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12/01/2023 | FRANCE | N°21DA01263

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 12 janvier 2023, 21DA01263


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1811715 du 1er avril 2021, le tribunal administratif de Li

lle a, d'une part, prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1811715 du 1er avril 2021, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, appliquée aux suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 juin 2021 et le 15 novembre 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Le Cam, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande qu'ils ont présentée devant le tribunal administratif de Lille n'était pas tardive, dès lors que la décision du 7 septembre 2016 rejetant leurs réclamations était insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales, pour n'avoir pas donné réponse à plusieurs des griefs qu'ils avaient présentés ;

- l'administration a apprécié à tort la consistance des travaux correspondant aux dépenses dont la déductibilité a été remise en cause en les regardant comme indissociables de l'opération de restauration du domaine, dans son ensemble, sans tenir aucun compte du fait que la propriété de ce domaine était partagée entre plusieurs personnes distinctes ; or, les dépenses en cause, portées en déduction de leurs revenus fonciers, correspondent exclusivement à des travaux, dont ils précisent le détail et dont l'administration méconnaît la nature exacte, effectués, au cours des années 2010 à 2012, sur la maison de maître construite au cœur de ce domaine ; ces travaux, dont les lieux de réalisation sont suffisamment établis, consistent essentiellement en la réfection partielle des façades, incluant le remplacement de pierres en mauvais état, en la réfection de carrelages, d'huisseries, d'une rampe d'escalier et de parquet, en la consolidation d'un mur fragilisé, en la réalisation d'une dalle de béton à la place d'un four à pain effondré, en la mise aux normes de l'assainissement, de l'électricité, de l'installation de chauffage et de la plomberie et en la pose de receveurs de douche dans des chambres existantes ; par suite, les dépenses correspondant à ces travaux, qui n'ont pas affecté significativement le gros-œuvre, constituent des dépenses d'entretien et de réparation déductibles, sans qu'aient d'incidence à cet égard la nature et la quantité des matériaux de construction mis en œuvre ou l'ampleur de ces travaux ou encore le taux de taxe sur la valeur ajoutée qui leur est applicable ; contrairement à ce qu'a retenu le service, ces travaux n'ont aucunement consisté à créer de nouvelles surfaces habitables dans les greniers, ce que les mentions de l'acte notarié d'acquisition ou des déclarations faites dans un journal d'information diffusé par le département du Pas-de-Calais ne peuvent suffire à établir, alors que ces greniers, sans qu'ait d'incidence leur affectation économique actuelle, avaient déjà été précédemment affectés au logement, comme il en est attesté par l'ancienne propriétaire des lieux ;

- la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-RFPI-BASE-20-30-10 conforte leur position.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2021, et par un mémoire, enregistré le 4 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut, d'une part, au rejet de la requête, d'autre part, et par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il prononce la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont l'administration avait assorti les impositions et contributions mis à la charge de M. et Mme A... au titre des années 2011, 2012 et 2013 et met à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le ministre demande également, à titre principal, que la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts soit remise à la charge de M. et Mme A..., à titre subsidiaire, que lui soit substituée la majoration de 10 % prévue, en cas de retard ou de défaut de déclaration, au I de l'article 1758 A du même code.

Il soutient que :

- la demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Lille devait être rejetée pour irrecevabilité, comme tardive, dès lors qu'elle a été enregistrée après l'expiration du délai, fixé à l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, de deux mois à compter de la date de notification de la décision rejetant leurs réclamations, ainsi qu'en témoigne l'avis de réception postal correspondant, et que cette décision est suffisamment motivée, en droit et en fait, au regard de l'exigence posée par l'article R. 198-10 du même livre, le service n'étant pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments développés par le contribuable ; en conséquence, c'est à tort que les premiers juges ont fait partiellement droit à cette demande ;

- M. et Mme A... ont seulement entendu contester le rehaussement portant sur les revenus fonciers issus de la maison de maître et non celui afférent aux revenus perçus de la société civile immobilière (SCI) JBL 5 dont ils sont les associés ;

