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28/11/2019 | FRANCE | N°17LY02889

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 28 novembre 2019, 17LY02889


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier universitaire de Dijon à lui verser la somme totale de 90 634,50 euros en réparation des conséquences dommageables des interventions chirurgicales des 4 et 24 juillet 2012 et du 16 octobre 2014 des infections nosocomiales contractées à la suite de ces interventions et de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), la MFP, la mu

tuelle des Sapeurs-Pompiers de Paris, le cabinet d'assurances Frand et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier universitaire de Dijon à lui verser la somme totale de 90 634,50 euros en réparation des conséquences dommageables des interventions chirurgicales des 4 et 24 juillet 2012 et du 16 octobre 2014 des infections nosocomiales contractées à la suite de ces interventions et de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), la MFP, la mutuelle des Sapeurs-Pompiers de Paris, le cabinet d'assurances Frand et Associés et la Société Monceau retraite et épargne à garantir les condamnations du centre hospitalier universitaire de Dijon.

Par un jugement n° 1403111 du 24 avril 2017, le tribunal administratif de Dijon a mis hors de cause l'ONIAM et la société cabinet de courtage Frand et associés, a condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser à M. B... la somme de 29 600 euros, à verser à la société Monceau retraite et épargne la somme de 2 729,88 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2017, a mis les frais d'expertise d'un montant de 3 000 euros à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2017, et des mémoires complémentaires, enregistré le 10 novembre et le 27 décembre 2017, le 21 décembre 2018 et le 1er octobre 2019, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon, représenté par Me Le Prado, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement du 24 avril 2017 du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a fait droit à certains chefs de préjudice ;

2°) de ramener les indemnités allouées à M. B... à de plus justes proportions ;

3°) de rejeter les conclusions de la société Monceau retraite et épargne et de l'ONIAM et l'appel incident de M. B....

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- l'appel provoqué de la société Monceau retraite et épargne n'est recevable qu'à la condition qu'il ne porte pas sur un litige distinct de l'appel principal ; il a été jugé que constituent des litiges distincts des appels portant sur des postes de préjudices différents ; il n'a formé un appel que sur l'indemnisation des préjudices subis par M. B... ; il appartenait à la société Monceau retraite et épargne d'interjeter appel dans le délai d'appel et, par suite, son appel est irrecevable ;

- M. B... ne saurait soutenir que l'expert s'est prononcé au vu d'un dossier incomplet dès lors que l'expert indique que le CHU de Dijon a adressé le dossier médical complet original comme demandé ;

- les experts ont estimé que la peau était contaminée avant le geste opératoire et à l'origine de la contamination bactérienne du foyer opératoire ; M. B... n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause l'expertise ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon l'a condamné à verser à M. B... une somme de 15 600 euros au titre de son déficit fonctionnel, une somme de 7 200 euros au titre des souffrances endurées, une somme de 6 000 euros au titre de son préjudice esthétique dans la mesure où ces postes de préjudice ne sont pas liés à l'infection nosocomiale dont il a été victime mais à son état de santé initial ;

- l'infection qu'a présentée M. B... au décours de la première ostéosynthèse n'a pas de caractère nosocomial et le tribunal a considéré que M. B... avait été victime d'une infection nosocomiale au décours de l'intervention du 16 octobre 2014 et a jugé qu'il était fondé à demander sa condamnation à réparer les dommages résultant de cette infection ; seules les conséquences résultant de cette infection nosocomiale sont susceptibles d'être mises à sa charge ; il ressort du rapport d'expertise qu'il n'y a pas de séquelles fonctionnelles imputables à l'infection nosocomiale ; l'incapacité permanente de 12% dont reste atteint M. B... est exclusivement liée à la fracture initiale ; les seuls préjudices retenus par les experts en lien avec l'infection nosocomiale sont les différentes périodes d'incapacité temporaire ; c'est à la suite d'une contradiction de motifs que le tribunal administratif l'a condamné à indemniser le préjudice fonctionnel permanent ; il en est de même concernant le préjudice esthétique qui est exclusivement imputable à l'accident initial à l'origine d'une fracture complexe de sa cheville droite dès lors que l'infection nosocomiale d'octobre 2014 a été à l'origine d'une ablation d'ostéosynthèse tibial distal droit et d'un lavage du site opératoire ; il en est de même des souffrances morales et physiques dès lors que la chute initiale a été à l'origine d'une importante douleur ainsi que les soins apportés à la fracture et l'infection nosocomiale a été traitée par l'administration d'un traitement antibiotique ;

- M. B... n'établit pas en quoi la circonstance qu'il a été placé dans un premier temps dans le service de chirurgie digestive, en l'absence de place disponible, dans le service d'orthopédie, serait fautive ; ce placement provisoire n'est pas à l'origine des préjudices subis ;

