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19/11/2020 | FRANCE | N°17DA02492

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 19 novembre 2020, 17DA02492


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Phrontier a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de réduire, à concurrence d'un montant de 13 000 euros, le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 2010, d'autre part, de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos en 2011.

Par un jugement n° 1500545 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

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rocédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2017, la SARL Phrontier...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Phrontier a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de réduire, à concurrence d'un montant de 13 000 euros, le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 2010, d'autre part, de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos en 2011.

Par un jugement n° 1500545 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2017, la SARL Phrontier, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de réduire, à concurrence d'un montant de 13 000 euros, le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 2010 et de prononcer, dans la mesure d'une réduction en base à hauteur de la somme de 341 380,28 euros, la décharge partielle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos en 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Phrontier, qui exerce une activité de conseil, de développement et de vente de brevets et licences de substances utilisables dans le domaine de l'industrie pharmaceutique, cosmétique et alimentaire, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité, portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2011, à l'issue de laquelle l'administration a, d'une part, suivant la procédure de rectification contradictoire, réduit le montant du résultat déficitaire constaté au titre de l'exercice clos en 2010, d'autre part, suivant la procédure de taxation d'office, mis à la charge de cette société au titre de l'exercice clos en 2011 une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, à hauteur d'un montant total de 238 673 euros, incluant la majoration de 40 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts. Ces suppléments d'imposition ont été mis en recouvrement le 24 décembre 2013. La SARL Phrontier relève appel du jugement du 26 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la réduction, à concurrence d'un montant de 13 000 euros, du résultat de l'exercice clos en 2010, d'autre part, à la décharge partielle, à concurrence d'une réduction de 341 380,28 euros en base, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos en 2011.

2. En vertu du I de l'article 209 du code général des impôts, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées notamment par les articles 34 à 45 de ce code en matière de bénéfices industriels et commerciaux. Aux termes de l'article 38 de ce code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. / 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. / (...) ".

Sur la rectification du résultat de l'exercice clos en 2010 :

3. Quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre à son égard, il appartient toujours au contribuable de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne plus précisément les apports en compte courant d'associé, il incombe au contribuable de justifier de ces apports par la production d'éléments suffisamment précis portant soit sur le versement sur le compte bancaire de la société réalisé par l'associé, soit sur la prise en charge par l'associé, notamment à partir d'un compte bancaire personnel, d'une dépense incombant à la société ou de l'apport d'un bien. En cas de justification par le contribuable, il incombe alors à l'administration d'établir soit que la somme créditée sur le compte courant d'associé correspond à une recette dissimulée de la société, soit que l'associé n'a pas réellement pris en charge une dépense incombant à la société.

4. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a constaté que la SARL Phrontier avait déduit du résultat déclaré au titre de l'exercice clos en 2010 une somme de 13 000 euros qui avait été portée au crédit du compte courant de M. A..., associé majoritaire de la société. La SARL Phrontier fait valoir que cette inscription comptable a pour contrepartie le dépôt d'espèces effectué sur le compte bancaire de la société par un tiers, employé par M. A... et agissant pour le compte de ce dernier. La société requérante justifie, par l'extrait du compte bancaire qu'elle produit, de la remise de cette somme en espèces le 20 décembre 2010 par une personne nommément identifiée qui a été salariée par M. A... trente-deux heures au mois de décembre de l'année 2010, comme cela résulte du relevé de cotisations sociales également produit. Toutefois ces éléments ne sont pas suffisants à établir que la somme de 13 000 euros, qui, selon l'administration, non contredite sur ce point, a été portée au crédit du compte courant de M. A..., par une écriture d'opérations diverses passée le dernier jour de l'exercice, serait la contrepartie de cette remise d'espèces, alors d'ailleurs que la société appelante indique elle-même que les mouvements d'espèces sont habituellement pratiqués à raison de ses opérations commerciales en Allemagne, ni que ce crédit trouverait sa cause dans un apport effectué par M. A... en sa qualité d'associé, ni davantage qu'il aurait pour contrepartie le règlement par celui-ci d'une dette de la société. Il en est de même de l'extrait du compte courant d'associé de M. A..., produit par la société Phrontier, qui ne fait pas apparaître l'écriture concernée portant cette somme au crédit de ce compte. En conséquence, dès lors que la somme de 13 000 euros ne peut être regardée comme une créance venant au passif de la société au sens des dispositions précitées du 2 de l'article 38 du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration a refusé sa déduction pour la détermination de la variation de l'actif net de la société au titre de l'exercice clos en 2010, et l'a, dès lors, réintégrée dans le résultat de cet exercice.

