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07/11/2017 | FRANCE | N°15LY03028

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 07 novembre 2017, 15LY03028


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée spontanément acquittés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, d'un montant de 12 602 euros.

Par un jugement n° 1203200 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 septembre 2015, M. D..., représentée par Me C..., demande à la cour :
r>1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 6 juillet 2015 ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée spontanément acquittés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, d'un montant de 12 602 euros.

Par un jugement n° 1203200 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 septembre 2015, M. D..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 6 juillet 2015 ;

2°) de lui accorder la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée spontanément acquittés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, d'un montant de 12 602 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'imposition litigieuse est contraire à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, telle qu'elle est issue d'un arrêt du 27 avril 2006 et méconnait les termes de l'article 13 A de la sixième directive du 17 mai 1977 ;

- le refus de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a spontanément acquitté est contraire au principe d'égalité devant la loi fiscale et contrevient au principe de neutralité fiscale ;

- la carence de l'Etat à produire les textes d'application de la loi du 4 mars 2002 ne peut lui être opposée ; le Conseil d'Etat a d'ailleurs reconnu cette carence par un arrêt du 7 mars 2008 ;

- il justifie d'une activité d'au moins cinq années consécutives et continues au cours des huit dernières années ; il communique un nombre significatif de fiches patients qui précisent les actes pratiqués, se rapportant aux années en litige ; s'il n'a pas encore reçu d'autorisation du titre professionnel de chiropracteur de la part du directeur de l'Agence régionale de santé d'Ile de France, c'est parce que celui-ci n'a pas encore réuni la commission compétente.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre expose qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 25 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances persiste dans ses écritures.

Il expose que les pièces produites par le requérant le 25 juillet 2016 ne sont pas de nature à établir la nature exacte des actes pratiqués et les conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; il ne démontre pas que les actes de chiropraxie pratiqués durant la période en lige seraient de qualité équivalente à ceux dispensés par les personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation française, de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu'il revendique.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats Membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires- Système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

- la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 portant loi de finances rectificative pour 2007 et notamment son article 58 ;

- le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de la chiropraxie ;

- le décret n° 2011-1127 du 20 septembre 2011 relatif à la formation des chiropracteurs et à l'agrément des établissements de formation en chiropraxie ;

- l'arrêté du 7 janvier 2011 pris pour l'application du décret n° 2011-32 ;

- l'arrêté du 20 septembre 2011 pris pour l'application du décret n° 2011-1127 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

1. Considérant que M. D... exerce une activité de chiropracteur à Annecy ; qu'il a spontanément acquitté la taxe sur la valeur ajoutée sur les prestations de soins qu'il dispense à ses patients au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 ; que le 17 novembre 2011, il a, par la voie de son conseil, solliciter la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée au titre de cette période pour un montant de 12 602 euros ; que M D... a contesté devant le tribunal administratif de Grenoble la décision de rejet implicite de sa demande de restitution qui, par un jugement du 6 juillet 2015 a rejeté sa demande ; que, par la présente requête, M D... relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions aux fins de restitution :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en démontrer le mal-fondé ; qu'en l'espèce, il appartient à M. D... de justifier du caractère exagéré des cotisations de taxe dont il demande la restitution, en établissant les circonstances de fait qu'il invoque au soutien de son argumentation ;

3. Considérant qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'il appartient au contribuable exerçant une activité de prestation de soins de démontrer qu'il dispose, pour la fourniture de telles prestations de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération de cette taxe ;

4. Considérant que pour obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés par M. D... à raison de ses prestations de chiropraxie au cours de la période litigieuse, l'intéressé doit démontrer qu'il disposait, pour la fourniture de ces prestations, de qualifications professionnelles propres à lui assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies, selon le cas, par un médecin ou par un membre d'une profession de santé réglementée ; qu'une telle appréciation ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes de chiropraxie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; qu'il appartient dès lors à M. D..., pour mettre le juge à même de s'assurer que la condition tenant à la qualité des actes était remplie, de produire, d'une part, et sous réserve de l'occultation des noms des patients, des éléments relatifs à sa pratique permettant d'appréhender, sur une période significative, la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à ses qualifications professionnelles ;

5. Considérant qu'au soutien de sa demande de restitution, M. D... se prévaut, d'une part, de la formation qu'il a suivie après une licence en sciences au Los Angeles College of Chiropractic, d'une durée de quatre années, et fait valoir que cette formation est conforme aux normes édictées par l'Organisation Mondiale de la Santé et aux standards des agences d'accréditation des établissements d'enseignement chiropratique ; qu'il fait également valoir la circonstance que, dans le cadre des dispositions transitoires du décret du 7 janvier 2011, il a obtenu le 17 octobre 2012 l'autorisation d'exercer la chiropraxie délivrée par l'agence régionale de santé d'Ile de France ; qu'il résulte ainsi de l'instruction qu'il disposait, durant la période d'imposition en litige, des qualifications professionnelles propres à lui assurer un niveau de qualité équivalent à celui des prestations fournies selon le cas par un médecin ou par un masseur-kinésithérapeute ; que le requérant produit également un nombre significatif de fiches patients, dont les noms sont occultés, se rapportant aux années en litige qui, dans le respect du secret médical, démontrent que les actes alors pratiqués n'étaient pas interdits et n'ont pas été accomplis sans avis médical préalable lorsque celui-ci était requis ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, M. D... établit que les actes qu'il a accomplis lui ouvraient droit au bénéfice de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée sur la période en cause ; qu'il est, par conséquent, en droit de prétendre à la restitution des sommes versées au titre de cette taxe au cours de la période litigieuse ;

6. Considérant que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. D... au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 6 juillet 2015, est annulé.

Article 2 : Il est accordé à M. D... restitution de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, à concurrence d'une somme de 12 602 euros.

Article 3 : L'Etat versera à M. D... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Terrade et MmeB..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 7 novembre 2017.

2

N° 15LY03028


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03028
Date de la décision : 07/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LAVOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-11-07;15ly03028 ?
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