La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/12/2018 | FRANCE | N°17LY01362

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2018, 17LY01362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1500139 du 6 février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 mars 2017 et le 23 juillet 2017, M. D..., représenté par Me A..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 février 2017 ;

2°) de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1500139 du 6 février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 mars 2017 et le 23 juillet 2017, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 février 2017 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 25 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'est pas justifié de l'homologation du rôle ;

- la demande qui lui a été adressée le 4 novembre 2012, qu'il n'a reçue que le 21 novembre suivant, présentait un caractère contraignant et devait, en application des dispositions de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales mais aussi des garanties résultant de la charte du contribuable vérifié, être assortie d'un délai de deux mois pour y répondre ;

- un délai minimal de trente jours aurait dû lui être accordé en vertu de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales ;

- conformément à la charte du contribuable vérifié, un nouveau délai aurait dû lui être accordé au terme de l'entretien du 6 décembre, pour préciser ses réponses ;

- le service a fait pression sur le contribuable en lui indiquant faussement avoir saisi les autorités suisses d'une demande d'assistance internationale, procédure qui constitue une garantie pour le contribuable, manquant ainsi à son devoir de loyauté ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées ;

- ces pénalités ne peuvent être appliquées eu égard à l'automaticité attachée à l'article 155 A du code général des impôts ;

- il résulte de la motivation retenu pour l'application de ces pénalités que le service a, en réalité, entendu réprimer un abus de droit sans accorder au contribuable les garanties attachées à la procédure de répression des abus de droit ;

- les conditions d'application de l'article 155 A du code général des impôts n'étaient pas réunies, la société Supra Group, qui n'est pas un simple donneur d'ordre d'un prestataire réel autre qu'elle-même, fournissant à la société Supra France de réelles prestations et une contribution qui lui est propre ;

- l'appréciation de ces critères d'effectivité doit être effectuée au regard des années 2007 à 2011 et non de la seule année 2009 ;

- la présomption simple posée par l'article 155 A du code général des impôts doit pouvoir être combattue ;

- avant de pouvoir mettre en oeuvre de la présomption simple posée par l'article 155 A du code général des impôts, le service à la charge de la preuve de l'absence de réalisation effective d'une activité industrielle ou commerciale autre que les prestations de services rendues à la société domiciliée en Francepar une société étrangère ;

- les bases de redressement sont excessives et comprennent des sommes qui ne sont pas afférentes aux prestations assujetties sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts ;

- la réalisation des prestations de présidence par M. D... était imposée par la loi puisqu'une personne morale présidente statutaire ne peut pas se représenter par elle-même ;

- Supra Group était une holding active de Supra France et de ses autres filiales et a totalement justifié des contreparties réelles à 1 'intervention de Supra Group dans la réalisation des prestations ;

- les engagements pris par la société Supra Group constituent bien la contrepartie économique indispensable à son intervention et à toute facturation réalisée en son nom dans le cadre de sa gestion ;

- la réalisation d'opération d'investissement bénéficiant au développement de la société française et à l'augmentation de son chiffre d'affaires est la contrepartie économique à toute intervention de la société suisse dans les prestations de gestion commerciale et financière réalisées en son nom par le prestataire réel ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de prestations de présidence réalisées par M. D... ;

- en janvier et février 2009, la société Supra Group a été représentée par M. C... et a délivré à la société Supra France une prestation réelle en contrepartie de sa rémunération.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 juillet 2017 et le 7 septembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 septembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 17 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant M. D... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. F... D... était en 2009 le directeur de la société Supra Group, établie en Suisse. Cette société occupe les fonctions statutaires de président du conseil d'administration de sa filiale, la société Supra France, établie en France. Les deux sociétés ont conclu le 5 janvier 2009 un contrat par lequel il était convenu que la société mère de droit suisse exercerait pour le compte de sa fille diverses prestations commerciales et de gestion financière. A la suite de l'examen de situation fiscale personnelle dont a fait l'objet M. D... au titre de l'année 2009, qui s'est déroulé de façon concomitante avec la vérification de la société Supra France, l'administration a estimé que les sommes facturées par la société Supra Group à la société Supra France en rémunération des prestations rendues en France par M. D... avaient le caractère de traitements et salaires, imposables en France sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts, et a rectifié en conséquence les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. D... au titre de l'année 2009. Par un jugement du 6 février 2017, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. L'homologation du rôle incorporant les impositions contestées a été effectuée le 12 mars 2014 par M. B..., administrateur des finances publiques à la direction des finances publiques de Haute-Savoie, régulièrement habilité par délégation de pouvoirs du préfet de ce département dont l'arrêté de délégation en date du 12 décembre 2011 a été publié au n° 53 du recueil des actes administratifs de cette préfecture. Dès lors, le moyen tiré par M. D... de l'irrégularité de l'homologation du rôle doit être écarté.

