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08/10/2020 | FRANCE | N°19DA02258

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 19DA02258


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ulma Service a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Lille à lui verser les sommes de 58 549,80 euros et 28 545,86 euros, toutes taxes comprises, au titre respectivement du lot n°1 du marché n°2009S0394 et du marché complémentaire n°2013S0006, de condamner la commune de Lille à lui verser les intérêts moratoires dus au titre des retards de paiement des sommes non incluses dans les décomptes mensuels et de prononcer la capitalisation de ces intérêts, et de m

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ulma Service a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Lille à lui verser les sommes de 58 549,80 euros et 28 545,86 euros, toutes taxes comprises, au titre respectivement du lot n°1 du marché n°2009S0394 et du marché complémentaire n°2013S0006, de condamner la commune de Lille à lui verser les intérêts moratoires dus au titre des retards de paiement des sommes non incluses dans les décomptes mensuels et de prononcer la capitalisation de ces intérêts, et de mettre à la charge de la commune de Lille la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1701538 du 23 juillet 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et des mémoires complémentaires, enregistrés le 30 septembre 2019, le 5 janvier 2020 et le 17 septembre 2020, la société Ulma Service, représentée par Me A..., demande, dans le dernier état de ses écritures, à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 juillet 2019 du tribunal administratif de Lille ;

2°) de condamner la commune de Lille à lui verser les sommes de 55 436,33 euros et 28 545,86 euros, toutes taxes comprises, au titre respectivement du lot n°1 du marché n°2009S0394 et du marché complémentaire n°2013S0006 ;

3°) de condamner la commune de Lille à lui verser les intérêts moratoires dus au titre des retards de paiement des sommes non incluses dans les décomptes mensuels et de prononcer la capitalisation de ces intérêts ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Lille la somme de 5 013 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la société Ulma, et de Me E..., représentant la commune de Lille.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Lille a décidé de procéder à la restauration de l'église Notre-Dame de Fives. Elle a confié le lot n°1 " échafaudages et parapluie " à la société Ulma Service, sous la maîtrise d'oeuvre de M. D.... Le marché conclu avec cette société prévoyait une tranche ferme d'un montant de 237 000 euros hors taxes et une tranche conditionnelle d'un montant de 38 500 euros hors taxes. Les travaux ont débuté à la suite de la notification, le 13 octobre 2010, d'un ordre de service du 5 octobre 2010 et devaient s'achever le 13 juin 2012. A la suite d'un sinistre ayant affecté l'intérieur de l'église au début du mois de janvier 2012, des retards ont entraîné la prolongation des travaux jusqu'au 13 juin 2013. Un avenant n°1 a été conclu le 6 août 2012 pour un montant de 32 869 euros hors taxes en raison de la nécessité d'apporter des modifications aux travaux prévus dans le marché initial. Un marché complémentaire n°2013S0006 a été conclu le 1er janvier 2013 entre la commune de Lille et la société Ulma Service pour un montant de 117 704,41 euros hors taxes. Les travaux relatifs au lot n°1 du marché n°2009S0394 et ceux du marché complémentaire ont été réceptionnés le 13 juin 2013 avec une levée des réserves le 15 juin 2015. La commune de Lille a notifié à la société Ulma Service le 24 mars 2016, par ordre de service, les décomptes généraux des marchés n°2009S0394 et n°2013S0006, pour des montants respectifs de 377 097,83 euros, après déduction de la somme de 12 535,96 euros due au sous-traitant, et de 140 774,47 euros , toutes ces sommes étant toutes taxes comprises. La société Ulma Service a contesté ces décomptes généraux et réclamé les sommes de 445 070,12 euros et 169 320,33 euros, toutes taxes comprises. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Lille à lui verser les sommes de 58 549,80 euros et de 28 545,86 euros au titre de ces marchés.

Sur les droits du titulaire :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir :

2. Si la société Ulma Service invoque, au soutien de ses conclusions, l'enrichissement sans cause de la commune de Lille, il résulte de l'instruction que, devant les premiers juges, la société requérante s'est fondée exclusivement sur la responsabilité contractuelle de celle-ci. Dans ces conditions, la demande de la société Ulma Service a, sur ce point et comme le fait valoir la commune, le caractère d'une demande nouvelle en appel qui est, par suite, irrecevable.

