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15/02/2024 | FRANCE | N°22DA00755

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 15 février 2024, 22DA00755


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société NL Logistique a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a prescrit la réalisation d'une évaluation quantitative des risques sanitaires consécutifs à l'incendie survenu le 26 septembre 2019 quai de France à Rouen.



Par un jugement n°2005304 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Rouen a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 4 avril 2022, la soc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société NL Logistique a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a prescrit la réalisation d'une évaluation quantitative des risques sanitaires consécutifs à l'incendie survenu le 26 septembre 2019 quai de France à Rouen.

Par un jugement n°2005304 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Rouen a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2022, la société NL Logistique, représentée par Me Julia Héraut, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 janvier 2022 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 28 octobre 2020 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence d'abrogation, cet arrêté reste exécutoire et opposable à l'exploitant de sorte que le litige conserve son objet ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- il méconnaît l'article L. 512-20 du code de l'environnement ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il n'y a plus lieu à statuer sur la demande présentée en première instance ;

- à titre subsidiaire, l'arrêté attaqué n'est entaché d'aucune illégalité.

Par une ordonnance du 28 septembre 2023, l'instruction a été close le 16 octobre 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Julia Héraut, représentant la société NL Logistique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 octobre 2020, le préfet de la Seine-Maritime a prescrit à la société NL Logistique la réalisation d'une évaluation quantitative des risques sanitaires consécutifs à l'incendie survenu le 26 septembre 2019 quai de France à Rouen. Cette société a demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Rouen qui a estimé, par un jugement du 28 janvier 2022, qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur sa demande. La société NL Logistique interjette appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 512-20 du code de l'environnement : " En vue de protéger les intérêts visés à l'article L. 511-1, le préfet peut prescrire la réalisation des évaluations et la mise en œuvre des remèdes que rendent nécessaires soit les conséquences d'un accident ou incident survenu dans l'installation (...). Ces mesures sont prescrites par des arrêtés pris, sauf cas d'urgence, après avis de la commission départementale consultative compétente ". Aux termes du I de l'article L. 514-6 du même code : " Les décisions prises en application des articles (...) L. 512-20 (...) sont soumises à un contentieux de pleine juridiction (...) ".

3. Il résulte des dispositions de l'article L. 514-6 du code de l'environnement que les décisions prises en application de l'article L. 512-20 de ce code, au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement, sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient au juge de ce contentieux de se prononcer sur l'étendue des obligations mises à la charge des exploitants par l'autorité compétente au regard des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue.

4. Lorsqu'à la suite d'un accident ou d'un incident survenu dans une installation classée pour la protection de l'environnement, l'autorité administrative prescrit à l'exploitant de cette installation la réalisation d'une évaluation des risques sur le fondement de l'article L. 512-20 du code de l'environnement et que cet exploitant forme un recours tendant à l'annulation de la décision prescrivant cette mesure, l'exécution complète de cette dernière en cours d'instance prive d'objet ce recours et il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.

5. Il résulte de l'instruction que, dans la nuit du 25 au 26 septembre 2019, un incendie est survenu au sein de l'installation classée pour la protection de l'environnement, qu'exploite la société NL Logistique quai de France à Rouen, ainsi que dans celle qu'exploite, à proximité immédiate, la société Lubrizol France. Par un arrêté du 14 octobre 2019, rectifié le 15 octobre 2019, le préfet de la Seine-Maritime a notamment prescrit à la société NL Logistique de réaliser des analyses des eaux souterraines, des sols et des végétaux et, au vu de leurs résultats, de remettre une interprétation de l'état des milieux (IEM) dans un délai de trois mois à l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement.

6. En complément, par un arrêté du 21 janvier 2020, le préfet de la Seine-Maritime a prescrit à la société NL Logistique de réaliser, avant le 15 février 2020 ou dans le mois suivant la remise de l'IEM mentionnée au point précédent, une évaluation quantitative des risques sanitaires (EQRS) sur le fondement du dernier alinéa de l'article L. 181-14 et de l'article R. 181-45 du code de l'environnement, qui permettent à l'autorité compétente d'imposer " à tout moment " toute prescription complémentaire à l'exploitant d'une installation soumise à autorisation. La société NL Logistique n'ayant remis l'IEM que le 20 juillet 2020, alors que l'EQRS prescrite devait notamment s'appuyer sur les conclusions de cette interprétation, le préfet de la Seine-Maritime a abrogé l'arrêté du 21 janvier 2020 par un arrêté du 28 octobre 2020.

7. Cependant, par le même arrêté du 28 octobre 2020, le préfet de la Seine-Maritime a également prescrit à la société NL Logistique, sur le fondement de l'article L. 512-20 du code de l'environnement, de réaliser dans un délai de cinq mois une EQRS comprenant, d'une part, " une évaluation rétrospective des risques et impacts générés, pour la population générale et pour des populations sensibles, par inhalation des substances toxiques pour l'homme (...) susceptibles d'avoir été émises dans des quantités non marginales lors de l'accident du 26 septembre et des jours qui ont suivi " et, d'autre part, une " évaluation des risques de moyen et long terme (...) potentiellement attribuables à l'incendie du 26 septembre 2019 ". Le même arrêté prescrivait à la société NL Logistique de remettre " une tierce expertise " dans les trois mois suivant la remise de l'EQRS.

8 Or il résulte de l'instruction que l'EQRS prescrite par l'arrêté attaqué a été remise " en juin 2021 " et que cette tierce expertise a été réalisée en " septembre 2021 ", sans que le préfet de la Seine-Maritime ne relève une quelconque insuffisance ou incomplétude de ces documents. Il s'ensuit que l'arrêté attaqué, qui n'avait ni pour objet ni pour effet de modifier l'autorisation d'exploiter délivrée à la société NL Logistique a ainsi été complètement exécuté par la société NL Logistique après l'introduction, le 31 décembre 2020, du recours formé par cette société devant le tribunal administratif de Rouen.

9. Dans ces conditions, les conclusions de la demande présentée devant ce tribunal tendant à l'annulation de cet arrêté du 28 octobre 2020 avaient perdu leur objet à la date à laquelle les premiers juges ont statué, nonobstant la circonstance qu'une nouvelle décision administrative pourrait être prise à la lumière des conclusions de l'EQRS remise en juin 2021.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2020. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens contestant la légalité de l'arrêté du 28 octobre 2020, la requête de la société NL Logistique doit être rejetée.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par la société NL Logistique et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société NL Logistique est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société NL Logistique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 1er février 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. Eustache

La présidente de la 1ère chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°22DA00755 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00755
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22da00755 ?
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