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29/06/2010 | FRANCE | N°08LY00245

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 29 juin 2010, 08LY00245


Vu la requête, enregistrée le 1er février 2008, présentée pour la COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY (Ain), représentée par son maire en exercice ;

La COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505627 du Tribunal administratif de Lyon en date du 29 novembre 2007,qui l'a condamnée à verser à la Société Eiffage Immobilier Centre Est la somme de 500 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2004 et la somme de 860 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rej

eter la demande présentée par la Société Eiffage Immobilier Centre Est devant le Tribu...

Vu la requête, enregistrée le 1er février 2008, présentée pour la COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY (Ain), représentée par son maire en exercice ;

La COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505627 du Tribunal administratif de Lyon en date du 29 novembre 2007,qui l'a condamnée à verser à la Société Eiffage Immobilier Centre Est la somme de 500 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2004 et la somme de 860 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par la Société Eiffage Immobilier Centre Est devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de la Société Eiffage Immobilier Centre Est la somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le représentant de la Société Eiffage Immobilier Centre Est n'avait pas qualité pour agir ; que la lecture des statuts ne permet pas de déterminer un pouvoir d'action en justice de M. A ; que la délégation produite manque de précision ; que le projet est clairement en contrariété avec le plan local d'urbanisme (PLU) à intervenir en matière de stationnement ; que le sursis à statuer mentionne expressément dans son visa les dispositions du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) tendant à faire de l'amélioration des conditions de stationnement et de la préservation du bâti naturel une condition du développement de la commune vers le statut de petite ville, lequel constitue l'un des deux axes prioritaires énoncés par le PADD ; que l'attitude fautive de la société est à l'origine de l'échec de son projet ; que la demande de permis de construire aurait dû en tout état de cause être refusée ; que le dossier de demande de permis de construire ne comportait pas de document justifiant du titre habilitant la société pétitionnaire à déposer une demande ; que le dossier ne mentionnait ni l'emplacement des 4 arbres devant être abattus ni ceux qui devaient être plantés, ni la représentation à long terme de 4 arbres ; que le projet a méconnu les dispositions de l'article UA 1-2 du POS ; que le dossier de demande n'a pas comporté les éléments techniques relatifs à l'isolement acoustique contre les bruits extérieurs ; que son préjudice sur le manque à gagner n'est qu'éventuel ; qu'elle ne justifie pas avoir payé les frais allégués pour la réalisation de ses projets ; qu'elle ne peut solliciter deux fois l'indemnisation des honoraires d'avocat ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 octobre 2008, présenté pour la Société Eiffage Immobilier Centre Est ; elle conclut au rejet de la requête et demande que la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY soit condamnée à lui verser la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que M. A avait qualité pour agir ; que le jugement relève à juste titre la généralité et le caractère en définitive théorique des orientations du PADD ; que le permis de construire aurait dû être accordé ; qu'elle disposait d'un titre l'habilitant à construire ; que le lien de causalité entre l'illégalité du sursis à statuer et le préjudice est établi ; que le Tribunal a fait une juste appréciation des éléments comptables et financiers produits ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 décembre 2008, présenté pour la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY ; elle conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 2 juillet 2009 fixant la clôture d'instruction au 2 septembre 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2009, présenté pour la Société Eiffage Immobilier Centre Est ; elle conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er avril 2010, présenté pour la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 mai 2010, présenté pour la Société Eiffage Immobilier Centre Est ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2010 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

- les observations de Me Eard-Aminthas, avocat de la COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY, et celles de Me Brocheton, avocat de la Société Eiffage Immobilier Centre Est ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que par un jugement en date du 29 novembre 2007, le Tribunal administratif de Grenoble a condamné la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY à verser à la Société Eiffage Immobilier Centre Est la somme de 500 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2004, en réparation du préjudice résultant de l'échec de son projet immobilier ; que la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY relève appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de la Société Eiffage devant le tribunal administratif :

Sur la responsabilité de la COMMUNE de SAINT-GENIS-POUILLY :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme alors applicable: A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ; qu'aux termes de l'article L. 123-1 du même code, les plans locaux d'urbanisme comportent un projet d'aménagement et de développement durable qui définit les orientations générales d'aménagement et d'urbanisme retenues pour l'ensemble de la commune ... / ... Les plans locaux d'urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols ; que si le projet d'aménagement et de développement durable n'est pas directement opposable aux demandes d'autorisation de construire, il appartient à l'autorité compétente de prendre en compte les orientations d'un tel projet, dès lors qu'elles traduisent un état suffisamment avancé du futur plan local d'urbanisme, pour apprécier si une construction serait de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution de ce plan ;

