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22/10/2020 | FRANCE | N°18LY03397

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 22 octobre 2020, 18LY03397


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La communauté d'agglomération Montluçon communauté a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- de condamner in solidum la société Socotec, la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Lagorsse et M. C... pris en son nom personnel et en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui payer la somme de 231 317,99 euros TTC en réparation du préjudice résultant des frais de remise en état du centre de loisirs aquatiques de la Loue, assortie des intérêts au

taux légal à compter de la date d'introduction de la requête ;

- de condamner in soli...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La communauté d'agglomération Montluçon communauté a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- de condamner in solidum la société Socotec, la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Lagorsse et M. C... pris en son nom personnel et en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui payer la somme de 231 317,99 euros TTC en réparation du préjudice résultant des frais de remise en état du centre de loisirs aquatiques de la Loue, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de la requête ;

- de condamner in solidum la société Socotec, la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Lagorsse et M. C... pris en son nom personnel et en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui payer la somme de 39 000 euros en réparation du préjudice résultant des pertes d'exploitation de son équipement auxquelles elle a été exposée, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de la requête ;

- de mettre la somme de 16 053,50 euros à la charge in solidum de la société Socotec, de la société Baudin Chateauneuf, de la société Dumez Lagorsse et de M. C... pris en son nom personnel et en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, au titre des dépens ;

- de mettre la somme de 16 053,50 euros à la charge in solidum de la société Socotec, de la société Baudin Chateauneuf, de la société Dumez Lagorsse et de M. C... pris en son nom personnel et en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1602232 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a :

- condamné in solidum la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Auvergne, la société Socotec et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à payer la somme de 231 317,99 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2016, à la communauté d'agglomération Montluçon communauté au titre des travaux visant à réparer les désordres affectant le plafond du centre de la Loue ;

- condamné in solidum la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Auvergne, la société Socotec et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à payer la somme de 39 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2016, à la communauté d'agglomération Montluçon communauté en réparation du préjudice tiré de la perte d'exploitation subie au cours des travaux visant à réparer les désordres affectant le plafond du centre de la Loue ;

- mis les frais de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 14 223,50 euros à la charge in solidum de la société Baudin Chateauneuf, de la société Dumez Auvergne, de la société Socotec et de M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- condamné in solidum la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Auvergne, la société Socotec et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à payer la somme de 2 000 euros à la communauté d'agglomération Montluçon communauté en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- condamné M. C..., en sa qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, à garantir la société Baudin Chateauneuf, à concurrence de 40 % des sommes mises à sa charge ;

- condamné la société Socotec à garantir la société Baudin Chateauneuf, à concurrence de 20 % des sommes mises à sa charge ;

- condamné la société Baudin Chateauneuf, en sa qualité de mandataire de son groupement d'entreprises, à garantir M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à concurrence de 40 % des sommes mises à sa charge ;

- condamné la société Socotec à garantir M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à concurrence de 20 % des sommes mises à sa charge ;

- a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

I. Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2018, sous le n° 18LY03397, et des mémoires enregistrés les 11 mars 2020 et 10 avril 2020, M. A... C..., représenté par la Selarl Tournaire Meunier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1602232 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

2°) de rejeter la demande de la communauté d'agglomération Montluçon communauté et les demandes des sociétés Baudin Chateauneuf, Dumez Lagorsse et Socotec France ;

3°) de condamner in solidum les sociétés Baudin Chateauneuf et Socotec à le garantir de l'intégralité des sommes susceptibles d'être mises à sa charge ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner in solidum les sociétés Baudin Chateauneuf et Socotec à le garantir de 95 % des sommes susceptibles d'être mises à sa charge ;

5°) de rejeter la demande de la communauté d'agglomération Montluçon communauté tendant à l'indemnisation d'un préjudice économique à hauteur de 39 000 euros ;

6°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Montluçon communauté, ou de tout partie succombante, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les demandes fondées sur la responsabilité contractuelle par la communauté d'agglomération, qui ne peut se cumuler avec la responsabilité décennale, seule susceptible d'être mise en oeuvre compte tenu de la nature décennale des désordres, doivent être rejetées ;

- sa responsabilité décennale n'est pas engagée dès lors qu'il a bien imposé dans le CCTP (article 12.1.2) que les crochets soient inoxydables, compatibles avec leur environnement, en particulier le milieu chloré, et précisé la nature et les conditions d'utilisations des suspentes ; il ne lui appartenait pas de définir de manière précise la nature de l'inox ou son niveau de protection, ce point relevant de la compétence des entreprises qui réalisent les travaux ;

- il n'est pas démontré que les désordres lui sont imputables, alors que l'erreur dans la qualité de l'inox des crochets de suspente du faux plafond acoustique est imputable à la société Baudin Chateauneuf, que la rédaction du CCTP informait clairement des attentes du maître d'ouvrage, les crochets de suspension devant être compatibles et suffisamment résistants pour soutenir les faux-plafonds au-dessus du bassin, et ce alors qu'à la date de rédaction du CCTP, il n'existait aucune norme technique applicable concernant la qualité des inox devant être utilisé pour les piscines ;