- l'expertise sollicitée est dépourvue d'utilité ;

- à titre subsidiaire, il conviendra de ramener les indemnités à de plus justes proportions ;

- la société Monceau retraite et épargne n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause le jugement en tant qu'il a limité la créance de la société ; la liste des débours produite par la société Monceau retraite et épargne ne permet en aucun cas d'apprécier si les débours sont liés au manquement reproché au centre hospitalier ; de nombreux débours sont liés à l'état de santé initial de M. B... ; la liste des débours ne permet pas de savoir s'il n'est pas demandé deux fois le remboursement des mêmes frais ;

- l'ONIAM ne saurait conclure à sa condamnation à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors qu'aucune conclusion n'a été dirigée contre l'ONIAM ;

Par un mémoire, enregistré le 14 novembre 2017, l'ONIAM, représenté par Me Joliff, avocat, conclut à la confirmation du jugement du 24 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon l'a mis hors de cause et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en application de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, l'intervention de l'ONIAM au titre de la prise en charge des conséquences d'une infection nosocomiale suppose à tout le moins un taux de déficit fonctionnel permanent fixé à plus de 25% strictement imputable à cette infection ; selon les experts, la première infection ne doit pas être qualifiée de nosocomiale tandis que la seconde survenue au décours de l'intervention du 16 octobre 2014 répond à la définition d'une infection nosocomiale ; les experts ne relèvent aucune séquelle fonctionnelle imputable à l'infection nosocomiale ; il appartient seulement au CHU de Dijon de prendre en charge les conséquences non graves de cette infection nosocomiale.

Par un mémoire, enregistré le 16 novembre 2017, la société Monceau retraite et épargne, représentée par Me Boisgard, avocat, conclut :

1°) à la confirmation du jugement du 24 avril 2017 en tant que le tribunal administratif de Dijon a mis hors de cause la société Cabinet de courtage Frand et associés et l'a déclarée bien fondée à demander la condamnation du CHU de Dijon ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement du 24 avril 2014 en tant que le tribunal administratif de Dijon n'a pas entièrement fait droit à sa demande d'indemnisation et à la condamnation du CHU de Dijon à lui verser la somme de 9 995,47 euros et subsidiairement la somme de 2 729,88 euros au titre du remboursement des dépenses de santé actuelles imputables à l'infection nosocomiale subie par M. B... au décours de l'opération du 16 octobre 2014, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2017 ;

3°) à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge du CHU de Dijon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle assure les sapeurs-pompiers du service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or ; à ce titre, elle est amenée à prendre en charge les prestations en nature ; la société Cabinet de courtage Frand et associés n'est intervenue qu'en qualité de simple courtier pour son compte ; elle a exposé des prestations au profit de M. B... ;

- les experts ont conclu que M. B... avait été victime d'une infection nosocomiale au décours de l'intervention chirurgicale du 16 octobre 2014 ; sa créance globale s'élève à la somme de 9 995,47 euros ;

Par un mémoire, enregistré le 4 janvier 2018, M. B..., représenté par Me C..., conclut :

1°) à titre principal, à ce qu'une expertise avant dire droit soit ordonnée afin de déterminer notamment si les lésions ou infections sont en relation directe et certaine avec les interventions du CHU de Dijon et qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;

2°) à titre subsidiaire et par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement du 24 avril 2014 en tant que le tribunal administratif de Dijon n'a pas entièrement fait droit à sa demande d'indemnisation et à la condamnation du CHU de Dijon à lui verser la somme de 94 634,50 euros ;

3°) à titre plus subsidiaire, au rejet de la requête ;

4°) à ce que l'arrêt à intervenir soit déclaré commun à l'ONIAM, à la Mutualité de la fonction publique (MPF), à la mutuelle des sapeurs-pompiers de Paris, au cabinet d'assurances Frand et associés et à la société Monceau Retraite et Epargne ;

5°) à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge du CHU de Dijon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.

Il soutient que :

- l'expertise est irrégulière dès lors que le CHU n'a pas communiqué les pièces demandées et que les experts se sont contentés des pièces fournies pour rendre leur conclusion ;

- la responsabilité du CHU de Dijon est engagée tant au titre de la première infection que de la seconde ; concernant la première infection survenue autour du 17 juillet 2012, si le rapport d'expertise indique que l'infection au décours de la première ostéosynthèse n'a pas de caractère nosocomial, les experts font état de leurs doutes quant à l'origine de l'infection ; il est admis que la victime puisse prouver le caractère nosocomial de l'infection par un faisceau d'indices ; l'infection est apparue immédiatement après la première opération le 4 juillet 2012, dans la mesure où les deux fractures étaient fermées, l'attrition de la peau ne peut expliquer la contamination, la nature du germe contracté plaide en faveur d'une infection nosocomiale ; il est établi qu'il n'était atteint d'aucune infection avant la première intervention ; concernant la seconde infection nosocomiale contractée au décours de l'intervention du 16 octobre 2014, les experts ont retenu l'existence d'une infection nosocomiale et n'ont retenu que des postes de préjudice en lien avec cette infection ;