Considérant que la révision du plan local d'urbanisme de Saint-Genis-Pouilly a été prescrite le 3 juillet 2001 ; que la délibération du 7 octobre 2003, visée par la décision de sursis à statuer se borne à approuver les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) qui devaient être développées dans le futur plan ; que la commune fait valoir l'existence de difficultés de stationnement dans le secteur du projet litigieux ; que les orientations du PADD à approuver prévoyaient notamment un accompagnement de la commune vers le statut de petite ville, en créant les conditions d'un meilleur fonctionnement urbain en matière de transport, de déplacement et de stationnement ; que, ces orientations très générales, ne permettent pas de considérer que le projet envisagé était de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan ; que, par suite, c'est à bon droit, que les premiers juges ont estimé que la décision en litige était entachée d'erreur d'appréciation ; que toutefois, si cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune, elle n'ouvre droit à réparation que dans la mesure où elle a été à l'origine d'un préjudice direct et certain ;

Considérant que la Société Eiffage Immobilier Centre Est, alors dénommée Société Eiffage Immobilier Rhônes-Alpes Auvergne, souhaitant acquérir un terrain à Saint-Genis-Pouilly, pour réhabiliter une ancienne ferme existante a d'abord fait part à la commune de sa volonté de réaliser une maison d'accueil pour personnes âgées et dépendantes ; que le conseil municipal de Saint-Genis-Pouilly a accueilli favorablement cette proposition et sollicité par délibération en date du 5 novembre 2002, l'avis du conseil général de l'Ain ; que cependant, il est constant que la Société Eiffage Immobilier Centre Est n'a pas demandé dans les délais impartis les agréments nécessaires et a renoncé à ce projet ; qu'elle est donc à l'origine de l'échec de ce premier projet ; que la Société Eiffage Immobilier Centre Est a ensuite envisagé une autre opération comprenant 52 logements collectifs et commerces ; que, par arrêté du 21 octobre 2003, le maire de Saint-Genis-Pouilly a rejeté la demande de permis de construire afférente à ce second projet ; que la société n'a pas contesté ce refus ; que la Société Eiffage Immobilier Centre Est a, modifié son deuxième projet et déposé une nouvelle demande d'autorisation, relative à la réalisation de 44 logements et deux commerces, qui a fait l'objet du sursis à statuer litigieux, par arrêté du 9 février 2004 ; que la société Eiffage Immobilier Centre Est n'a pas davantage contesté cet acte, mais a seulement sollicité l'indemnisation de son préjudice lié à l'échec de l'opération immobilière envisagée ; que, par un courrier en date du 27 avril 2004, les propriétaires du terrain d'assiette du projet ont entendu ne pas donner suite au compromis de vente qui avait été conclu initialement le 2 décembre 2002 et dont ils avaient accepté la prorogation à plusieurs reprises ; qu'ainsi le préjudice dont se prévaut la société trouve son origine tant dans le retard mis à conclure l'acquisition du terrain que dans l'échec des deux premiers projets ; que, dès lors, dans ces circonstances, l'illégalité fautive de l'arrêté du 9 février 2004 n'est, la cause ni exclusive ni déterminante du préjudice allégué ; que la Société Eiffage Immobilier Centre Est ne peut en conséquence se prévaloir d'un préjudice direct et certain ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE de SAINT-GENIS- POUILLY est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à verser la somme de 500 000 euros à la Société Eiffage Immobilier Centre Est ; que le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 29 novembre 2007 doit être annulé et la demande présentée par la Société Eiffage Immobilier Centre Est doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE de SAINT-GENIS- POUILLY qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante la somme que demande la Société Eiffage Immobilier Centre Est au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la Société Eiffage Immobilier Centre Est le versement de la somme de 1 200 euros, au titre de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 29 novembre 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la Société Eiffage Immobilier Centre Est devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la Société Eiffage Immobilier Centre Est versera à la COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY une somme de 1 200 euros.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE de SAINT-GENIS POUILLY, et à la Société Eiffage Immobilier Centre Est.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2010 à laquelle siégeaient :

M. Fontbonne, président,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 29 juin 2010.

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N° 08LY00245

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00245
Date de la décision : 29/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SCP VEDESI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-29;08ly00245 ?
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