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28/02/2019 | FRANCE | N°16LY03140

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 février 2019, 16LY03140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1202705, l'association tricastine d'aide aux personnes handicapées (ATAPH) a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 13 mars 2012 par lequel le président du conseil général de la Drôme a fixé l'excédent des résultats d'exploitation du foyer de vie " AlineE... " à la somme de 1 005 654,50 euros au 4 mars 2010 ;

2°) d'annuler les arrêtés des 25 juin 2010 et 31 août 2010 par lesquels le président du conseil général de la Drôme

l'a rendue débitrice envers le département de la Drôme de la somme de 1 005 654, 50 euros en rest...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1202705, l'association tricastine d'aide aux personnes handicapées (ATAPH) a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 13 mars 2012 par lequel le président du conseil général de la Drôme a fixé l'excédent des résultats d'exploitation du foyer de vie " AlineE... " à la somme de 1 005 654,50 euros au 4 mars 2010 ;

2°) d'annuler les arrêtés des 25 juin 2010 et 31 août 2010 par lesquels le président du conseil général de la Drôme l'a rendue débitrice envers le département de la Drôme de la somme de 1 005 654, 50 euros en restitution des excédents d'exploitation dudit foyer ;

Par une requête n° 1306315, l'ATAPH a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le titre exécutoire n° 008985 du 2 octobre 2013 émis par le département de la Drôme la constituant débitrice de la somme de 1 005 654,50 euros et de la décharger de l'obligation de payer ladite somme.

Par un jugement n° 1202705 et 1303615 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir joint les deux requêtes, a annulé l'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 en tant qu'il liquide une créance détenue par le département de la Drôme sur l'ATAPH pour un montant supérieur à 981 048,50 euros et le titre exécutoire n° 008995 émis le 2 octobre 2011 par le président du conseil général de la Drôme en ce qu'il met en recouvrement une somme supérieure à 981 048,50 euros et a déchargé l'ATAPH de l'obligation de payer la somme de 24 606 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2016 et un mémoire complémentaire, enregistré le 13 novembre 2018, l'ATAPH, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2016 ;

2°) d'annuler les arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 par lesquels le président du conseil général de la Drôme l'a rendue débitrice envers le département de la Drôme de la somme de 1 005 654,50 euros en restitution des excédents d'exploitation dudit foyer ;

3°) d'annuler les arrêtés du 13 mars 2012 en tant que le président du conseil général de la Drôme a fixé l'excédent des résultats d'exploitation du foyer de vie " AlineE... " à la somme de 1 005 654,50 euros au 4 mars 2010 ;

4°) à titre subsidiaire, de fixer à 241 625,39 euros le montant des sommes à reverser au département ;

5°) de mettre à la charge de l'administration la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la prescription de la reprise des résultats pour 2007 ;

- sur la légalité externe des arrêtés contesté : l'arrêté du 13 mars 2012 n'a pas été précédé d'une procédure contradictoire dès lors que les courriers adressés trois ans avant la prise de l'arrêté ne sauraient constituer une procédure contradictoire valable et qu'il n'est pas établi que les dirigeants de l'association avaient en leur possession des courriers datant de 2009 et 2010 et en auraient eu connaissance ; ce vice l'a privé d'une garantie ; l'administration ne l'a pas informée de la décision projetée et de ses motifs ; la décision litigieuse doit être regardée comme une sujétion ; aucune procédure contradictoire n'est organisée par la loi en vue de la mise en oeuvre du reversement des sommes litigieuses ; le président du conseil général de la Drôme n'était pas en situation de compétence liée ; le compte rendu de la réunion ne constitue pas un élément de la procédure contradictoire ; les courriers par lesquels le département a fixé les résultats d'exploitation pour les années 2007 à 2009 ne sauraient s'analyser comme répondant à l'obligation d'organiser une procédure contradictoire préalablement à l'arrêté contesté ; l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;