- le CHU a commis une faute dès lors qu'il a été hospitalisé dans un premier temps dans le service de chirurgie digestive faute de place dans le service d'orthopédie ;

- il a subi une rechute le 12 juillet 2016 qui est en lien direct et certain avec son accident de service et ses suites opératoires ; cette rechute a conduit à une aggravation des préjudices subis ; un complément d'expertise doit être ordonné en vue de confirmer le lien de causalité entre cette aggravation et les infections nosocomiales ;

- sur le déficit fonctionnel temporaire, le docteur Cabrita a relevé qu'il avait utilisé son fauteuil roulant du jour de sa sortie du CHU, le 12 juillet 2012, jusqu'au 25 janvier 2013 et le déficit doit être évalué à 75% ; pendant la période d'utilisation de deux cannes anglaises, le déficit doit être évalué à 50% ; pour la période d'utilisation d'une seule canne, le déficit doit être évalué à 25% ; il devra être indemnisé sur la base d'une indemnité journalière de 25 euros ; les souffrances psychologiques n'ont pas été indemnisées dans le poste " souffrances endurées " ; il a subi un préjudice esthétique temporaire en lien avec l'infection ; le déficit fonctionnel permanent devra être évalué à 20% ; compte tenu de ses nombreuses activités, il a subi un préjudice d'agrément qui devra faire l'objet d'une indemnisation à hauteur de 20 000 euros ; son préjudice esthétique permanent sera indemnisé à hauteur de 6 000 euros ;

- concernant les préjudices patrimoniaux, les experts ont omis de se prononcer sur l'assistance par une tierce personne et il sollicite une indemnisation à hauteur de 3 159 euros ; sur les frais futurs, il sera porteur d'une paire de semelles orthopédiques pour le restant de ses jours qui sera indemnisée à hauteur de 1 800 euros ; sur la perte de gains professionnels et l'incidence professionnelle, il n'a pu reprendre son activité professionnelle qu'en novembre 2015 et supporte des restrictions importantes imposées par la médecine du travail ; le docteur Cabrita conclut à une forte probabilité de licenciement pour inaptitude ; il a subi une perte de gains professionnels au regard de la grille indiciaire de la fonction publique attachée à la fonction de sous-officier de sapeurs-pompiers professionnels qui sera évaluée à 15 183 euros ;

Par lettre du 12 septembre 2019, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité du jugement en l'absence de mise en cause par le tribunal administratif de Dijon de l'employeur de M. B..., le service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or, et de la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, en méconnaissance des articles 3 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959.