- le tribunal n'indique pas en quoi il n'aurait pas réalisé une analyse complète de la variante proposée ;

- la société Baudin Chateauneuf ne démontre pas que l'expert judiciaire aurait minimisé sa part de responsabilité en tant qu'architecte ;

- la société Baudin Chateauneuf, qui doit répondre à l'égard du maître de l'ouvrage des fautes de son sous-traitant et de son fournisseur concernant les crochets litigieux et qui a manqué à son obligation d'information auprès de l'architecte sur la nature des crochets inoxydables utilisés, n'a émis aucune réserve sur l'expression " alliage léger inoxydable " dans le CCTP, a engagé de manière prépondérante sa responsabilité décennale à hauteur de 63,33 % ;

- la responsabilité décennale de la société Socotec est engagée à hauteur de 33,66 % dès lors que son rapport initial de contrôle technique (RICT) est muet sur le système de fixation des faux plafonds et qu'elle a émis un avis F (favorable) après l'analyse des plans, alors même qu'une réserve aurait été émise sur ce principe constructif ;

- les travaux de reprise doivent être évalués à la somme de 176 645,58 euros TTC correspondant au premier devis dès lors que la communauté d'agglomération Montluçon communauté ne justifie pas de la nécessité de réaliser les travaux dans des délais d'exécution précis et de supporter un surcoût de 36 142,48 euros TTC résultant du second devis d'un montant de 212 788,06 euros TTC ; à cette somme de 176 645,58 euros TTC devront être intégrés le coût des travaux de réparation ponctuels déjà réglés par ladite communauté, pour un montant de 6 444 euros TTC, 1 444,45 euros TTC et 3 081,48 euros TTC ;

- le jugement contesté n'est pas motivé sur le choix préférentiel de ce second devis ;

- le préjudice économique consistant en des pertes d'exploitation n'est pas justifié par un élément comptable ;

- l'appel en garantie formé à son encontre par la société Socotec doit être rejeté dès lors qu'elle ne démontre pas une faute imputable à l'architecte ;

- la société Baudin Chateauneuf doit la garantir des condamnations prononcées à son encontre dès lors qu'elle a commis une faute dans la proposition de la variante en n'attirant pas l'attention de la société Sogeb Mazet sur les caractéristiques des crochets en inox à utiliser, en n'émettant aucune réserve sur le CCTP rédigé par l'architecte, et en ne s'interrogeant pas sur les caractéristiques techniques des crochets ;

- la société Socotec doit la garantir des condamnations prononcées à son encontre dès lors qu'elle a commis une faute dans sa mission LP en établissant un rapport initial de contrôle technique (RICT) ne correspondant pas aux travaux qui ont été réalisés concernant la variante relative au système de faux plafond acoustique en émettant un avis favorable sur le principe constructif du faux plafond pour lequel il avait émis une réserve ;

- il n'y a pas lieu à condamnation in solidum dès lors que l'expert judiciaire a fixé les pourcentages de responsabilités imputables aux différents intervenants et que le pourcentage de responsabilité qui lui est imputé par l'expert à hauteur de 5 % démontre qu'il n'a pas participé à la réalisation de l'entier dommage ;

- le jugement contesté est insuffisamment motivé sur la condamnation in solidum prononcée.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2019, la société anonyme Baudin Chateauneuf, représentée par la SCP Langlais Genevois et Associés, demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement contesté en ce que les condamnations qui seront prononcées à son encontre seront prononcées solidairement avec la société Dumez Auvergne venant aux droits et actions de la société Dumez Lagorsse et concernant sa garantie par M. A... C..., en son nom personnel et es-qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, et par la société Socotec à hauteur respectivement de 40 % et 20 % de toute condamnation prononcée à son encontre ;

2°) de rejeter l'appel en garantie formé à son encontre par la société Dumez Auvergne ;

3°) de prononcer les condamnations hors taxe et de rejeter toute demande indemnitaire au titre du préjudice de perte d'exploitation de la communauté d'agglomération excédant l'euro symbolique ;

4°) de mettre à la charge de M. A... C... et de la société Dumez Auvergne la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les instances n° 18LY03397 et n° 18LY03426 doivent être jointes ;

- la société Sogeb Mazet a seule mise en oeuvre les matériaux défaillants qu'elle a personnellement choisis et retenus, après avoir consulté ses fournisseurs ;