3. Par courrier du 14 novembre 2012, le vérificateur a indiqué à M. D... que sa situation lui paraissait pouvoir relever des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts et lui a demandé en conséquence la communication de différents documents portant notamment sur l'identité des actionnaires de la société Supra Group au titre de l'année 2009, l'identité des personnes occupant les fonctions de direction de la structure sur cette même période, ainsi que celles disposant de la maîtrise des fonds sociaux, ou la nature exacte de l'activité exercée en 2009 par la société Supra Group, et le caractère prépondérant d'une activité industrielle et commerciale éventuelle par rapport à celle correspondant aux prestations fournies à Supra France. Ce courrier, qui faisait suite à une conversation téléphonique, rappelait qu'une rencontre entre le vérificateur et le contribuable avait été convenue pour le 30 novembre suivant.

4. En dépit du rappel du régime de présomption contenu dans les dispositions de l'article 155 A du code général des impôts, ce courrier ne saurait être assimilé à une demande d'éclaircissement ou de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, imposant qu'un délai de deux mois soit imparti au contribuable pour apporter des éléments de réponse.

5. Il ressort par ailleurs de l'avis de réception versé aux débats par l'administration, signé par le contribuable, que ce courrier a été reçu par M. D... le 15 novembre 2012. La proposition de rectification du 18 décembre 2012 a été rédigée plus d'un mois après la réception de ce courrier. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'intéressé n'aurait pas disposé du délai d'un mois prévu par les dispositions de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales n'est pas fondé.

6. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré du non respect des délais préconisés par la charte du contribuable vérifié doit être écarté. Par ailleurs, cette dernière n'imposait nullement la tenue d'un nouvel entretien après celui qui a finalement eu lieu le 6 décembre 2012 afin de permettre à M. D... de préciser les réponses qu'il avait apportées lors de cet entretien.

7. Le courrier adressé le 14 novembre 2012 par le vérificateur à M. D... l'informait de ce que le service avait sollicité des autorités fiscales suisses la communication de différents renseignement et documents, afin d'apprécier les conditions d'application éventuelle des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts, tout en précisant qu'il n'était pas en mesure d'informer le contribuable du calendrier précis de l'envoi de ces demandes aux autorités suisses. Le vérificateur a précisé que le délai de reprise se trouverait repoussé dans l'hypothèse selon laquelle des rectifications trouveraient leur fondement dans les éléments communiqués en réponse par les autorités fiscales suisses, et de ce que l'article L. 12 du livre des procédures fiscales permettait de proroger la durée du contrôle du délai nécessaire à l'administration afin de recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères.

8. Les dispositions de l'article L. 188 A du livre des procédures fiscales imposent à l'administration, lorsqu'elle entend prolonger le délai de reprise dont elle dispose, d'informer le contribuable de l'existence de la demande de renseignements au moment où celle-ci a été formulée, ainsi que de l'intervention de la réponse attendue. Si, afin de respecter ces dispositions, le vérificateur a informé le contribuable de son intention de saisir les autorités suisses d'une demande d'assistance internationale, l'administration ne saurait pour autant, et alors même que cette intention ne s'est finalement pas concrétisée, être regardée comme ayant manqué à son devoir de loyauté. La prorogation du délai de reprise et de la période sur laquelle peut s'étendre un examen de situation fiscale personnelle, qui résultent d'une telle démarche ont pour objet de neutraliser l'impact, sur ces délais, du rallongement de la procédure inhérent à une demande d'assistance internationale. Elle n'a pas pour objet de permettre artificiellement de repousser le terme des opérations de contrôle et du débat contradictoire. La circonstance que M. D... ait été informé que, dans l'hypothèse où des rectifications trouveraient leur fondement dans des réponses apportées par des autorités suisses, le délai de reprise s'en retrouverait prolongé ne caractérise aucune irrégularité et n'a privé l'intéressé, auquel le délai de droit commun a été appliqué, d'aucune garantie. S'il est entouré de garanties pour le contribuable, le recours à l'assistance administrative internationale ne constitue pas par lui-même une garantie pour ce dernier mais une simple faculté à laquelle l'administration peut renoncer à recourir. Il en résulte que le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait viciée du fait de l'abstention finale de l'administration doit être écarté.

9. Enfin, l'administration n'a pas remis en cause la réalité de la société Supra Group mais s'est bornée à appliquer à la situation qu'elle examinait les dispositions de l'article 155 A du code général des impôts. Elle pouvait, sur le fondement des dispositions de ce texte, imposer M. D... à raison des sommes que la société suisse Supra Group a perçues de la société française Supra France en rémunération des services rendus par M. D... sans rechercher si pouvaient également être appliquées les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales réprimant les abus de droit.