Par un mémoire, enregistré le 27 septembre 2019, en réponse au moyen d'ordre public, M. B... indique qu'il appartiendra au service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or et à la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales de faire valoir, le cas échéant, leurs créances respectives.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant le centre hospitalier universitaire de Dijon et de Me C... représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 juillet 2012, M. B..., né le 30 décembre 1964, a été victime d'un accident de service en chutant dans les escaliers sur une hauteur d'environ un mètre et a présenté une déformation de l'extrémité distale de la jambe droite. Il a été pris en charge par le SMUR de Dijon qui a pratiqué une réduction de la fracture sous anesthésie et une immobilisation puis a été transféré au centre hospitalier universitaire de Dijon où a été posé le diagnostic de fracture complexe et articulaire du pilon tibial droit associée à une fracture de la diaphyse ulnaire droite fermée. Le 4 juillet 2012, une intervention chirurgicale consistant en une ostéosynthèse du péroné a été réalisée et une antibiothérapie est administrée. Le 11 juillet 2012, M. B... a été autorisé à regagner son domicile, une reprise chirurgicale sur le tibia étant envisagée à court terme après amélioration de l'état cutané et diminution de l'oedème important du pied et de la jambe. Du 23 juillet au 3 août 2012, l'intéressé a été à nouveau hospitalisé en raison d'une désunion cicatricielle avec infection et syndrome inflammatoire biologique et il a été procédé à la dépose du matériel précédemment mis en place et à la pose d'un fixateur externe. Les prélèvements réalisés ont permis de mettre en évidence la présence de staphylococcus lugdunensis et d'enterobacter Sp et une antibiothérapie a été instaurée. Du 22 au 30 août 2012, M. B... a été hospitalisé pour la prise en charge chirurgicale de la fracture du pilon tibial droit qui a conduit à la mise en place d'une plaque antéro-externe du tibia. A la suite de cette intervention, M. B... a été revu à plusieurs reprises en consultation afin de contrôler l'évolution de la cicatrisation et de la mobilité du pied. Le 15 octobre 2014, il a été procédé à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse en vue de redonner une mobilité en flexion dorsale. Le 16 novembre 2014, M. B... s'est présenté aux urgences du centre hospitalier universitaire de Dijon en raison d'une fièvre et d'un syndrome inflammatoire biologiques associés à des douleurs à la cheville et un abcès de la face antérieure de la jambe. Le 18 novembre 2014, M. B... a subi une reprise avec lavage et a bénéficié d'une antibiothérapie compte tenu de ce que les prélèvements effectués ont mis en évidence la présence d'un staphylocoque doré sensible. Par ordonnance du 20 octobre 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a désigné le docteur Grisi, spécialiste en hygiène hospitalière, en qualité d'expert et, par ordonnance du 24 mars 2015, il a désigné le docteur Gaillard, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologique, en qualité de sapiteur. Le rapport d'expertise a été déposé le 25 avril 2016. Le centre hospitalier universitaire de Dijon relève appel du jugement n° 1403111 du 24 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a mis hors de cause l'ONIAM et la société cabinet de courtage Frand et associés, l'a condamné à verser à M. B... la somme de 29 600 euros, à verser à la société Monceau retraite et épargne la somme de 2 729,88 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2017, a mis les frais d'expertise d'un montant de 3 000 euros à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon et a rejeté le surplus des conclusions des parties. M. B..., par la voie de l'appel incident, conclut à la réformation du jugement entrepris en ce qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques, les agents de l'Etat ou d'une personne publique mentionnée à l'article 7 de cette ordonnance ou leurs ayants droit qui demandent en justice la réparation d'un préjudice qu'ils imputent à un tiers " doivent appeler en déclaration de jugement commun la personne publique intéressée et indiquer la qualité qui leur ouvre droit aux prestations de celle-ci ". Cette obligation, dont la méconnaissance est sanctionnée par la possibilité reconnue à toute personne intéressée de demander pendant deux ans l'annulation du jugement, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des personnes publiques susceptibles d'avoir versé ou de devoir verser des prestations à la victime ou à ses ayants droit. Devant le tribunal administratif de Dijon, M. B... a indiqué qu'il avait été victime d'un accident du travail en qualité de sapeur-pompier professionnel au sein du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Côte-d'Or. En ne communiquant pas sa requête au service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or et à la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le tribunal administratif de Dijon a entaché son jugement d'irrégularité. La violation de la règle susmentionnée constitue une irrégularité que la cour, saisie de conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement qui lui est déféré, doit soulever d'office. Il y a lieu dès lors, d'annuler le jugement rendu le 24 avril 2017.

3. La procédure ayant été communiquée au service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or et à la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, l'affaire étant en état d'être jugée, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... tant devant le tribunal administratif de Dijon que devant la cour.

Sur les conclusions à fin d'appel en déclaration de jugement commun :

4. Aux termes des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement. A défaut du respect de l'une de ces obligations, la nullité du jugement sur le fond pourra être demandée pendant deux ans, à compter de la date à partir de laquelle ledit jugement est devenu définitif, soit à la requête du ministère public, soit à la demande des caisses de sécurité sociale intéressées ou du tiers responsable, lorsque ces derniers y auront intérêt (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la caisse doit être appelée en déclaration de jugement commun dans l'instance ouverte par la victime contre le tiers responsable, le juge étant, le cas échéant, tenu de mettre en cause d'office la caisse si elle n'a pas été appelée en déclaration de jugement commun. Tel n'est pas le cas concernant les mutuelles qui ne gèrent pas le régime obligatoire de sécurité sociale des agents de la fonction publique, les sociétés d'assurance et de courtage. Seules les conclusions de M. B... tendant à ce que la mutualité de la fonction publique et la société Monceau retraite et épargne soient appelées en déclaration de jugement commun doivent dès lors être accueillies. La société Monceau retrait et épargne a au demeurant été régulièrement mise en cause. Les conclusions en déclaration de jugement commun à la Mutuelle des sapeurs-pompiers de Paris, au cabinet d'assurances Frand et associés ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la recevabilité de la demande indemnitaire de M. B... :

5. La circonstance que M. B... a différé le chiffrage de sa demande indemnitaire jusqu'au dépôt du rapport d'expertise ne rend pas irrecevable sa demande présentée devant le tribunal administratif de Dijon. Par ailleurs, à la suite du dépôt du rapport d'expertise le 25 avril 2016, le tribunal administratif de Dijon a invité M. B... à chiffrer ses conclusions, ce qu'il a fait dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Dijon le 13 mars 2017. Par suite, la fin de non recevoir opposée par le CHU de Dijon et tirée du défaut de chiffrage des conclusions indemnitaires présentées par M. B... doit être écartée.