- la demande en garantie présentée par la société Dumez Auvergne à son encontre doit être rejetée dès lors que les membres du groupement solidaire Baudin Chateauneuf / Dumez Auvergne sont responsables de plein droit envers le maître d'ouvrage des désordres décennaux résultant d'une cause étrangère à leur intervention et que la convention de groupement n'est pas opposable au maître d'ouvrage ; Il y a donc lieu de retenir, si elle doit l'être, la responsabilité solidaire des sociétés Baudin Chateauneuf et Dumez Lagorsse au côté de celle des autres intervenants à l'opération de construire ;

- la responsabilité de M. A... C... en son nom personnel et es-qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre ne saurait être inférieure à 40 % eu égard à la rédaction maladroite et approximative du CCTP, qui n'a pas précisé les caractéristiques des matériaux, et n'a pas assuré une mission d'assistance au contrat de travaux, en méconnaissance du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- sa demande de garantie par M. A... C..., en son nom personnel et es-qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, est donc fondée à hauteur de 40 % des condamnations prononcées à son encontre ;

- la société Socotec, qui a admis sans discussion et sans émettre le moindre avis, les conditions de pose des faux-plafonds litigieux n'a pas rempli son rôle de contrôleur technique et n'a pas su poser les questions qui auraient permis d'anticiper le désordre, en particulier ne s'est pas interrogée sur la nature du système de fixation des faux-plafonds et n'a pas vérifié la compatibilité des matériaux employés avec le milieu agressif et humide d'une piscine couverte ; sa part de responsabilité ne saurait être inférieure à 20 % et elle doit donc la garantir à cette hauteur ;

- l'ensemble des condamnations seront prononcées hors taxe dès lors que la communauté d'agglomération Montluçon communauté ne justifie pas ne pas pouvoir récupérer la TVA et ne pas être éligible au fonds de compensation de la TVA, alors qu'il existe une présomption de non assujettissement à la TVA au profit des collectivités territoriales ;

- la perte d'exploitation n'est pas établie dans son montant et ne saurait excéder en tout état de cause l'euro symbolique ;

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 mars 2019 et 5 avril 2019, ce dernier non communiqué, la société Socotec Construction, représentée par la Selarl Piras et Associés, demande à la cour :

1°) à titre principal de rejeter toutes les demandes formées à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire de rejeter la demande de condamnation solidaire, les demandes qui ne sont pas justifiées dans leur quantum ou de les réduire à de plus justes proportions et de fixer sa part de responsabilité à 5 % au maximum du montant des condamnations ;

3°) à titre très subsidiaire, de condamner solidairement M. C..., ès-qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, la société Baudin Chateauneuf, ès-qualité de mandataire du groupement d'entreprise, et la société Dumez Lagorsse à la relever et garantir de toutes condamnations ;

4°) de mettre à la charge de M. A... C..., ou qui mieux le devra, la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- sa responsabilité décennale ne peut être engagée dès lors qu'elle a respecté les termes de sa mission en émettant, dès le 3 septembre 2004 (rapport préalable) puis le 9 décembre 2004 (rapport initial), de strictes réserves sur l'utilisation d'un faux plafond et que les fiches techniques d'exécution des faux plafonds lui ont été transmises tardivement par la société Sogeb Mazet le 21 juin 2006, soit un mois avant la réception de l'ouvrage, ce qui ne lui permettait pas de participer à la prévention des aléas techniques pour les ouvrages de plafond ;

- la responsabilité solidaire des défendeurs ne peut être engagée dès lors que l'entier dommage ne résulte pas d'activités conjointes sans qu'il soit possible de dissocier la part de chacun des intervenants à l'opération et qu'il ressort de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation que le contrôleur technique ne peut être engagé conjointement avec les autres locateurs d'ouvrage ;

- le préjudice d'exploitation n'est pas justifié ;

- la requérante ne justifie pas du montant de ses demandes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- elle sera garantie par la société Baudin Chateauneuf, ès-qualité de mandataire du groupement d'entreprise, qui a commis une faute en ne précisant pas à son sous-traitant les caractéristiques techniques nécessaires des crochets et en n'émettant aucune réserve sur le CCTP rédigé par le maître d'oeuvre ;

- elle sera garantie par M. C..., en qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, dès lors que la maîtrise d'oeuvre a commis une faute en rédigeant un CCTP imprécis, en particulier en ce qui concerne la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en oeuvre.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2020, la communauté d'agglomération Montluçon communauté, représentée par Me Cabanes, conclut au rejet des conclusions d'appel et à ce qu'il soit mis à la charge de M. C... et des sociétés Baudin Chateauneuf et Socotec la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la responsabilité décennale de plein droit de M. C... et de la société Socotec, qui ne contestent ni leur qualité de constructeur ni le caractère décennal des désordres, ni que les désordres sont en lien avec leurs missions, doit être solidairement engagée, sans qu'il soit nécessaire d'établir une faute.

