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27/02/2018 | FRANCE | N°16LY01844

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 27 février 2018, 16LY01844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... B...a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 à 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par une ordonnance du 27 septembre 2012, le président du tribunal administratif de Dijon a transmis le dossier de sa requête au tribunal administratif de Grenoble.

Par un jugement n° 1205138 du 29 mars 2016, le tribunal admin

istratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... B...a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 à 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par une ordonnance du 27 septembre 2012, le président du tribunal administratif de Dijon a transmis le dossier de sa requête au tribunal administratif de Grenoble.

Par un jugement n° 1205138 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 mai 2016, M. B..., représenté par Me A...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 mars 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Grenoble a méconnu le principe du contradictoire en ne laissant pas au conseil de M. B... le délai nécessaire pour obtenir auprès de ses confrères l'ensemble des pièces de procédure indispensables à la défense de ses intérêts ;

- l'administration ne pouvait plus, en 2009, exercer son droit de reprise sur les années 2004 et 2005 ;

- les dépenses de sponsoring ont été réintégrées à tort dans les résultats de la société DJP ;

- l'ensemble des dépenses de véhicules de la société sont justifiés par les déplacements professionnels des salariés et du gérant ;

- l'achat ACE HOME CINEMA et l'abonnement TPS sont nécessaires aux réunions et rendez-vous du groupeB..., ces charges supportées par DJP IMMO, ayant été refacturées via les conventions de gestion.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure,

- et les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B... relève appel du jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 à 2008, à raison notamment des résultats de la vérification de comptabilité de la SARL DJP Immo dont il est associé à hauteur de 50 % des parts et gérant ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... a introduit sa requête devant le tribunal administratif de Dijon ; que le 27 septembre 2012, le président du tribunal administratif de Dijon a transmis le dossier de sa requête au tribunal administratif de Grenoble ; que ni le tribunal administratif de Dijon ni celui de Grenoble n'ont été informés de la constitution de Me A... C...pour la défense des intérêts de M. B... dans le cadre de cette instance avant le 8 février 2016 ; qu'après avoir été informé par l'intéressée de sa constitution, le tribunal a, le 8 février 2016, d'une part, reporté l'audience, initialement prévue le jour même, au 15 mars 2016 et, d'autre part, décidé que l'instruction serait close le 22 février suivant ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, depuis l'enregistrement, le 11 juin 2012, date antérieure à la constitution de Me A...C..., qui indique être l'avocat de M. B...depuis octobre 2012, du mémoire en réplique produit par le conseil de M. B..., aucune production n'avait été versée aux débats par les parties ; que, dès lors, et en l'absence de toute évolution du dossier depuis cette date, le délai retenu par le tribunal pour renvoyer l'affaire et mettre Me A... C...à même de présenter d'éventuelles observations sur une procédure dans laquelle rien n'avait été produit depuis plus de quatre mois avant sa constitution était suffisant ; que le principe du contradictoire n'a, par suite, pas été méconnu par le tribunal ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la prescription :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, alors en vigueur : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. " ; qu'en vertu des dispositions de l'article 1600-0 C du code général des impôts, et des dispositions combinées des articles 1600-0 G, 1600-0 F bis du même code et de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, ces délais sont applicables aux contributions sociales afférentes aux sommes soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration fiscale ne peut se prévaloir du délai de reprise dérogatoire prévu par les dispositions précitées de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales si elle disposait d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en oeuvre des procédures d'investigation dont elle dispose, d'établir, dans le délai normal de reprise, les insuffisances ou omissions d'imposition ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes de la proposition de rectification adressée le 21 décembre 2009 à M. B... que le rehaussement de son revenu imposable des années 2004 et 2005 est fondé sur des informations issues d'une instruction judiciaire ouverte contre l'intéressé, dont l'administration a obtenu communication auprès du tribunal de grande instance de Chambéry en 2009, en application des articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, au cours de laquelle il était reproché à M. B... d'avoir fait, de mauvaise foi, un usage des biens et crédits de la société contraire à l'intérêt de celle-ci en achetant un montre Rolex d'une valeur de 9 500 euros pour son usage personnel, en lui faisant supporter le coût d'une thalassothérapie effectuée par lui et sa compagne pour un coût de 5 683 euros, en faisant supporter à la société la charge de cinq véhicules mis à sa disposition et à celle de son fils Michaël et de sa concubine, en versant une somme de 5 000 euros à la SARL Eros n'Ross et en prenant en charge les coûts de formation à la conduite sportive de son fils Michaël ; que, dans ces conditions, et alors même que le service a initialement exercé son droit de communication, dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société DJP Immo, pour obtenir la comptabilité de la société saisie par le juge judiciaire, les informations relatives aux omissions et insuffisances d'imposition de M. B... pour les années 2005 et 2006 ayant été révélées par l'instance pénale menée contre lui, l'administration fiscale a pu se prévaloir du délai de reprise dérogatoire alors prévu par les dispositions précitées de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort également des termes de la proposition de rectification du 21 décembre 2009 que les rectifications apportées à l'imposition primitive de M. B... pour l'année 2004 procèdent aussi de la remise en cause de la demi-part supplémentaire de quotient familial dont il a bénéficié en tant que parent isolé ; que si l'administration fiscale se réfère à un procès-verbal d'audition de garde à vue du 18 septembre 2007 dans lequel M. B... a reconnu vivre en concubinage, il ressort des termes même de la proposition de rectification que la qualité de parent isolé avait été remise en cause dès 2005, par une notification de redressement du 1er décembre 2005 ; que l'administration disposait, dès lors, d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en oeuvre des procédures d'investigation dont elle dispose, avant l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, d'établir sur ce point les omissions et insuffisances d'imposition reprochées à M. B... ; que ces omissions et insuffisances n'ayant pas été révélées par l'instance ouverte devant le tribunal de grande instance de Chambéry, l'administration ne pouvait dès lors bénéficier du délai de reprise dérogatoire pour remettre en cause la demi-part supplémentaire de quotient familial dont avait bénéficié M. B... ;

