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30/12/2020 | FRANCE | N°18DA00687

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 30 décembre 2020, 18DA00687


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration, prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été mise à leur charge.

Par un jugement n° 1503566 du 8 février 2018,

le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration, prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été mise à leur charge.

Par un jugement n° 1503566 du 8 février 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2018, M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, à titre principal, des impositions en litige, en droits et pénalités, à titre subsidiaire, de la majoration, prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été mise à leur charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui exerce la profession de jockey, est associé à hauteur de 12 % de la société en participation Christophe A... (SEP CS), qui a pour objet social de gérer sa carrière. En 2012, la SEP CS a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé devoir rectifier le bénéfice imposable réalisé par la SEP CS au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011. En raison de la transparence fiscale des sociétés en participation, qui relèvent de l'article 8 du code général des impôts, ces rehaussements de bénéfices ont donné lieu à la rectification des revenus déclarés par M. et Mme A..., pour les années 2009 à 2011, au titre de l'impôt sur le revenu. Par ailleurs, l'administration a remis en cause la déduction par M. A... de ses revenus imposables, de l'amortissement des parts qu'il détenait dans la SEP CS. Les rehaussements concernant la SEP CS ont été portés à la connaissance de cette société par une proposition de rectification qui lui a été adressée le 18 décembre 2012. Parallèlement, une proposition de rectification a été adressée le même jour à M. et Mme A... concernant leurs revenus imposables des années 2009, 2010 et 2011. Malgré les observations formulées pour la SEP CS et par M. et Mme A..., les rectifications ont été maintenues. Le différend opposant M. et Mme A... à l'administration a été soumis, à la demande des intéressés, à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui, à l'issue de ses séances des 28 mars et 24 octobre 2014, a émis l'avis qu'une part de 20 % des dépenses que l'administration n'avait pas admises en déduction des bénéfices de la SEP CS devait être regardée comme présentant un caractère professionnel et être ainsi admise en déduction. L'administration s'est rangée à cet avis, ce dont la SEP CS a été informée par un courrier du 2 décembre 2014. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant, pour M. et Mme A..., des rectifications notifiées à la SEP CS et de celles les concernant personnellement ont été mises en recouvrement le 31 juillet 2015. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 8 février 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant, à titre principal, à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, à titre subsidiaire, à la décharge de la majoration, prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été mise à leur charge.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification et de la réponse aux observations des contribuables :

2. En vertu de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la proposition de rectification que l'administration adresse au contribuable doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation et il doit en être de même de la réponse par laquelle l'administration rejette les observations du contribuable.

3. La proposition de rectification adressée le 18 décembre 2012 à M. et Mme A..., qui fait référence, notamment en ce qui concerne la remise en cause de la déduction de leurs revenus imposables d'un amortissement de la valeur des parts de M. A... dans la SEP CS, à la proposition de rectification adressée le même jour à cette dernière, dont une copie était jointe en annexe, mentionne les impositions et les années concernées et expose les motifs de droit et de fait sur lesquelles l'administration s'est fondée pour asseoir les rectifications notifiées. En particulier, s'agissant de la remise en cause de la déduction, par M. A..., de l'amortissement des parts détenues par lui dans la SEP CS, la proposition de rectification qui lui a été adressée l'invite à se reporter à celle adressée à cette société, lequel document mentionne, au point 5 du paragraphe VII, qui a trait aux conséquences financières, pour l'imposition personnelle de M. et Mme A..., des rectifications notifiées à la SEP CS, qu'un amortissement de valeurs mobilières ne peut être admis en déduction que lorsqu'il est établi que celles-ci sont affectées, par l'écoulement du temps, d'une dépréciation effective et qu'en l'espèce, tel ne peut être le cas des participations détenues par M. A... dans la SEP CS, dès lors que le chiffre d'affaires de cette dernière a connu une progression constante durant la période couvrant les exercices 2009 à 2011.