Sur la régularité de l'expertise :

6. M. B... fait valoir que le rapport définitif qui conclut partiellement à l'absence de responsabilité du CHU de Dijon souffre d'un manque d'impartialité compte tenu de ce que le CHU a refusé de communiquer certains documents relatifs aux interventions pratiquées.

7. Il résulte toutefois de l'instruction et notamment de la réponse au dire n° 2 concernant le respect du contradictoire que l'expert a indiqué " suite à notre demande, le CHU de Dijon nous a adressé le dossier médical complet original comme demandé : ce dernier n'a rien amené de plus à notre connaissance que ce que nous savions déjà ; il a été renvoyé sans délai au CHU de Dijon. Concernant les autres pièces, nous avons reçu le tableau de bord de la lutte contre les infections nosocomiales et nous l'annexons au rapport. Ce dernier est un document déclaratif qui nous a permis de nous assurer que l'établissement est en conformité avec la réglementation en matière de prévention des infections nosocomiales. (...) Nous considérons avoir eu suffisamment de pièces du dossier de la part du CHU de Dijon, sans quoi nous aurions informé le tribunal administratif que nous ne pouvions poursuivre notre travail expertal ". Par suite, l'expert a pu estimer être en possession des pièces nécessaires pour répondre aux questions qui lui étaient posées dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée par le tribunal administratif. Dans ces conditions, M. B... ne saurait soutenir que l'expert n'a pas accompli l'intégralité de sa mission et a méconnu le principe d'impartialité.

Sur la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Dijon :

En ce qui concerne la responsabilité pour faute :

8. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut de produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ( ...) ".

9. Si le requérant fait valoir qu'il a été placé dans le service de chirurgie digestive, dans l'attente d'une place dans le service d'orthopédie, il n'établit pas le caractère fautif de ce placement provisoire et ce alors que l'expert ne retient pas à l'encontre du CHU de Dijon l'existence d'une faute médicale ou d'une faute dans l'organisation des services.

En ce qui concerne la responsabilité au titre d'une infection nosocomiale :

10. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l'article 98 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ".

11. Aux termes du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, les professionnels de santé et les établissements, services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins " sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". Doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge.

12. En premier lieu, M. B... fait état, en se fondant sur le rapport critique établi lors des opérations d'expertise par le docteur Cabrita, médecin et expert près la cour d'appel de Dijon, que la première infection survenue autour du 17 juillet 2012 présente un caractère nosocomial dès lors que, selon lui, l'infection est apparue immédiatement après la première opération du 4 juillet 2012, que les deux fractures étaient fermées, l'attrition de la peau ne pouvant expliquer la contamination, que la nature du germe contracté plaide en faveur d'une infection nosocomiale eu égard à la circonstance qu'il a été initialement hospitalisé dans le service de chirurgie digestive. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'après l'intervention chirurgicale du 4 juillet 2012 consistant en une ostéosynthèse du péroné, M. B... a dû être à nouveau hospitalisé à compter du 23 juillet 2012 et jusqu'au 3 août 2012 en raison d'une désunion cicatricielle avec une infection et un syndrome inflammatoire biologique. Il a alors été procédé à la dépose du matériel précédemment mis en place et les prélèvements bactériologiques réalisés ont permis de mettre en évidence la présence de staphylococcus lugdunensis et d'enterobacter Sp. L'expert conclut que cette infection au décours de la première ostéosynthèse n'avait pas de caractère nosocomial en estimant que " l'origine probable des germes est liée au traumatisme initial " et souligne que " la peau n'étant pas intacte au moment de l'intervention, nous considérons cette peau comme contaminée avant le geste opératoire et à l'origine de la contamination bactérienne du foyer opératoire. (...) Il s'agit d'une infection d'origine cutanée liée à l'importance du traumatisme initial, à la réaction des tissus sous cutanés et cutanés avec apparition d'un volumineux oedème et de phlyctènes. Nous considérons que le site opératoire était déjà contaminé au moment de la prise en charge par le CHU de Dijon ". Si M. B... fait également valoir que l'infection est liée à un germe entérocoque qui est couramment retrouvé dans le tube digestif alors qu'il a été hospitalisé en service de chirurgie digestive dans l'attente d'une place dans le service d'orthopédie, le rapport critique du docteur Cabrita, au soutien des prétentions de M. B..., indique que ce germe peut également être présent sur la peau même si c'est en très faible quantité et l'expert a précisé, au cours de la discussion d'expertise, que " le profil antibiotique n'est pas le profil d'un germe hospitalier multi résistant. Il présente une sensibilité diminuée au C3G mais le reste des ATB restent sensibles et on considère qu'épidémiologiquement, cette souche est sauvage donc non hospitalière ". Il résulte de ces constatations que l'infection présentée après la première intervention chirurgicale est la conséquence non des actes pratiqués dans le cadre de la prise en charge de M. B... ni de son séjour dans l'environnement hospitalier mais de la pathologie qui avait nécessité son hospitalisation. Par suite, les dommages résultant de cette infection ne sont pas dus à une infection nosocomiale au sens des dispositions précitées du code de la santé publique.