- les arrêtés du préfet de la Drôme des 30 juin 2010 et du 16 septembre 2010 portant désignation des bénéficiaires des moyens du foyer et des modalités de versement de ces sommes par l'ancien gestionnaire ont été annulés par le tribunal administratif de Grenoble dans un jugement du 12 juillet 2016 ; par voie de conséquence, les arrêtés du président du conseil général portant reversement de la réserve de compensation à son profit sont illégaux ;

- sur la légalité interne : l'article L. 314-1 du code de l'action sociale et des familles se borne à définir les règles générales d'établissement du tarif et ne traite pas des reversements possibles en cas de fermeture ; dans un avis du 2 octobre 2013, le Conseil d'Etat rappelle que si le pouvoir réglementaire a compétence au regard de l'article L. 313-1 et L. 314-1 du code précité pour organiser le reversement de certaines sommes, c'est seulement au bénéfice d'un établissement ou service poursuivant un but similaire ; l'intégralité des sommes procurées par la tarification doit être reversée non pas à l'autorité de tarification mais à un service poursuivant un but similaire ; le département aurait dû, préalablement à la dévolution et au reversement des fonds, prendre un arrêté de clôture des comptes ; en procédant de la sorte, le département ne lui a pas permis de contester les tarifs et les affectations de résultat ; en application de l'alinéa 1er de l'article R. 314-97 du code de l'action sociale et des familles, le bilan de clôture est l'acte permettant de fixer les reversements ; dans une décision du 6 mai 2016, le Conseil d'Etat a estimé que la contestation du quantum de la somme réclamée par l'administration dans les comptes de clôture relève du juge de la tarification et non du juge administratif ; l'année 2007 était prescrite en matière de tarification ; l'association n'était plus gestionnaire du foyer dès le 4 mars 2010 et le département n'a pas pris en compte le déficit à cette date ; faute de disposer de l'ensemble des documents comptables, elle n'a pas pu arrêter les comptes de 2009 et 2010 ;

Par un mémoire enregistré le 19 décembre 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 16 novembre 2018, le département de la Drôme, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'ATAPH au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le conseil d'administration habilitant la présidente de l'association à agir n'a pas valablement délibéré dès lors qu'il a été réuni en urgence au domicile des épouxE..., seuls les époux E...étaient présents, M. B...et M. D...ont été contactés par téléphone et n'ont pas été en mesure d'être présents ou représentés ; par suite, les règles de convocation, de quorum et de majorité n'ont pas été respectées ; aucune régularisation ne sera possible ; le procès-verbal du conseil d'administration du 30 août 2016 ne concerne que la procédure d'appel et non les procédures de première instance ;

- sur l'irrégularité du jugement : le juge administratif n'est pas tenu de répondre à chacun des arguments soulevés par le requérant ; le moyen est formulé de manière embryonnaire ; le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté le moyen ; la prescription n'a pas été formulée dans l'instance n° 1306315 ;

- sur la procédure contradictoire : ce moyen n'est pas recevable dans l'instance n° 1303615 en application de la jurisprudence Intercopie ; l'arrêté contesté ne constitue pas une décision individuelle qui doit être motivée au sens de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; cet arrêté ne saurait s'analyser comme une prescription dès lors qu'il se borne à demander le versement de sommes que le département était tenu d'exiger ; par suite, les moyens tirés de la violation de la méconnaissance de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 sont inopérants ; dans tous les cas, il a mis en oeuvre la procédure particulière et contradictoire prévue par les dispositions du code de l'action sociale et des familles ; l'ATAPH a été mise à même de présenter des observations écrites et s'est vu transmettre l'ensemble des documents et informations utiles et la procédure prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'a pas été méconnue ; si la cour retenait une méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, cette méconnaissance n'a pas privé l'association d'une garantie et n'a pas été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision ; l'association a été informée de la procédure engagée dès lors que l'arrêté du 13 mars 2012 a été précédé de deux autres arrêtés dont l'objet était identique ;

