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04/02/2021 | FRANCE | N°18LY02637

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 04 février 2021, 18LY02637


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- de condamner solidairement les sociétés Sagena, Atelier 19, Projectec, Eric D..., Bureau Alpes contrôle, Denis Boujon et HBC ainsi que M. R... et M. I...-S... à à l'indemniser du coût des travaux de réparation des désordres ayant affecté les cloisons du secteur restauration de son centre hospitalier ;

- de condamner solidairement les sociétés Sagena, Atelier 19, Projectec, Eric

D..., Bureau Alpes contrôle, Denis Boujon et HBC ainsi que M. R... et M. I...-S... à à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- de condamner solidairement les sociétés Sagena, Atelier 19, Projectec, Eric D..., Bureau Alpes contrôle, Denis Boujon et HBC ainsi que M. R... et M. I...-S... à à l'indemniser du coût des travaux de réparation des désordres ayant affecté les cloisons du secteur restauration de son centre hospitalier ;

- de condamner solidairement les sociétés Sagena, Atelier 19, Projectec, Eric D..., Bureau Alpes contrôle, Denis Boujon et HBC ainsi que M. R... et M. I...-S... à à indemniser son préjudice matériel dû au coût de la mise en place d'une cuisine provisoire pendant la période nécessaire aux travaux de réparation des désordres.

Par un jugement n° 1505106 du 27 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a admis l'intervention de la société Generali Iard, donné acte du désistement d'instance de l'EPSM en ce qui concerne ses conclusions dirigées contre la société SAS HBC, condamné solidairement M. I...-S..., la société Projectec, la société Ebso, la société Denis Boujon, Bureau Alpes contrôle à verser à l'EPSM la somme de 369 806,20 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 août 2015, avec capitalisation, a condamné M. I...-S... à garantir la société Ebso à hauteur de 50 % de la condamnation prononcée à son encontre et a condamné La société Ebso à garantir M. I...-S..., la société Projectec et le Bureau Alpes contrôle à hauteur de 50 % de leurs condamnations respectives.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2018, un mémoire enregistré le 6 décembre 2019 et un mémoire, non communiqué, enregistré le 4 août 2020, l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ci-après l'EPSM, représenté par Me L..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement susmentionné n° 1505106 du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes et de condamner in solidum :

- la SAS Denis Boujon, la SMA SA, la SARL EBSO, la SAS Bureau Alpes Contrôles, M. O... I... exploitant sous l'enseigne S..., la SARL Atelier 19, la SAS Projectec et M. H... R..., exploitant sous l'enseigne A..., à lui payer la somme de 594 838,78 euros en réparation intégrale de son préjudice matériel, outre intérêts avec capitalisation à compter du 30 juin 2014 ;

- la SAS Denis Boujon, la SMA SA, la SARL EBSO, la SAS Bureau Alpes Contrôles, M. O... I... exploitant sous l'enseigne S..., la SARL Atelier 19, la SAS Projectec et M. H... R... à lui payer la somme 213 884,18 euros en réparation intégrale de son préjudice immatériel, outre intérêts avec capitalisation à compter du 30 juin 2014 ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une expertise judiciaire portant sur l'indemnisation du préjudice qu'il a subi, aux frais avancés des défendeurs à l'instance ;

3°) de mettre à la charge in solidum de la SAS Denis Boujon, de la SA SMA, de la SARL EBSO, de la SAS Bureau Alpes Contrôles, de M. O... I..., de la Sarl Atelier 19, de M. H... R... et de la SAS Projectec la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le directeur, représentant légal de l'établissement, pouvant ester en justice ès-qualité et sans autorisation préalable de quelque instance que ce soit, en particulier du conseil de surveillance, la cour ne pourra que confirmer le considérant n° 4 du jugement attaqué ;

- l'appel incident de M. I... a été formé après le délai de recours contentieux et n'est donc pas recevable ;

- la société Bureau Alpes Contrôles, qui a présenté ses conclusions après le délai de recours contentieux contre le jugement, ne peut solliciter la réformation de celui-ci en ce qu'il a retenu sa responsabilité de plein droit ;

- le jugement contesté est irrégulier dès lors qu'il a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire en retenant des arguments qui n'avaient pas été développés par les parties défenderesses et débattus contradictoirement par les parties au point 15 ;

- il ne lui a jamais été formellement indiqué que le rapport de l'expert de l'assureur était totalement définitif et qu'il n'y aurait pas d'expertise complémentaire et/ou de vérifications des marchés ainsi qu'un métrage définitif ;

- ses conclusions dirigées contre la SMA SA, anciennement dénommée Sagena, sont recevables car elles étaient fondées sur sa responsabilité contractuelle, en particulier le contrat d'assurance souscrit auprès de cet assureur dommages-ouvrages ;

- elle est fondée à solliciter la condamnation in solidum de la SMA SA anciennement dénommée Sagena avec les autres constructeurs à réparer ses préjudices matériel et immatériel ;

- le désordre est de nature décennale car il porte atteinte à la solidité de l'ouvrage, en l'occurrence de la cuisine, qui est un ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792 du code civil, et la rend impropre à sa destination ;

- la responsabilité décennale du groupement solidaire de maitrise d'oeuvre (composé de M. O... I...-S..., Atelier 19, M. H... R... - A..., Projectec), dont le mandataire est M. I... exerçant sous l'enseigne S..., qui a réalisé une conception inadaptée et suivi et accepté les travaux, est engagée en l'absence d'une répartition des tâches claire entre les membres de ce groupement, en l'absence d'opposabilité de la convention liant les membres de ce groupement ; le jugement contesté sera donc réformé en ce qu'il a écarté la responsabilité de M. H... R..., exploitant sous l'enseigne A..., et la société Atelier 19, compte tenu des missions qui leur ont été confiées ;

- S..., représenté lors des opérations d'expertise et destinataire des différents rapports, ne s'est jamais prévalu d'une absence d'erreur de conception ;

- les CCTP des lots 3 et 4 étaient incomplets ;

- la responsabilité décennale de la SAS Boujon Denis, titulaire du lot n° 3 " carrelage-faïence ", qui a mis en place un système de protection à l'eau sous carrelage (SPEC) sans continuité avec les parois, en méconnaissance des dispositions du CCTP de son lot, est engagée ;

- la responsabilité décennale de la société D... nouvellement dénommée Ebso, titulaire du lot n° 4 " cloisons - doublage - faux plafond ", et celle du contrôleur technique, sont engagées en raison des défauts de liaison entre les cloisons et le carrelage ;

- la responsabilité décennale de la société Bureau Alpes Contrôles, chargée de la mission L, relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements indissociables et la mission P 1, relative à la solidité des éléments d'équipement non indissociablement liés et qui à ce titre devait donner son avis sur les plans établis et n'a pas émis d'avis défavorable lors du suivi du chantier, est engagée ; les cloisons et les faïences/carrelages font corps avec la structure et ne peuvent être dissociées sans destruction, le CCTP du lot 3 " Carrelage-Faïence " indiquant bien le DTU 52.1 " Revêtement de sol scellés " ;

- la responsabilité solidaire de ces différents constructeurs, y compris de tous les membres du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, doit être engagée car ils ont concouru à la réalisation d'un dommage commun ;

- à titre subsidiaire, la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre doit être engagée compte tenu de son manquement à son obligation de conseil ;

- à titre subsidiaire, la responsabilité contractuelle de la société Bureau Alpes Contrôles, qui a validé des plans non conformes et n'a pas émis d'avis défavorable lors du suivi du chantier, et a confié une mission portant sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indissociables et dissociables, est engagée en raison de son manquement à son devoir de conseil ;

- le chiffrage de 455 908,42 euros TTC de la solution n° 5, qui est passé à 250 050,32 euros TTC, somme retenue par le jugement, doit être revu à la hausse, eu égard aux travaux de réparation indispensables à la réfection des désordres et qui ont été réalisés, avant la transmission du rapport d'expertise du 24 août 2012, et être porté à la somme de 649 007,90 euros.