13. En deuxième lieu, il résulte également de l'instruction que, le 16 octobre 2014, il a été procédé à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse en vue de redonner une mobilité en flexion dorsale de la cheville droite de M. B.... Le 16 novembre 2014, M. B... s'est présenté aux urgences du centre hospitalier universitaire de Dijon en raison d'une fièvre et d'un syndrome inflammatoire biologique associés à des douleurs à la cheville et un abcès de la face antérieure de la jambe. Le 18 novembre 2014, M. B... a subi une reprise avec lavage et a bénéficié d'une antibiothérapie du fait que les prélèvements effectués ont mis en évidence la présence d'un staphylocoque doré sensible. Les experts précisent, sans être contestés par le centre hospitalier, que " L'intervention du 16 octobre 2014 représentait un risque infectieux élevé du fait du site multi-opéré et des antécédents d'infection. C'est averti de ce risque que M. B... a souhaité cette intervention dont la finalité était de récupérer de la mobilité dans sa cheville. (...) L'infection qui survient au décours de l'intervention du 16 octobre 2014 dans un délai d'un mois est une infection à germes d'origine cutanée. Il est connu que les infections sont plus fréquentes sur des sites multi-opérés. Les prélèvements réalisés le 16 octobre 2014 lors de l'intervention pour ablation du matériel d'ostéosynthèse du tibia, tous stériles montrent que le patient était indemne de toute infection avant l'intervention. Malgré le respect des mesures de prévention du risque infectieux, nous considérerons cette infection comme une infection nosocomiale imputable à l'intervention du 16 octobre 2014 sur l'argument du délai de survenu, de la présence de prélèvements stériles lors de l'intervention confirmant que le site n'était pas infecté au moment de l'intervention, sur la présence d'autres germes comme staphylocoque aureus non présents dans la première infection ". Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que M. B... aurait présenté une infection en cours ou en incubation lors de sa prise en charge par le centre hospitalier le 15 octobre 2014 et que son infection aurait une autre origine que la prise en charge par le centre hospitalier. Par suite, l'infection contractée lors de l'intervention du 16 octobre 2014 doit être regardée comme ayant un caractère nosocomial et engage ainsi la responsabilité du CHU de Dijon.

14. En dernier lieu, M. B... fait encore valoir qu'il a subi une rechute le 12 juillet 2016 qui est en lien direct et certain de causalité avec son accident de service survenu le 3 juillet 2012 et ses suites opératoires et qu'il a dû subir une nouvelle intervention le 7 décembre 2016 au niveau des orteils de son pied droit en griffe et il indique que cette rechute a conduit à l'aggravation de ses préjudices. S'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'une radiographie du 16 avril 2016 de l'avant pied droit qui a permis de déceler une déminéralisation intense et diffuse de l'ensemble du squelette exploré, M. B... a subi une intervention le 7 décembre 2016 au centre orthopédique médico-chirurgical de Dracy-le-Fort et, selon le rapport d'expertise, aucune séquelle fonctionnelle n'est imputable à l'infection nosocomiale, la date de consolidation de son état de santé, évaluée postérieurement à l'infection nosocomiale, ayant été fixée au 4 mai 2015. Par suite, il n'est pas établi que la rechute alléguée soit imputable à l'infection nosocomiale résultant de l'intervention du 16 octobre 2014. En conséquence, les conclusions tendant à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée doivent être rejetées.

15. Il résulte de ce qui vient d'être dit que le CHU de Dijon doit être déclaré responsable de l'infection nosocomiale dont a été victime M. B... à la suite de l'intervention du 16 octobre 2014.