- les arrêtés préfectoraux annulés ne sont pas le support juridique de l'arrêté contesté et l'annulation de ces arrêtés préfectoraux est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;

- l'association ne peut se prévaloir d'un arrêt du Conseil d'Etat du 2 octobre 2013 qui ne vise que le reversement des amortissements cumulés ; l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles prévoit que les sommes à reverser peuvent être attribuées à une collectivité publique ; l'article R. 314-97 alinéa 2 du code précité précise que les crédits d'exploitation non utilisés et le solde de la réserve de compensation d'un établissement sont reversés aux financeurs ;

- le moyen tiré de ce que l'arrêté de reversement est illégal faute d'arrêté préalable de clôture des comptes n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée ; rien n'imposait l'établissement d'un arrêté de clôture des comptes ; la détermination du solde de la réserve de compensation, à la date de fermeture, est sans rapport avec le bilan de clôture de l'exercice en cours ; le solde de la réserve de compensation ne prend pas en compte les résultats de l'année 2010 ; il n'est question que du reversement du solde de la réserve de compensation existant à la date du 4 mars 2010 ;

- aucune prescription n'est opposable ;

- le résultat pour l'année 2010 n'a pas été pris en compte pour la fixation des sommes à reverser au département ; la somme exigée correspond au solde de la réserve de compensation existant au 4 mars 2010.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës,

- les conclusions de Mme Vigier-Carriere, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant l'association tricastine d'aide aux personnes handicapées (ATAPH), et de MeA..., représentant le département de la Drôme.

1. Considérant que, par un arrêté du 10 juin 2004, le président du conseil général de la Drôme a autorisé la création d'un foyer pour personnes adultes handicapées géré par l'association tricastine d'aide aux personnes handicapées (ATAPH) ; que le foyer, situé à Saint-Paul-Trois-Châteaux, a été ouvert le 2 novembre 2006 ; qu'à la suite de la mission d'inspection diligentée par le conseil général le 7 mai 2007, le foyer a été placé sous administration provisoire ; que, par arrêtés du 2 mars 2010, le président du conseil général a décidé de fermer définitivement le foyer et de transférer, en application de l'article L. 313-18 du code de l'action sociale et des familles, l'autorisation de gestion du foyer à l'association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales (ADAPEI) ; que, par arrêté du 25 juin 2010, le président du conseil général de la Drôme a fixé le total cumulé excédentaire des résultats d'exploitation issus de la gestion du foyer de vie et a émis le titre exécutoire n° 005151 à l'encontre de l'ATAPH pour un montant de 1 069 632 euros au titre des résultats d'exploitation des exercices 2007, 2008 et 2009 du foyer ; que, par arrêté du 30 juin 2010, modifié par un arrêté du 16 septembre 2010, le préfet de la Drôme a désigné l'ADAPEI comme bénéficiaire des sommes indiquées au 1, 3 et 4 de l'article L. 319-19 du code de l'action sociale et des familles et a indiqué que les crédits d'exploitation non utilisés à la fermeture du foyer et le solde de la réserve de compensation seraient reversés au département sur le fondement de l'article R. 314-97 du même code ; que ces arrêtés ont été annulés par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2016 ; que, par arrêté du 31 août 2010, compte tenu de l'absence de prise en compte du déficit d'exploitation du foyer pour l'année 2006, le président du conseil général de la Drôme a retiré l'arrêté du 25 juin 2010, a fixé le total cumulé excédentaire à 1 005 654,50 euros et émis à l'encontre de l'ATAPH le titre exécutoire correspondant au montant susmentionné au titre des résultats d'exploitation des exercices 2007, 2008 et 2009 ; que, par arrêté du 13 mars 2012, pris pour actualiser la période au titre de laquelle le montant des sommes à reverser est arrêté, le président du conseil général de la Drôme a abrogé l'arrêté du 31 août 2010 et a fixé à la somme de 1 005 654, 50 euros le total cumulé excédentaire des résultats d'exploitation au 4 mars 2010, date de la fermeture et du transfert de gestion de l'établissement ; que, le 2 octobre 2013, un titre exécutoire d'un montant de 1 005 654, 50 euros a été émis à l'encontre de l'ATAPH ; que, par un jugement nos 0901874, 1000414, 1001177, 1003014 et 1005156 du 13 juillet 2012, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé un non-lieu à statuer sur les recours introduits par l'association tendant à l'annulation des arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 et des titres exécutoires afférents et a rejeté le recours dirigé contre les arrêtés des 5 mars et 4 septembre 2009 portant respectivement nomination de l'administrateur provisoire et renouvellement de son mandat et les arrêtés précités du 2 mars 2010 ; que, par un arrêt du 10 juillet 2014, confirmé par une décision du Conseil d'Etat du 30 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté la requête dirigée contre ce jugement du 13 juillet 2012 en raison du défaut de qualité pour agir de la présidente de l'association ; que l'ATAPH a demandé l'annulation devant le tribunal administratif de Grenoble de l'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 ainsi que du titre exécutoire du 2 octobre 2013 afférent ; que l'association relève appel du jugement n° 1202705, 1306315 du 12 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté partiellement ses demandes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen soulevé dans la requête n° 1202705, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que l'arrêté critiqué n'a pas tenu compte de la prescription de la reprise des résultats pour 2007 ; que, par suite, l'ATAPH est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer sur la requête n° 1202705 et est, pour ce motif, irrégulier ;

3. Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble, enregistrée sous le n° 1202705 et tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2012 et de statuer, par la voie de l'effet dévolutif, sur les conclusions contenues dans la requête n° 1306315 et tendant à l'annulation du titre exécutoire du 2 octobre 2013 ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

4. Considérant que l'ATAPH s'est acquittée du droit de timbre institué par l'article 1635 bis Q, alors applicable, du code général des impôts, lors de l'enregistrement de chacune de ses requêtes ;

5. Considérant qu'une association est régulièrement engagée par l'organe tenant de ses statuts le pouvoir de la représenter en justice, sauf stipulation de ces statuts réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif ; qu'il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie ; que tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier ; qu'à ce titre, si le juge doit s'assurer de la réalité de l'habilitation du représentant de l'association qui l'a saisi, lorsque celle-ci est requise par les statuts, il ne lui appartient pas, en revanche, de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles une telle habilitation a été adoptée ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'article 12 des statuts de l'ATAPH stipule que le conseil d'administration est " investi des pouvoirs les plus étendus pour prendre toutes les décisions qui ne sont pas réservées à l'assemblée générale " ; que selon l'article 14 des statuts, le président " représente les procès-verbaux des réunions, assure l'ordonnancement des dépenses " et " peut déléguer tout ou partie de ses pouvoirs à un autre membre du conseil " ; que ces stipulations réservent ainsi au conseil d'administration la capacité de décider de former une action devant le juge administratif ; que, pour attester de l'habilitation de sa présidente, l'association a produit une délibération du 17 juin 2014 du conseil d'administration qui comprenait les éléments essentiels de nature à établir la réalité de cette habilitation ; que les conditions dans lesquelles le conseil d'administration s'est prononcé ne peuvent être utilement invoquées pour contester la qualité pour agir de la présidente de l'ATAPH ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des deux demandes de première instance doit être écartée ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mars 2012 et du titre exécutoire du 2 octobre 2013 ainsi que des arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 :