En ce qui concerne les dépenses de parrainage :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " ; que l'article 47 de l'annexe II dudit code précise que : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. " ; qu'au cas d'espèce, le contribuable ayant refusé les rectifications qui lui ont été notifiées selon la procédure contradictoire, l'administration supporte la charge de prouver l'existence, le montant et l'appréhension des sommes imposées en tant que revenus distribués entre les mains de M. B... ;

7. Considérant que l'administration fiscale a remis en cause la déduction en charges de frais de parrainage d'un montant total de 34 925,17 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et de 11 960 euros au titre de l'exercice clos en 2007 facturés à la société DJP Immo par les sociétés Tech1 Racing, Formula Motorsport, Stand 21, Future Racing, SG Formula et par l'association MRK, et présentées par la société DJP Immo comme correspondant à des frais de parrainage ;

8. Considérant que pour justifier du bien-fondé de ces réintégrations, l'administration soutient que ces frais, qui sont liés à la carrière automobile du fils de M. B..., MichaëlB..., sont dépourvus de caractère professionnel et n'ont pas été exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ; qu'elle invoque l'absence de tout contrat définissant les obligations du pilote envers la société et l'absence de contrepartie directe avérée d'une telle collaboration pour une société marchand de biens, les dépenses engagées étant ainsi sans rapport avec l'avantage attendu par l'entreprise ;

9. Considérant que M. B... affirme pour sa part que sa présence sur le lieu des compétitions automobiles et la notoriété de son fils lui ont permis de nouer de nombreux contacts dans le milieu industriel et celui de l'immobilier d'entreprise ; que s'il soutient que ce parrainage sportif est à l'origine de la génération d'un chiffre d'affaires à hauteur de 133 650 euros en 2006, de 112 194 euros en 2007 et de 292 740 euros en 2008, les actes de ventes produits par le requérant pour justifier des retombées économiques du parrainage sont conclus entre la société Holding B...et d'autre sociétés et non avec la société DJP Immo ; qu'aucun des documents produits ne montre l'existence d'un lien quelconque entre le parrainage sportif de la société DJP Immo et les ventes ainsi réalisées ; que les conventions conclues entre la société DJP Immo et la société Holding B...ne permettent pas de faire un lien direct entre les prestations réalisées par la société DJP Immo et les ventes qui auraient été réalisées par la société Holding B...grâce au parrainage ; que la réalité et la nature des contacts professionnels que la présence de M. B... lors des courses aurait permis de nouer n'est pas établie ; que dans ces conditions, et en dépit de la présence d'autocollants aux initiales de la société sur les véhicules automobiles de compétition apparaissant sur des photographies non datées versées au dossier, l'administration doit être regardée comme établissant que ces dépenses, sans rapport avec l'avantage attendu pour l'entreprise, ne peuvent être regardées comme ayant été exposées dans son intérêt direct et qu'elles pouvaient ainsi être réintégrées dans les bases imposables de la société ;

En ce qui concerne les dépenses de véhicules :

10. Considérant qu'il y a lieu d'écarter la contestation développée par M. B... contre ce chef de rectification par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

En ce qui concerne les dépenses personnelles :

11. Considérant que l'administration a réintégré dans les bases imposables de la SARL DJP Immo des dépenses correspondant à l'acquisition d'un home cinema et à un abonnement à la chaîne TPS, au motif qu'il s'agit de dépenses personnelles non engagées dans l'intérêt de la société ; qu'eu égard à l'activité de la société et à la nature de ces dépenses, M. B... ne remet pas en cause le bien-fondé de cette réintégration en se bornant à indiquer que ces dépenses sont nécessaires aux réunions et rendez-vous du groupe B...auquel elles seraient refacturées ;

En ce qui concerne l'appréhension des revenus par M. B... :

12. Considérant que l'administration fait valoir que M. B... détient la moitié du capital de la société DJP Immo dont il est le dirigeant, qu'il est ainsi maître de l'affaire ; que les sommes prises en charge au titre des frais de véhicules, de sponsoring et les dépenses personnelles ont profité directement ou indirectement à M. B..., pour ses besoins personnels ou ceux des membres de sa famille ; qu'elle justifie ainsi de l'appréhension par l'appelant des revenus distribués ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a refusé d'admettre que les impositions à l'impôt sur le revenu procédant de la remise en cause d'une demi-part de quotient familial au titre de l'année 2004 étaient prescrites et de lui accorder la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu correspondantes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. B... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2004 à raison de la remise en cause d'une demi-part de quotient familial.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 mars 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente assesseure,

Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 27 février 2018.

6

N° 16LY01844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01844
Date de la décision : 27/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BEN SALEM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-02-27;16ly01844 ?
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