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15/04/2021 | FRANCE | N°18LY04118

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 15 avril 2021, 18LY04118


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne à lui verser les sommes de 7 093 euros correspondant aux indemnités de travail additionnel qu'elle soutient avoir accompli entre le 31 mars et le 17 novembre 2014 et de 6 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'obligation qui lui a été imposée d'effectuer ce travail additionnel et de la résistance abusive à l'en rémunérer.

Par un juge

ment n° 1604888 du 19 septembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne à lui verser les sommes de 7 093 euros correspondant aux indemnités de travail additionnel qu'elle soutient avoir accompli entre le 31 mars et le 17 novembre 2014 et de 6 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'obligation qui lui a été imposée d'effectuer ce travail additionnel et de la résistance abusive à l'en rémunérer.

Par un jugement n° 1604888 du 19 septembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2018, et deux mémoires enregistrés les 24 octobre 2019 et 30 juillet 2020 (non communiqué), Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 septembre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 25 avril 2016 par laquelle le directeur du centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne a rejeté sa demande préalable d'indemnisation ;

3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne à lui verser les sommes de 7 093 euros correspondant aux indemnités de travail additionnel, de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral né du refus abusif de l'indemnisation de son temps de travail additionnel, durant la période du 31 mars au 17 novembre 2014 et de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral né de l'accomplissement contraint de ce dernier ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie avoir effectué un travail additionnel entre le 31 mars et le 17 novembre 2014, sans avoir perçu les indemnités compensatrices correspondantes ;

- elle a été contrainte à ce travail supplémentaire par la réorganisation du service qui lui a été imposée, ce qui constitue une faute du centre hospitalier.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 4 juillet 2019 et le 22 juin 2020, le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, représenté par Me B... conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 24 juin 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 juillet 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;

- l'arrêté du 30 avril 2003 modifié relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité des soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ;

- le code de la santé publique ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me E..., pour le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C..., praticien hospitalier à plein temps au centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, a été affectée, à la suite d'une réorganisation du service, à l'unité fonctionnelle d'urgences chirurgicales entre le 31 mars et le 17 novembre 2014. En faisant valoir, d'une part, qu'elle n'a pas perçu d'indemnité compensatrice du temps de travail additionnel qu'elle aurait effectué durant cette période, d'autre part, que les conditions dans lesquelles elle aurait été amenée à ce travail additionnel constituent une faute du centre hospitalier universitaire, elle a demandé, après le rejet, le 25 avril 2016, de sa demande préalable par le centre hospitalier universitaire, au tribunal administratif de Lyon de condamner l'établissement à lui verser cette indemnité et à réparer ses préjudices. Mme C... demande l'annulation du jugement du 19 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête et la condamnation du centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne à lui verser les sommes de 7 093 euros correspondant aux indemnités de travail additionnel, de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral né du refus abusif de l'indemnisation de son temps de travail additionnel, durant la période du 31 mars au 17 novembre 2014, et de 3 000 euros en réparation du préjudice moral né de l'accomplissement contraint de ce dernier.

Sur les indemnités pour travail additionnel au titre de l'année 2014 :

2. En premier lieu, la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail prescrit aux États membres de fixer des règles minimales en matière de protection des travailleurs, notamment, en son article 6, une durée maximale hebdomadaire de travail de quarante-huit heures, dont le calcul ne peut en principe s'opérer, en vertu de son article 16, que sur une période de référence de quatre mois au maximum. Cette période peut toutefois être portée, en vertu des dispositions du point 3) c) i) de son article 17 et des dispositions de son article 19, à six ou, sous certaines conditions, à douze mois, pour des services relatifs à la réception, au traitement et/ou aux soins donnés par des hôpitaux ou des établissements similaires. Selon l'article 22 de la directive, un État membre a la faculté de ne pas appliquer l'article 6 tout en respectant les principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs et sous certaines conditions, notamment celle qu'aucun employeur ne demande à un travailleur de travailler plus de quarante-huit heures au cours d'une période de sept jours, calculée comme moyenne de la période de référence visée à l'article 16, sans l'accord du travailleur.

3. D'une part, aux termes de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique dans sa version applicable au litige : " Les praticiens perçoivent, après service fait, attesté par le tableau mensuel de service réalisé, validé par le chef de pôle ou, à défaut, par le responsable du service, de l'unité fonctionnelle ou d'une autre structure interne : (...) 2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret. " et de l'article R. 6152-23-1 du même code : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : (...) b) Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires ". Il résulte de ces dispositions que, si le temps de travail additionnel accompli par un praticien attaché associé, avec l'accord de son établissement d'emploi, ouvre à celui-ci droit à indemnisation, c'est à la double condition que l'intéressé établisse par tout moyen de preuve, d'une part, avoir effectivement accompli des services ouvrant droit à rémunération, d'autre part, que le temps de travail additionnel n'ait pas fait l'objet d'une récupération de la part de l'intéressé.