Sur l'évaluation des préjudices :

16. La société Monceau retraite et épargne intervient en sa qualité d'assureur des sapeurs-pompiers du SDIS de la Côte-d'Or et à ce titre, elle a procédé au versement de prestations au bénéfice de M. B.... En première instance, elle a précisé que la société cabinet de courtage Frand et associés n'intervient qu'en qualité de courtier à son bénéfice. Par suite, il y a lieu de mettre hors de cause la société cabinet de courtage Frand et associés.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

Sur les dépenses de santé :

17. M. B... n'établit ni même n'allègue de dépenses de santé restées à sa charge. Il demande toutefois l'indemnisation d'une paire de semelles orthopédiques pour le restant de ces jours en faisant valoir que la sécurité sociale ne rembourse qu'une paire par an et que, dans le cadre de son activité professionnelle, il a besoin d'une seconde paire de semelles. Il résulte de l'instruction que les experts ont relevé qu'aucune séquelle fonctionnelle n'est imputable à l'infection nosocomiale, l'infection nosocomiale n'ayant pas aggravé l'état fonctionnel du pied de M. B.... Par suite, M. B..., n'établissant pas le lien de causalité entre ce chef de préjudice et l'infection nosocomiale, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

18. La société Monceau retraite et épargne fait valoir qu'elle a exposé pour son assuré, du 20 octobre 2014 au 19 mars 2015 les sommes de 1 377,74 euros au titre des frais pharmaceutiques, de 6 898,42 euros au titre des actes ambulatoires, de 1 540,81 euros au titre des frais de kinésithérapie et de 178,50 euros au titre des frais de transports. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que " la complication liée à l'intervention du 16 octobre 2014 est responsable d'une hospitalisation du 16 au 24 novembre 2014 et de trois mois et demi d'antibiothérapie et de soins jusqu'à début mars ". Il résulte également de l'instruction que les frais de kinésithérapie en lien avec les complications de l'intervention chirurgicale du 16 octobre 2014 se sont élevés à la somme de 1 162,30 euros, les frais de pharmacie se sont élevés à la somme de 1 144,58 euros, les frais ambulatoires se sont élevés à la somme de 244,50 euros et les frais de transport se sont élevés à la somme de 178,50 euros, soit un total de 2 729,88 euros. Il y a lieu en conséquence de condamner le CHU de Dijon à verser à la société Monceau retraite et épargne la somme de 2 729,88 euros.

Sur les dépenses d'assistance par une tierce personne :

19. M. B... fait état de ce que les experts ont omis de prendre en compte ce poste de préjudice alors que, du 12 juillet 2012 au 25 janvier 2013, il était porteur de cannes anglaises ou sur un fauteuil roulant. Il résulte de ce qui a été dit au point 13 que seule la seconde infection dont a été victime M. B... le 14 novembre 2014 peut être regardée comme une infection nosocomiale. Par suite, compte tenu de la demande indemnitaire de M. B... pour la période du 12 juillet 2012 au 25 janvier 2013, ce chef de préjudice doit être écarté.

Sur les pertes de revenus et l'incidence professionnelle :

20. M. B... fait valoir que, depuis sa première opération en juillet 2012, il n'a pu reprendre son activité de sapeur-pompier qu'en novembre 2015 avec des restrictions importantes imposées par la médecine du travail et qu'il a subi une perte de gains professionnels et qu'il n'a pu bénéficier d'une évolution de carrière normale. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'aucune séquelle fonctionnelle n'est imputable à l'infection nosocomiale, celle-ci n'ayant pas aggravé l'état fonctionnel du pied de M. B.... Par suite, M. B..., qui n'établit pas le lien de causalité entre la perte de gains professionnels allégués et l'incidence professionnelle et l'infection nosocomiale du 14 novembre 2014, n'est pas fondé à solliciter une somme au titre d'une perte de revenus ou de l'incidence professionnelle.

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux de M. B... :

Sur le déficit fonctionnel temporaire :

21. Ainsi qu'il a été indiqué au point 13, seules les périodes de déficit fonctionnel temporaire total et partiel en lien avec la seconde infection doivent être prise en compte pour évaluer les préjudices subis par M. B... et devant être réparés par le CHU de Dijon. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que " le traumatisme initial était considéré comme consolidé à hauteur de 15% le 31 mai 2014. L'intervention du 16 octobre 2014 était sensée améliorer les séquelles. A la date du 4 mai 2015, M. B... a retrouvé son état du 31 mai 2014. ". M. B... a subi une période d'incapacité totale temporaire imputable à l'infection nosocomiale résultant de l'intervention du 16 octobre 2014 du 16 au 25 novembre 2014 et une période d'incapacité temporaire partielle du 26 novembre au 18 décembre 2014 au taux de 50%, du 19 décembre 2014 au 1er mars 2015 au taux de 25% et du 2 mars 2015 au 4 mai 2015 au taux de 15%. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 000 euros.

Sur le déficit fonctionnel permanent :

22. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que si l'expert a indiqué qu'" il persiste une incapacité permanente partielle de 12% correspondant à la raideur persistante de la cheville ou du pied ", il a également précisé qu' " il n'y a pas de séquelles fonctionnelles imputables à l'infection nosocomiale ". Par suite, M. B... ne peut prétendre à aucune indemnité au titre du déficit fonctionnel permanent.

