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30/03/2010 | FRANCE | N°07LY00969

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 30 mars 2010, 07LY00969


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2007, présentée, d'une part pour M. Hassane A et Mme Amina B, épouse A, domiciliés ..., agissant en leur nom propre et au nom de leurs enfants, alors tous mineurs, Saloua, Marouane et Safa, d'autre part pour Mme Rabha C, domiciliée ... ;

Ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302708, en date du 27 février 2007, en tant que le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs conclusions tendant à ce que le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne soit condamné à verser, respectivement, 25 000 euros tant à M

. qu'à Mme A, 15 000 euros tant à Saloua, qu'à Marouane et qu'à Safa, et en...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2007, présentée, d'une part pour M. Hassane A et Mme Amina B, épouse A, domiciliés ..., agissant en leur nom propre et au nom de leurs enfants, alors tous mineurs, Saloua, Marouane et Safa, d'autre part pour Mme Rabha C, domiciliée ... ;

Ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302708, en date du 27 février 2007, en tant que le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs conclusions tendant à ce que le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne soit condamné à verser, respectivement, 25 000 euros tant à M. qu'à Mme A, 15 000 euros tant à Saloua, qu'à Marouane et qu'à Safa, et enfin 10 000 euros à Mme C ;

2°) de prononcer lesdites condamnations ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le centre hospitalier a commis une faute en n'organisant pas de visite pré-anesthésique et en ne tenant dès lors pas compte de l'état de santé de la patiente le jour de l'intervention ;

- le centre hospitalier a également commis une faute en raison du défaut de surveillance en salle de réveil, qui n'a pas permis d'éviter que du sang soit inhalé ;

- le centre hospitalier a engagé sa responsabilité du fait des infections nosocomiales dont la patiente a été victime, et spécialement du fait du virus respiratoire syncytial qui est à l'origine du décès ;

- ils ont subi, du fait du décès, un préjudice moral ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2008, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- compte tenu de l'absence de fièvre, une visite pré-anesthésique n'aurait pas modifié la programmation de l'intervention, les affirmations des requérants sur l'état de santé de l'enfant n'étant au demeurant corroborées par aucun élément ;

- il n'y a pas eu d'insuffisance de la surveillance post-opératoire ;

- les infections nosocomiales contractées ne sont pas à l'origine du décès ; quant à l'infection par le virus respiratoire syncytial, elle n'est pas nosocomiale, l'enfant en étant porteuse antérieurement à son hospitalisation ;

- subsidiairement, les montants demandés par les parents et les frères et soeurs au titre du préjudice moral sont excessifs ;

- la demande de Mme C ne peut, pour sa part, qu'être rejetée, faute de toute précision sur ses liens éventuels avec l'enfant ;

Vu les pièces dont il résulte que la caisse primaire d'assurance maladie de Saint-Etienne, qui n'a pas produit d'observations, a été régulièrement mise en cause ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 mars 2010, présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2010 :

- le rapport de M. Stillmunkes, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

Considérant que la jeune Asma A, âgée de 4 ans, a été opérée en vue d'une amygdalectomie et de soins dentaires au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, le 12 janvier 2001 ; qu'elle y est décédée le 1er février 2001 ; que, par un premier jugement avant-dire droit, en date du 9 juin 2004, le Tribunal administratif de Lyon a décidé une expertise ; que, par le jugement attaqué, il a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par les parents de l'enfant, agissant en leur nom propre et au nom des trois frères et soeurs d'Asma, ainsi que par Mme C, sa grand-mère maternelle ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise réalisée en première instance, que la jeune Asma souffrait de troubles neurologiques sérieux, ayant notamment entraîné une grande hypotonie ; que l'année 2000 a été marquée par la récurrence d'épisodes de rhinopharyngites, qui a justifié l'amygdalectomie pratiquée ; que son mauvais état dentaire justifiait de son coté la réalisation de soins et d'extractions dentaires ; que, dans les suites de cette intervention, elle a été victime d'une pneumopathie d'inhalation, en raison d'un saignement post-opératoire, ainsi que d'une infection à virus respiratoire syncitial, le décès étant dû à un syndrome de détresse respiratoire aigüe ;

Considérant que l'expert a constaté l'absence de visite pré-opératoire, contrairement aux bonnes pratiques en la matière ; qu'il a par ailleurs indiqué que l'enfant était infectée par le virus respiratoire syncytial lors de son arrivée à l'hôpital ; qu'à cet égard, ses parents ont indiqué qu'elle était enrhumée et toussait ; que l'expert souligne que l'intervention multiple dont elle a fait l'objet présentait un risque hémorragique connu, accompagné de risques respiratoires au réveil ; qu'il a en outre indiqué que ces risques étaient particulièrement sérieux en l'espèce, compte tenu des lourds antécédents neurologiques de l'enfant et de ses problèmes d'hypotonie ; qu'il a enfin indiqué qu'un état inflammatoire des voies aériennes supérieures, du fait de l'affection rhino-pharyngée dont souffrait l'enfant, augmentait encore les difficultés susceptibles de survenir au réveil ; que, dans ces conditions, eu égard à la fragilité particulière de l'enfant, qui aurait dû conduire au report de l'opération si son état avait été correctement apprécié avant que l'opération ne soit réalisée, l'absence fautive de visite pré-opératoire doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme lui ayant fait perdre toute chance de bénéficier de ce report et d'éviter la complication dont elle a été victime ;

Considérant que le préjudice moral entraîné par le décès de la jeune Asma doit être évalué à un montant de 20 000 euros pour chacun de ses deux parents, à un montant de 10 000 euros pour chacun de ses frères et soeurs et à un montant de 2 000 euros pour sa grand-mère ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A et les autres requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon n'a pas condamné le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne à verser, respectivement, une somme totale de 60 000 euros à M. et Mme A agissant en leur nom propre et en celui de leurs enfants encore mineurs Saloua et Marouane, une somme de 10 000 euros à M. Safa A et une somme de 2 000 euros à Mme C ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et les autres requérants et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne est condamné à verser, respectivement, une somme totale de 60 000 euros à M. et Mme Hassane A agissant en leur nom propre et en celui de leurs enfants encore mineurs Saloua et Marouane, une somme de 10 000 euros à M. Safa A et une somme de 2 000 euros à Mme C.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 27 février 2007 est annulé.

Article 3 : Une somme de 1 500 euros, à verser à M. A et aux autres requérants, est mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande de M. et Mme A et de Mme C est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hassane A, à Mme Amina B, épouse A, à Mme Rabha C, à M. Safa A, au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, et à la caisse primaire d'assurance maladie de Saint-Etienne.

Délibéré après l'audience du 11 février 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Stillmunkes, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 mars 2010.

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N° 07LY00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY00969
Date de la décision : 30/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : BUFFARD ANDRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-03-30;07ly00969 ?
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