- M. C... est responsable en raison de l'imprécision des prescriptions du CCTP, de sa défaillance dans le contrôle de la variante proposée par l'entreprise, de sa carence dans sa mission ACT, et pour ne pas avoir conseillé de différer la réception des ouvrages ;

- la société Socotec est responsable dès lors qu'elle n'a pas demandé la suppression des faux plafonds, induite par la variante de l'entreprise mise en oeuvre, alors qu'elle avait antérieurement émis une réserve sur l'opportunité d'un tel équipement, et qu'elle n'a pas alerté le maître d'ouvrage sur les risques que représente la pose de faux plafonds, alors qu'elle a une obligation d'examen visuel des ouvrages sur le chantier et qu'elle devait remettre un rapport final avant la réception ;

- une condamnation in solidum de la société Socotec n'entre pas en contradiction avec les dispositions de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation, qui ne régissent que les rapports entre constructeurs et n'intéressent pas les actions du maître de l'ouvrage, et ne sont en toute hypothèse pas opposables aux contrats conclus avant le 9 juin 2005 ;

- concernant les travaux de réparation, le dernier devis d'un montant de 212 788,06 euros TTC, validé par l'expert, tient compte des contraintes d'exploitation du centre, en prévoyant une intervention sur une période réduite pour limiter les pertes d'exploitation, alors que retenir le premier devis, qui imposait une fermeture complète de 8 semaines pour l'un des bassins et 4 semaines et demi pour l'autre, entrainait des conséquences trop lourdes en termes de service et d'image ;

- la fermeture partielle des installations durant les travaux a généré des pertes d'exploitation estimées à la somme de 39 000 euros, qui a été validée par l'expert et ne fait l'objet de la part des appelants d'aucun élément de contre-estimation ;

- comme l'a retenu le tribunal, il y a un principe de non assujettissement à la TVA des collectivités publiques, dont il ne lui appartient pas d'apporter la preuve contraire.

II. Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2018, sous le n° 18LY03426, la société Dumez Auvergne, venant aux droits de la société Dumez Lagorsse, représentée par la Selarl Pôle Avocats Limagne-Fribourg, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1602232 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en ce qu'il a rejeté la demande de garantie qu'elle a formée à l'encontre de la société Baudin Chateauneuf ;

2°) de condamner la société Baudin Chateauneuf à la garantir intégralement de toute condamnation prononcée à son encontre en qualité de membre du groupement d'entreprises ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'elle était fondée à être garantie des éventuelles condamnations prononcées contre elle par la société Baudin Charteauneuf dès lors que la convention de groupement d'entreprises, qui est conjoint, signée entre elles révèle une répartition des prestations, qu'elle n'est pas intervenue sur les travaux ayant causé les désordres, en particulier les plafonds suspendus, et que ladite société doit répondre de la faute de son sous-traitant, la société Sogeb Mazet, dans l'exécution des travaux et prestations prévues à la convention, qui est selon l'expert l'un des responsable des désordres.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2019, la société anonyme Baudin Chateauneuf, représentée par la SCP Langlais Genevois et Associés, conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que celles et ceux qu'elle a exposés dans le dossier n° 18LY03397.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 mars 2019 et 5 avril 2019, ce dernier non communiqué, la société Socotec Construction, représentée par la Selarl Piras et Associés, conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que celles et ceux qu'elle a exposés dans le dossier n° 18LY03397.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2020, la communauté d'agglomération Montluçon communauté, représentée par Me Cabanes, conclut au rejet des conclusions d'appel et à ce qu'il soit mis à la charge des sociétés Baudin Châteauneuf et Socotec la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir les mêmes moyens que ceux qu'elle a exposés dans le dossier n° 18LY03397 en ce qui concerne la responsabilité décennale de la société Socotec, la condamnation in solidum de cette dernière, et les préjudices subis.

La clôture de l'instruction a été fixée dans les deux instances au 1er septembre 2020 par des ordonnances du 17 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code civil ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

- le décret n° 99-443 du 28 mai 1999 relatif au cahier des clauses techniques générales applicables aux marchés publics de contrôle technique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rivière ;

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

- et les observations de Me Meunier, pour M. C..., celles de Me G..., pour Montluçon Communauté et celles de Me Langlais pour la société Baudin Chateauneuf.