- l'administration a retenu, à juste titre, que, indépendamment des transformations opérées par la SCI JBL 5 dans les anciens bâtiments agricoles attenants afin d'y aménager des salles de réception, les travaux effectués dans la maison de maître, qui avaient notamment consisté à créer de nouvelles surfaces habitables dans des greniers, à réaménager de façon importante d'autres pièces et qui avaient affecté le gros œuvre, étaient assimilables, eu égard à leur ampleur, corroborée par les quantités de matériaux mis en œuvre, à une reconstruction ; au surplus, ces travaux s'inscrivent dans le cadre de la réalisation d'une opération de remise en état complète de la propriété ; d'ailleurs, plusieurs des factures produites ne se rapportent pas explicitement à des travaux effectués au sein de la maison de maître génératrice des revenus fonciers rectifiés et ne peuvent être utilement appuyées par des attestations établies pour les besoins de la cause par des entrepreneurs, ou ne comportent pas l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée ; en outre, les travaux en cause ont permis notamment d'aménager, au sein de la maison de maître, un gîte proposé à la location ; le tableau récapitulatif produit par les requérants ne peut suffire à établir que les travaux, effectués au cours de l'année 2010, qu'il répertorie, constituent des opérations d'entretien ou de réparation déductibles des revenus fonciers ; ni les plans, au demeurant peu lisibles, ni les photographies, non datées, produites par M. et Mme A... ne permettent d'établir une situation précise de l'état de l'immeuble avant l'exécution de ces travaux ; l'attestation, non datée, de l'ancienne propriétaire, selon laquelle les greniers étaient déjà affectés, avant ces travaux, au logement de travailleurs agricoles saisonniers est contredite par les mentions de la déclaration modèle H1 déposée le 8 mai 1970 par son époux, qui fait état d'une surface habitable de 200 m², tandis que la déclaration modèle H1 souscrite par les requérants fait état d'une surface habitable de 603 m² ; cette attestation n'est, en outre, corroborée par aucun autre document, si ce n'est par un constat amiable établi dans le cadre d'un contrôle technique et dépourvu de caractère probant ; par ailleurs, M. et Mme A... n'apportent aucun élément au soutien de leur allégation selon laquelle les travaux sanitaires et de chauffage auraient été réalisés avant le démembrement de leur propriété ;

- le service était fondé, pour les motifs exposés dans les propositions de rectification, à faire application, aux suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts ; à titre subsidiaire, l'administration, dans le cadre d'une demande de substitution de base légale, est fondée à soutenir que les déductions pratiquées à tort par M. et Mme A... justifient, à tout le moins, l'application de la majoration de 10 % prévue, en cas de retard ou de défaut de déclaration, au I de l'article 1758 A du même code.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... A... ont fait l'acquisition, le 21 février 2009, d'une propriété dénommée " Ferme de la Traxène ", située à Coupelle-Vieille (Pas-de-Calais), composée d'une maison de maître et de vastes dépendances autrefois affectées à l'exploitation agricole. Le 31 mars 2010, M. et Mme A... ont créé, avec leurs trois enfants, la société civile immobilière (SCI) JBL 5, qui a opté pour le régime d'imposition applicable aux sociétés de capitaux. M. et Mme A... ont alors cédé à cette société civile immobilière les anciens bâtiments d'exploitation, en cours de rénovation, dans lesquels ils avaient pour projet d'aménager des salles de réception destinées à être proposées à la location pour l'organisation d'événements familiaux. Le 31 décembre 2011, M. et Mme A... ont cédé à leur fille, Mme D... A... épouse B..., la nue-propriété de la maison de maître. Le 26 mai 2012, la SCI JBL 5 a cédé à cette dernière la partie des anciens bâtiments d'exploitation aménagée en gîtes. A l'issue d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus souscrites par M. et Mme A..., l'administration a constaté que ceux-ci n'avaient pas déclaré le revenu foncier perçu par eux de la SCI JBL 5 au titre de l'année 2010 et a estimé, en outre, qu'il y avait lieu de remettre en cause la déduction des revenus fonciers de M. et Mme A... de dépenses de travaux portées sur leurs déclarations des années 2010, 2011 et 2012 pour les montants respectifs de 20 627 euros, 333 656 euros et 43 603 euros, ce qui a entraîné l'annulation du report sur l'année 2013 du déficit foncier non imputé que les intéressés avaient fait valoir. L'administration a fait connaître à M. et Mme A... ces rectifications par deux propositions de rectification qu'elle leur a adressées le 20 décembre 2013, pour ce qui concerne l'année 2010, et le 23 octobre 2014, pour ce qui concerne les années 2011 à 2013. Les observations présentées par M. et Mme A... n'ayant pas convaincu l'administration, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, pour les années 2010 à 2013, des rectifications ainsi notifiées ont été mises en recouvrement le 30 septembre 2015, pour un montant total de 312 255 euros en droits et pénalités.