Sur le bien-fondé des impositions :

10. Aux termes du I de l'article 155 A du code général des impôts : " Les sommes perçues par une personne domiciliée en Franceen rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; (...) ". Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée en Francene trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.

11. L'administration fiscale apporte la preuve que des sommes perçues par une personne domiciliée en Franceen rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières en vertu du I de l'article 155 A du code général des impôts par la production d'éléments attestant de ce que ces personnes ont réalisé les prestations de services en cause et de ce qu'elles contrôlent la personne qui perçoit la rémunération de ces services. Dans l'hypothèse où l'administration s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au contribuable d'apporter des éléments permettant d'établir que la facturation de ces prestations par la société établie hors de France aurait trouvé une contrepartie réelle dans une intervention qui lui aurait été propre et de regarder le service ainsi rendu comme l'ayant été pour son compte.

12. Au cas d'espèce, la société Supra Group a perçu en 2009, par inscription au crédit du compte courant d'associé ouvert à son nom dans les comptes de la société Supra France, des sommes d'un montant total de 510 173 euros en rémunération de prestations de direction et de prestations d'assistance commerciale et financière. L'administration, qui a considéré que ces prestations avaient été réalisées par M. D... et qu'il contrôlait la société Supra Group, a imposé les sommes ainsi perçues par cette société au nom de M. D..., par application des dispositions précitées.

13. En premier lieu, l'administration fait valoir que si l'administrateur de la société Supra Group était, jusqu'en mars 2009 un résident suisse, M. F... D... y exerçait, au titre de l'ensemble de l'exercice 2009, les fonctions de directeur avec signature individuelle, et pouvait engager la société et agir pour son compte. Elle indique que les copies des cartons de signatures et mandats de procuration qu'elle a obtenus dans l'exercice du droit de communication ont permis de constater qu'au titre de l'année 2009, M. D... disposait de la signature sur l'ensemble des comptes actifs identifiés de la société Supra France. Elle fait également valoir que l'ensemble des déclarations fiscales porte la signature de M. F... D.en France Elle souligne que la société Supra Group est une société holding dont l'unique filiale est la société Supra France dont M. D... est le dirigeant de fait, et que par un document du 2 mars 2009, le conseil d'administration de la société Supra Group a conféré à M. F... D... tout pouvoir pour représenter la société Supra Group en sa qualité de président de la société Supra France. Le contrôle par M. D... de la société Supra Group doit, dans ces conditions, être considéré comme établi, ce qui n'est d'ailleurs pas véritablement contesté.

14. En deuxième lieu, les sociétés Supra Group et Supra France ont prévu, dans le cadre d'une convention de prestation de services conclue le 5 janvier 2009, que la société mère de droit suisse exercerait pour le compte de sa fille diverses prestations commerciales et de gestion financière. Cette convention prévoit que les prestations exercées au profit de la société Supra France par la société Supra Group portent notamment sur la politique et la stratégie commerciales, la veille commerciale, la prospection, les relations commerciales, les visites clientèle, les appels d'offre, la négociation de marchés et commandes, les relations bancaires, l'élaboration et l'exécution du plan de trésorerie et du budget. Lors de la procédure de contrôle de la société Supra France, des tableaux de suivi des investissements et d'établissement des plans d'investissements, une liste et un détail des visites en clientèle effectuées par Monsieur D..., des copies de contrats clients signés, négociés et/ou avalisés par Monsieur D... dans le cadre de la revue de contrats, des copies de courriels adressés par Monsieur D... à la clientèle dans le cadre d'offre de prix, des copies des sommaires de plans stratégiques établis par Monsieur F... D..., des copies de tableaux de budgets émis par Monsieur D..., des copies de contrats fournisseurs d'approvisionnements signés par Monsieur D... ont fait apparaître que les prestations contractuellement prévues ont été réalisées par Monsieur F... D... lui-même. Par ailleurs, les prestations " de direction " ont été exercées par M. D..., qui avait tout pouvoir pour représenter la société Supra Group en sa qualité de président de la société Supra France.

15. L'administration démontre ainsi que les sommes perçues par la société Supra Group l'ont été en rémunération de prestations qui ont été réalisées pour l'essentiel par M. D... lui-même, qui contrôle cette société. Il appartient donc à M. D... de démontrer que ces sommes ont trouvé une contrepartie réelle dans une intervention propre de la société Supra Group, permettant de regarder le service ainsi rendu comme l'ayant été pour son compte. Contrairement à ce que soutient M. D..., cette démonstration doit porter sur l'année en litige. Par ailleurs, et dès lors que les prestations en cause ont été effectivement réalisées par le contribuable entre les mains duquel la rémunération a été imposée par l'administration, le fait que la société qui a été rémunérée puisse ponctuellement fournir une contribution qui lui est propre n'est pas, à lui seul de nature à remettre en cause l'application des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts.