Sur le bien-fondé de l'imposition supplémentaire au titre de l'exercice clos en 2011 :

5. Il est constant que la SARL Phrontier n'a pas déposé de déclaration de résultat se rapportant à l'exercice clos en 2011 dans le délai légal de déclaration, ni même dans le délai imparti par la mise en demeure qui lui a été adressée à cette fin en application de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales. L'imposition supplémentaire mise à la charge de cette société au titre de l'exercice en cause ayant, en conséquence, été établie d'office conformément à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, la SARL Phrontier supporte, en application de l'article L. 193 du même livre, la charge de la preuve de l'exagération de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés établie par l'administration à partir de la reconstitution du bénéfice réalisé au cours de cet exercice comptable.

6. La SARL Phrontier n'ayant pu présenter, au cours des opérations de contrôle, les pièces comptables relatives à l'exercice clos en 2011, l'administration, pour reconstituer le résultat imposable, a, tout d'abord, déterminé les produits de l'exercice à partir des encaissements bancaires dont elle a isolé la part revenant à la revente de marchandises en retenant le montant de 20 506 euros porté au compte de résultat annexé aux observations, en date du 4 janvier 2013, que la société a présentées sur la proposition de rectification qui lui avait été adressée. Elle a, ensuite, déterminé les charges venant en déduction, à partir des justificatifs produits par la société au cours des opérations de contrôle, notamment, une facture d'achat de marchandises d'un montant de 212 600 euros. En l'absence d'inventaire, l'administration a reconstitué la variation des stocks en ajoutant aux éléments déclarés par la société au 31 décembre 2010 le montant des achats de marchandises justifiés en 2011 avant de retrancher le produit de leur revente au cours de cet exercice tel qu'il ressortait des observations du contribuable.

7. En premier lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) /2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) ". Il appartient au contribuable de justifier que l'inscription en comptabilité des amortissements a été effectuée avant l'expiration du délai imparti pour souscrire la déclaration des résultats annuels de l'entreprise.

8. D'une part, le ministre fait valoir, sans être contredit par la SARL Phrontier ni démenti par les documents comptables édités seulement en 2013 que celle-ci a produits, que les amortissements dont la société appelante se prévaut, à hauteur de la somme de 143 780,28 euros, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011, n'ont pas été comptabilisés avant l'expiration, le 4 mai 2012, du délai imparti pour la souscription de la déclaration des résultats de l'exercice concerné. Dès lors, ces amortissements ne sauraient être regardés comme "réellement effectués" au sens et pour l'application des dispositions précitées du 2 de l'article 39 du code général des impôts. Il s'ensuit que l'administration était fondée, pour ce motif, à reconstituer le résultat de cet exercice sans pratiquer la déduction d'amortissements dont se prévaut la société.

9. D'autre part, la SARL Phrontier ne peut se prévaloir utilement de l'acceptation de ces amortissements que le vérificateur aurait exprimée oralement au cours des opérations de contrôle, dont la réalité est contestée par le ministre de l'action et des comptes publics, et qui, en tout état de cause, ne saurait constituer une prise de position formelle opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, en raison de son absence d'antériorité au regard du fait générateur de l'imposition en litige. La société requérante ne peut davantage se prévaloir de ce que la déduction de ces amortissements aurait été acceptée par l'administration au titre d'années postérieures à celle en litige.

10. En second lieu, la SARL Phrontier soutient que l'administration, en mettant en oeuvre la méthode décrite au point 6, a surévalué la variation des stocks en omettant de la diminuer d'un montant de 197 600 euros, correspondant à la valeur d'achat de marchandises périmées ayant fait l'objet, selon ses déclarations, d'une destruction en 2011. Toutefois, si la société requérante justifie, par les documents qu'elle produit en cause d'appel, avoir fait procéder à la destruction de spécialités diététiques périmées pour se conformer aux obligations légales en vigueur en Allemagne, ces pièces, qui ne permettent pas de réaliser un rapprochement individualisé entre les mises au rebut auxquelles elle a procédé et les achats qu'elle a effectués ne suffisent pas à établir l'exagération, dont elle se prévaut, de la variation des stocks au 31 décembre 2011, alors, d'ailleurs, qu'il résulte de ces mêmes documents que cette destruction s'est poursuivie en 2012. Par suite, la SARL Phrontier n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération de l'imposition mise à sa charge au titre de l'année 2011.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Phrontier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Phrontier est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Phrontier et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°17DA02492


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