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19/09/2023 | FRANCE | N°22DA01439

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 19 septembre 2023, 22DA01439


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 136 euros au titre des traitements non versés au cours de la période du 1er octobre 2016 au 31 janvier 2017 et la somme totale de 17 481 euros en réparation des préjudices résultant des fautes commises dans la gestion de son dossier administratif.

Par un jugement n° 2004596 du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête enregistrée le 6 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Akaba, demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 136 euros au titre des traitements non versés au cours de la période du 1er octobre 2016 au 31 janvier 2017 et la somme totale de 17 481 euros en réparation des préjudices résultant des fautes commises dans la gestion de son dossier administratif.

Par un jugement n° 2004596 du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Akaba, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 mai 2022 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 136 euros au titre des traitements non versés au cours de la période du 1er octobre 2016 au 31 janvier 2017 et la somme totale de 17 481 euros en réparation des préjudices résultant des fautes commises dans la gestion de son dossier administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande devant le tribunal administratif était recevable dès lors que sa demande indemnitaire préalable du 5 décembre 2019 a été laissée sans réponse par l'administration ; il a présenté une seconde demande indemnitaire le 20 octobre 2021 qui a eu pour effet de régulariser sa demande devant le tribunal ; seule la notification d'une décision expresse de rejet est de nature à faire courir le délai de recours ; il a intérêt à agir et que son action n'est pas prescrite ;

- l'administration a commis une faute en omettant de procéder en temps utile à son reclassement et en refusant d'exécuter le jugement du tribunal administratif de Rouen n° 1700230 du 8 février 2019 annulant la décision le plaçant en disponibilité d'office et enjoignant le réexamen de sa situation ;

- il a droit à un rappel de traitement sur la période du 1er octobre 2016 au 31 janvier 2017, pour un montant de 3 136 euros ;

- il a subi un préjudice matériel constitué des frais de formation qu'il a dû engager pour sa reconversion professionnelle, d'un montant de 7 481 euros, ainsi qu'un préjudice moral évalué à la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 avril 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête d'appel se borne à reproduire la demande et le mémoire présentés en première instance et est donc irrecevable ;

- la demande présentée devant le tribunal administratif était tardive et par suite irrecevable ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 28 avril 2023, l'instruction a été close à la date du 19 mai 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration,

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020,

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., gardien de la paix titulaire, a été placé en disponibilité d'office à compter du 15 décembre 2014, après épuisement de ses droits à congés de maladie. Par un jugement n° 1700230 du 8 février 2019, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du préfet de la zone de défense et de sécurité Ouest du 5 décembre 2016 maintenant l'intéressé dans cette position de disponibilité d'office au cours de la période du 1er octobre 2016 au 31 janvier 2017. Par un courrier du 5 décembre 2019, M. A... a saisi le préfet d'une demande tendant au versement des éléments de salaire dont il estimait avoir été privé pendant la période précitée, et à l'indemnisation de ses préjudices financier et moral. En l'absence de suite donnée à sa demande, M. A... a présenté sa demande indemnitaire au tribunal administratif de Rouen qui l'a rejetée par un jugement du 24 mai 2022. M. A... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. / (...) " Aux termes de l'article R. 421-2 du même code : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 de ce code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. Aux termes de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les dispositions de la présente sous-section ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents ". Cette sous-section comprend l'article L. 112-3, aux termes duquel : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception. / (...) ", ainsi que l'article L. 112-6, aux termes duquel : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. / (...) ". Il résulte en outre de l'article L. 231-4 du même code que le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet dans les relations entre les autorités administratives et leurs agents.

4. Aux termes du I de l'article 15 de l'ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif : " Les dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 susvisée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période sont applicables aux procédures devant les juridictions de l'ordre administratif ". Aux termes de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période : " Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ". En application du I de l'article 1er de cette même ordonnance, les dispositions précitées de l'article 2 " sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus ".

5. En premier lieu, M. A... a présenté sa demande indemnitaire, d'un montant total de 20 617 euros, par un courrier du 5 décembre 2019, réceptionné par le préfet de la zone de défense et de sécurité Ouest le 16 décembre suivant. Le silence gardé pendant deux mois par l'administration sur cette demande préalable indemnitaire a fait naître une décision implicite de rejet à la date du 16 février 2020. Le délai de deux mois dont le requérant disposait à compter de cette date pour saisir la juridiction administrative d'un recours contentieux, qui aurait dû arriver à son terme le 17 avril 2020, a été prorogé en application des dispositions précitées des ordonnances du 25 mars 2020 pour expirer le 24 août 2020. Contrairement à ce que soutient le requérant, l'article R. 421-3 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable en l'espèce issue du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016, ne subordonne pas le déclenchement du délai de recours, en matière de plein contentieux, à l'intervention d'une décision expresse de rejet. La demande indemnitaire de M. A... a donc été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Rouen le 19 novembre 2020, soit après l'expiration du délai de recours.

6. En second lieu, si M. A... a de nouveau saisi l'administration au cours de l'instance devant le tribunal, en lui présentant une seconde demande indemnitaire par un courrier du 20 octobre 2021, il résulte de l'instruction que cette demande, en tout point identique à la précédente présentée le 16 décembre 2019, est fondée sur la même cause juridique et tend à l'indemnisation des mêmes préjudices. La décision implicite de rejet, née du silence gardé sur cette seconde demande, a donc revêtu le caractère d'une décision confirmative de la première, née du silence gardé sur la demande du 16 décembre 2019, qui était insusceptible de rouvrir le délai de recours devant le tribunal administratif. M. A... ne saurait non plus se prévaloir de la possibilité de saisir le juge dans le délai quadriennal prévu par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, dès lors que la décision implicite rejetant sa demande préalable est intervenue dans des conditions telles que le délai de recours contentieux lui est opposable.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience publique du 5 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : J-M. Guérin-Lebacq La présidente de chambre,

Signé : M-P. Viard

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

N. Roméro

2

N° 22DA01439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01439
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : SELAS NORMANDIE-JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-09-19;22da01439 ?
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