- ce préjudice matériel doit être évalué à la somme de 594 838,78 euros correspondant à la somme précitée de 649 007,90 euros après déduction de la somme de 54 169,12 euros versée par l'assureur, avec intérêts et capitalisation des intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2014, date de la mise en demeure ;

- son préjudice immatériel résultant de la location d'une cuisine provisoire s'élève à la somme de 213 884,18 euros correspondant à son coût réel de 366 959,18 euros, soit une somme de 39 959,18 euros en sus de la somme de 326 925 euros préconisée par l'expert, déduction faite de la garantie versée par la compagnie Sagena d'un montant de 153 000 euros ; cette indemnité sera assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts ;

- cette somme ne constitue pas une demande nouvelle et les premiers juges n'ont donc pas statué ultra petita en octroyant la somme de 119 755,88 euros ;

- ce moyen tiré du caractère nouveau de cette demande et du caractère ultra petita de la somme octroyée a été soulevé par les parties après le délai de recours contentieux ;

- il n'est pas opposé à ce qu'une expertise judiciaire soit ordonnée aux frais avancés des défendeurs ;

- il n'a pas la possibilité de récupérer la TVA sur les investissements via le fonds de compensation de la TVA et la cour ne pourra donc que confirmer le considérant 20 du jugement attaqué ;

- il n'a commis aucune faute et en particulier lors des opérations d'entretien de la cuisine.

Par des mémoires en défense enregistrés les 28 septembre 2018, 29 octobre 2019, 30 janvier 2020 (non communiqué), 31 juillet 2020 et 20 août 2020, M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., représenté par la SELARL Cabinet MLB Avocat, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité décennale ;

2°) de dire et juger que seule la somme de 42 881,20 euros correspondant au solde des travaux chiffrés par l'expert dommage-ouvrage pourra être mis à la charge des constructeurs dont la responsabilité sera retenue compte tenu de la somme de 207 169,12 euros perçue de la SA SAGENA par le maître d'ouvrage ;

3°) de rejeter comme irrecevable la demande nouvelle de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron tendant à obtenir la somme de 213 884,18 euros en réparation de son préjudice matériel ;

4°) de rejeter comme irrecevables les demandes de condamnation solidaire des sociétés S..., Ebso, Boujon Denis et Bureau Alpes Contrôle présentées par la SMA SA tant pour ce qui concerne la somme qu'elle a versée à titre provisionnelle à l'EPSM, en septembre 2010 et février 2011, soit 207 169,12 euros, que s'agissant des condamnations complémentaires qui pourraient être prononcées en appel ;

5°) de condamner in solidum la Sarl Ebso, anciennement dénommée Sarl Entreprise Eric D... et la SAS Denis Boujon à le garantir des condamnations prononcées à son encontre pour la plus large part et à tout le moins à hauteur de 90 % ;

6°) de mettre à la charge in solidum de la Sarl Ebso, anciennement dénommée Sarl Entreprise Eric D... et de la SAS Denis Boujon, ou qui mieux le devra, à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors qu'aucun défaut de conception en lien avec le désordre ne peut être retenu, que l'étanchéité sous carrelage a bien été mise en place et que le classement des locaux en classe EB+c est sans lien avec les désordres, alors qu'il s'agit d'une cuisine collective à caractère non industriel ;

- le désordre résulte de défauts d'exécution entièrement imputables aux entreprises D... et Boujon, en particulier de l'absence de pose du profilé prévu au CCTP et de joint silicone qui sont à l'origine des remontées d'humidité ;

- la faute de la société D... est établie en raison de la réalisation défectueuse de l'étanchéité entre les cloisons et le carrelage ;

- la contribution de cette société à la dette ne peut être limitée au montant du marché de son lot mais s'applique à l'ensemble des préjudices, sans distinction, dès lors que sa faute a contribué à créer l'entier dommage ;

- seul un manquement dans sa mission de suivi de l'exécution du chantier peut lui être reproché et sa responsabilité à ce titre ne pourra excéder 10 % ;

- une part de responsabilité imputée à la société Denis Boujon doit être retenue, pour ne pas avoir mis en oeuvre les procédés d'étanchéité liquide prévus ;

- les demandes de la SMA SA, nouvelles en appel, doivent être rejetées comme irrecevables ;

- il sera relevé et garanti par la SAS Denis Boujon et la SARL Ebso venant aux droits de la SARL Entreprise Eric D... à hauteur de 90 % minimum ;

- une part de responsabilité à hauteur de 10 % minimum doit être laissée à l'établissement requérant, qui ne s'est pas conformé aux règles imposées par le classement du bâtiment ;

- les sommes demandées par l'établissement requérant ne sont pas justifiées en l'absence de production de factures et il n'est pas établi que les marchés de travaux de reprise correspondaient strictement aux travaux de reprise nécessaires pour remédier aux désordres ;

- le choix retenu par l'établissement requérant de la solution n° 4 proposée par l'expert mandaté par l'assureur dommage-ouvrage, correspondant à une réfection totale des cloisons, doublages et sols, n'est pas justifié techniquement et n'était pas strictement nécessaire à la réparation des désordres mais comporte pour une partie des travaux d'amélioration de l'existant sans lien avec les désordres, alors qu'une autre solution avait été techniquement validée pour un montant de 250 050,31 euros ;

- seule cette dernière somme pourra être mise à la charge des constructeurs, sous déduction de la somme de 207 169,12 euros perçue par l'établissement requérant à titre de provision, soit un montant de 42 881,20 euros TTC ;

- en l'absence de justification par l'EPSM du montant réel de son préjudice, et si la cour s'estime insuffisamment informée, il y aura lieu de désigner un expert ;

- seule la date d'enregistrement de la requête, soit le 14 août 2015, pourra être retenue comme point de départ des intérêts dès lors que la mise en demeure invoquée par le requérant n'a été adressée qu'à l'assureur dommage-ouvrage ;

- la demande nouvelle de 213 884,18 euros au titre du préjudice immatériel, alors que l'établissement réclamait la somme de 113 884,18 euros TTC devant le tribunal, est irrecevable ;

- cette demande est également infondée dès lors que comme l'a retenu le tribunal, le montant de ce préjudice lié à l'installation d'une cuisine provisoire doit être fixé à la somme retenue par l'expert soit 326 925 euros, dont doit être déduite la somme versée par l'assureur dommages-ouvrage (153 000 euros TTC) ;

- la demande subsidiaire d'expertise sera rejetée et en tout état de cause, il n'appartient pas aux défendeurs d'en faire l'avance.