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Par un acte d'engagement, la communauté d'agglomération montluçonnaise, devenue Montluçon Communauté, a conclu, avec un groupement solidaire dont M. A... C... était mandataire un marché pour la conception architecturale, fonctionnelle et technique d'un stade nautique, dit centre de la Loue, à Montluçon. Par une convention conclue le 7 juin 2004, la communauté d'agglomération a confié la mission de contrôle technique à la Société Socotec. Le 1er mars 2005, elle a confié au groupement solidaire composé de la société Dumez Lagorsse, aux droits de laquelle est venue la société Dumez Auvergne, et de la société Baudin Chateauneuf, mandataire, un marché public de travaux pour la réalisation de cette opération. Par un acte spécial de sous-traitance, signé le 1er mars 2005, le maître d'ouvrage a agréé la société Sogeb Mazet en qualité de sous-traitant du groupement titulaire du marché de travaux pour le lot n° 13 " plâtrerie - peinture ". Les travaux réalisés ont fait l'objet d'une réception assortie de réserves, étrangères à l'installation des faux-plafonds, constatée par un procès-verbal en date du 27 juillet 2006. Ces réserves ont été levées le 27 octobre 2006. Ultérieurement, plusieurs désordres sont apparus au sein du centre de loisirs, en particulier des déformations du plafond et l'effondrement partiel de plusieurs porteurs et entretoises des dalles de faux-plafonds, à l'aplomb de l'extrémité Nord du bassin olympique et de la plage du bassin. Sur requête de Montluçon Communauté, une expertise confiée à M. I..., assisté d'un sapiteur, M. H... , a été ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Le rapport d'expertise, déposé le 16 février 2016, a révélé que les désordres précités étaient dus à la détérioration des éléments de suspentes qui, bien qu'inoxydables, ne présentaient pas une résistance suffisante à la corrosion dans un milieu de vapeurs chlorées. Cette corrosion de tous les éléments de suspente a conduit à terme à la rupture des crochets, dont la faible section était un facteur de fragilité. La communauté d'agglomération a recherché la responsabilité des sociétés Baudin Chateauneuf, Dumez Lagorsse, Socotec et de M. C..., à raison de ces désordres sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs et, subsidiairement, sur le fondement de leur responsabilité contractuelle. Par un jugement n° 1602232 du 5 juillet 2018, dont M. A... C... et la société Dumez Auvergne relèvent chacun appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, sur le fondement de la responsabilité décennale, d'une part, condamné in solidum les sociétés Baudin Chateauneuf, Dumez Auvergne, Socotec, et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à indemniser, à hauteur de 270 317,99 euros, dont 39 000 euros hors taxes, Montluçon Communauté des préjudices subis en raison des désordres et mis les dépens à leur charge solidaire, d'autre part, condamné M. C... a garantir la société Baudin Chateauneuf à concurrence de 40 % des condamnations prononcées à son encontre, la société Socotec a garantir la société Baudin Chateauneuf et M. C... à concurrence de 20 % des condamnations prononcées à leur encontre, et la société Baudin Chateauneuf à garantir M. C... à concurrence de 40 % des condamnations prononcées à son encontre.

Sur la régularité du jugement :

3. Après avoir retenu la responsabilité décennale de la société Baudin Chateauneuf, de la société Dumez Auvergne, de la société Socotec et de M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, du fait de l'imputabilité des désordres à ces constructeurs, les premiers juges devaient faire droit à la demande par le maitre d'ouvrage de leur condamnation solidaire. La circonstance que l'expert judiciaire avait déterminé les parts respectives de responsabilité incombant aux différents intervenants, dont 5 % pour M. C..., ne permettait pas au tribunal pour ce motif d'écarter le principe d'une condamnation in solidum en prenant en considération dès ce stade les fautes imputables à chaque participant dans le cadre des appels en garantie pour les exclure, le cas échéant de la solidarité demandée par le maître d'ouvrage lésé. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement contesté, qui pour le surplus n'avait pas à répondre à tous les arguments des parties, est insuffisamment motivé.

Sur bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la responsabilité décennale des constructeurs :

4. Il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables. Par ailleurs, un constructeur dont la responsabilité est recherchée par un maître d'ouvrage n'est fondé à demander à être garanti par un autre constructeur que si et dans la mesure où les condamnations qu'il supporte correspondent à un dommage imputable à ce constructeur. Il n'est pas contesté que la nature des dommages constatés qui rendent le centre aquatique impropre à sa destination étaient de nature à engager la responsabilité décennale des participants à l'opération de construction.

S'agissant de M. A... C..., en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre :

5. En vertu de l'article 5 du décret du 29 novembre 1993 susvisé : " Les études de projet ont pour objet : a) De préciser par des plans, coupes et élévations, les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en oeuvre ". Aux termes de l'article 6 du décret du 29 novembre 1993 susvisé : " L'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux sur la base des études qu'il a approuvées a pour objet : / (...) / c) D'analyser les offres des entreprises et, s'il y a lieu, les variantes à ces offres ; / d) De préparer les mises au point permettant la passation du ou des contrats de travaux par le maître de l'ouvrage ". Aux termes de l'article 7 alinéa 2 du même décret : " Lorsque le maître de l'ouvrage retient une offre d'entreprise qui comporte une variante respectant les conditions minimales stipulées dans le dossier de consultation, le maître d'oeuvre doit compléter les études du projet pour en assurer la cohérence, notamment en établissant la synthèse des plans et spécifications et, le cas échéant, prendre en compte les dispositions découlant d'un permis de construire modifié. ".

6. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres peuvent être imputés, pour sa mission de conception, au maître d'oeuvre, à qui l'acte d'engagement confiait notamment les missions APS, APD, PRO, ACT, DET, AOR, et EXE, en raison d'une formulation maladroite et approximative du cahier des clauses techniques particulières qu'il a rédigé, indiquant seulement pour le système de montage des faux plafonds, que " tous les éléments métalliques seront galvanisés ou en alliage léger inoxydable ", de l'accord donné à la réalisation de la variante n°7, proposée par les sociétés Dumez Lagorsse et Baudin Chateauneuf, prévoyant la pose d'un plafond suspendu pour réaliser une économie sur d'autres éléments, et de l'absence d'émission de réserve sur la réalisation de ce plafond suspendu, ainsi que de l'absence de recommandation sur les caractéristiques techniques des éléments de suspente qui seraient utilisés par les entreprises, alors même que les rapports datés du 3 septembre 2004 et du 9 décembre 2004 du contrôleur technique, comportaient des avis relevant, notamment au titre de la rubrique " Plafonds suspendus ", que " dans les locaux à forte hygrométrie il faut proscrire la pose de faux plafonds sous la couverture (risques de condensations) ", et que l'ouvrage avait une destination et des caractéristiques spécifiques, dans un contexte d'humidité intérieure agressive. Ainsi, M. A... C..., en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, a engagé sa responsabilité décennale.

S'agissant de la société Socotec, contrôleur technique :

7. La société Socotec avait notamment une mission relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indissociables et dissociables. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres subis peuvent être imputés au contrôleur technique, qui, s'il avait dans son rapport préalable du 3 septembre 2004 et son rapport initial de contrôle technique (RICT) du 9 novembre 2004, conseillé de proscrire la pose de faux plafonds sous la couverture, susceptible de favoriser la condensation dans des locaux à forte hygrométrie, tout en émettant néanmoins un avis favorable (F) à la réalisation de tels plafonds suspendus, n'est pas de nouveau intervenu après la modification du projet par l'acception de la variante 7 précitée dans le marché signé le 1er mars 2005 qui prévoyait la réalisation d'un faux plafond . La société Socotec n'a pas modifié son RICT et mis en garde le maître d'ouvrage contre les risques propres à un tel aménagement dans un milieu à forte hygrométrie, alors qu'elle a une obligation de visite sur le chantier et de remise avant la réception d'un rapport final selon la norme NF P 03-100 visée à l'article 3 de son contrat. Elle n'établit pas avoir été informée de l'acceptation et du contenu de la variante susmentionnée que par la transmission par la société Sogeb Mazet, sous-traitant, des fiches techniques le 21 juin 2006. La société Socotec a dans ces conditions engagé sa responsabilité décennale.

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant des travaux de reprise des désordres :

8. Il résulte de l'instruction, en particulier du compte rendu d'expertise du 23 novembre 2015 et du rapport d'expertise, que les travaux de réparation des désordres ont été chiffrés initialement à la somme de 147 204,65 euros HT, sans inclure une variante pour le remplacement des dalles pour un coût de 27 752,80 euros HT, dans un délai d'exécution de deux mois et un délai de livraison des suspentes de neuf semaines, avec l'installation d'un seul échafaudage pour les deux bassins, qui devait être déplacé en fonction de l'avancement de l'intervention. Toutefois, ce premier devis a été complété pour intégrer les plafonds des bassins de plongée, dont les crochets présentent les mêmes symptômes que ceux constatés par ailleurs, et leur remplacement par des cochets hypertrempés. Les travaux ont ensuite été évalués selon un nouveau devis à la somme de 177 323,38 euros HT, outre les travaux de reprises ponctuelles d'un montant de 9 141,61 euros et les études d'un montant de 6 300 euros, soit un montant de 192 764,99 euros HT, soit 231 318 euros TTC. Ce devis chiffrait en outre l'installation permanente de six échafaudages pour les deux bassins. Cette augmentation a été justifiée par la nécessité de raccourcir le délai d'intervention pour tenir compte des manifestations sportives prévues dans les mois à venir, et donc de renoncer à une intervention sur deux mois comme initialement prévu. A cet égard, Montluçon Communauté fait valoir, sans être sérieusement contredite, que le dernier devis, validé par l'expert, tient compte des contraintes d'exploitation du centre aquatique, pour réduire les pertes d'exploitation. Elle expose que le délai d'intervention induit par la première solution réparatoire imposait une fermeture complète du grand bassin pendant cette période et celle du bassin ludique pendant 4 semaines et demi, et que ces contraintes étaient incompatibles avec le maintien du service offert au public et de la vocation sportive et éducative indéniable de cet équipement.