4. Si M. et Mme A... ont contesté les rectifications qui leur ont été ainsi notifiées et notamment celle relative à cette prise en compte d'un amortissement des parts de la SEP CS, par les observations qu'ils ont présentées le 4 février 2013, en faisant notamment valoir que ces parts étaient attachées à une société qui avait vocation à être dissoute à l'expiration de sa septième année d'exercice, soit au 31 décembre 2013, sans possibilité de renouvellement ni de prorogation, la réponse apportée par l'administration le 23 avril 2013 à ces observations expose les motifs de droit et de fait pour lesquels l'argumentation développée sur ce point par M. et Mme A... n'a pas été accueillie, ces motifs étant tirés notamment de ce que la dissolution de la SEP CS ne se traduirait pas par une perte définitive de la valeur des parts de cette société, mais par la récupération par les associés, à due proportion de leurs droits, de leurs apports. En outre, ce même document répond à la question que M. et Mme A... avaient posée dans leurs observations, en ce qui concerne le traitement fiscal susceptible d'être appliqué à leurs parts sociales au terme de la durée du contrat constituant la SEP CS, en se référant à la position précédemment exprimée dans le même document par l'administration en ce qui concerne la récupération de leurs apports par les associés et en y ajoutant que cette situation ne générerait aucune charge pour ceux-ci.

5. Les éléments ainsi contenus dans la proposition de rectification adressée à M. et Mme A... et dans la réponse apportée aux observations qu'ils ont formulées sur ce document doivent être regardés comme suffisamment motivés au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et comme ayant permis aux intéressés de comprendre les raisons pour lesquelles des rectifications de leurs revenus imposables étaient envisagées et de les contester utilement. Par suite, le moyen tiré par M. et Mme A... de l'irrégularité, sur ce point, de la procédure d'imposition mise en oeuvre à leur égard doit être écarté. Par ailleurs, une insuffisance de motivation des décisions rejetant leur réclamation ou celle formée par la SEP CS demeurerait, à la supposer avérée, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.

En ce qui concerne le moyen tiré de la vérification de comptabilité anticipée :

6. En vertu de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. En outre, en vertu de l'article L. 13 de ce même livre, dans le cadre d'une vérification de comptabilité, les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par ce livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. L'article R. 13-1 du même livre précise que les vérifications de comptabilité comportent notamment la comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce et qu'elles impliquent aussi l'examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de la comptabilité à l'aide, particulièrement, des renseignements recueillis à l'occasion de l'exercice du droit de communication, et de contrôles matériels.

7. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. A..., en son nom personnel, le 23 juillet 2012, un avis de vérification de comptabilité portant sur son activité de jockey professionnel au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, la première intervention sur place de la vérificatrice ayant été fixée au 31 août 2012. Par un courrier daté du 1er août 2012, M. A... a demandé que ce premier rendez-vous se déroule au bureau de son comptable. A l'occasion de cette première intervention et de la suivante, qui s'est tenue le 4 septembre 2012, il est apparu à la vérificatrice que M. A..., qui avait souscrit jusqu'en 2009 une déclaration annuelle de bénéfices industriels et commerciaux en ce qui concerne son activité de jockey, n'était désormais plus soumis à aucune obligation déclarative en son nom propre à ce titre, dès lors que cette activité était désormais gérée, en réalité depuis le 1er janvier 2007, date de la création de la SEP CS, dans le cadre de cette société. Le service a alors adressé à la SEP CS, le 24 septembre 2012, un avis de vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, prévoyant une première intervention le 9 octobre 2012, qui a cependant été reportée à une date ultérieure.

8. Si, lors de sa deuxième intervention sur place, le 4 septembre 2012, la vérificatrice a consulté les documents comptables de la SEP CS qui avaient alors été mis à sa disposition, ainsi que des pièces justificatives, telles les factures des fournisseurs et les relevés délivrés par France Galop, et si, à son départ, elle a remis à ses interlocuteurs une liste de documents, au nombre desquels figuraient des contrats d'emprunt et d'assurance, des factures concernant les immobilisations et des justificatifs de frais de déplacement et de voyage à l'étranger, en leur demandant de les préparer en vue de l'intervention suivante, qui a finalement été annulée, il ne résulte pas de l'instruction qu'à l'occasion de cette première approche des documents comptables mis à sa disposition, la vérificatrice se soit livrée à un examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de ces documents comptables en les confrontant aux autres éléments d'information dont elle a pu alors disposer et qui, d'ailleurs, s'avéraient insuffisants à lui permettre de conduire une analyse critique de la comptabilité afférente à l'activité professionnelle de jockey exercée par M. A.... Ainsi, en effectuant dès les 31 août et 4 septembre 2012, avant l'envoi à la SEP CS, le 24 septembre 2012, d'un avis de vérification de comptabilité concernant cette activité professionnelle, des interventions dans les locaux du comptable de la société, et en opérant, à cette occasion, de simples constats préparatoires ainsi que des recensements des documents utiles à sa mission, la vérificatrice ne s'est pas livrée, de manière anticipée, à une vérification de comptabilité de la SEP CS. Dès lors, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition mise en oeuvre à l'égard de cette société serait, sur ce point, entachée d'irrégularité doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne la prescription :

