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30/03/2000 | FRANCE | N°97LY00747

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 30 mars 2000, 97LY00747


Vu, avec les mémoires et pièces qui y sont visés, l'arrêt du 23 décembre 1999 par lequel la cour a déclaré l'ETAT responsable des conséquences dommageables de l'accident survenu à M. X... le 19 juillet 1983 au cours d'un exercice militaire et a, avant de statuer sur le montant de l'indemnité définitive due à M. X..., d'une part, ordonné un supplément d'instruction afin d'inviter le MINISTRE DE LA DEFENSE à produire un état relatif au déroulement normal de carrière et à la rémunération dont M. X... aurait normalement bénéficié jusqu'à la date de la consolidation de ses

blessures et, d'autre part, alloué à M. X... une somme de 100 000 francs...

Vu, avec les mémoires et pièces qui y sont visés, l'arrêt du 23 décembre 1999 par lequel la cour a déclaré l'ETAT responsable des conséquences dommageables de l'accident survenu à M. X... le 19 juillet 1983 au cours d'un exercice militaire et a, avant de statuer sur le montant de l'indemnité définitive due à M. X..., d'une part, ordonné un supplément d'instruction afin d'inviter le MINISTRE DE LA DEFENSE à produire un état relatif au déroulement normal de carrière et à la rémunération dont M. X... aurait normalement bénéficié jusqu'à la date de la consolidation de ses blessures et, d'autre part, alloué à M. X... une somme de 100 000 francs à titre de provision ;
Vu, enregistrée au greffe de la cour le 2 mars 2000, la pièce produite par le MINISTRE DE LA DEFENSE pour donner suite au supplément d'instruction ordonné par l'arrêt susvisé ;
Vu, enregistré au greffe de la cour le 20 mars 2000, le mémoire complémentaire présenté par maître Guy Y..., avocat, pour M. Gérard X..., qui persiste dans les conclusions de sa requête et de ses précédents mémoires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du service national ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2000 ;
- le rapport de M. BOUCHER, premier conseiller ;
- les observations de M. X... ;
- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement ;

