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01/03/2016 | FRANCE | N°14LY03792

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 01 mars 2016, 14LY03792


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1102834 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 décembre 2014 et le 19 octobre 2015, M.B..., repré

senté par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1102834 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 décembre 2014 et le 19 octobre 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 octobre 2014 ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- l'administration ne pouvait imposer, au titre des revenus 2008, en qualité de revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement de l'article 111 a du code général des impôts, la totalité du solde de son compte courant d'associé au 31 décembre ; en effet, seule la variation d'un solde débiteur de compte courant entre l'ouverture et la clôture de l'exercice est susceptible de constituer un revenu distribué, ce qui exclut la somme de 11 589 euros, correspondant au report à nouveau des déficits antérieurs constatés sous le régime des revenus fonciers ; la variation du solde débiteur du compte courant de M. B...au cours de l'année 2008 représente 5 576 euros ;

- hormis 3 000 euros prélevés par M.B..., aucune somme n'a été mise à sa disposition par la SCI Saint Jacques durant l'année 2008 ; la SCI ne disposait pas des fonds nécessaires pour procéder à une telle avance ; l'écriture en " opérations diverses " en débit du compte courant d'associé de 10 041 euros, passée le 31 décembre 2008, correspond à la quote-part revenant à M. B...dans la perte comptable de 2007, quote-part ramenée par l'administration à 2 576 euros à la suite du contrôle fiscale de la SCI ayant conduit l'administration à ramener le déficit de la SCI à 20 604 euros ; la constatation de déficits de la SCI avant le 1er janvier 2008 par le débit du compte courant de M. B...ne correspond en aucune manière à un prêt ou à une avance qui aurait été consentie par la SCI à M. B...; il s'agit d'une écriture comptable erronée, l'affectation d'une quote-part de déficit foncier ne pouvant constituer un revenu distribué ; à supposer qu'il s'agisse d'un revenu, de telles avances auraient été en partie faites alors que la société n'était pas soumise à l'impôt sur les sociétés, ce qui fait obstacle à l'application de l'article 111 a du code général des impôts ; il n'existe aucune décision d'assemblée des associés de la SCI ayant décidé que les associés supporteraient les pertes de la société à concurrence de leur quote-part de détention dans le capital social ; tout au plus ces écritures pourraient traduire l'existence d'un engagement d'apport contracté par M. B..., mais non la mise à disposition par la SCI de sommes à son profit ; l'inscription au débit du compte courant de M. B...d'une quote-part du déficit de la société durant les exercices antérieurs à 2008 est radicalement insusceptible de constituer un désinvestissement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er avril 2015 et le 9 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :

- l'inscription au débit des comptes courants des associés des pertes antérieurement subies par la SCI ne résulte pas d'une erreur comptable puisque dans ce type de société, les associés peuvent décider de prendre les pertes à leur charge, à proportion de leurs droits dans la société, en application de l'article 1844-1 du code civil en l'absence de clause statutaire, et qu'en pareil cas, l'affectation de la perte est comptabilisée au débit du compte 455 " associés-comptes courants " ; il appartient à M. B...d'apporter la preuve, qu'il est seul en mesure de produire, qu'une telle décision n'a pas été prise par l'assemblée générale des associés, en produisant les statuts de la société et les procès verbaux d'assemblée ;

- les dispositions de l'article 202 ter II à IV du code général des impôts relatif aux conséquences de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés d'une société de personne dont les revenus n'avaient pas la nature de bénéfices industriels et commerciaux, comme c'était le cas de la SCI qui exerçait, jusqu'au 31 décembre 2007, une activité de location d'immeubles dont les bénéfices étaient soumis à l'impôt sur le revenu des associés avant qu'elle ne se mette à exercer une activité de marchand de biens, soumise à l'impôt sur les sociétés, s'appliquent à la SCI ; les valeurs inscrites au bilan d'ouverture de la première période d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés doivent être considérées comme représentant les valeurs auxquelles les éléments d'actif et de passif sont apportés à la nouvelle personne fiscale par la société de personnes antérieurement soumise à l'impôt sur le revenu ; il s'agit d'une décision de gestion opposable à l'entreprise ; alors que chaque associé était censé supporter la charge de sa quote-part dans les pertes antérieures, la nouvelle personne fiscale, issue du changement fiscal de la SCI, a consenti à ses associés au titre de l'année 2008, en s'abstenant de leur demander le comblement des dettes auxquelles ils étaient tenus, une avance imposable sur le fondement de l'article 111 a du code général des impôts.