9. D'une part, en vertu de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Toutefois, le deuxième alinéa de cet article dispose que, par exception à ce principe, le droit de reprise de l'administration s'exerce, en ce qui concerne les revenus imposables selon un régime réel, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, jusqu'à la fin de la deuxième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable est adhérent d'un centre de gestion agréé et que le service des impôts des entreprises a reçu, pour les périodes considérées, une copie du compte-rendu de mission prévu à l'article 1649 quater E du code général des impôts.

10. D'autre part, aux termes de l'article 1649 quater E du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les centres sont notamment habilités à élaborer, pour le compte de leurs adhérents placés sous un régime réel d'imposition, les déclarations destinées à l'administration fiscale ; un agent de l'administration fiscale apporte son assistance technique au centre de gestion agréé, dans les conditions prévues par la convention passée entre le centre et l'administration fiscale. (...) / Les centres demandent à leurs adhérents tous renseignements utiles afin de procéder chaque année, sous leur propre responsabilité, à un examen en la forme des déclarations de résultats et de leurs annexes, des déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires, puis à l'examen de leur cohérence, de leur vraisemblance et de leur concordance. / Les centres ont l'obligation de procéder aux contrôles de concordance, de cohérence et de vraisemblance des déclarations de résultats et de taxes sur le chiffre d'affaires de leurs adhérents dans les six mois à partir de la date de réception des déclarations des résultats par le centre. / Les centres sont tenus d'adresser à leurs adhérents un compte rendu de mission dans les deux mois qui suivent la fin des opérations de contrôle. Dans le même délai, une copie de ce compte rendu est transmise, par le centre, au service des impôts des entreprises dont dépend l'adhérent concerné. / (...) ".

11. M. et Mme A... soutiennent que, la SEP CS étant adhérente, au cours des années d'imposition en litige, à un centre de gestion agréé, l'administration ne disposait que du droit de reprise réduit à deux ans, prévu par les dispositions, rappelées au point 9, du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, de sorte que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2009 en conséquence des rectifications notifiées à la SEP CS sont atteintes par la prescription. Toutefois, M. et Mme A... ne justifient pas, par la seule copie de lettres du centre de gestion transmettant à M. A..., en sa qualité d'associé, des comptes rendus de gestion se rapportant à la période vérifiée, de la réception de ces rapports par le service des impôts des entreprises, alors même que ces lettres font mention d'un envoi à l'administration fiscale. Le ministre conteste d'ailleurs en défense que l'administration ait été destinataire de ces documents. Cette condition, à laquelle les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales subordonnent le bénéfice du délai de reprise de deux ans, ne pouvant ainsi être tenue pour satisfaite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir qu'une partie des impositions et prélèvements sociaux en litige seraient atteints par la prescription.

En ce qui concerne l'amortissement des participations :

12. Aux termes de l'article 151 nonies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Lorsqu'un contribuable exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu dans la catégorie (...) des bénéfices industriels ou commerciaux (...), ses droits ou parts dans la société sont considérés notamment pour l'application des articles 38,72 et 93, comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession. / (...) ". Le 1. de l'article 93 du code général des impôts dispose que le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Ce même 1. ajoute que les dépenses déductibles comprennent notamment, en vertu de son 2°, les amortissements effectués suivant les règles applicables en matière de bénéfices industriels et commerciaux. Un élément d'actif incorporel peut, en application du 2° du 1. de l'article 39 du code général des impôts, donner lieu à amortissement s'il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition par l'entreprise, que ses effets bénéfiques sur l'exploitation prendront fin à une date déterminée.