En ce qui concerne les arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date d'introduction de la demande de l'association requérante : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; que le délai de recours contentieux contre un acte administratif doit être regardé comme commençant à courir soit à compter de la publication ou de la notification complète et régulière de l'acte attaqué soit, au plus tard, à compter, pour ce qui concerne un requérant donné, de l'introduction de son recours contentieux contre cet acte ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'ATAPH a introduit des recours contentieux contre les arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 qui ont été enregistrés au greffe du tribunal administratif de Grenoble respectivement les 9 juillet et 22 novembre 2010 ; que l'ATAPH ne pouvait plus, à la date d'introduction de son recours devant le tribunal administratif de Grenoble le 15 mai 2012, contester à nouveau les arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 alors que le délai prévu par les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, et qui avait commencé à courir au plus tard à compter de l'introduction des recours contentieux contre ces arrêtés, était expiré ; qu'ainsi que le fait valoir le département de la Drôme, les conclusions dirigées contre les arrêtés des 25 juin et 31 août 2010 sont tardives et, par suite, irrecevables ;

En ce qui concerne l'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 et le titre exécutoire du 2 octobre 2013 :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction alors applicable : " En cas de fermeture définitive d'un établissement ou d'un service géré par une personne morale de droit public ou de droit privé celle-ci reverse à une collectivité publique ou à un établissement privé poursuivant un but similaire les sommes affectées à l'établissement ou service fermé, apportées par l'Etat, par l'agence régionale de santé, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou par les organismes de sécurité sociale, énumérées ci-après : 1° Les subventions d'investissement non amortissables, grevées de droits, ayant permis le financement de l'actif immobilisé de l'établissement ou du service. Ces subventions sont revalorisées selon des modalités fixées par décret ; 2° Les réserves de trésorerie de l'établissement ou du service constituées par majoration des produits de tarification et affectation des excédents d'exploitation réalisés avec les produits de la tarification ; 3° Des excédents d'exploitation provenant de la tarification affectés à l'investissement de l'établissement ou du service, revalorisés dans les conditions prévues au 1° ; 4° Les provisions pour risques et charges, les provisions réglementées et les provisions pour dépréciation de l'actif circulant constituées grâce aux produits de la tarification et non employées le jour de la fermeture./ La collectivité publique ou l'établissement privé attributaire des sommes précitées peut être : a) Choisi par le gestionnaire de l'établissement ou du service fermé, avec l'accord de l'autorité ou des autorités ayant délivré l'autorisation du lieu d'implantation de cet établissement ou service ; b) Désigné par l'autorité compétente de l'Etat dans le département, en cas d'absence de choix du gestionnaire ou de refus par l'autorité ou les autorités mentionnées au a./ L'organisme gestionnaire de l'établissement ou du service fermé peut, avec l'accord de l'autorité de tarification concernée, s'acquitter des obligations prévues aux 1° et 3° en procédant à la dévolution de l'actif net immobilisé de l'établissement ou du service. " ; qu'aux termes de l'article R. 314-97 du même code, dans sa rédaction alors applicable, " En cas de fermeture ou de cessation d'activité totale ou partielle d'un établissement ou d'un service, si les frais financiers, les dotations aux comptes d'amortissement et aux comptes de provisions, les dotations au compte de réserve de trésorerie et les annuités d'emprunt contractées en vue de la constitution d'un fonds de roulement ont été pris en compte dans la fixation des tarifs, l'organisme gestionnaire reverse à un établissement ou service poursuivant un but similaire les montants des amortissements cumulés des biens, des provisions non utilisées et des réserves de trésorerie apparaissant au bilan de clôture. / Les crédits d'exploitation non utilisés à la fermeture ou à la cessation d'activité et le solde de la réserve de compensation d'un établissement sont reversés aux financeurs concernés. / L'organisme gestionnaire de l'établissement ou du service qui a cessé son activité ou a fermé peut, avec l'accord de l'autorité de tarification, s'acquitter de l'obligation relative au reversement des montants des amortissements cumulés des biens définie au premier alinéa et des subventions d'investissement mentionnées à l'article L. 313-19, en procédant à la dévolution de l'actif net immobilisé de l'établissement ou du service. / L'organisme gestionnaire dispose d'un délai de 30 jours à compter de l'arrêté de fermeture ou de la cessation d'activité de l'établissement ou du service pour choisir entre le versement des sommes exigibles au titre du présent article et des 1° et 3° de l'article L. 313-19 ou la dévolution de l'actif net immobilisé. Après ce délai, le représentant de l'Etat dans le département arrête l'option après accord, le cas échéant, de l'autorité de tarification. / L'autorité de tarification désigne l'attributaire du reversement. En cas de pluralité d'autorités de tarification, le préfet, après avis de ces autorités, procède à cette désignation. " ;

