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02/04/1992 | FRANCE | N°91LY00608

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 02 avril 1992, 91LY00608


Vu le recours du ministre délégué au budget, enregistré au greffe de la cour le 3 juillet 1991 ;
Le ministre délégué au budget demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 88-33 en date du 3 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif de Bastia a accordé à la SA Société Corse de Super Service dont le siège social est à Lupino, Bastia, Corse, la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981 par avis de mise en recouvrement du 22 octobre 1984 ;
2°) de remettre l'impositi

on contestée à la charge de la SA Société Corse de Super Service à concurrence de...

Vu le recours du ministre délégué au budget, enregistré au greffe de la cour le 3 juillet 1991 ;
Le ministre délégué au budget demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 88-33 en date du 3 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif de Bastia a accordé à la SA Société Corse de Super Service dont le siège social est à Lupino, Bastia, Corse, la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981 par avis de mise en recouvrement du 22 octobre 1984 ;
2°) de remettre l'imposition contestée à la charge de la SA Société Corse de Super Service à concurrence de 233 628 francs au titre des droits en principal et de 153 736 francs au titre des pénalités ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 1992 :
- le rapport de Mme X..., président-rapporteur ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA Société Corse de Super Service, qui exploite à Bastia un magasin à rayons multiples, a été assujettie à un complément de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981 à raison de divers redressements dont elle a été déchargée par un jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 3 juillet 1991 à concurrence de 637 143 francs en droits et de 928 717 francs en pénalités ; que le ministre délégué au budget demande l'annulation de ce jugement et le rétablissement du complément de taxe sur la valeur ajoutée dont s'agit à concurrence d'une somme de 233 628 francs en droits et de 153 736 francs en pénalités correspondant aux redressements relatifs au taux de démarque inconnue et à la ventilation par taux d'imposition des ventes dans la limite toutefois, comme il vient d'être dit, de l'objet de la demande présentée devant le tribunal administratif ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SA Société Corse de Super Service ayant refusé, dans sa réponse à la notification de redressements du 28 octobre 1981, le redressement relatif à la ventilation par taux d'imposition des ventes, l'administration sur la demande du contribuable a saisi la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de ce différend ; que par un avis rendu le 17 avril 1984 cette commission a déclaré adopter la méthode administrative de reconstitution de la taxe sur la valeur ajoutée exigible ; qu'il appartient, par suite, à la SA Société Corse de Super Service, par application de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts alors applicable d'établir devant le juge de l'impôt l'exagération des bases d'imposition relatives à ce chef de redressement ;
Considérant, en second lieu, que la SA Société Corse de Super Service, dans sa réponse à la notification de redressements du 28 octobre 1981, a en ce qui concerne la reconstitution afférente au taux de démarque inconnue elle-même proposé de reverser 45 714 francs et 40 554 francs au titre respectivement de 1979 et de 1980 et n'a pas ensuite le 12 février 1982 dans sa demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sollicité l'avis de cet organisme sur ce chef de redressement ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que l'avis faute de s'être prononcé sur ce différend est irrégulier ; qu'ainsi l'administration ayant suivi les propositions du contribuable, il appartient à celui-ci d'établir l'exagération de la reconstitution administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre délégué au budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a mis à sa charge la preuve de l'exagération des reconstitutions administratives ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence d'annuler ledit jugement en tant qu'il a mis cette preuve à la charge du ministre ; que, dès lors, il appartient à la cour administrative d'appel saisie du litige par l'effet dévolutif d'examiner les moyens soulevés par la société et par le ministre délégué au budget tant devant la cour que devant le tribunal administratif ;
Sur les impositions contestées :
- En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que la notification de redressements du 28 octobre 1981, porte d'une part, s'agissant du taux de démarque inconnue, qu'il est en général dans les milieux de la profession de 1,50 du chiffre d'affaires T.C. alors qu'en l'espèce ayant été de 2,13 en 1977, 1,28 en 1978, 4,28 en 1979 et 3,60 en 1980, il y a lieu de retenir pour ces deux dernières années 2,90, d'autre part, s'agissant de la ventilation par taux d'imposition qu'il y a lieu de retenir pour reconstituer la taxe sur la valeur ajoutée une méthode fondée sur la corrélation qui doit exister entre la taxe sur la valeur ajoutée récupérée sur les achats et la taxe sur la valeur ajoutée facturée sur les ventes, l'administration donnant alors pour chaque année le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déduite et le montant hors taxes des achats et après avoir déterminé le pourcentage de taxe sur la valeur ajoutée déductible par rapport aux achats hors taxes l'a ensuite appliqué aux recettes hors taxes déclarées pour obtenir la taxe sur la valeur ajoutée brute dans une récapitulation dont le détail des différents calculs est donné en annexe ; qu'eu égard aux précisions ainsi données, et quelque soit les insuffisances de cette méthode, cet acte est suffisamment motivé au sens de l'article L 57 alinéa 1 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, que si la confirmation de la notification de redressements du 13 janvier 1982 retient, s'agissant du taux de démarque inconnue des montants de régularisation de déduction sur achats différents de ceux portés dans la notification de redressements susmentionnée du 28 octobre 1981, il résulte de l'instruction que les chiffres ainsi retenus sont ceux proposés par la société dans sa réponse à ladite notification de redressements ; qu'elle ne saurait, par suite, soutenir que ce redressement n'est pas motivé au sens de l'article L 57 alinéa 2 du livre des procédures fiscales ;