2. Les quatre réclamations introduites par M. et Mme A... ayant été rejetées par une décision unique du 7 septembre 2016, ceux-ci ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 1er avril 2021, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, appliquée aux suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, d'autre part, mis une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de ce jugement, en tant qu'il prononce la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont l'administration avait assorti les impositions et contributions auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, et met à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le ministre demande également, à titre principal, que la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts soit remise à la charge de M. et Mme A..., à titre subsidiaire, que lui soit substituée la majoration de 10 % prévue, en cas de retard ou de défaut de déclaration, au I de l'article 1758 A du même code.

3. En vertu de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales, en matière d'impôts directs, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif. L'article R. 199-1 du même livre précise qu'il appartient au contribuable d'introduire son action devant le tribunal territorialement compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration lui notifie la décision prise sur sa réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 de ce livre. Enfin, l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales impose à l'administration de motiver une telle décision, lorsqu'elle rejette totalement ou partiellement la réclamation.

4. Il résulte des dispositions des articles L. 199, R. 198-10 et R. 199-1 du livre des procédures fiscales qu'en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, le délai de recours pour saisir le juge de l'impôt ne court qu'à compter du jour de la réception de l'avis portant notification d'une décision de l'administration des impôts suffisamment motivée pour permettre au contribuable de connaître et de discuter devant le tribunal administratif les motifs du rejet de sa réclamation.

5. Il ressort des termes des réclamations que M. et Mme A... ont introduites devant l'administration, par leur conseil, pour chacune des années d'imposition en cause, que celles-ci tendaient au dégrèvement, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à la charge des intéressés au titre des années 2011, 2012 et 2013, ainsi qu'au bénéfice du sursis de paiement visé à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales. Au soutien de ces réclamations, rédigées dans des termes proches, M. et Mme A... soutenaient que, contrairement à ce qu'avait retenu le service, les travaux correspondant aux dépenses dont la déductibilité de leurs revenus fonciers avait été remise en cause n'étaient pas assimilables à une reconstruction, mais qu'il s'agissait de travaux de réparation et d'entretien qui étaient déductibles de leurs revenus fonciers, sur le fondement du 1°) du I de l'article 31 du code général des impôts. A l'appui de ce moyen, ces réclamations développaient plusieurs arguments, tirés notamment de l'absence de prise en compte par l'administration de la nature de ces travaux et de la situation juridique de chacune des composantes de la propriété dite " Domaine de la Traxène ". Par cette argumentation, M. et Mme A... relevaient l'absence de portée de la notion d'ampleur de ces travaux, l'absence de pertinence du taux de taxe sur la valeur ajoutée mentionné sur les factures ainsi que le caractère inopérant des conditions d'exploitation de certaines chambres de la maison de maître, et reprochaient au service une méconnaissance de la teneur exacte des propos tenus par M. A... dans une publication locale. Enfin, les intéressés soulevaient le caractère erroné de l'argument du service en ce qui concerne la personne tenue aux travaux sanitaires et de chauffage, ainsi que l'absence d'incidence du transfert d'un permis de construire à la SCI JBL 5 et l'absence de caractère probant et opposable de la déclaration de surfaces déposée par l'ancienne propriétaire des lieux.