16. Si M. D... fait valoir que les prestations en cause étaient toutes constitutives d'actes de gestion engageant la responsabilité de la société Supra Group, que la société est l'interlocuteur direct de créanciers et apporte sa garantie, qu'elle a engagé des charges externes auprès de prestataires tiers afin de l'assister lors la réalisation de prestations financières ou commerciales rendues à sa filiale et qu'elle a réalisé directement et de manière régulière des investissements sur ses fonds propres destinés à assurer le développement commercial de Supra France, cette implication, qu'elle trouve son origine dans des prérogatives statutaires ou dans la mise en oeuvre de moyens spécifiques, doit être distinguée des prestations en cause effectivement réalisées par M. D.en France

17. Par ailleurs, et en toute hypothèse, M. D... n'apporte aucun élément de nature à démontrer, ainsi que cela lui incombe, que la société Supra Group exercerait de manière prépondérante une activité industrielle ou commerciale autre que la prestation de services.

18. Il résulte de ce qui précède que les sommes versées par la société Supra France à la société de droit suisse Supra Group, au titre de prestations de direction et d'assistance commerciale et financière, doivent être regardées comme des rémunérations liées à l'activité de M. D... et imposables à l'impôt sur le revenu, à son nom, en application des dispositions précitées de l'article 155 A du code général des impôts.

19. Les prestations de services en cause ont, au titre de l'exercice 2009, donné lieu entre le 1er septembre 2009 et le 31 décembre 2009 à une inscription au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de la société Supra Group dans les livres de comptes de la société Supra France, sous les libellés " supra group fact ", " supra group frais adm ", " frais de siège " et " c/c supra group ". L'existence de différences dans ces libellés ne permet pas, par elle-même de considérer que des sommes qui ne sont pas afférentes aux prestations évoquées ci-dessus, assujetties sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts, auraient été retenues par l'administration dans les bases imposables rectifiées.

Sur les pénalités :

20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (en France) ".

21. Lorsque les conditions d'application de l'article 155 A du code général des impôts sont remplies, l'administration peut légalement fonder l'imposition sur ces dispositions. Cela ne la dispense pas, si elle entend sanctionner un manquement délibéré du contribuable à ses obligations déclaratives, de justifier du bien-fondé des pénalités infligées en démontrant que le contribuable a minoré ses déclarations en connaissance de cause. Réciproquement, la circonstance que les conditions d'application de l'article 155 A du code général des impôts soient réunies ne saurait faire obstacle à ce que l'administration, pour peu qu'elle en démontre le bien-fondé, inflige au contribuable les pénalités prévues par les dispositions rappelées ci-dessus.

22. Pour les raisons expliquée au point 9, l'administration n'a pas, dans la présente espèce, entendu se placer sous le régime de la répression des abus de droit. Il en résulte que M. D... n'est pas fondé à soutenir que seules les pénalités prévues dans une telle hypothèse pouvaient être appliquées.

23. L'administration s'est fondée, pour appliquer les pénalités prévues en cas de manquement délibéré, par l'article 1729 du code général des impôts, sur l'existence d'un montage juridique qui s'est traduit par la création de la société suisse Supra Group et le transfert de la majeure partie du capital de la société Supra France vers la société suisse et a eu pour conséquence de soustraire à l'application de l'impôt français, pour l'année 2009, les rémunérations versées en contrepartie des prestations rendues par M. D..., résident fiscal français sur cette période. Elle fait aussi valoir que M. D... qui avait le contrôle et la maîtrise des fonds sociaux des deux sociétés, apparaît comme le principal bénéficiaire du montage mis en place et souligne le rôle central tenu par l'intéressé dans l'organisation du groupe, comme dans la détermination des modalités de rémunération des prestations qu'il a lui-même réalisées. Elle invoque, enfin, l'importance des sommes soustraites à l'impôt qui représentent plus de huit fois les montants déclarés. En invoquant ces différentes circonstances, l'administration justifie du bien-fondé des pénalités infligées à M. D..., qui ne les critique pas utilement en alléguant un supposé manque de dialogue au cours de la procédure contradictoire ou contentieuse.

24. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente-assesseure,

Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.

4

N° 17LY01362

gt


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01362
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Texte applicable (dans le temps et dans l'espace).

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Divers.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Questions communes - Personnes imposables.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-18;17ly01362 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award