En ce qui concerne le marché n°2009S0394 :

3. La prolongation de la prestation du titulaire d'un marché public n'est de nature à justifier une rémunération supplémentaire que si elle a donné lieu à des modifications décidées par le maître d'ouvrage. Toutefois, le titulaire d'un marché public ayant effectué des prestations non prévues au marché et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de celles-ci, nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché, si elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ou si le titulaire a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.

4. La société Ulma Service soutient que la durée du marché ayant été prolongée, elle est fondée à solliciter le paiement de la prestation de location d'échafaudages au cours de la période allant du 1er mai au 30 novembre 2012. Il résulte de l'instruction qu'au début du mois de janvier 2012, une voûte de bas-côté dans l'église Notre-Dame de Fives s'est effondrée. La société requérante a été reconnue responsable du sinistre par le jugement n° 1803159 du tribunal administratif de Lille du 23 juillet 2019, devenu définitif. Un ordre de service n°5 du 6 juin 2012 a prolongé les travaux jusqu'au 13 décembre 2012. Cette prolongation était motivée par ce sinistre, par une demande de pièces complémentaires par l'inspection du travail, par des travaux complémentaires au niveau du clocher en lien avec des découvertes de peintures au cours du chantier et par des sujétions techniques imprévues en charpente et couverture suite à l'installation de l'échafaudage. Le 6 août 2012, un avenant n°1 au marché a été conclu pour un montant de 36 279,48 euros hors taxes, pour la réalisation de travaux modificatifs consistant en " location de matériel, travaux au niveau du clocher dont la durée est plus longue que celle prévue au marché, vu l'ampleur des dégradations non visibles avant les travaux, protections non réalisées à l'intérieur de l'église ".

5. La société Ulma Service a proposé le 12 octobre 2012 un projet d'avenant n°2 tendant au paiement des matériels loués pour la période allant du 1er mai au 30 novembre 2012, qui a été visé par l'architecte en chef des monuments historiques et par le cabinet Virtz, économiste de la construction. Mais ce projet d'avenant n'a jamais été signé par le maître d'ouvrage, de sorte que ce dernier ne peut être regardé comme ayant sollicité la réalisation de prestations complémentaires. L'avenant n°1 conclu le 6 août 2012 et le marché complémentaire conclu le 1er janvier 2013 ont déjà entendu tirer les conséquences des aléas survenus sur le chantier qui ne pouvaient être inclus dans le caractère forfaitaire du prix initialement fixé par le marché. Le maintien dans l'église des échafaudages et autres matériels du 1er mai au 30 novembre 2012 ne suffit pas à démontrer par lui-même, ni qu'il s'agirait de réaliser des prestations non prévues par le marché, sans lien avec des retards imputables à la société Ulma service comme le soutient la commune, ni que ce maintien des échafaudages, même à le supposer utile comme le soutient la société Ulma Service, était indispensable à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art. Dans ces conditions, la société Ulma Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 23 juillet 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Lille à lui verser la somme complémentaire qu'elle a évaluée, dans le dernier état de ses écritures, à 55 436,33 euros.

En ce qui concerne le marché n°2013S0006 :

6. La société Ulma Service soutient que la somme de 28 545,86 euros lui est due au titre du solde du marché complémentaire. Il résulte de l'instruction que si, le 8 mars 2013, le cabinet Virtz, économiste de la construction, a visé un document récapitulant le montant des travaux du marché complémentaire réalisés et incluant des prestations supplémentaires à hauteur de la somme que la société requérante réclame, celui-ci ne saurait être regardé comme une demande émanant du maître d'ouvrage de réaliser des prestations complémentaires. Par ailleurs, en se bornant à indiquer que les prestations complémentaires de location d'échafaudage pour une durée de trois mois de mars à mai 2013 étaient validées par l'expert judiciaire et faisaient l'objet de négociations entre les parties prenantes " en vue de leur contractualisation ", la société Ulma Service n'établit pas que celles-ci n'auraient pas déjà été prévues au marché ou qu'elles auraient été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art. Par suite, la demande présentée au titre de ce marché doit également être rejetée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Ulma Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 23 juillet 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Lille au paiement des sommes de 58 549,80 euros et 28 545,86 euros, aux intérêts afférents et à la capitalisation de ceux-ci.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lille, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société Ulma Service, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Ulma Service une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Lille sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Ulma Service est rejetée.

Article 2 : La société Ulma Service versera à la commune de Lille la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ulma Service et à la commune de Lille.

Copie sera adressée à M. B... D... et à Me C..., es liquidateur judiciaire de la société Virtz.

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N°19DA02258

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02258
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Prix.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : VERNON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;19da02258 ?
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