- En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'article 221-1 de l'annexe II au code général des impôts pris par application de l'article 271 du même code que le montant de la taxe dont la déduction a déjà été opérée doit être reversée notamment lorsque les marchandises ont disparu ; que la SA société Corse de Super Service n'ayant pas reversé la taxe correspondant aux vols dont elle soutient avoir été victime au cours de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1980 et qualifiés de "démarque inconnue", estimés à 4,29 % en 1979 et à 3,60 % en 1980 de son chiffre d'affaires T.C, l'administration, après avoir préalablement fixé à 74 606 francs et 43 424 francs au titre respectivement des années 1979 et 1980, a comme il vient d'être dit sur la proposition de la SA société Corse de Super Service ramené à 45 714 francs pour 1979 et à 40 554 francs pour 1980 la régularisation à opérer de ce chef ; que la circonstance que le montant de cette régularisation ait été proposé au stade de la procédure administrative par le contribuable ne fait pas obstacle à ce qu'il en conteste le bien fondé devant le juge de l'impôt ;
Considérant que pour apporter la preuve qui lui incombe, la SA société Corse de Super Service se prévaut, sur le fondement de l'article 1649 quinquiès E du code général des impôts, applicable pendant la période d'imposition, d'une instruction administrative en date du 15 décembre 1969 3-D-1421 d'après laquelle la régularisation des déductions de taxe sur la valeur ajoutée afférente à des biens volés n'a toutefois pas à être opérée dans le secteur de la distribution lorsque la démarque inconnue se maintient dans les limites habituellement constatées, dès lors, qu'en l'espèce dans le secteur de la distribution ce taux serait de 5 % ; que toutefois, dès lors, qu'il résulte de l'instruction que dans sa réponse à la notification de redressements susmentionnée la société a accepté de reverser à ce titre les sommes de 45 714 francs et 40 554 francs respectivement pour les années 1979 et 1980 et que ce sont ces chiffres qui ont été retenus par l'administration, il appartient à la société de justifier d'un taux de démarque usuel supérieur à celui qu'elle avait précédemment admis ; qu'elle n'apporte, en l'espèce, aucun élément de nature à établir cette preuve ; qu'il suit de là que le redressement opéré à ce titre par l'administration est justifié et que c'est donc à tort que le jugement attaqué en a prononcé la décharge ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société estimant qu'elle était dans l'impossibilité de déterminer avec précision, du fait de la nature de son activité, le montant de ses ventes au détail à soumettre aux différents taux de taxe sur la valeur ajoutée a appliqué au montant de son chiffre d'affaires le pourcentage ressortant des achats ventilés taux par taux ; que l'administration ayant estimé que cette méthode conduisait nécessairement la société à appliquer pour une certaine part de son chiffre d'affaires des taux de taxe inférieurs au taux normal légalement exigible a reconstitué le montant de la taxe sur la valeur ajoutée à régulariser, par application aux ventes hors taxes, de la période dont s'agit, d'un pourcentage de 9,309 faisant ressortir un complément de taxe de 637 412 francs ; que pour apporter la preuve qui lui incombe de l'exagération de cette reconstitution administrative la SA société Corse de Super Service se prévaut de sa comptabilité ; que toutefois, l'absence de répartition de ses recettes par catégories d'opération et par taux d'imposition prive sa comptabilité de valeur probante et ne peut, par suite, servir a démontrer la dite exagération ; que la société n'est pas fondée non plus à soutenir que la méthode retenue par l'administration ne tient pas compte des soldes, promotions ou fin de séries dès lors que, d'une part, le service s'étant fondé sur les ventes hors taxes , ces différents rabais ont nécessairement été pris en compte, d'autre part, elle n'établit pas que ces différentes remises étaient plus importantes pour les produits soumis aux taux les plus élevés de taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 1er mars 1991, le tribunal administratif de Bastia a déchargé la société Corse de Super Service d'une somme de 233 628 francs en droits en principal et de 153 736 francs au titre des pénalités ; qu'il est, par suite, fondé à demander le rétablissement de la taxe sur la valeur ajoutée dont s'agit et des pénalités y afférentes ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 1er mars 1991 est annulé en tant qu'il a mis à la charge du ministre délégué au budget la charge de la preuve de l'exagération des bases de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle la SA société Corse Super Service a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981.
Article 2 : La taxe sur la valeur ajoutée à laquelle la SA société Corse de Super Service a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981 et des pénalités y afférentes est remise à sa charge à concurrence de la somme de 387 364 francs.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 1er mars 1991 est réformé en ce qu'il a déchargé la SA Société Corse de Super Service pour la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 mai 1981.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 91LY00608
Date de la décision : 02/04/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-06-02-08-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - BASE D'IMPOSITION


Références :

CGI 1649 quinquies A, 271, 1649 quinquies E
CGI Livre des procédures fiscales L57
CGIAN2 221-1
Instruction du 15 décembre 1969


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: SIMON
Rapporteur public ?: HAELVOET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1992-04-02;91ly00608 ?
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