La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2021 | FRANCE | N°19DA02308

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 06 mai 2021, 19DA02308


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Industrial et Environnemental Platform a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1400720 du 18 février 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Par un arrêt n°16DA00788 du 5 décembre 2017, la cour administrative

de Douai a rejeté l'appel formé par la SAS Industrial et Environnemental Platform contre ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Industrial et Environnemental Platform a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1400720 du 18 février 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Par un arrêt n°16DA00788 du 5 décembre 2017, la cour administrative de Douai a rejeté l'appel formé par la SAS Industrial et Environnemental Platform contre ce jugement.

Par une décision n° 418100 du 9 octobre 2019, le Conseil d'Etat, saisi par la SAS Industrial et Environnemental Platform, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Douai.

Procédure devant la cour :

Par une requête, initialement enregistrée sous le n°16DA00788 le 25 avril 2016, un mémoire, enregistré après renvoi le 6 janvier 2020, et un mémoire, enregistré le 11 avril 2021, qui n'a pas été communiqué, la SAS Industrial et Environnemental Platform, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., pour la SAS Industrial et Environnemental Platform.

Considérant ce qui suit :

1. La société Sabic Innovative Plastics ABS France, devenue la société par actions simplifiée (SAS) Industrial et Environnemental Platform, a cessé, en mars 2008, son activité de production de matières plastiques exercée à Villers-Saint-Sépulcre (Oise). Ses actions ont été cédées le 19 décembre 2008, le nouvel actionnaire s'engageant à ne pas reprendre l'activité industrielle précédemment exercée sur le site et projetant, après avoir procédé à sa dépollution, de le diviser en parcelles destinées à être exploitées par des entreprises des secteurs de la protection de l'environnement, des énergies renouvelables et de la valorisation des déchets. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration a notamment estimé que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition des biens immobilisés qui avaient cessé d'être utilisés pour les besoins de l'activité de production de matières plastiques exercée par la SAS Industrial et Environnemental Platform devait faire l'objet d'une régularisation sur le fondement du 5° du 1 du III de l'article 207 de l'annexe II au code général des impôts et a, en conséquence, adressé à cette société un rappel de taxe sur la valeur ajoutée, assorti de l'intérêt de retard. Cette société a relevé appel du jugement du 18 février 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition. Par un arrêt du 5 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête. Par une décision du 9 octobre 2019, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Douai.

2. L'article 185 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 prévoit que la taxe sur la valeur ajoutée déduite lors de l'acquisition d'un bien utilisé pour les besoins des opérations taxées d'un assujetti doit faire l'objet d'une régularisation " lorsque des modifications des éléments pris en considération pour la détermination du montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée, entre autres en cas d'achats annulés ou en cas de rabais obtenus. (...) ".

3. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) ". L'article 207 de l'annexe II à ce code, qui transpose notamment l'article 185 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, prévoit que cette déduction est définitivement acquise à l'entreprise, sous réserve des dispositions suivantes, énoncées audit article : " II. - 1. Pour les biens immobilisés, une régularisation de la taxe initialement déduite est opérée chaque année pendant cinq ans (...) / 2. Chaque année, la régularisation est égale au cinquième du produit de la taxe initiale par la différence entre le coefficient de déduction de l'année et le coefficient de déduction de référence mentionné au 2 du V. Elle prend la forme d'une déduction complémentaire si cette différence est positive, d'un reversement dans le cas contraire. / 3. Par dérogation à la durée mentionnée au 1 et à la fraction mentionnée au 2, cette régularisation s'opère pour les immeubles immobilisés par vingtième pendant vingt années. / (...) / III. - 1. Une régularisation de la taxe initialement déduite et grevant un bien immobilisé est également opérée : / (...) / 5° Lorsqu'il cesse d'être utilisé à des opérations imposables. / 2. Cette régularisation est égale à la somme des régularisations qui auraient été effectuées jusqu'au terme de la période de régularisation en application des 1, 2, 3 et 5 du II, en considérant que pour chacune des années restantes de cette période : / (...) / 5° Dans le cas visé au 5° du 1, le coefficient d'assujettissement est égal à zéro. / (...) ".

4. Une entreprise n'est tenue de procéder à la régularisation globale prévue par les dispositions précitées du 5° du 1 du III de l'article 207 de l'annexe II au code général des impôts qu'à compter de l'évènement qui caractérise de façon certaine la désaffectation définitive d'une immobilisation à la réalisation d'opérations taxables.

5. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'arrêt définitif, en mars 2008, de l'activité industrielle exercée à Villers-Saint-Sépulcre, la société Sabic Innovative Plastics ABS France a, conformément à la procédure applicable aux installations classées soumises à autorisation alors prévue par l'article R. 512-74 du code de l'environnement, aujourd'hui repris à l'article R. 512-39-1 de ce code, procédé à la mise en sécurité du site de production dans l'attente de son démantèlement et de sa dépollution. Ainsi, si les biens immobilisés de la société ont cessé, à cette date, d'être utilisés pour les besoins de son activité industrielle, ils étaient destinés à être soit détruits, soit cédés, soit transformés dans le cadre de la réaffectation des terrains à un nouvel usage. Aussi, la conservation, au cours de l'année 2008, des biens mobiliers et immobiliers dans le patrimoine de la société dans l'attente de l'engagement des opérations de démantèlement, ne constituait pas un évènement de nature à entraîner la régularisation globale de la taxe ayant grevé leur acquisition. La circonstance, dont le ministre se prévaut, qu'il n'est pas justifié, à ce jour, de l'avancée des opérations de dépollution du site ni des suites effectives données aux études de reconversion achevées en 2011, n'est pas davantage de nature à caractériser, à elle seule, la cessation certaine et définitive, dès l'année 2008, de l'affectation des biens immobilisés à des opérations imposables. Par suite, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2008, afférents aux biens immobiliers et mobiliers inscrits comme immobilisations par la société Sabic Innovative Plastics ABS France à la date de l'arrêt de l'activité de production de matières plastiques, ne sont pas susceptibles de trouver leur fondement légal dans les dispositions du 5° du 1 du III de l'article 207 de l'annexe II au code général des impôts sur lesquelles l'administration s'est fondée pour assigner les redressements en litige.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la SAS Industrial et Environnemental Platform est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande. Par suite, le jugement du 18 février 2016 du tribunal administratif d'Amiens doit être annulé et la SAS Industrial et Environnemental Platform doit être déchargée du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et de l'intérêt de retard correspondant qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à la SAS Industrial et Environnemental Platform au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 février 2016 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La SAS Industrial et Environnemental Platform est déchargée du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et de l'intérêt de retard correspondant mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à la SAS Industrial et Environnemental Platform au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Industrial et Environnemental Platform et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°19DA02308


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02308
Date de la décision : 06/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-08 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Cessation ou modification d'activité.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : ALLEAUME

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-05-06;19da02308 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award