Par des mémoires en défense enregistrés les 9 octobre 2018 et 7 novembre 2019, la société Bureau Alpes Contrôles, représentée par Me E... demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité décennale et de la mettre purement et simplement hors de cause ;

2°) de dire et juger que seule la somme de 42 881,20 euros au titre du solde des préjudices matériels est susceptible d'être mis à la charge des constructeurs compte tenu de la somme de 207 169,12 euros perçue par le maître d'ouvrage de la SA Sagena ;

3°) d'ordonner, si la cour s'estimait insuffisamment informée, une expertise judiciaire afin de déterminer si la solution de travaux n° 5 permettait la réparation intégrale des désordres allégués par l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron et d'examiner la solution n° 4 retenue par ledit établissement en indiquant et chiffrant les améliorations et plus-values apportées à l'ouvrage par rapport au contrat initial ;

4°) de limiter à 73 925 euros la somme mise à la charge des constructeurs dont la responsabilité sera retenue au titre du préjudice immatériel compte tenu de la somme de 153 000 euros perçue de la SA Sagena ;

5°) de rejeter toutes demandes de condamnation solidaire ou in solidum ;

6°) de condamner in solidum la Sarl Ebso et la SAS Boujon Denis à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

7°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou qui mieux le devra, la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- il n'y a pas eu violation du principe du contradictoire ;

- l'appel en garantie formé à son encontre par la compagnie Generali est une demande nouvelle en appel irrecevable ;

- la demande de l'établissement requérant au titre du préjudice immatériel porté à la somme de 213 884,19 euros est une demande nouvelle en appel irrecevable ;

- sa responsabilité décennale ne peut être engagée et elle sera donc mise hors de cause dès lors que sa mission contractuelle ne portait pas sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements dissociables, alors que les cloisons et le carrelage collé, et non scellé, qui ne font pas corps avec la dalle de structure, sont des éléments d'équipement dissociables ;

- elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle ;

- le désordre de remontées capillaires dans les pieds de cloisons relève d'un défaut d'exécution ;

- il ne peut lui être reproché de ne pas avoir émis d'avis défavorable au cours de sa mission dès lors que les documents écrits examinés préalablement étaient conformes aux règlementations opposables ;

- une part des désordres trouve son origine dans les conditions d'exploitation anormales par le maître de l'ouvrage, en particulier un nettoyage au jet sous haute pression ;

- à titre infiniment subsidiaire, elle sera relevée et garantie de toutes condamnations prononcées in solidum à son encontre par les sociétés Ebso et Boujon Denis, qui ont commis une faute en ne réalisant pas l'étanchéité en profilé U, et comme l'a relevé l'expert, en raison de l'absence de joint d'étanchéité en pied de cloison et de l'absence de réalisation d'une étanchéité de type " système étanchéité liquide " sur le support de la dalle au sol avant la colle du carrelage ;

- seule la somme de 250 050,31 euros TTC correspondant à la solution n° 5 permettant de mettre un terme aux désordres peut être retenue au titre du préjudice matériel et l'établissement requérant ayant perçu de la société Sagena une provision de 207 169,12 euros, seule la somme de 42 881,20 euros TTC est susceptible d'être réclamée par cet établissement ;

- en choisissant de sa propre initiative la solution n° 5, l'établissement requérant entend faire supporter aux constructeurs une amélioration de l'ouvrage et donc une plus-value apportée à celui-ci ;

- seule la date d'enregistrement de la requête pourra être retenue comme point de départ des intérêts dès lors que la mise en demeure invoquée par le requérant n'a été adressée le 30 juin 2014 qu'à l'assureur dommage-ouvrage, la Compagnie Sagena ;

- seule la somme de 73 925 euros au titre du préjudice immatériel est susceptible d'être mise à la charge des différents intervenants à l'acte de construire au regard de l'absence de toute justification du coût réel de ce préjudice et de la somme 153 000 euros déjà versée par la société Sagena ;

- sa condamnation in solidum ne pourra être retenue dès lors qu'une telle solidarité ne se présume pas et que sa responsabilité s'apprécie, en vertu de l'article L. 121-25 du code de la construction et de l'habitation, dans la limite de sa mission, le contrôleur technique n'étant pas un constructeur.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2018, la SAS Boujon Denis, représentée par Me F... J..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de la mettre hors de cause et en conséquence de rejeter toute demande de condamnation in solidum présentée à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, de confirmer le jugement du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il a rejeté les conclusions d'appel en garantie présentés à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner M. I...-S... et la société Ebso à la garantir, à hauteur de 50 % chacun, de toutes condamnations prononcées solidairement à son encontre ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de limiter aux sommes de 42 881,20 euros TTC pour les préjudices matériels et de 73 925 euros pour les préjudices immatériels le montant des condamnations mises à la charge des différentes entreprises ;

5°) à titre infiniment subsidiaire, de limiter à 17,5 % au plus la part d'indemnisation pouvant lui être imputée dans la réparation des désordres, avant déduction de la part de responsabilité de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron pour le nettoyage inapproprié des locaux ;

6°) de dire et juger qu'aucune condamnation au titre des frais irrépétibles de l'instance, ni intérêts, ni anatocisme à compter du 30 juin 2014 comme réclamé par l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ne sauraient être mis à sa charge, mais seulement en ce qui la concerne à compter du 1er avril 2016 ;

7°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou qui mieux le devra, la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le désordre de remontées capillaires dans les pieds de cloisons ne relève pas d'une malfaçon d'exécution qui lui serait imputable, car elle a respecté toutes les dispositions du CCTP la concernant ;

- les désordres ont également pour origine des conditions d'exploitations anormales par le maître d'ouvrage qui a procédé à des nettoyages à haute pression ;

- l'absence d'indemnisation ou l'indemnisation incomplète du maître de l'ouvrage n'est pas de son fait mais de celui de l'assureur dommage-ouvrage ;

- le point de départ des intérêts moratoires court à compter de la date d'enregistrement de la requête introductive d'instance, soit pour elle, à compter du 1er avril 2016 ;

- l'établissement requérant ayant fait le choix unilatéral d'une réfection totale des cloisons, doublages et sols correspondant à la solution n° 4 proposée par l'expert dommage ouvrage, non motivé par des causes techniques, seule la somme de 250 050,32 euros TTC devra être retenue après déduction de la somme de 207 169,12 euros perçue par l'établissement requérant à titre de provision, soit un montant de 42 881,20 euros TTC ;

- si l'établissement requérant sollicite en réparation des préjudices immatériels d'une somme totale de 366 884,18 euros TTC, soit 39 959,18 euros de plus que l'estimation retenue par l'expert dommage ouvrage et pour laquelle il a déjà perçu une provision de 153 000 euros, seul, un montant de 73 925 euros TTC peut lui être versé.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2018, non communiqué, la SAS HBC, représentée par Me F... J..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il a donné acte du désistement d'instance de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron en ce qui concerne ses conclusions dirigées à son encontre ;

2°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron la somme de 1 000 euros sur le fondement l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle a mis en évidence qu'il y avait eu erreur de la part du requérant sur l'identité du titulaire du lot n° 3 carrelage-faïence en raison d'une confusion avec la SAS Boujon Denis et que par un mémoire enregistré le 29 août 2017 devant les premiers juges, l'établissement requérant a déclaré se désister purement et simplement des conclusions dirigées à son encontre.

Par des mémoires enregistrés les 18 juin 2019 et 10 août 2020, M. H... R..., représenté par la SCP Seloron-Hutt-Grangeon, demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il l'a mis hors de cause ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner la société Ebso anciennement dénommée Sarl Entreprise Eric D... et la SAS Boujon Denis à le garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- il n'est pas responsable des désordres, qui ne lui sont pas imputables, en particulier aux études de structure, dès lors qu'il est intervenu en qualité de bureau de structures et qu'il n'avait aucune mission sur les cloisons ;

- l'appel en garantie formé à son encontre par la société Ebso doit être rejeté ;

- à titre subsidiaire, la société Ebso devra le garantir de toute condamnation, dès lors qu'elle n'a pas respecté les règles de l'art et les documents contractuels qui imposaient la mise en place d'une étanchéité, de même que l'entreprise Boujon Denis, qui n'a pas réalisé l'étanchéité de type SEL sur le support de la dalle au sol avant la colle du carrelage et qui ont donc tous deux commis des fautes.

Par un mémoire en intervention enregistré le 24 juillet 2019, la compagnie Generali IARD, assureur de la SAS HBC, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) de déclarer recevable et bien fondée son intervention volontaire ;

2°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou de tout autre succombant, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt légitime à intervenir afin de prendre connaissance de manière détaillée des éléments de responsabilité et du montant des demandes.