9. Le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs à raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection. Ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître de l'ouvrage ne relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou une partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations. Il appartient aux constructeurs mis en cause d'apporter au juge tout élément de nature à remettre en cause la présomption de non assujettissement des collectivités territoriales à la taxe sur la valeur ajoutée et à établir que le montant de celle-ci ne devait pas être inclus dans le montant du préjudice indemnisable. En l'espèce, si la société Baudin Chateauneuf demande que le montant de la réparation soit évalué hors taxes, elle n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause la présomption de non assujettissement de la communauté d'agglomération Montluçon Communauté à la taxe sur la valeur ajoutée.

10. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement contesté en ce qu'il a condamné in solidum la société Baudin Chateauneuf, la société Dumez Auvergne, la société Socotec et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à payer à la communauté d'agglomération Montluçon communauté la somme totale de 231 317,99 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant les plafonds du centre de la Loue, qui tient compte des solutions mises en oeuvre selon le second devis évoqué au point 8, et qui sont de nature à apporter une remise en état de fonctionnement de l'équipement sportif communautaire. Cette somme sera augmentée des intérêts dus dans les conditions fixées par les premiers juges.

S'agissant des pertes d'exploitation :

11. Si la communauté d'agglomération Montluçon communauté a sollicité l'indemnisation de ses pertes d'exploitation à hauteur de 39 000 euros, elle n'a pas établi la réalité de ce préjudice, que par ailleurs le rapport de l'expert judiciaire, n'aborde pas en se bornant à renvoyer aux estimations déclaratives du maître d'ouvrage. Le tableau que Montluçon Communauté a produit en première instance, comporte un rappel pour mémoire de l'année n-1, un prévisionnel pour 2016 et une évaluation des pertes d'exploitation pour cette même année. Cette estimation, qui ne tient pas compte d'une éventuelle réduction des charges d'exploitation et des conditions financières de fonctionnement de l'équipement en temps normal ne suffit pas pour établir la réalité et l'effectivité des pertes ainsi alléguées. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont augmenté, pour compenser une perte d'exploitation, le montant de l'indemnité mise à la charge solidaire des constructeurs condamnés de la somme de 39 000 euros .

12. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de ramener à 231 317,99 euros TTC le montant de l'indemnité mise à la charge des sociétés Baudin Chateauneuf, Dumez Auvergne, Socotec, et M. C... es qualité, au titre de la réparation des conséquences des désordres de nature décennale dont ils sont redevables, et de réformer en conséquence les articles 1er et 2 du jugement attaqué.

Sur les appels en garantie :

En ce qui concerne l'appel en garantie formé par la société Dumez Auvergne contre la société Baudin Chateauneuf :

13. Il résulte de l'instruction que la variante prévoyant des faux-plafonds avec suspentes qui devait générer une économie sur la couverture, la peinture de la charpente et les baffles acoustiques a été proposée par le groupement d'entreprises composé des sociétés Dumez-Lagorsse Baudin-Chateauneuf. La convention de groupement d'entreprises du 28 janvier 2005 répartit à son article 7 les missions entre ces deux sociétés, en mettant à la charge de la seule société Baudin Chateauneuf la réalisation de la charpente et la couverture. Ainsi que l'a indiqué dans son compte rendu du 23 novembre 2015 l'expert judiciaire, la société Dumez Lagorsse était étrangère aux travaux de second oeuvre. C'est le sous-traitant de la société Baudin-Chateauneuf, la société Sogeb Mazet, chargée du lot plâtrerie-peinture et en particulier de l'installation du faux-plafond suspendu qui s'est procuré les tiges filetées, écrous et crochets de suspension des faux plafonds auprès de la société Plafometal. La société Sogeb Mazet a commandé les éléments de suspente, à l'origine des désordres, en indiquant seulement qu'ils seraient mis en place dans une ambiance humide, sans préciser qu'il s'agissait d'un centre aquatique à forte hygrométrie et les sociétés Sogeb Mazet et Plafométal, son fournisseur qui n'a pas fait davantage préciser la qualité attendue des produits à livrer, ont donc commis des fautes dont doit répondre la société Baudin-Chateauneuf, qui d'ailleurs reconnait que la société Sogeb Mazet a seule mise en oeuvre les éléments inadaptés qu'elle a personnellement choisis et retenus, après avoir consulté ses fournisseurs. Par suite, la société Dumez Auvergne venant aux droits de la société Dumez-Lagorsse, qui n'a commis pour sa part aucune faute à l'origine des désordres, est fondée à solliciter la condamnation de la société Baudin Chateauneuf à la garantir intégralement des condamnations prononcées à son encontre, tant au titre de l'indemnité réparatrice que des dépens et des frais irrépétibles mis à sa charge par les premiers juges.

En ce qui concerne l'appel en garantie formé par la société Baudin Chateauneuf contre M. A... C..., ès-qualité.