Sur le préjudice :
Considérant, en premier lieu, que, dans le rapport d'expertise médicale du 17 avril 1990, la date de consolidation des blessures résultant pour M. X... de l'accident dont il a été victime le 19 juillet 1983 a été fixée au 25 juin 1987 ; que, jusqu'à cette date, M. X... a subi une perte de revenus ; que, compte tenu du fait qu'il a bénéficié du maintien de sa solde jusqu'au 30 mai 1984 et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration aurait demandé le reversement de sommes perçues à tort pour la période antérieure à cette date, cette perte de revenus couvre la période du 1er juin 1984 au 25 juin 1987 pendant laquelle il était placé en congé de réforme temporaire sans solde ; que l'indemnité due de ce chef doit être déterminée sur la base de la solde que le requérant aurait perçue s'il avait accompli son service au cours de cette période et non sur la base de la rémunération qu'il percevait dans l'emploi qu'il occupait avant son engagement, dès lors que, si l'accident l'a empêché de poursuivre sa carrière militaire, il ne peut être regardé comme la cause directe et certaine de l'interruption de sa carrière dans l'entreprise qui l'employait avant cet engagement et qu'il avait choisi de quitter pour s'engager dans l'armée ; qu'ainsi, la perte de revenus s'élève à la somme de 187 106,80 francs, représentant le montant de la solde qu'il aurait perçue au cours de la période en cause sur la base d'un déroulement normal de carrière ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte du même rapport d'expertise qu'à la suite de son accident M. X... présente une incapacité permanente partielle de 22 % ; que les troubles physiologiques résultant de cette incapacité justifient l'allocation d'une indemnité de 200 000 francs ;
Considérant, en troisième lieu, que le requérant a subi un préjudice professionnel résultant, d'une part, du fait qu'il a perdu une chance sérieuse de poursuivre sa carrière dans l'armée alors que, dans cette perspective, il avait quitté son précédent emploi et, d'autre part, des difficultés qu'il a rencontrées pour assurer sa reconversion et retrouver un emploi ; que, compte tenu du taux d'incapacité permanente partielle dont il reste atteint et des revenus dont il aurait normalement disposé à la date de consolidation s'il avait poursuivi sa carrière, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui allouant une indemnité de 340 000 francs ;
Considérant, en quatrième lieu, que M. X... justifie avoir effectué, entre 1984 et 1992, divers déplacements, dont la réalité n'est pas contestée en défense, pour des séjours à l'hôpital, pour des consultations médicales et pour répondre à diverses convocations administratives ; que le montant de ces frais doit être évalué à la somme forfaitaire de 40 000 francs ;
Considérant, en cinquième lieu, que l'accident dont s'agit a entraîné pour M. X... des souffrances physiques qualifiées de moyennes, un préjudice esthétique qualifié de modéré, et un préjudice d'agrément résultant notamment du fait qu'il a été contraint d'abandonner la pratique de certains sports ; qu'il sera fait une exacte appréciation de ces divers préjudices en allouant à ce titre au requérant respectivement les sommes de 40 000, 30 000 et 20 000 francs ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, que la perte d'un capital garanti au titre d'un contrat d'assurance vie résilié faute de règlement des primes, la perte de cotisations réglées en pure perte au titre de deux contrats d'assurance automobile et la perte financière alléguée au titre de la retraite, ne peuvent être regardées comme présentant un lien direct avec l'accident ; qu'il en est de même s'agissant des frais de rééducation fonctionnelle et des frais annexes engagés hors prescription médicale ainsi que des frais d'achat d'un vélo ; que, pareillement, ni les frais financiers résultant d'emprunts contractés après l'accident, ni, par suite, les frais de procédure liés à la liquidation judiciaire dont le requérant a fait l'objet en raison de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de rembourser ses dettes, ne présentent de lien direct avec l'accident dont s'agit ; que les préjudices invoqués à ces divers titres ne peuvent, dès lors, ouvrir droit à indemnisation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préjudice total subi par M. X... du fait de l'accident dont il a été victime le 19 juillet 1983 s'élève à la somme de 857 106,80 francs ;
Considérant que l'Etat est fondé à demander que les sommes qu'il a versées à M. X... au titre de l'accident dont s'agit soient déduites de l'indemnité qui lui est due ; que ces sommes comprennent les indemnités journalières perçues pendant la période de congé temporaire sans solde, la pension militaire d'invalidité concédée le 9 août 1987 et la solde de réforme liquidée le 17 juillet 1987, soit un total de 396 191,74 francs ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Etat doit être condamné à verser à M. X... une indemnité de 460 915,06 francs, sur laquelle il y aura lieu d'imputer les provisions de 15 000 et 50 000 francs déjà versées à M. X..., respectivement les 16 mai 1988 et 19 mai 1992, ainsi que, le cas échéant, la provision de 100 000 francs que l'Etat a été condamné à lui verser par l'arrêt susvisé de la cour du 23 décembre 1999 ;
Sur les intérêts : Considérant que M. X... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 460 915,06 francs, à compter du 4 août 1990, selon les termes de sa demande, cette date étant postérieure à la première proposition d'indemnisation de l'administration ; qu'en ce qui concerne les provisions, ces intérêts courront jusqu'aux dates respectives auxquelles elles ont été versées ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X... une somme de 5 000 francs en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : L'ETAT (MINISTRE DE LA DEFENSE) est condamné à verser à M. X... une indemnité de quatre cent soixante mille neuf cent quinze francs et six centimes (460 915,06 F.) sur laquelle s'imputera le montant des provisions déjà versées.
Article 2 : La somme de 460 915,06 francs portera intérêts à compter du 4 août 1990 et, en ce qui concerne les sommes versées à titre de provision, jusqu'aux dates respectives auxquelles elles ont été versées.
Article 3 : L'ETAT (MINISTRE DE LA DEFENSE) versera à M. X... une somme de cinq mille francs (5.000 F.) en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 97LY00747
Date de la décision : 30/03/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ARMEES - SERVICE NATIONAL - CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITE - DOMMAGE SUBI PAR UN APPELE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BOUCHER
Rapporteur public ?: M. BOURRACHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2000-03-30;97ly00747 ?
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