur bénéficiaire. Par un jugement du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la SAS VRALE tendant à la décharge des amendes qui lui ont été infligées par l'administration sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à hauteur, respectivement, de la somme de 124 881 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et de la somme de 129 131 euros au titre de l'exercice clos en 2012. La SAS VRALE relève appel de ce jugement et demande, en outre, à la cour de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées, en droits et pénalités, à hauteur, respectivement, de la somme de 63 246 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et de la somme de 63 704 euros au titre de l'exercice clos en 2011.

Sur les conclusions tendant à la décharge des redressements d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes :

2. Le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir, ce que la société requérante admet dans ses dernières écritures, que, si des redressements d'impôt sur les sociétés assortis de pénalités ont été assignés à la SAS ZF Holding à l'issue des opérations de vérification, aucun rehaussement d'impôt sur les sociétés n'a été mis à la charge de la SAS VRALE, que ce soit en droits ou en pénalités. Par suite, les conclusions aux fins de décharge présentées à ce titre par la SAS VRALE, au demeurant nouvelles en appel, sont irrecevables et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

Sur les conclusions aux fins de décharge des amendes fiscales :

3. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ". Par ailleurs, aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. (...) ".

4. En premier lieu, la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts peut être suivie à l'égard d'une société concomitamment à la recherche des véritables bénéficiaires des revenus distribués jusqu'à ce que ceux-ci aient été assujettis à des impositions devenues définitives. Contrairement à ce que soutient la SAS VRALE, la circonstance que l'administration connaîtrait ou serait en mesure de connaître l'identité des bénéficiaires de ces distributions ne lui interdit pas, hors le cas, qui n'est pas celui de l'espèce, où le redressement est relatif à la reprise d'une fraction estimée exagérée des rémunérations de ses dirigeants, d'adresser à la société la demande de désignation prévue à l'article 117 du code général des impôts. Cette circonstance ne fait pas davantage obstacle à ce que l'administration applique, en l'absence de réponse par la société dans le délai imparti par ces dispositions, la pénalité prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts. La SAS VRALE ne peut davantage se prévaloir utilement du point n° 100 de l'instruction publiée au BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 du 8 septembre 2014, qui, relative à la procédure d'imposition ne constitue pas une interprétation administrative de la loi fiscale opposable à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les amendes en litige ont été infligées à l'issue d'une procédure irrégulière.

5. En second lieu, en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les prêts sans intérêts, les abandons de créances ainsi que les aides en trésorerie accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt. Cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avances est une filiale, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'une aide consentie par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où la société apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive. Enfin, il résulte des dispositions du 13 de l'article 39 du code général des impôts, applicables aux exercices clos à partir du 4 juillet 2012, que la perte consécutive à un abandon de créance à caractère purement financier n'est déductible, en tout état de cause, que si elle se rapporte aux aides consenties en application d'un accord constaté ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 611-8 du code de commerce ou si elle est consentie à une entreprise pour lesquelles une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte.

En ce qui concerne la déduction pratiquée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011 :

6. La SAS VRALE fait valoir, dans le dernier état de ses écritures en cause d'appel, qu'afin de garantir l'emprunt bancaire d'un montant de 5 500 000 euros souscrit par sa filiale de droit belge, la société Premium, pour lequel elle a souscrit un engagement de caution solidaire à hauteur de la somme de 3 223 000 euros, elle a pris en charge, en lieu et place de l'emprunteur et sans procéder à leur refacturation, les frais résultant d'un contrat de couverture des évolutions du taux d'intérêt variable de cet emprunt. Pour justifier de l'existence pour elle d'un intérêt propre de nature à conférer à cet acte de gestion un caractère normal, ce que l'administration conteste, la SAS VRALE fait valoir, d'une part, que le paiement par elle de ces charges financières a permis la réussite des projets de développement des propres filiales de la société Premium, consistant à acquérir des titres de participation et des immeubles, et, par voie de conséquence, a contribué à favoriser indirectement le développement de l'ensemble du groupe en Belgique. Il n'est toutefois ni établi, ni même allégué, au soutien de l'intérêt qu'elle fait ainsi valoir, qu'à la date de souscription de cette garantie bancaire, la société Premium, en dépit de la situation déficitaire rencontrée par certaines de ses propres filiales, alors en démarrage d'activité, se serait trouvée en difficulté financière. Il n'est pas davantage établi que l'aide consentie aurait présenté un caractère commercial. D'autre part, la société requérante se prévaut de ce que les conséquences financières de l'augmentation du taux d'intérêt devaient, en exécution de ce contrat, être supportées par l'établissement bancaire et non par l'emprunteur. Toutefois, la société requérante, ce faisant, n'établit pas davantage l'existence d'une contrepartie directe qu'elle aurait retirée de l'opération. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a considéré que la prise en charge, sans refacturation, de frais incombant à sa filiale constituait un acte anormal de gestion, a qualifié les sommes en cause de distributions de revenus et a refusé, en conséquence, leur inscription en charges déductibles.

En ce qui concerne la déduction pratiquée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012 :

7. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que la société Premium se serait trouvée, dans l'un des cas mentionnés au point 5 pour lesquels, en application de l'article 39 du code général des impôts, une entreprise peut inscrire en charges déductibles les aides de toute nature consenties à une autre entreprise même lorsqu'elles ne présentent pas un caractère commercial. Aussi, dès lors que la garantie souscrite en faveur de la société Premium ne présentait pas, comme il a été dit précédemment, un caractère commercial, c'est à bon droit que l'administration a refusé l'inscription des frais incombant à sa filiale en charges déductibles et a regardé les sommes correspondantes comme des distributions.

8. Il résulte des deux points précédents que, en l'absence de réponse de la SAS VRALE à la demande de désignation du ou des bénéficiaires de distributions effectuées au titre des exercices clos en 2011 et 2012, dans le délai de trente jours qui lui avait été imparti, l'administration était fondée à faire application des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts, sans, ainsi qu'il a été dit au point 4, que puisse y faire obstacle, la circonstance que leurs bénéficiaires auraient été connus de l'administration.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS VRALE n'est ni recevable à demander à être déchargée de redressements d'impôt sur les sociétés qui ne lui ont pas été assignés, ni fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des amendes qui lui ont été infligées, en application des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts, à hauteur de la somme totale de 254 012 euros. Par suite, la requête de la SAS VRALE doit être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS VRALE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée VRALE et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°18DA01734


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01734
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SARL "DIDIER DENHEZ - AVOCAT"

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-01;18da01734 ?
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