10. Considérant que les crédits d'exploitation non utilisés et le solde de la réserve de compensation d'un établissement fermé figurent au nombre des sommes exigibles qu'énumère l'article R. 314-97 du code de l'action sociale et des familles ; que, dès lors, et alors même que ces crédits doivent être reversés aux financeurs concernés et non à une collectivité ou à un établissement poursuivant un but similaire, ils font partie des sommes pour lesquelles, en vertu du même article, l'organisme gestionnaire dispose d'un choix entre leur versement ou la dévolution de l'actif net immobilisé ; qu'à défaut pour celui-ci de faire connaître son choix dans le délai imparti, il appartient au préfet de prescrire le reversement des sommes en cause ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 30 juin 2010 modifié le 16 septembre 2010, le préfet de la Drôme, après avoir constaté que l'ATAPH n'avait pas exercé son choix dans le délai imparti par l'avant-dernier alinéa de l'article R. 314-97 du code de l'action sociale et des familles, a désigné les bénéficiaires des moyens du foyer fermé dit " Aline E..." et les modalités de versement de ces sommes par l'ancien gestionnaire du foyer ; qu'il a notamment indiqué, en son article 3, que " conformément à l'article R. 314-97 du code de l'action sociale et des familles, les crédits d'exploitation non utilisés à la fermeture du foyer Aline E...et le solde de la réserve de compensation sont reversés au département de la Drôme " ; qu'il a également précisé, en son article 1er, que l'ATAPH versera au département les crédits en question, selon le titre de recettes émis par le conseil général ;

12. Considérant que, par un jugement n° 1005218 du 12 juillet 2016 devenu définitif, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés du 30 juin 2010 et du 16 septembre 2010 au motif que la procédure contradictoire instituée par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations avait été méconnue ; que, comme le soutient l'association requérante, cette annulation a nécessairement pour effet de priver de base légale l'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 par lequel il a fixé au montant de 1 005 654,50 euros le total cumulé excédentaire du foyer de vie " AlineE... " à la date du 4 mars 2010 ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, il y a lieu de prononcer l'annulation de l'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 ; que cette annulation entraîne par voie de conséquence l'annulation, dans sa totalité, du titre exécutoire subséquent du 2 octobre 2013 ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ATAPH est seulement fondée à demander l'annulation totale de l'arrêté du 13 mars 2012 par lequel le président du conseil général de la Drôme a abrogé l'arrêté du 31 août 2010 et a fixé le total cumulé excédentaire des résultats d'exploitation à la date du 4 mars 2010 à la somme de 1 005 654,50 euros et à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble n'a annulé le titre exécutoire afférent du 2 octobre 2013 qu'en tant qu'il met en recouvrement une somme supérieure à 981 048,50 euros ;

Sur les frais liés à l'instance :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ATAPH qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le département de la Drôme demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du département de la Drôme la somme demandée par l'ATAPH au même titre ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1202705, 1306315 du 12 juillet 2016 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : L'arrêté du président du conseil général de la Drôme du 13 mars 2012 et le titre exécutoire afférent du 2 octobre 2013 sont annulés dans leur totalité.

Article 3 : L'ATAPH est déchargée de l'obligation de payer mise à sa charge par le titre exécutoire mentionné à l'article précédent.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association tricastine d'aide aux personnes handicapées et au département de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 février 2019.

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N° 16LY03140


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03140
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

04-03-01 Aide sociale. Institutions sociales et médico-sociales. Établissements - Questions communes.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CABINET PIERRE NAITALI et AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-28;16ly03140 ?
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