13. Il résulte de l'instruction que M. A... a porté en déduction de ses revenus imposables, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des années 2009 à 2011, des dotations aux amortissements destinées à tenir compte d'une dépréciation des parts détenues par lui dans le capital de la SEP CS, qui a pour objet social la réalisation, la gestion et le développement de sa carrière de jockey, ainsi que la gestion des gains et le partage des résultats provenant de cette activité. L'administration a remis en cause cette déduction, après avoir estimé, comme il a été dit au point 4, qu'une telle dépréciation n'était pas établie.

14. Pour justifier cette déduction, M. et Mme A... soutiennent qu'il avait été convenu, dès la création de cette société en 2007, que celle-ci aurait une durée d'existence de sept années, non renouvelable ni prorogeable, de sorte qu'il était certain, à leurs yeux et à celui de la société cocontractante, autre associée de la SEP CS, que les actifs incorporels apportés à cette société en participation allaient, de même que ceux acquis par elle, se déprécier de manière irréversible au fur et à mesure de l'écoulement du temps et de l'approche de cette échéance, fixée au 31 décembre 2013.

15. Toutefois, ainsi que le fait valoir le ministre, il résulte des termes mêmes du contrat constituant la SEP CS, conclu le 23 juillet 2007 et versé à l'instruction, en particulier, de son article 12, que, lors de la dissolution de cette société, notamment lorsque l'échéance de sept années prévue par l'article 3 de ce contrat serait intervenue, chacun des cocontractants reprendrait la jouissance des biens demeurés dans le capital de la SEP CS et mis par lui à la disposition de celle-ci, le surplus de l'actif net disponible étant, après apurement des dettes, réparti entre les associés, à due concurrence de leurs participations dans la société, conformément à l'article 9 du contrat. En outre, il n'est pas contesté que, comme le relève l'administration dans la proposition de rectification qu'elle a adressée le 18 décembre 2012 à la SEP CS et dont elle a joint une copie à la proposition de rectification adressée le même jour à M. et Mme A..., le chiffre d'affaires réalisé par cette société a connu une constante progression durant la période couvrant les exercices clos en 2009, 2010 et 2011, ce qui, dès lors qu'il n'est pas allégué qu'elle aurait dû, dans le même temps, faire face à des charges déductibles d'un montant particulièrement élevé, ne corrobore pas l'existence d'une dépréciation de ses parts sociales. Par ailleurs, le ministre fait observer, sans être contredit, que, si le contrat prévoit que, dès la date de sa signature, le capital de 720 000 euros apporté par M. A... est libérable, l'intéressé n'a effectué aucun apport en numéraire. M. et Mme A... n'apportent, enfin, aucun élément de nature à justifier de l'existence d'une dépréciation effective des parts détenues dans le capital de la SEP CS, ni n'établissent, en particulier, que le terme du contrat coïnciderait avec une cessation, par M. A..., qui aurait alors atteint l'âge de trente-trois ans, de son activité professionnelle de jockey et que leurs apports ne pourraient ainsi continuer à générer des profits après l'intervention de ce terme de sept années. Par suite, l'administration était fondée à remettre en cause la déduction des dotations aux amortissements pratiquées par M. A... dans les déclarations des bénéfices industriels et commerciaux issus, par l'intermédiaire de la SEP CS, de son activité de jockey.

16. Enfin, M. et Mme A... ne sont pas fondés à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les prévisions du paragraphe n°30 de l'instruction publiée le 4 avril 2008 sous la référence 4 B-1-08, reprises par la doctrine publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-BIC-PVMV-30-10, qui, concernant les plus ou moins-values réalisées sur des opérations portant sur des valeurs mobilières, ne peuvent leur permettre de justifier la déduction d'amortissements pour dépréciation de leurs parts sociales.

Sur les pénalités :

17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

18. L'administration a assorti les rehaussements notifiés à la SEP CS, puis mis à la charge de M. et Mme A... à due proportion des droits de M. A... dans cette société, de la majoration prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts.