6. L'administration a rejeté ces réclamations par une décision unique, en date du 7 septembre 2016, qui comporte, sans erreur ni ambiguïté, la mention des voies et délais de recours impartis pour la contester. Il ressort des éléments produits pour la première fois en cause d'appel par le ministre, en particulier de la copie de l'avis de réception du pli ayant contenu cette décision, que ce pli a été reçu par M. et Mme A... le 10 septembre 2016, ce que les intéressés ne contestent d'ailleurs pas. Il ressort des termes mêmes de cette décision que, pour rejeter les réclamations mentionnées au point précédent, le directeur départemental des finances publiques du Pas-de-Calais, après avoir rappelé l'objet et la teneur de ces réclamations, les textes en vigueur, l'application de ceux-ci par la jurisprudence et leur interprétation par la doctrine administrative, a retenu que les dépenses dont la déduction des revenus fonciers de M. et Mme A... avait été remise en cause se rapportaient à des travaux qui, ayant conduit à tripler la surface habitable offerte par la maison de maître, notamment en rendant habitable, au premier et au second étage, des surfaces jusqu'alors affectées à des greniers, et à augmenter notablement le nombre des pièces qui la composaient, comme le révèle la comparaison des déclarations modèle H1 souscrites pour cet immeuble et des plans avant et après travaux, étaient, eu égard à leur importance, révélée notamment par la nature et les quantités de matériaux mis en œuvre, assimilables à une reconstruction au sens des dispositions du 1°) du I de l'article 31 du code général des impôts. Cette décision ajoute que M. et Mme A..., louant habituellement des biens immobiliers, ne pouvaient raisonnablement ignorer les règles applicables en la matière, ni que les travaux auxquels ils ont fait procéder impliquaient une augmentation notable de la surface habitable de leur immeuble, de sorte que la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts a été appliquée à bon droit aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 et que la majoration de 10 % prévue, en cas de retard ou de défaut de déclaration, au I de l'article 1758 A du même code, appliquée aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à la charge des intéressés au titre de l'année 2010, est également fondée.

7. Par ces motifs, alors que le service n'est pas tenu de répondre à tous les arguments développés par le contribuable dans sa réclamation, l'administration doit être regardée comme ayant suffisamment précisé, dans sa décision du 7 septembre 2016, prise sur les réclamations de M. et Mme A..., les motifs du rejet de celles-ci et comme ayant mis les intéressés à même de les discuter utilement devant le tribunal administratif.

8. Il suit de là que le délai de saisine du tribunal administratif a couru à compter du 10 septembre 2016, date à laquelle le pli contenant la décision du 7 septembre 2016, prise sur les réclamations de M. et Mme A..., leur a été notifié. La demande que les intéressés ont présentée devant le tribunal administratif de Lille, enregistrée au greffe le 20 décembre 2018, était donc tardive et, par suite, entachée d'une irrecevabilité non susceptible d'être couverte en cours d'instance, de sorte qu'elle ne pouvait qu'être rejetée, ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé, par la voie de l'appel incident, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont l'administration avait assorti les impositions et contributions supplémentaires auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à demander que la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts soit remise à la charge des intéressés. De même, il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à se plaindre du rejet du surplus des conclusions de leur demande. Enfin, par voie de conséquence, les conclusions qu'ils présentent en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1811715 du 1er avril 2021 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant, d'une part, qu'il prononce la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, au a. de l'article 1729 du code général des impôts, appliquée aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, d'autre part, qu'il met à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : La majoration mentionnée à l'article 1er ci-dessus, dont la décharge a été prononcée par ce jugement, est remise à la charge de M. et Mme A....

Article 3 : Les conclusions correspondantes de la demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Lille, ainsi que leur requête, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 15 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : S. Pinto Carvalho

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Suzanne Pinto Carvalho

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N°21DA01263

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01263
Date de la décision : 12/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : LE CAM

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-01-12;21da01263 ?
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