Par un mémoire en intervention enregistré le 23 août 2019, la compagnie Generali IARD, assureur de la société Goujon Denis, représentée par Me C... demande à la cour :

1°) de déclarer recevable et bien fondée son intervention volontaire ;

2°) de mettre hors de cause la société Goujon Denis et de rejeter les conclusions des parties dirigées contre cette société ;

3°) de rejeter les demandes de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron au titre de ses préjudices matériel et immatériel en ce qu'elles dépassent les évaluations de l'expertise dommage-ouvrage et de déduire des éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à la charge des défendeurs les provisions perçues par l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron ;

4°) de rejeter les demandes de condamnation in solidum formulées par l'EPSM ou toute autre partie ;

5°) de condamner la société S..., la société Bureau Alpes Contrôle et la société Ebso à garantir la société Goujon Denis des condamnations prononcées à son encontre, à tout le moins au regard du partage de responsabilité établi par l'expertise dommages-ouvrage, qui a limité la part de responsabilité de cette société dans la survenance des désordres à 17,5 % ;

6°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou de tout autre succombant, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- elle justifie d'un intérêt légitime à intervenir afin de prendre connaissance de manière détaillée les éléments de responsabilité et du montant des demandes ;

- la société Goujon Denis, assurée auprès de la compagnie Generali Iard, sera mise hors de cause dès lors que les désordres résultent exclusivement d'une erreur de conception et non pas d'un défaut d'exécution ;

- l'expert dommages ouvrage a également mis en évidence les conditions inadaptées de nettoyage de locaux par l'établissement requérant ;

- à titre subsidiaire, la part de responsabilité susceptible d'être mise à la charge de la société Goujon Denis sera limitée à 17,5 % telle que ressortant du rapport d'expertise dommage ouvrage, approuvé par les parties ;

- la société S..., la société Bureau Alpes Contrôle, et la société Ebso devront relever et garantir la société Goujon Denis des condamnations prononcées à son encontre ;

- aucune condamnation ne pourra intervenir au-delà des chiffrages validés lors des opérations d'expertise dommages-ouvrage, dont devront être déduites les sommes déjà perçues par l'établissement requérant, soit 207 169,12 euros au titre du préjudice matériel et 153 000 euros au titre du préjudice immatériel.

Par des mémoires en défense enregistrés les 23 août 2019 et 17 juillet 2020, la SARL Atelier 19 et la SARL Projectec, représentées par Me M..., demandent à la cour :

1°) de confirmer le jugement du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il a mis hors de cause la SARL Atelier 19 et de les mettre hors de cause ;

2°) de rejeter comme irrecevables et infondées les demandes nouvelles de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron fondées sur la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'oeuvre du fait d'un défaut d'assistance à réception ;

3°) à titre subsidiaire, si la cour devait retenir au titre de la convention de groupement de maîtrise d'oeuvre, leur responsabilité, de condamner la société Ebso, la SAS Boujon Denis et M. I... à les garantir de toute condamnation (principale, dépens et article L. 761-1 du code de justice administrative) prononcées à leur encontre ;

4°) de réformer le jugement en ce qu'il n'a pas statué sur la demande de garantie par M. I... et a limité celle de la société Ebso ;

5°) de réformer le jugement qui a condamné le BET Projectec au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de rejeter les demandes de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron au titre des préjudices matériels en ce qu'elles dépassent la somme de 250 050,32 euros retenue par l'expert dommages-ouvrage ;

7°) de rejeter les demandes de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron au titre des préjudices immatériels au regard des sommes versées par l'assureur dommages-ouvrage et en ce qu'elles excèdent l'évaluation de l'expert dommages-ouvrage ;

8°) de rejeter comme nouvelle en appel la demande de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron tendant à se voir allouer la somme de 213 884,18 euros alors que sa demande était limitée à 113 884,18 euros en première instance ;

9°) de réformer le jugement en ce qu'il a statué ultra petita en allouant la somme de 119 755,88 euros à l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron ;

10°) de dire et juger que les intérêts ne peuvent courir qu'à compter de l'introduction de la demande en justice ;

11°) de rejeter la demande d'expertise et à tout le moins de dire et juger qu'elle sera ordonnée aux frais avancés de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron ;

12°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou de tout autre succombant, la somme de 3 000 euros sur le fondement l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- le principe du contradictoire n'a pas été méconnu dès lors que chaque partie a contesté le quantum sollicité et que le tribunal a répondu aux arguments qui lui étaient soumis et ne s'est pas emparé d'office de moyens non débattus ;

- l'établissement requérant ne peut s'étonner que ses conclusions contre la SMA ont été jugées irrecevables dès lors qu'il a été informé par le tribunal qu'une telle irrecevabilité était susceptible d'être relevée d'office et qu'il n'a pas répliqué ;

- la solidarité du groupement de maîtrise d'oeuvre cesse avec la réception des ouvrages et avec l'achèvement de l'année de parfait achèvement ;

- les désordres allégués ne leur sont pas imputables au regard de leurs missions définies au contrat de maîtrise d'oeuvre porté à la connaissance du maître de l'ouvrage, qui répartit ces missions, en particulier une mission APS et APD pour l'Atelier 19 et le traitement de l'air et de la ventilation pour Projectec, BET fluide ; elles doivent donc être mises hors de cause ;

- la demande au titre de la responsabilité contractuelle, qui constitue une demande nouvelle en cause d'appel, est irrecevable ;

- cette demande est infondée dès lors que la réception d'un ouvrage met fin aux relations contractuelles entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ;

- si l'établissement requérant recherche la responsabilité de la maîtrise d'oeuvre au titre d'un défaut d'assistance à réception, la mission de l'Atelier 19 s'est arrêtée en phase conception et ne devait pas contractuellement une assistance à réception et Projectec n'était pas chargée de la réception des ouvrages de type architecturaux mais devait uniquement une participation sur les ouvrages en lien avec sa mission fluide et les dommages n'étaient pas décelables à la réception ;

- subsidiairement si la cour ne mettait pas hors de cause le BET Projectec, elle confirmerait la décision qui a exclu toute responsabilité de ce dernier dans les dommages et fait peser exclusivement les dommages sur Monsieur I... et la société Esbo qui seront condamnés à garantir intégralement y compris pour l'article L 761-1 du code de justice administrative le BET Projectec ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur le recours en garantie contre M. I... ;

- les désordres ont pour cause la réalisation par l'entreprise D... des cloisons sans respecter l'avis technique sur la pose des cloisons dans ce type de locaux humides et l'absence de mise en oeuvre d'une étanchéité de type SEL par l'entreprise Boujon ;

- si leur responsabilité était retenue, elles seront relevées et garanties intégralement sur le fondement de la responsabilité quasi délictuelle par la société Ebso, nouvelle dénomination de la société Eric D..., et par la société Boujon Denis en raison des fautes commises en raison de l'absence de joints d'étanchéité en pieds de cloisons et de l'absence de réalisation d'une étanchéité de type " système étanchéité liquide " sur le support de la dalle au sol avant la colle du carrelage ;

- en vertu du contrat de maîtrise d'oeuvre, au titre du suivi des travaux, si la cour devait retenir un défaut dans le cadre de l'exécution, ils sont recevables et bien fondés à solliciter la garantie de M. I... ;

- les travaux de reprise devront être limités à la somme de 250 050,31 euros sauf à déduire toute provision qui aurait été reçue ;

- le jugement contesté a statué ultra petita en accordant à l'établissement requérant au titre du préjudice immatériel une somme de 119 755,88 euros, déduction faite de la provision reçue de 207 169,12 euros, alors que seule une somme de 113 884,18 euros était demandée ;

- la demande de 213 884,19 euros au titre du préjudice immatériel est nouvelle en cause d'appel et donc irrecevable ;

- l'indemnité au titre de ce préjudice ne saurait excéder le montant de l'évaluation faite par l'expert dommages-ouvrages, soit 326 925 euros déduction faite de la provision reçue, qui n'est pas de 153 000 euros mais de 207 169,18 euros, et sera limitée au quantum dont le tribunal avait été saisi, soit 113 884,18 euros ;

- la date de départ des intérêts ne peut être fixée au mieux qu'à la date de l'introduction de la demande, la mise en demeure à l'assureur dommage ouvrage étant sans incidence à l'égard des locateurs d'ouvrage ;

- la demande d'expertise est injustifiée, les travaux étant terminés, elle n'est ni utile ni légitime et en tout état de cause, ne pourrait être ordonnée qu'aux frais avancés du demandeur.

