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05/07/2016 | FRANCE | N°15LY00563

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15LY00563


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1202790 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 février 2015, Mme B...A..., représentée par Me D..., demande à

la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 décembre 2014 ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1202790 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 février 2015, Mme B...A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 décembre 2014 ;

2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... A...soutient que :

Sur le bien fondé de l'imposition :

- la maison qu'elle a cédée, qui constituait sa résidence principale jusqu'à sa mise en vente en mars 2015, entrait dans le champ de l'exonération de plus-value prévue à l'article 150 U du code général des impôts, la cession étant intervenue dans un délai normal de vente compte tenu des conditions du marché et des caractéristiques du bien, qui n'a pas été occupé pendant la période de mise en vente, et qui comportait à la fois une partie habitation et une zone de bureaux et d'entrepôt, dans une zone artisanale ;

- elle est bien fondée à se prévaloir des prévisions de l'instruction 8-M-1-09 du 31 mars 2009 et du paragraphe n° 22 de la fiche n°2 de l'instruction 8-M-1-04 du 14 janvier 2004.

Sur la pénalité de l'article 1728 du code général des impôts :

- les dispositions de l'article 1728 ne visent que le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt, ce qui ne la concerne pas puisqu'elle était dispensée du dépôt de la déclaration, la cession concernant sa résidence principale ;

- il convient au juge, conformément à la réponse faite par le Conseil constitutionnel le 17 mars 2011 sur la question prioritaire de constitutionnalité n° 2010-104, d'apprécier la gravité de l'infraction commise ; qu'en l'espèce, ayant déclaré dans un acte soumis à enregistrement qu'à son sens elle n'était pas soumise à cette déclaration, elle n'a commis aucune infraction.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre des finances et des comptes publics soutient que les moyens soulevés par Mme B...A...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 janvier 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 9 février 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 7 avril 2016, la clôture d'instruction a été reportée au 25 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que Mme B...A...a vendu le 18 janvier 2007 une maison sise 14 rue des Jonquilles à Froges (38) ; qu'elle s'est placée sous le bénéfice de l'exonération de la plus-value de cession des immeubles qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la vente prévue par le 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts ; que l'administration, après l'avoir vainement mise en demeure de souscrire une déclaration de plus value, a décidé de remettre en cause le bénéfice de cette exonération en lui adressant une proposition de rectification datée du 22 mars 2010 ; qu'en réponse aux observations présentées par Mme B...A...le 23 avril 2010, l'administration a maintenu les rectifications envisagées le 20 avril 2011 ; que les cotisations supplémentaires en résultant en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, ainsi que les pénalités afférentes ont été mises en recouvrement le 8 septembre 2011 ; que Mme B...A...relève appel du jugement du 18 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I.-Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques (...), sont passibles de l'impôt sur le revenu (...). II.-Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession. " ;

3. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, un immeuble ne perd pas sa qualité de résidence principale du cédant au jour de la cession du seul fait que celui-ci a libéré les lieux avant ce jour, à condition que le délai pendant lequel l'immeuble est demeuré inoccupé puisse être regardé comme normal ; qu'il en va ainsi lorsque le cédant a accompli les diligences nécessaires, compte tenu des motifs de la cession, des caractéristiques de l'immeuble et du contexte économique et réglementaire local, pour mener à bien cette vente dans les meilleurs délais à compter de la date prévisible du transfert de sa résidence habituelle dans un autre lieu ;

4. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si un contribuable remplit les conditions légales d'une exonération ; que Mme B...A...ayant été taxée d'office pour défaut de déclaration, malgré une mise en demeure qui lui a été adressée, la charge de la preuve lui incombe en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant que si Mme B...A...fait valoir que la maison située rue des Jonquilles à Froges a constitué sa résidence principale jusqu'à sa mise en vente en mars 2005, elle n'a produit aucun élément permettant de justifier de la date à laquelle elle a déménagé de sa résidence située à Froges à sa nouvelle résidence située à Fontaine, bien que l'administration l'ait invitée à le faire ; qu'elle a indiqué, dès le 23 septembre 2004, dans la déclaration de création d'une SARL dont elle était gérante, résider à Fontaine (Isère) boulevard Joliot Curie ; que c'est cette adresse qu'elle a continué à déclarer comme étant sa résidence principale dans ses différentes déclarations fiscales déposées en octobre 2005, mai 2006 et octobre 2006 ; qu'en outre, c'est également cette adresse qui figurait dans le mandat de vente qu'elle a signé avec le groupe Foncia en juin 2005 ; que, par suite, elle doit être regardée comme ayant libéré la résidence qu'elle occupait rue des Jonquilles à Froges depuis plus de vint-sept mois lorsqu'elle l'a cédée le 18 janvier 2007 ; que si l'intéressée, qui n'a pas exposé les motifs de la cession, fait valoir qu'elle a accompli toutes les diligences nécessaires pour mener à bien cette vente dans les meilleurs délais, en signant notamment deux mandats de vente, l'un le 15 mars 2005 avec Square Habitat, l'autre le 13 juin 2005 avec le groupe Foncia, elle ne justifie d'aucune diligence pour la mise en vente de son bien pendant les six mois précédents ; qu'en outre, si elle fait valoir que son bien était atypique, du fait de sa situation géographique dans une zone artisanale et de sa configuration alliant une habitation, un entrepôt et des bureaux, ce qui justifierait un tel délai de vente et ce qui l'aurait conduit à devoir à plusieurs reprises abaisser le prix de vente, elle ne justifie pas de conditions particulièrement difficiles de cession de ce type de bien, dans le contexte économique des années 2005 à 2007 et ne justifie pas avoir ramené, dans un délai raisonnable, le prix de cession de son bien, au prix du marché, étant précisé que le prix de vente finalement consenti a été de 28 % inférieur au prix de mise en vente, net de frais d'agence, de juin 2005 ; que, dans ces conditions, le délai de plus de 27 mois pendant lequel l'immeuble a été inoccupé doit être regardé comme anormalement long et c'est à bon droit que l'administration a estimé que celui-ci avait perdu sa qualité de résidence principale au jour de la cession ;

En ce qui concerne le terrain de la doctrine :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) " ;

7. Considérant que Mme B...A...n'est pas fondée à se prévaloir des prévisions du paragraphe n° 22 de la fiche n° 2 de la doctrine administrative BOI 8-M-1-04 du 14 janvier 2004, ces prévisions, dans lesquelles au demeurant la requérante n'entre pas puisqu'elle sont relatives aux immeubles occupés jusqu'à leur mise en vente, ne comportant aucune interprétation formelle de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application ; que, par ailleurs, la requérante ne peut utilement se prévaloir des prévisions de l'instruction 8-M-1-09 du 31 mars 2009, postérieure à l'imposition litigieuse ;

Sur les pénalités :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) " ;

9. Considérant que la loi a elle-même assuré la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés ; que le juge décide, dans chaque cas, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, soit de lui substituer un autre taux parmi ceux prévus par les autres dispositions de l'article 1728 s'il l'estime légalement justifié, soit de ne laisser à la charge du contribuable que les intérêts de retard, s'il estime que ce dernier ne s'est pas abstenu de souscrire une déclaration ou de déposer un acte dans le délai légal ; qu'il peut ainsi proportionner les pénalités selon la gravité des agissements commis par le contribuable ;

10. Considérant que la cession de la résidence sise à Froges ne concernant pas, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, la cession de la résidence principale de Mme B...A..., cette dernière aurait dû déclarer la plus value de cession de ce bien ; que Mme B...A...n'ayant pas déclaré cette plus value, malgré la mise en demeure que l'administration lui a adressée, l'administration était fondée à appliquer la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées du b) de l'article 1728 du code général des impôts, sans que puisse avoir d'incidence sur l'application de cette pénalité la circonstance que Mme B...A...ait, selon ses dires, en toute bonne foi cru pouvoir bénéficier de l'exonération de plus-value de cession ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme B... A...la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.

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N° 15LY00563

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00563
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-08-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : CABINET DURAFFOURD- GONDOUIN-PALOMARES BARICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-07-05;15ly00563 ?
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