Sur les souffrances endurées :

23. Si le CHU de Dijon fait valoir que les souffrances endurées sont uniquement imputables à la fracture complexe initiale et que l'infection nosocomiale a été traitée par l'administration d'un traitement antibiotique, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. B... s'est présenté aux urgences de l'hôpital, le 16 novembre 2014, pour fièvres, frissons et syndrome inflammatoire biologiques associées à des douleurs de cheville et abcès de la face antérieure de la jambe et qu'il a été admis au CHU pour une reprise lavage qui a eu lieu le 18 novembre 2014, le compte rendu opératoire précisant " indication après discussion au staff de reprise chirurgicale pour prélèvement et lavage. Il existe de nombreuses fausses membres./ On progresse en prenant soin des tendons jusqu'à l'articulation ; évacuation d'une collection purulente franche ". Par suite, et compte tenu des souffrances endurées en lien avec l'infection nosocomiale, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à M. B... la somme de 4 000 euros.

Sur le préjudice esthétique temporaire et le préjudice esthétique permanent :

24. Si le CHU de Dijon fait valoir que le préjudice esthétique est uniquement imputable aux interventions en vue de remédier à la fracture complexe dont M. B... a été victime, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. B... a présenté un syndrome inflammatoire biologiques avec abcès de la face antérieure de la jambe dans les suites de l'intervention du 16 octobre 2014. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice esthétique temporaire en lien avec l'infection nosocomiale en l'estimant à hauteur de 1 000 euros.

25. Si M. B... fait état d'atteintes physiques de nature à altérer son apparence physique, il n'établit pas que l'infection nosocomiale et l'intervention du 18 novembre 2014 auraient conduit à une aggravation de l'altération de son apparence physique résultant de la fracture complexe dont il a été victime. Par suite, la demande indemnitaire au titre du préjudice esthétique permanent ne peut être accueillie.

Sur le préjudice d'agrément :

26. M. B... fait valoir qu'il est gêné dans ses activités de bricolage et ne peut plus faire de ski alpin ou de course à pied, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'aucune séquelle fonctionnelle n'est imputable à l'infection nosocomiale, l'infection nosocomiale n'ayant pas aggravé l'état fonctionnel du pied de M. B.... Par suite, M. B... n'établit le lien de causalité entre le préjudice d'agrément allégué et l'infection nosocomiale du 14 novembre 2014.

27. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander la condamnation du CHU de Dijon à lui verser la somme de 6 000 euros et que la société Monceau retraite et épargne est fondée à demander la condamnation du même établissement hospitalier à lui verser la somme de 2 729,88 euros.

Sur les intérêts :

28. La société Monceau retraite et épargne a droit, comme elle le demande, aux intérêts au taux légal sur la somme de 2 729,88 euros à compter du 9 janvier 2017, date d'enregistrement de son second mémoire devant le tribunal administratif de Dijon.

Sur les dépens :

29. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./ Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ".

30. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge définitive du CHU de Dijon, partie perdante, le montant des frais d'expertise de première instance liquidés et taxés aux sommes de 1 000 et 2 000 euros par ordonnances du 13 mai 2016 du président du tribunal administratif de Dijon.

Sur les frais liés au litige :

31. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des parties les sommes demandées au titre des frais exposés par elles sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le présent arrêt est déclaré commun à la Mutualité de la fonction publique et[AF1] à la société Monceau retraite et épargne

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon 24 avril 2017 est annulé.

Article 3 : Le CHU de Dijon est condamné à verser à M. B... la somme de 6 000 euros.

Article 4 : Le CHU de Dijon est condamné à verser à la société Monceau retraite et épargne la somme de 2 729,88 euros. Cette somme portera intérêts à compter du 9 janvier 2017.

Article 5 : Les frais d'expertise de première instance liquidés et taxés aux sommes de 1 000 et 2 000 euros par ordonnances du 13 mai 2016 du président du tribunal administratif de Dijon sont mis à la charge du CHU de Dijon.

Article 6 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier universitaire de Dijon, à M. B..., à la société Monceau retraite et épargne, à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la société cabinet de courtage Frand et associes, au service départemental d'incendie et de secours de la Côte-d'Or, à la caisse des dépôts et consignations[AF2], à la Mutualité de la fonction publique et à la mutuelle des sapeurs-pompiers de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Drouet, président de la formation de jugement,

Mme A..., premier conseiller,

M. Pin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 novembre 2019 .

Le rapporteur,

R. A...

Le président,

H. DrouetLe greffier,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la solidarité en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

[AF1]Rozenn, la mutuelle n'avait pas été mise en partie

[AF2]Doit on ajouter les mutuelles '

2

N° 17LY02889

mv


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY02889
Date de la décision : 28/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-005 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité sans faute.


Composition du Tribunal
Président : M. DROUET
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-11-28;17ly02889 ?
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