Par un mémoire enregistré le 16 juillet 2020, la SMA SA, assureur dommages-ouvrages de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, venant aux droits de la société Sagena, représentée par la Selarl Piras et Associés, demande à la Cour :

1°) à titre principal, de rejeter les demandes de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron au titre des préjudices matériels qui ne sont pas justifiées ou à tout le moins les limiter aux montants retenus par l'expert économiste ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement les sociétés S..., D... devenue Ebso, Boujon Denis et Bureau Alpes Contrôle à lui payer la somme de 207 169,12 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement les sociétés S..., D... devenue Ebso, Boujon Denis et Bureau Alpes Contrôle à la garantir de toutes condamnations prononcées contre elle en principal, intérêts, frais et dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, ou qui mieux le devra, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- elle a réglé à l'établissement requérant la somme provisionnelle de 207 169,12 euros TTC, dont 153 000 euros au titre du plafond contractuel de garantie au titre des préjudices immatériels et 54 169,12 euros au titre des préjudices matériels ;

- l'établissement requérant ne justifie pas du surplus de sa demande au titre de la reprise des désordres, qui a été évaluée par le Cabinet Ecotech, expert économiste, à la somme totale de 250 050,531 euros ;

- elle n'a commis aucune faute puisqu'elle a satisfait à ses obligations en formalisant une proposition d'indemnisation sur la base du chiffrage arrêté par l'expert et vérifié par M. Q... ;

- le jugement contesté sera confirmé en ce qu'il a entériné les montants arrêtés par l'expert dommages-ouvrage ;

- la prise en charge des préjudices immatériels n'a pas à être imputée à l'assureur dommage ouvrage à titre de sanction ;

- le montant dû au titre du préjudice immatériel ne saurait excéder la somme de 153 000 euros ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée, au titre de son action subrogatoire, à solliciter la condamnation solidaire des sociétés S..., Ebso, Boujon Denis et Bureau Alpes Contrôle à lui payer la somme de 207 169,12 euros qu'elle a réglée à titre provisionnel au maître de l'ouvrage ;

- à titre subsidiaire, elle est également fondée à demander à la cour de condamner solidairement les sociétés S..., Ebso, Boujon Denis et Bureau Alpes Contrôle à la relever et garantir de toute condamnation complémentaire qui pourrait être prononcée contre elle en principal, intérêts, frais, et dépens.

Par des mémoires enregistrés les 16 et 29 juillet 2020, la SARL Ebso, représentée par son liquidateur amiable, M. B... D..., et par la SCP Reffay et Associés, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en ce qu'il a retenu à sa charge une part de responsabilité à hauteur de 50 % du sinistre et de rejeter tout demande de condamnation in solidum présentée à son encontre ;

2°) de dire et juger que seules les sommes de 42 881,20 euros et de 113 884,18 euros TTC pourront être allouées à l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron au titre respectivement des préjudices matériels et immatériels compte tenu des sommes déjà versées par l'assureur dommages ouvrage selon l'évaluation faite par l'expert dommage ouvrage ;

3°) de rejeter les demandes supplémentaires de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron comme résultant de chiffrages non soumis contradictoirement aux parties et non validés, et susceptible de conduire à un enrichissement sans cause injustifié.

4°) de limiter à 17,5 % des montants évalués par l'assureur dommages-ouvrages, ou le cas échéant, à concurrence des seuls lots qui lui sont imputés s'il est fait droit aux conclusions de l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, soit à concurrence de 45 350,63 euros TTC pour le lot cloisons- doublages- peinture et de 14 469,29 euros pour le lot faux-plafonds ;

5°) de rejeter toute demande à son encontre de condamnation in solidum au titre des intérêts et capitalisation sur les indemnisations accordées au requérant ;

6°) de rejeter toute demande à son encontre de condamnation in solidum au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

7°) de rejeter la demande de condamnation solidaire présentée à son encontre par la SMS SA ;

8°) subsidiairement, en cas de condamnation prononcée à l'encontre de la société Ebso, au titre de la réclamation de la SMA SA, de limiter sa contribution à une somme n'excédant pas 17,5 % de l'indemnité provisionnelle d'assurance versée en phase amiable, soit 36 254,60 euros ;

9°) de condamner in solidum M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., l'Eurl Atelier 19, M. H... R... et la société Projectec, membres du groupement de maîtrise d'oeuvre, ainsi que la SAS Boujon Denis et la société Bureau Alpes contrôles à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et dépens, ou à défaut dans une proportion qui ne saurait être inférieure à 82,5 % ;

10°) de mettre les intérêts des indemnisations et frais de procédure exclusivement à la charge de la SA Sagena qui a tardé à financer des travaux de réparation.

Elle fait valoir que :

- le principe du contradictoire n'a pas été méconnu dès lors qu'elle a, comme les autres défendeurs, largement contesté le quantum des réclamations formulées par l'établissement requérant ;

- sa quote-part de responsabilité ne saurait excéder celle retenue par le Cabinet SED Expertise, expert missionné par l'assureur dommages-ouvrage, en l'occurrence 17,5 % et le jugement sera donc réformé en ce qu'il a retenu une responsabilité la concernant de 50 %, compte tenu de l'imputabilité également des désordres à la société Boujon, qui n'a pas réalisé un traitement d'angle avec une bande de renfort et des joints mastics sous la plinthe et a posé un SPEC sans continuité avec les parois et ne s'est pas soucié lors de la pose des plinthes en pied de cloisons de l'absence de traitement contre les infiltrations d'eau, à la société Bureau Alpes contrôles, qui n'a pas émis d'observation particulière sur l'utilisation des produits mis en oeuvre, et à M. I..., qui a manqué à sa mission de suivi de l'exécution du chantier ;

- seules les sommes validées par le Cabinet SED Expertise seront retenues dès lors que l'établissement requérant ne justifie pas que la solution retenue était indispensable pour remédier aux désordres, que son indemnisation intégrale conduirait à un enrichissement sans cause, qu'un coefficient de vétusté important aurait dû s'appliquer puisque les travaux semblent avoir été réalisés en 2014, soit 9 ans après la réception, et que le matériel de cuisine remplacé par l'établissement, pour un montant de 107 636,98 euros, ne fait pas partie des désordres indemnisables et doit rester à sa charge ;

- l'établissement ne pourra réclamer que 250 550,32 euros TTC au titre du préjudice matériel dont devra être déduite la somme de 207 169, 12 euros perçue de la SMA SA, soit la somme de 42 881,20 euros au titre du solde des travaux ;

- la demande de 213 884,18 euros pour le préjudice immatériel est nouvelle et donc irrecevable pour le quantum excédant la somme de 113 884,18 euros demandée en première instance ;