4. D'autre part, aux termes de l'article R. 6152-27 dudit code : " Le service hebdomadaire est fixé à dix demi-journées, sans que la durée de travail puisse excéder quarante-huit heures par semaine, cette durée étant calculée en moyenne sur une période de quatre mois. Lorsqu'il est effectué la nuit, celle-ci est comptée pour deux demi-journées. Lorsque l'activité médicale est organisée en temps continu, l'obligation de service hebdomadaire du praticien est, par dérogation au premier alinéa, calculée en heures, en moyenne sur une période de quatre mois, et ne peut dépasser quarante-huit heures. Le praticien peut accomplir, sur la base du volontariat au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, un temps de travail additionnel donnant lieu soit à récupération, soit au versement d'indemnités de participation à la continuité des soins et, le cas échéant, d'indemnités de temps de travail additionnel. Il bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives par période de vingt-quatre heures. Le repos quotidien après la fin du dernier déplacement survenu au cours d'une astreinte est garanti au praticien. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, il peut accomplir une durée de travail continue maximale de vingt-quatre heures. Dans ce cas, il bénéficie, immédiatement à l'issue de cette période, d'un repos d'une durée équivalente. " L'article 4 de l'arrêté du 30 avril 2003 susvisé prévoit notamment que lorsque, dans le cadre de la réalisation de ses obligations de service, le praticien a été conduit à dépasser le seuil maximal de quarante-huit heures hebdomadaires en moyenne lissée sur le quadrimestre, le temps de travail effectué au-delà est décompté en heures de temps de travail additionnel qui, cumulées par plages de cinq heures, sont converties en une demi-période de temps de travail additionnel. Le décompte du temps de travail additionnel n'intervient qu'à l'issue de chaque période de référence de quatre mois, après que la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaires effectuées, en moyenne, sur cette même période a été constatée au vu du tableau de service. Il résulte de ces dispositions que, sans que le décompte ainsi effectué soit incompatible avec la directive 2003/88/CE susvisée dont se prévaut Mme C..., le temps de travail additionnel d'un praticien est celui effectivement réalisé par ce dernier au-delà du seuil de quarante-huit heures hebdomadaires en moyenne lissée sur un quadrimestre compte non tenu, pour cette base, des temps pendant lesquels l'intéressé a utilisé ses droits à congés annuels afin de neutraliser l'incidence de ces derniers.

5. Il suit de là que, d'une part, Mme C..., qui a, au demeurant, à supposer même comme elle le soutient, par voie de régularisation, signé le 30 octobre 2014, avant la fin de la période en litige, un contrat de temps de travail additionnel, ne saurait tirer de la simple multiplication d'une durée hebdomadaire de travail par le nombre de semaines de la même période, qu'elle aurait effectué un travail additionnel sans en avoir été indemnisée.

6. D'autre part, il résulte de l'instruction que, pour justifier des 39,6 demi-journées de temps de travail additionnel qu'elle soutient avoir effectuées sur cette période en unité fonctionnelle d'urgences chirurgicales et dans le service de chirurgie au-delà de ses dix demi-journées d'obligations de service hebdomadaires, Mme C..., qui par ailleurs n'y intègre pas les congés au-delà du décompte analysé au point 4 qu'elle a effectivement pris durant la même période, se borne à produire des plannings portant sa seule signature et dépourvus du visa du chef de service ou du directeur de l'établissement un tableau figurant une semaine-type tandis qu'en défense, le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, qui conteste l'existence d'heures de travail additionnelles effectuées au-delà de celles déjà rémunérées par ses soins, produit un tableau de décompte dont il ne saurait être déduit l'inexactitude de la seule allégation par la requérante d'un défaut de tenue d'un registre. Dans ces circonstances, Mme C..., qui n'établit, par les éléments qu'elle produit, ni la quotité, ni même l'existence des heures additionnelles dont elle demande la rémunération, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande sur ce point.

Sur les conclusions indemnitaires :

7. Mme C... réitère en appel ses demandes d'indemnisation de préjudices matériels et moraux nés de ce qu'elle aurait été contrainte d'effectuer du temps de travail additionnel non rémunéré entre le 31 mars et le 17 novembre 2014, sans apporter aucun élément nouveau de droit ou de fait. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, de rejeter ces demandes.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme C....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2021.

N° 18LY04118


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04118
Date de la décision : 15/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.

Fonctionnaires et agents publics - Dispositions propres aux personnels hospitaliers - Personnel médical.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : ANNE BOST AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-15;18ly04118 ?
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