La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2018 | FRANCE | N°15LY03156

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2018, 15LY03156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Razel-Bec a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Mâcon et la société Ingerop à l'indemniser des surcoûts et des préjudices qu'elles a supportés pour l'exécution du marché relatif au lot n° 3 " gros oeuvre " dans le cadre du réaménagement de l'esplanade Lamartine.

Par un jugement n° 0802353 du 9 juillet 2015, le tribunal a partiellement fait droit à sa demande en condamnant la commune de Mâcon à lui verser la somme de 145 482,74 euros TTC assortie d

e la révision selon la formule contractuelle et des intérêts moratoires à compter du 30...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Razel-Bec a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Mâcon et la société Ingerop à l'indemniser des surcoûts et des préjudices qu'elles a supportés pour l'exécution du marché relatif au lot n° 3 " gros oeuvre " dans le cadre du réaménagement de l'esplanade Lamartine.

Par un jugement n° 0802353 du 9 juillet 2015, le tribunal a partiellement fait droit à sa demande en condamnant la commune de Mâcon à lui verser la somme de 145 482,74 euros TTC assortie de la révision selon la formule contractuelle et des intérêts moratoires à compter du 30 avril 2008, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 septembre 2015 et 3 novembre 2016, la société Razel-Bec, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires au titre du planning de réalisation des émergences et du coût de prolongement des " moyens gros oeuvre " ;

2°) de condamner la commune de Mâcon à lui verser la somme de 374 419,22 euros TTC assortie de la révision des prix selon la formule contractuelle et des intérêts moratoires à compter du 30 avril 2008, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mâcon la somme de 3 000 euros au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- s'agissant des surcoûts directs liés au décalage du planning de réalisation des émergences en raison des défaillances de la maîtrise d'ouvrage dans l'obtention de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, le tribunal s'est appuyé uniquement sur le point 9.4 du rapport d'expertise et a opéré une confusion entre ses postes de réclamation ;

- ce décalage a eu pour conséquence des surcoûts directs liés à l'allongement des délais, évalués par l'expert à la somme de 128 136,28 euros HT ;

- s'agissant des surcoûts indirects liés au prolongement des " moyens gros oeuvre ", la réalisation des poutres butons en hiver a augmenté de trois semaines le délai d'exécution du lot gros oeuvre, le mauvais état du sol a augmenté ce délai d'une semaine et demi et le décalage du planning de réalisation concomitante des émergences et du cheminement doux de sept semaines, soit au total un allongement du délai d'exécution de onze semaines et demi ou 2,74 mois ; son préjudice à ce titre s'élève à la somme de 246 282,94 euros TTC.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2016, la commune de Mâcon, représentée par la Selas Adamas, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Razel-Bec au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- l'avis tardif de l'architecte des bâtiments de France n'est pas la seule raison du décalage du planning de réalisation des émergences ; la maîtrise d'oeuvre est en très grande partie responsable de l'allongement de la durée du chantier et la société Razel-Bec avait accumulé des retards successifs ;

- s'agissant de la réalisation des poutres butons en hiver, du mauvais état du sol et du chemin doux, ces postes de préjudices ont déjà fait l'objet d'une indemnisation par le tribunal et le montant demandé n'est pas justifié.

Par une ordonnance du 4 novembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 12 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel ;

- les conclusions de MmeB... ;

- et les observations de MeA..., représentant la société Razel-Bec et celles de Me C..., représentant la commune de Mâcon ;

Considérant ce qui suit :

1. Pour les besoins de l'opération de réaménagement de l'esplanade Lamartine, la commune de Mâcon, par un marché à prix global et forfaitaire, a confié en 2005 à la société Bec Frères, aux droits de laquelle est venue la société Razel-Bec, l'exécution du lot n° 3 " gros oeuvre ". Saisi par la société Razel-Bec, le tribunal administratif de Dijon a, par un jugement du 9 juillet 2005, partiellement fait droit à sa demande en condamnant la commune de Mâcon à lui verser au titre de l'indemnisation des surcoûts qu'elle a supportés pour l'exécution du marché la somme de 145 482,74 euros TTC euros assortie de la révision selon la formule contractuelle et des intérêts moratoires à compter du 30 avril 2008, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés. La société Razel-Bec relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires au titre du planning de réalisation des éléments en béton coloré dits " émergences " du parking souterrain de l'esplanade Lamartine et du coût de prolongement des " moyens gros oeuvre ".

2. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

3. S'agissant, en premier lieu, de la somme demandée en réparation des surcoûts directs liés au décalage du planning de réalisation des émergences du parking souterrain de l'esplanade Lamartine, il résulte de l'instruction que le choix de la teinte de ces émergences nécessitait de recueillir l'avis préalable de l'architecte des bâtiments de France (ABF). Après un premier avis défavorable, émis au vu du 1er échantillon qui lui a été présenté le 19 juillet 2006, l'ABF a émis un avis favorable le 15 septembre 2006 sur le second échantillon présenté. Le planning de réalisation des émergences en a été affecté puisque les travaux initialement planifiés du 22 juin au 10 août 2006 ont été réalisés entre le 9 octobre et le 24 novembre 2006. Il ressort toutefois du compte rendu de réunion de chantier n° 69 du 14 septembre 2006 que les travaux de réalisation du soubassement des émergences, planifiés du 13 juillet au 10 août 2006, ont été reportés sur la période du 3 au 25 août en raison du seul retard pris par la société Razel-Bec, de sorte que la réalisation des élévations extérieures était possible au mieux à la date du 25 août. Le choix de la teinte du béton a été validé le 15 septembre, soit vingt-et-un jours plus tard. Le planning de réalisation des émergences a donc été décalé, dans cette mesure seulement, par la tardiveté de cette validation par l'ABF. Si la société Razel-Bec soutient qu'elle a été contrainte, à cause du décalage du planning, de réaliser les émergences simultanément alors qu'elles devaient être réalisées successivement, cette circonstance entraînant un surcoût de main d'oeuvre, les effectifs ayant été portés de quatre à neuf compagnons, et un surcoût de matériel de coffrages, elle n'en justifie toutefois pas. Elle n'établit pas non plus que ce serait en raison de ce décalage de vingt-et-un jours qu'elle a dû recourir à des grues mobiles pour réaliser les émergences, en raison de la démobilisation de la grue à tour, de meilleur rendement. Dans ces conditions, sa demande de condamnation de la commune de Mâcon à l'indemniser de ce chef de préjudice, qui n'est pas davantage fondée en appel qu'en première instance, doit être rejetée.

4. En second lieu, la société Razel-Bec soutient que la réalisation des poutres butons en période hivernale a augmenté de trois semaines le délai d'exécution du lot gros oeuvre, que le mauvais état du sol a augmenté ce délai d'une semaine et demie et que le décalage du planning de réalisation concomitante des émergences et du cheminement doux, initialement prévu pour sept semaines, a porté l'allongement total à onze semaines et demie. Elle demande en conséquence la condamnation de la commune de Mâcon à l'indemniser des surcoûts directs liés au prolongement de la mobilisation des " moyens gros oeuvre ".

5. En ce qui concerne les émergences, la durée de réalisation de sept semaines prévue au planning n'ayant pas été modifiée comme il a été rappelé au point 4, celle, concomitante, du chemin doux, ne l'a pas été davantage. S'agissant du décalage en période hivernale des travaux de réalisation des poutres butons, la commune de Mâcon a été condamnée par le tribunal à indemniser la société Razel-Bec des dépenses exposées pour la mise en place d'un dispositif de chauffage des coffrages, le recours à un béton de qualité supérieure et la réorganisation de ses équipes de travail. Il résulte de l'instruction que la somme de 91 159,78 euros TTC au paiement de laquelle la commune a été condamnée correspond à l'indemnisation de l'allongement du délai de réalisation des poutres butons. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du compte rendu de chantier n° 32, que les travaux de remise en état du sol génèrent un préjudice distinct de celui au titre duquel la commune a été condamnée en première instance à verser à la requérante la somme de 17 266,10 euros TTC.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Razel-Bec n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande sur ces chefs de préjudice. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais du litige doivent être également rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Razel-Bec la somme que la commune de Mâcon demande au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Razel-Bec est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Mâcon présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Razel-Bec et à la commune de Mâcon.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

M. Chassagne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 novembre 2018.

2

N° 15LY03156


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03156
Date de la décision : 15/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SELARL VS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-15;15ly03156 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award