- l'évaluation de ce préjudice ne saurait dépasser l'évaluation du cabinet SED Experts, soit la somme de 326 925 euros TTC, faute de justifier du surcoût qu'il avance ; seule la somme de 113 884,18 euros TTC pourra être allouée au requérant au titre des préjudices immatériels, dès lors qu'une indemnité de 153 000 euros a déjà été allouée de ce chef par l'assureur DO à l'établissement requérant ;

- l'établissement n'a exposé au titre des travaux de réfection du lot 4 que la somme de 59 819,92 euros, qui seul sera mis à sa charge si les montants revendiqués par le requérant sont retenus ;

- l'appel en garantie de la compagnie SMA SA contre les constructeurs constitue une demande nouvelle en cause d'appel irrecevable, comme l'ensemble de ses demandes, et la SMA SA sera donc déboutée de sa demande de condamnation solidaire présentée à son encontre ; subsidiairement, s'il était fait droit à cette réclamation, elle ne saurait être tenue à l'égard de la compagnie SMA SA d'une somme excédant 17,5 % de l'indemnité provisionnelle versée par l'assureur dommages ouvrage en phase amiable (soit 207 169,12 x 17,5 % = 36 254,60 euros), et ce conformément au partage de responsabilité retenu par l'expert intervenant pour la SMA SA ;

- en tout état de cause, en cas de condamnation in solidum prononcée à son encontre et à celui des autres constructeurs à l'égard de la SMA SA, elle est recevable et fondée à être relevée et garantie in solidum de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, frais, intérêts et dépens, et à tout le moins dans une proportion qui ne saurait être inférieure à 82,5 %, par l'ensemble des membres de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, qui ont retenu un mode de traitement ayant conduit les entreprises à enfreindre les règles de pose dont relèvent leurs propres ouvrages, ont été défaillants dans sa mission de conception et de suivi des travaux et n'ont pas observé ni réservé l'absence d'étanchéité, et dès lors que M. I... a commis un défaut de conception et de suivi des travaux, par la société Boujon Denis, qui ayant posé le carrelage avant les cloisons, ne pouvait ignorer que les cloisons seraient posées sur son ouvrage, qui est intervenue pour poser les plinthes en pied de cloisons sans vérifier la présence d'un traitement contre les infiltrations d'eau et ne pouvait ignorer l'importance du traitement des ouvrages contre ces infiltrations, et de la société Bureau Alpes Contrôle ;

- une expertise serait inutile dès lors que l'expert ne pourrait pas se prononcer sur l'origine des désordres puisque les travaux ont été réalisés ; en tout état de cause, elle sera ordonnée au frais avancés du requérant, qui est appelant et réclame une indemnisation ;

- aucune condamnation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne saurait intervenir notamment contre la société EBSO, et plus encore, des intérêts et leur capitalisation à compter du 30 juin 2014 comme réclamé par l'EPSM, ne sauraient être mis à sa charge, puisque l'absence d'indemnisation ou l'indemnisation incomplète n'est pas le fait des entreprises, mais celui de l'assureur dommage ouvrage.

La clôture de l'instruction a été fixée au 21 août 2020 par une ordonnance du 20 juillet 2020.

Par lettres du 26 octobre 2020, les parties ont été notamment informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé les moyens relevés d'office suivants :

- irrecevabilité de la demande, nouvelle en appel, présentée au titre de la responsabilité contractuelle dirigée contre la société Alpes Contrôles ;

- irrecevabilité des appels en garantie, nouveaux en appel formés par la société Denis Boujon à l'encontre de M. I...-S... et de la société Ebso.

La société Boujon Denis a présenté des observations le 30 octobre 2020.

M. I... a présenté des observations le 9 novembre 2020.

La société Ebso a présenté des observations le 12 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code civil ;

- le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le décret n°99-443 du 28 mai 1999 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. N... ;

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

- les observations de Me L..., pour l'EPSM, celles de Me P..., pour M. I..., celles de Me G... pour les sociétés Atelier 19 et Projectec et celles de Me K..., pour M. R... ;

Considérant ce qui suit :

1. En 2002, l'EPSM a réhabilité les locaux de restauration du centre hospitalier, sous la maîtrise d'oeuvre d'un groupement solidaire composé de M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., économiste et mandataire du groupement, de la société Atelier 19, architecte, de la société Projectec, bureau d'études fluides et de M. H... R..., exerçant sous l'enseigne A..., bureau d'études structures. Le lot n° 3 " carrelage faïence " et le lot n° 4 " cloison doublage faux-plafond " ont été respectivement confiés aux sociétés Denis Boujon et Eric D..., devenue la société Ebso. Après avoir constaté la présence de moisissures sur les cloisons rénovées, l'EPSM a déclaré le 17 avril 2007 un sinistre auprès de son assureur dommage-ouvrage, la société Sagena, aux droits de laquelle est depuis venue la SMA SA, soit postérieurement à la réception de l'ouvrage, intervenue le 1er septembre 2005. La société Sagena après avoir diligenté plusieurs expertises a indemnisé l'EPSM à hauteur de 207 169,12 euros au titre de sa garantie dommage-ouvrage. Dès lors que des désordres affectaient aussi les cuisines de l'hôpital, l'EPSM, estimant pouvoir prétendre à une indemnisation plus importante, a demandé au tribunal administratif de Grenoble la condamnation solidaire des constructeurs à lui verser la somme totale de 712 399,58 euros en réparation de ces désordres, outre intérêts au taux légal capitalisés. Par un jugement n° 1505106 du 27 mars 2018, dont l'EPSM relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a retenu la responsabilité décennale de M. I... et des sociétés Projectec, Ebso, Denis Boujon et Bureau Alpes contrôle et les a condamnés à hauteur de 369 806, 20 euros TTC.

Sur les interventions :

Concernant l'intervention de la compagnie Generali, assureur de la SAS HBC :

2. L'arrêt à rendre sur la requête de l'EPSM n'est pas susceptible de préjudicier aux droits de la société HBC, assuré par la compagnie Generali, qui n'est pas mis en cause. Dès lors son intervention en qualité d'assureur de la SAS HBC ne peut être admise.

Concernant l'intervention de la compagnie Generali, assureur de la société Denis Goujon :

3. L'assureur d'un constructeur dont la responsabilité en matière de travaux est recherchée par le maître de l'ouvrage n'est pas recevable à intervenir en cette seule qualité devant le juge administratif saisi du litige.

4. Il résulte de ce qui précède que l'intervention de la compagnie Generali, assureur de la société Denis Goujon, dont la responsabilité est recherchée par l'EPSM, doit être rejetée, et ce alors que par ailleurs elle ne justifie d'aucune subrogation dans les droits de son assuré.

Sur le montant de la demande indemnitaire formée devant les premiers juges :

5. Les prétentions d'une partie devant le juge d'appel ne peuvent excéder, en l'absence d'éléments nouveaux postérieurs à la décision des premiers juges, le montant total de l'indemnité chiffrée en première instance.

6. Il ressort des pièces du dossier que l'EPSM qui devant les premiers juges, a, avant la clôture de l'instruction, demandé une indemnité d'un montant total de 598 515,40 euros au titre des travaux de reprise des désordres en réparation de son préjudice, demande en appel à ce même titre une somme de 594 838,78 euros. Il ressort du dossier de première instance, que l'appelant entendait demander en réparation de son préjudice qualifié d'immatériel la somme correspondant à la différence entre le coût réel exposé pour la mise en service d'une cuisine provisoire, d'un montant de 366 884,18 euros TTC, et l'indemnité d'assurance perçue au titre de ce même préjudice, soit 153 000 euros. Le montant de sa demande à ce titre s'établissait ainsi à la somme de 213 884,18 euros. C'est donc au prix d'une erreur de plume que la somme de 113 884,18 euros a été mentionnée à ce titre dans ses écritures. Ainsi, les prétentions indemnitaires en appel de l'EPSM, d'un montant total de 808 792,96 euros, n'excèdent pas le montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, soit la somme de 812 399,58 euros (598 515,40 + 213 884,18).