19. Pour justifier l'application qui a ainsi été faite de cette majoration, le ministre fait valoir que la SEP CS a porté, sciemment et de manière répétée, en comptabilité des amortissements concernant des investissements qui ne lui incombaient pas et qui n'avaient pas davantage été engagés dans son intérêt social. Il fait également valoir que cette société a pris en charge des intérêts d'emprunts contractés pour financer des investissements personnels de M. A... et dont elle ne pouvait ignorer qu'ils ne présentaient pas le caractère de charges déductibles de son résultat imposable, et que la SEP CS a supporté des dépenses exposées à titre personnel par M. A..., telles des dépenses d'énergie ou d'assurance concernant son logement, de même que des frais de voyage relatifs, d'une part, à des séjours effectués par l'intéressé avec son épouse notamment à l'étranger, d'autre part, à des indemnités kilométriques non appuyées de justificatifs., Enfin, il relève que la SEP CS a également acquitté les taxes foncières et d'habitation auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis, au titre des années d'imposition en litige, à raison de leur habitation principale. Le ministre fait valoir le caractère récurrent de ces déductions et le fait qu'elles portent sur un montant total élevé.

20. M. et Mme A... contestent ces éléments en faisant valoir que l'administration, suivant l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, a admis qu'une part de 20 % des dépenses prises en charge par la SEP CS en ce qui concerne leur logement présentait, y compris s'agissant de la taxe foncière et de la taxe d'habitation, un caractère professionnel. Ils ajoutent que la notoriété de l'épouse de M. A..., ancienne Miss France et présentatrice de télévision, lui donnait vocation à participer de manière active dans la promotion de l'image de son époux, notamment à l'occasion de ses déplacements à l'étranger, et que son implication a eu un impact positif dans les relations de M. A... avec ses contacts professionnels. Enfin, ils font observer que le caractère professionnel des déplacements correspondant aux indemnités kilométriques versées n'a pas été remis en cause et soutiennent que les erreurs matérielles et l'absence de quelques dates affectant les états fournis à la vérificatrice ne peuvent suffire à caractériser une intention délibérée d'éluder l'impôt.

21. Toutefois, il n'est pas contesté que la SEP CS a pris en charge des dépenses personnelles de M. et Mme A..., se rapportant notamment à leur logement, à raison d'une quotité excédant les 20 % admis en déduction, et qu'outre ces dépenses courantes, elle a aussi pris en charge des investissements réalisé par M. A..., dont le caractère personnel n'est pas contesté, et qu'elle a porté en déduction de ses résultats imposables des dotations aux amortissements ainsi que des charges d'emprunt s'y rapportant. Par ailleurs, il n'est pas non plus contesté que les indemnités kilométriques perçues par M. A... lui ont été versées dans une situation dans laquelle il n'avait pu fournir que des états insuffisamment détaillés et non appuyés de justifications de nature à établir la réalité des trajets correspondants, quand bien même leur caractère professionnel n'a pas été mis en doute. Eu égard au caractère répété de ces déductions opérées à raison de dépenses engagées en vue d'un intérêt étranger à celui de la SEP CS ou dont l'intérêt pour cette dernière n'est pas établi, l'administration a assorti, à bon droit, ces chefs de rehaussement de la majoration pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts.

22. En revanche, eu égard aux éléments, non sérieusement contredits, avancés par les appelants pour justifier de l'utilité de la participation de l'épouse de M. A... aux voyages effectués par ce dernier notamment à l'étranger, le fait que la SEP CS ait pris en charge, à l'occasion de ces voyages, dont le caractère professionnel n'est pas remis en cause par l'administration dans le cadre d'une argumentation précise, des frais de transport et de séjour concernant Mme A... et les enfants du couple, de même que des frais exposés à l'occasion de ces voyages pour la garde de ces derniers, ne peut suffire à caractériser l'intention, qui aurait été celle de la SEP CS, d'éluder l'impôt.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge, à due proportion des droits de M. A... dans la SEP CS, de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis les rehaussements notifiés à cette société en ce qui concerne les frais de voyage et de séjour, mentionnés au point 22, que celle-ci a pris en charge. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel, au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens. Enfin et pour le même motif, les conclusions des appelants afférents à la charge des dépens ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme A... sont déchargés, à due proportion des droits de M. A... dans la SEP CS, de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis les rehaussements notifiés à cette société en ce qui concerne les frais de voyage et de séjour que celle-ci a pris en charge.

Article 2 : Le jugement n° 1503566 du 8 février 2018 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA00687


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00687
Date de la décision : 30/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Amortissement.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CARIES LACROIX DE SENILHES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-30;18da00687 ?
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