Par ordonnance du 12 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société civile immobilière Saint Jacques, l'administration fiscale a constaté, au 31 décembre 2008, que le compte courant d'associé de M. A...B..., associé de ladite société à hauteur de 12,5 % du capital, présentait un solde débiteur de 25 630 euros ; que l'administration ayant estimé que ce solde débiteur constituait un revenu distribué sur le fondement de l'article 111 a du code général des impôts, elle a adressé le 20 septembre 2009 à M. B...une proposition de rectification afin d'imposer cette somme au titre de l'année 2008 à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, en tant que revenus de capitaux mobiliers ; qu'à la suite des observations présentées par M.B..., l'administration a ramené cette somme à 18 165 euros ; que les impositions supplémentaires en résultant ont été mises en recouvrement le 30 septembre 2010 ; que M. B... relève appel du jugement du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge desdites impositions et des pénalités correspondantes ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 108 du code général des impôts : " Les dispositions des articles 109 à 117 fixent les règles suivant lesquelles sont déterminés les revenus distribués par : / 1° Les personnes morales passibles de l'impôt prévu au chapitre II du présent titre ; " ; qu'aux termes de l'article 109 du même code : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. Les sommes imposables sont déterminées pour chaque période retenue pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés par la comparaison des bilans de clôture de ladite période et de la période précédente selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) " ; qu'en application de ces dispositions, doit être regardée comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, la variation positive au cours d'une année du solde débiteur d'un compte courant d'associé ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a décidé d'imposer, sur le fondement de l'article 111 a précité du code général des impôts, le solde débiteur du compte courant d'associé de M. B...au 31 décembre 2008, dont le montant initial de 24 630 euros a été ramené, par l'administration fiscale, à 17 165 euros ; que ce solde débiteur résulte de trois écritures comptables portées au débit du compte courant de M. B...au cours de l'année 2008 ; que le 1er janvier 2008, une écriture de 11 589 euros " à nouveau " a été portée en débit du compte courant d'associé de M.B..., correspondant à la quote-part de M. B...dans les pertes comptables de la SCI antérieures à l'année 2007 ; que le 18 septembre 2008, une écriture comptable d'un montant de 3 000 euros a été portée au débit du compte courant, pour un prélèvement effectué par M. B...dans la caisse sociale ; qu'enfin, le 31 décembre 2008, une écriture de 10 041 euros intitulée " opérations diverses " a été passée, correspondant à la quote-part de M. B...dans les pertes comptables de la SCI au titre de l'année 2007 ; que la vérification de comptabilité de la SCI ayant conduit l'administration à ramener le déficit de la SCI à 20 604 euros au titre de l'année 2007, l'administration fiscale a décidé de ramener la dernière écriture de 10 041 euros à 2 576 euros, ce qui a ramené le solde débiteur du compte courant de 24 630 euros à 17 165 euros ;

4. Considérant que M. B...ne conteste pas qu'il a effectué le 18 septembre 2008 un prélèvement pour un montant de 3 000 euros dans les caisses sociales de la société ; que cette somme a été mise à sa disposition au titre de l'année 2008 par la société sans contrepartie ;

5. Considérant que l'article 1844-1 du code civil prévoit que, sauf clause contraire des statuts, la part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social ; que les associés d'une société de personnes peuvent décider, après la clôture de l'exercice, plutôt que de reporter un résultat qui est déficitaire en report à nouveau négatif dans les comptes de la société, de répartir entre eux les pertes de la société en les prenant à leur charge ; que, dans un tel cas, le montant affecté à chaque associé est inscrit au débit de son compte courant d'associé et les soldes débiteurs des comptes courants sont inscrits à l'actif du bilan de la société ; que si M. B...fait valoir que l'inscription, le 31 décembre 2008, au débit de son compte courant d'associé du montant correspondant à sa quote-part dans les pertes sociales de la SCI au titre de l'année 2007, constitue une erreur comptable, une telle décision n'ayant jamais été prise par les associés, il lui appartient, ainsi que l'avait déjà noté le tribunal, dès lors que les écritures comptables de la SCI, dont il n'y a pas de raison de penser qu'elles ne seraient pas probantes, font foi jusqu'à preuve du contraire, d'apporter la preuve, qu'il est seul en mesure de produire, qu'une telle décision n'a pas été prise par les associés, en produisant tous éléments dont il dispose tel que le procès verbal de l'assemblée générale des associés ou les statuts de la société ; que le solde débiteur résultant de l'inscription d'une telle dette dans le compte courant d'un associé constitue une avance accordée par la société à cet associé et peut, dès lors, même si le contribuable ne l'a pas appréhendée, et même en l'absence de " désinvestissement " de la société au profit de l'associé, entrer dans le champ de l'article 111 a du code général des impôts précité ; que la circonstance que les pertes réparties entre les associés concernent l'exercice 2007 au cours duquel les résultats de la société étaient encore soumis à l'impôt sur le revenu ne fait pas obstacle à l'application de ces dispositions dès lors qu'au cours de l'exercice 2008, période au cours de laquelle le choix a été opéré par les associés de répartir entre eux les pertes plutôt que de reporter le déficit, la SCI avait changé de régime fiscal et entrait dans le champ du 1° de l'article 108 précité du code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a pris en compte l'écriture comptable du 31 décembre 2008, qu'elle a ramenée après la vérification de comptabilité de la société à 2 576 euros, pour évaluer le montant du solde débiteur de M. B...et déterminer le montant des revenus distribués par la société ;

6. Considérant que l'écriture comptable en débit de 11 589 euros faite le 1er janvier 2008 sur le compte-courant de M. B...porte la mention " à nouveau " ; qu'il est constant, et non contesté, qu'il s'agit du report, sur le compte courant de M.B..., du solde débiteur de son compte-courant du précédent exercice, lequel correspondait à la quote-part de M. B... dans les pertes comptables de la SCI antérieures à l'année 2007 ; que cette écriture ne correspondant pas à des revenus de l'année 2008, mais d'années antérieures, et alors au surplus que la SCI était alors soumise à l'impôt sur le revenu, l'administration ne pouvait, malgré les dispositions de l'article 202 ter du code général des impôts, estimer que l'inscription de ce report à nouveau constituait, pour l'année 2008, une décision de gestion de la société nouvellement soumise à l'impôt sur les sociétés et intégrer cette somme dans les revenus distribués à M. B... au titre de l'année 2008 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 résultant du rehaussement, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, de la somme représentant en base 11 589 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales de M. B...au titre de l'année 2008 est réduite d'une somme de 11 589 euros.

Article 2 : M. B...est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes correspondant à cette réduction des bases d'imposition.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1102834 en date du 16 octobre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 2 février 2016 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er mars 2016.

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N° 14LY037902


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03792
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : CABINET DURAFFOURD- GONDOUIN-PALOMARES BARICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-01;14ly03792 ?
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