Sur la recevabilité :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit au point 6 que la demande indemnitaire de l'EPSM en réparation du préjudice consistant dans la mise en place d'une cuisine provisoire sur la période nécessaire aux travaux de réparation des désordres à hauteur de 213 884,18 euros ne constitue pas en partie une demande nouvelle en appel.

8. En deuxième lieu, l'établissement requérant n'a pas recherché devant les premiers juges avant la clôture de l'instruction la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre ni celle de la société Bureau Alpes Contrôles. Ses prétentions nouvelles en appel formées sur ce fondement de responsabilité ne sont donc pas recevables.

9. En troisième lieu, les conclusions susvisées présentées à titre subsidiaire par la SMA SA, venant aux droits de la Sagena, assureur dommages-ouvrages de l'EPSM, constituent des demandes nouvelles en appel irrecevables.

10. En dernier lieu, l'établissement requérant n'est pas fondé à soutenir que les appels incidents de M. I... et de la société Alpes contrôle seraient irrecevables pour avoir été formés après l'échéance du délai d'appel, eu égard à la nature même de l'appel incident.

Sur la régularité du jugement :

11. En premier lieu, par les motifs retenus au point 15 du jugement, les premiers juges n'ont pas fait droit à une argumentation non soulevée par les défendeurs mais ont exercé leur office concernant l'évaluation du coût des travaux de reprise des désordres, discuté par les parties. l'EPSM n'est donc pas fondé à soutenir que le principe du contradictoire, rappelé à l'article L. 5 du code de justice administrative, a été méconnu.

12. En deuxième lieu, dans sa requête et ses deux mémoires présentés avant la clôture de l'instruction devant le tribunal administratif de Grenoble, l'établissement requérant n'a pas précisé le fondement juridique de ses conclusions tendant à la condamnation de la société Sagena, son assureur dommage-ouvrage. Il n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions comme irrecevables par application des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.

13. En troisième lieu, le jugement contesté, qui a mis hors de cause la société Atelier 19, n'avait pas à se prononcer sur son appel en garantie formé à l'encontre de M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S.... En outre, ce jugement, ainsi qu'il ressort de son point 28, n'a pas omis de statuer sur l'appel en garantie formé l'encontre de M. O... I... par la SARL Projectec dont la responsabilité décennale était engagée. Par suite, la SARL Atelier 19 et la SARL Projectec ne sont pas fondées à soutenir, que les premiers juges ont omis de statuer sur les appels en garantie qu'elles ont formés contre M. I....

14. En quatrième et dernier lieu, le moyen soulevé par la SARL Atelier 19 et la SARL Projectec et tiré de ce que le jugement contesté a statué ultra petita en accordant à l'établissement requérant au titre du préjudice immatériel une somme de 119 755,88 euros, déduction faite de la provision reçue de 207 169,12 euros, alors que seule une somme de 113 884,18 euros était demandée, doit être écarté compte tenu de ce qui a été dit aux points 6 et 7, alors d'ailleurs que ce montant de 119 755,88 euros correspondant au montant de 326 925 euros retenu par l'expert déduction faite de la totalité de l'indemnité d'assurance versée, y compris pour la reprise des désordres, d'un montant de 207 169,12 euros (54 169,12 + 153 000).

Sur le bien-fondé du jugement :

- S'agissant de la responsabilité décennale des constructeurs :

15. Il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables. Par ailleurs, un constructeur dont la responsabilité est recherchée par un maître d'ouvrage n'est fondé à demander à être garanti par un autre constructeur que si et dans la mesure où les condamnations qu'il supporte correspondent à un dommage imputable à ce constructeur.

16. En l'espèce, les désordres affectant les cuisines de l'hôpital, qui sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination, consistent en des remontées d'humidité du sol carrelé vers plusieurs cloisons, qui provoquent l'apparition de moisissures engendrant l'enfoncement des murs, plinthes et des faïences à certains endroits. Les remontées d'humidité et les pénétrations d'eau en pieds de cloison entraînent des affaiblissements mécaniques ponctuels en pied. Le caractère décennal de tels désordres n'est d'ailleurs pas contesté.

En ce qui concerne la garantie décennale des membres du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre :

17. En l'absence de stipulations contraires, les entreprises qui s'engagent conjointement et solidairement envers le maître de l'ouvrage à réaliser une opération de construction s'engagent conjointement et solidairement non seulement à exécuter les travaux, mais encore à réparer le préjudice subi par le maître de l'ouvrage du fait de manquements dans l'exécution de leurs obligations contractuelles. Un constructeur ne peut échapper à sa responsabilité conjointe et solidaire avec les autres entreprises co-contractantes, au motif qu'il n'a pas réellement participé aux travaux révélant un tel manquement, que si une convention, à laquelle le maître de l'ouvrage est partie, fixe la part qui lui revient dans l'exécution des travaux.

18. En l'espèce, la maîtrise d'oeuvre a été confiée à un groupement solidaire composé de M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., économiste et mandataire du groupement, de la société Atelier 19, architecte, de la société Projectec, bureau d'études fluides et de M. H... R..., exerçant sous l'enseigne A..., bureau d'études structures. L'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre, signé par le représentant du maître d'ouvrage stipule que la répartition des missions du groupement est précisée dans l'annexe n°2 qui détaille leurs missions respectives.

Quant à la responsabilité décennale de M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., économiste et mandataire du groupement :

19. Il résulte de l'instruction que les désordres sont imputables à M. I..., économiste, qui avait, en vertu de l'annexe 2 du contrat de maîtrise d'oeuvre, une mission complète de maîtrise d'oeuvre, comprenant notamment la conception, l'établissement du dossier et des pièces administratives du marché, l'organisation et la direction des réunions hebdomadaires, le contrôle de conformité et la réception. Sa responsabilité décennale de plein droit est donc, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, engagée.

Quant à la responsabilité décennale de la société Atelier 19 :

20. Il ressort de l'annexe n°2 du contrat de maîtrise d'oeuvre que la société Atelier 19 était chargée en sa qualité d'architecte de la procédure administrative et de l'élaboration des documents graphiques. Il ne résulte pas de l'instruction que les désordres soient imputables à ces éléments de la mission confiée à l'architecte. A cet égard, les conclusions de l'expert de l'assureur dommage-ouvrage ne font pas état d'une responsabilité particulière de la société Atelier 19. C'est donc à juste titre que les premiers juges l'ont mis hors de cause.

Quant à la responsabilité décennale de la société Projectec (BET fluide) :

21. Il ressort de l'annexe n° 2 du contrat de maîtrise d'oeuvre que la société Projectec a participé à la majorité des missions confiées au groupement de maîtrise d'oeuvre, qu'il s'agisse de la définition du projet, de l'élaboration des pièces administratives du marché et de la constitution du dossier, de l'organisation et la direction des réunions hebdomadaires, du contrôle de conformité et des opérations de réception. Les désordres lui sont donc imputables et sa responsabilité décennale de plein droit pouvait dès lors, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, être engagée.

Quant à la responsabilité décennale de M. H... R..., bureau d'études structures exerçant sous l'enseigne A... :

22. Il ressort de l'annexe n° 2 du contrat de maîtrise d'oeuvre que le BET structures a participé activement à l'élaboration des pièces administratives du dossier de consultation des entreprises (DCE), dans le cadre de l'assistance pour la passation des contrats de travaux, (mission ACT) et aux opérations de réception. Il ne résulte pas de l'instruction que les désordres en litige soient imputables aux éléments de la mission ainsi confiée à ce bureau d'études. A cet égard, les rapports de l'expert de l'assureur dommage-ouvrage ne font pas apparaître de responsabilité particulière de M. R..., que les premiers juges ont ainsi pu mettre hors de cause.