14. En premier lieu, eu égard aux fautes commises par la maîtrise d'oeuvre telles qu'exposées au point 6, le jugement contesté a fait une juste appréciation des fautes et responsabilités respectives des constructeurs en condamnant M. C... à garantir la société Baudin Chateauneuf, en qualité de mandataire de son groupement, à concurrence de 40 % de l'indemnité de 231 317,99 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres ainsi que des dépens et des frais irrépétibles déterminés par les premiers juges.

15. En second lieu, eu égard aux fautes commises par la société Socotec telles qu'exposées au point 7, le jugement contesté a fait une juste appréciation des fautes et responsabilités respectives des constructeurs en condamnant la société Socotec à garantir la société Baudin Chateauneuf, en qualité de mandataire de son groupement, à concurrence de 20 % de l'indemnité de 231 317,99 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres ainsi que des dépens et des frais irrépétibles déterminés par les premiers juges.

En ce qui concerne l'appel en garantie formé par M. A... C... es qualité contre les sociétés Baudin Chateauneuf et Socotec :

16. Compte tenu de ce qu'il a été dit précédemment le jugement contesté a fait une juste appréciation des fautes et responsabilités respectives des constructeurs susmentionnés en condamnant la société Baudin Chateauneuf, en qualité de mandataire de son groupement, et la société Socotec à garantir M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à concurrence respectivement de 40 % et de 20 % de l'indemnité de 231 317,99 euros TTC au titre des travaux de réfection des désordres ainsi que des dépens et des frais irrépétibles déterminés par les premiers juges.

En ce qui concerne les appels en garantie formé par la société Socotec ;

17. En s'abstenant de préciser à son sous-traitant les incidences de l'environnement auquel seraient exposés les dispositifs assurant l'ancrage des faux plafonds, la société Baudin Châteauneuf a concouru à la défaillance imputée à la société Socotec. De même, les insuffisances sur ce même point des prescriptions du CCTP établi par le maître d'oeuvre ont compromis la mission de contrôle technique. En revanche, dès lors que la société Socotec ne démontre aucune faute de la société Dumez Largorsse ayant concouru au dommage qu'elle doit réparer, son appel en garantie formé à l'encontre de cette société, devenue la société Dumez Auvergne, doit être rejeté.

18. Compte tenu de ce qu'il a été dit précédemment il sera une juste appréciation des fautes et responsabilités respectives des constructeurs susmentionnés en condamnant M. C..., ès-qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, et la société Baudin Chateauneuf, ès-qualités de mandataire du groupement d'entreprise à garantir la société Socotec, à concurrence chacun de 40 % de l'indemnité de 231 317,99 euros TTC au titre des travaux de réfection des désordres ainsi que des dépens et des frais irrépétibles déterminés par les premiers juges.

19. Il résulte des points précédents qu'il y a seulement lieu de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté en totalité les appels en garantie formés par la société Socotec.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par les différentes parties.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme à laquelle ont été condamnés in solidum les sociétés Baudin Chateauneuf, Dumez Auvergne, Socotec, et M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, aux articles 1er et 2 du jugement n° 1602232 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est ramenée à la somme de 231 317,99 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2016.

Article 2 : M. C..., en sa qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, est condamné à garantir la société Baudin Chateauneuf et la société Socotec, à hauteur de 40 % de la condamnation prononcée à l'article 1er ainsi que des dépens et des frais irrépétibles fixés par les premiers juges.

Article 3 : La société Socotec est condamnée à garantir la société Baudin Chateauneuf et M. C..., en sa qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, à hauteur de 20 % de la condamnation prononcée à l'article 1er ainsi que des dépens et des frais irrépétibles fixés par les premiers juges.

Article 4 : La société Baudin Chateauneuf, en sa qualité de mandataire de son groupement d'entreprises, est condamnée à garantir M. C... en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, à hauteur de 40 % de la condamnation prononcée à l'article 1er ainsi que des dépens et des frais irrépétibles fixés par les premiers juges.

Article 5 : La société Baudin Chateauneuf, en sa qualité de mandataire de son groupement d'entreprises, est condamnée à garantir la société Socotec, à hauteur de 40 % de la condamnation prononcée à l'article 1er ainsi que des dépens et des frais irrépétibles fixés par les premiers juges.

Article 6 : La société Baudin Chateauneuf, en sa qualité de mandataire de son groupement d'entreprises, est condamnée à garantir la société Dumez Auvergne, à hauteur de 100 % de la condamnation prononcée à l'article 1er ainsi que des dépens et des frais irrépétibles fixés par les premiers juges.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 8: Le jugement n° 1602232 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la communauté d'agglomération Montluçon Communauté, à la société Baudin Chateauneuf, à la société Dumez Auvergne, et à la société Socotec. Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. Rivière, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020.

2

N° 18LY03397 et 18LY03426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03397
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELARL D'AVOCATS TOURNAIRE et MEUNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-22;18ly03397 ?
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