En ce qui concerne la responsabilité décennale de la société Bureau Alpes Contrôle, contrôleur technique :

23. Aux termes de l'article 1792-2 du code civil : " Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage ".

24. Le cahier des clauses techniques particulières du lot n° 3 " carrelage-faïence " stipule, dans les conditions techniques générales, à son article 3.1.3 que les ouvrages de ce lot devront notamment répondre aux conditions et prescriptions du document technique unifié (DTU) 52.1 " revêtement de sol scellés ", dont le point 3.1.8 précise notamment les règles de mise en oeuvre des carrelages scellés.

25. Il résulte de l'instruction que la société Bureau Alpes Contrôles avait une mission de type L, qui porte sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indissociables en vertu des dispositions de l'article 7 du décret du 28 mai 1999 relatif au cahier des clauses techniques générales applicables aux marchés publics de contrôle technique, et également une mission de type P1 portant, en vertu de l'annexe A du décret du 28 mai 1999 précité et du cahier des clauses administratives particulières, sur la solidité des éléments d'équipements dissociables visés par la mission L (équipements non indissociablement liés). Les désordres, qui affectent notamment les cloisons et le carrelage, qui pour une partie au moins a été scellé à la dalle et fait donc indissociablement corps avec celle-ci, sont donc imputables à la société Bureau Alpes Contrôles. Sa responsabilité décennale de plein droit peut dès lors, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, être engagée.

En ce qui concerne la responsabilité décennale de la société Denis Boujon et de la société Ebso, anciennement Eric D... :

26. Les désordres sont sans conteste imputables à ces sociétés, qui étaient chargées respectivement du lot n° 3 " carrelage faïence " et du lot n° 4 " cloison doublage faux-plafond ". Leur responsabilité décennale de plein droit est comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, engagée, ce que la société Ebso ne conteste d'ailleurs pas en appel.

- S'agissant de la faute du maître de l'ouvrage :

27. S'il résulte notamment d'un courrier du 28 mai 2004 attribué à la société Bureau Alpes contrôle et du rapport du 31 mai 2007 de l'expert missionné par l'assureur dommage-ouvrage que le classement " EB+c " des locaux autorise en cours d'exploitation de procéder à des opérations de nettoyage au jet d'eau si les siphons de sol le permettent mais que le nettoyage par jets d'eau sous haute pression est exclu, il ne résulte pas de l'instruction que l'EPSM aurait contribué aux désordres en utilisant un mode de nettoyage inapproprié, alors que le rapport d'expertise se contente de constater que les opérations de nettoyage sont effectuées " par des jets de lavage prévus dans l'opération ". Dès lors, il n'y a pas lieu, comme l'a jugé le tribunal, de retenir une faute du maître de l'ouvrage de nature à exonérer partiellement les constructeurs de leurs responsabilité.

- S'agissant des préjudices :

En ce qui concerne les travaux de reprise des désordres (préjudice matériel) :

28. L'établissement requérant, qui produit des décomptes de dépenses, des décomptes généraux des travaux exécutés, et des factures, ne démontre pas que les travaux, qui ont été effectués pour un coût d'un montant de 649 007,90 euros TTC, sans déduction de l'indemnité d'assurance, coût nettement très supérieur à celui retenu par l'expert dommage ouvrage dans son rapport d'expertise définitif du 24 août 2012, étaient strictement nécessaires à la reprise des désordres et n'aboutissent pas une plus-value ou à une amélioration de l'ouvrage par rapport aux stipulations contractuelles. Il y a donc lieu de retenir l'évaluation des travaux de reprise des désordres faite par cet expert, soit la somme de 250 050,32 euros TTC, qui comprend les missions de direction des travaux, et dont il convient de déduire la somme de 54 169,12 euros versée par l'assureur dommage ouvrage au titre de la mise en oeuvre de sa garantie. Le montant de l'indemnité à la charge des constructeurs peut ainsi être fixé à la somme de 195 881,20 euros.

En ce qui concerne la location d'une cuisine provisoire :

29. Si l'EPSM réclame en réparation de ce préjudice, qu'il qualifie d'immatériel, la somme de 366 884,18 euros, en produisant le décompte final du lot concernant la cuisine provisoire, il ne démontre pas que cette somme correspond à celle engagée pendant la durée des travaux de reprise des désordres tels qu'évalués par l'expert, alors que ce dernier a, dans son rapport d'expertise définitif du 24 août 2012, évalué les travaux de réparation des dommages dits immatériels à la somme de 326 925 euros TTC, en retenant une durée totale de location de 9 mois. Il y a donc lieu, en l'absence d'autres éléments, de retenir le montant de l'évaluation expertale, soit la somme de 326 925 euros TTC dont il convient de déduire la somme de 153 000 euros versée par l'assureur dommage ouvrage au titre de la mise en oeuvre de sa garantie. Le montant de l'indemnité à la charge des constructeurs peut ainsi être fixé à la somme de 173 925 euros.

30. Il résulte de ce qui précède, et notamment des montants retenus aux points 28 et 29 que c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné in solidum M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., la société Projectec, la société Bureau Alpes contrôle, la société Denis Boujon, et la société Ebso anciennement Eric D..., qui ont concouru à la réalisation des dommages, à verser la somme totale de 369 806,20 euros à l'EPSM.

S'agissant des intérêts et la capitalisation des intérêts :

31. Si l'établissement requérant demande pour chaque indemnité les intérêts au taux légal capitalisés à compter du 30 juin 2014, cette date correspond à celle d'un courrier du conseil dudit établissement à son assureur dommage ouvrage, la compagnie Sagena, demandant la transmission d'un procès-verbal d'indemnisation d'un montant de 598 515,40 euros, et non à une demande d'indemnisation adressée aux constructeurs précités. Ainsi, l'EPSM a droit aux intérêts de la somme de 423 975,32 euros TTC, calculés à compter de la date d'introduction de sa requête devant le tribunal administratif de Grenoble, soit le 14 août 2015, ainsi que retenu par les premiers juges. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 14 août 2016, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les appels en garantie :

32. En premier lieu, les conclusions d'appel en garantie formées par la société Denis Boujon à l'encontre de M. I... et de la société Ebso sont nouvelles en appel et par suite irrecevables.

33. En second lieu, en l'absence d'aggravation de la situation de M. O... I..., et de celles des sociétés Bureau Alpes contrôles, Projectec et Ebso, leurs conclusions respectives d'appel en garantie, présentées par la voie de l'appel provoqué, doivent être rejetées comme tardives.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

34. En premier lieu, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par l'EPSM, la société Atelier 19, M. R..., M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., la société Projectec, la société Bureau Alpes contrôle, la société Denis Boujon et la société Ebso, anciennement Eric D....

35. En deuxième lieu, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la SMA SA, partie perdante dans la présente instance.

36. En troisième et dernier lieu, la compagnie Generali IARD, dont les conclusions en intervention sont rejetées, n'est en tout état de cause pas partie au présent litige. Ses conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les interventions de la compagnie Generali IARD ne sont pas admises.

Article 2 : La requête de l'établissement public de santé mentale (EPSM) de la Roche-sur-Foron est rejetée.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident et d'appel provoqué et celles formées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées par les autres parties, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron, à la SMA SA, à la société Ebso, à la société Bureau Alpes contrôle, à M. O... I..., exerçant sous l'enseigne S..., à la société Atelier 19, à M. H... R..., à la société Projectec, à la société HBC, à la compagnie Generali IARD et à la Société Boujon Denis.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. N..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2021.

2

N° 18LY02637


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY02637
Date de la décision : 04/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELARL BARRE-LE GLEUT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-04;18ly02637 ?
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