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27/05/2021 | FRANCE | N°19LY01128

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 27 mai 2021, 19LY01128


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, en droits et pénalités.

Par un jugement n°1706628 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, déchargé les intéressés de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires susvisées et, dans u

n article 2, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, en droits et pénalités.

Par un jugement n°1706628 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, déchargé les intéressés de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires susvisées et, dans un article 2, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2019, M. et Mme A..., représentés par Me C..., doivent être regardés comme demandant à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 22 janvier 2019 et de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge pour les années 2012 et 2013 en droits et pénalités et restant à leur charge ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ils ne peuvent être regardés comme ayant en France le centre de leurs intérêts économiques au sens de l'article 4 B du code général des impôts dès lors que leurs principaux investissements sont réalisés au Luxembourg ;

- à titre subsidiaire, ils ont, au sens de l'article 4 de la convention franco-suisse du 9 septembre 1966, le centre de leurs intérêts vitaux en Suisse et y séjournent de façon habituelle.

Par un mémoire, enregistré le 18 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 7 septembre 2020 a fixé la clôture de l'instruction au 8 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention conclue le 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration fiscale a estimé que ces derniers devaient être qualifiés de résidents fiscaux français et les a assujettis à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre de leurs revenus perçus au titre des années 2012 et 2013. M. et Mme A... relèvent appel de l'article 2 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de leur demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales en droits et pénalités ainsi mis à leur charge.

2. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. Il en est ainsi à l'égard de toute convention ayant cet objet, alors même qu'elle définit directement les critères de la résidence fiscale à prendre en compte pour les besoins de son application.

Sur l'application de la loi fiscale :

3. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) ". L'article 4 B du même code dispose que : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) ". Pour l'application des dispositions du a du 1 de l'article 4 B du code général des impôts, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, ou, s'il est célibataire, le centre de sa vie personnelle, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles. Le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer.

4. Il résulte de l'instruction que si M. et Mme A... louent un appartement en Suisse à Morgues et y sont titulaires d'un permis d'établissement de type C depuis 2010, les intéressés, qui sont retraités, conservent en France leurs parents, y disposent de plusieurs résidences, à Montréal-la-Cluse et à Saint-Raphaël, où ils votent et ne contestent pas s'y faire soigner. M. A... est par ailleurs titulaire d'un permis de chasse en France et les appelants cotisent à plusieurs associations locales. L'administration justifie, dans l'annexe III à la proposition de rectification adressée aux intéressés, que plusieurs dépenses de la vie courante ont été effectuées en France au cours des années vérifiées, par l'intermédiaire de la carte bancaire de la société NRJ II, située dans l'Ain, dont Mme A... est la gérante, alors que les appelants ne produisent que quelques rares documents épars afin de justifier de dépenses courantes effectuées en Suisse sur la même période. Si M. et Mme A... estiment qu'ils n'ont pu occuper leur maison de Montréal-la-Cluse en raison de travaux effectuées à compter d'avril 2013, ils n'en justifient pas par la seule attestation de l'architecte précisant que la cuisine et les salles de bain étaient inutilisables alors que les consommations d'eau et d'énergie sont restées constantes sur la période en cause et correspondent à une occupation régulière des lieux. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les époux A... doivent être regardés comme ayant eu au cours de la période vérifiée le centre de leurs intérêts familiaux en France. Il suit de là qu'ils avaient, au titre des années 2012 et 2013, leur foyer en France, au sens des dispositions du a. de l'article 4 B du code général des impôts. Ils étaient ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner le critère du centre des intérêts économiques prévu par le c. de l'article 4 B du code général des impôts, passibles de l'impôt sur le revenu en France.

Sur l'application de la convention franco-suisse :

5. Aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression "résident d'un Etat contractant" désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites ; b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité ; d) Si cette personne possède la nationalité de chacun des Etats contractants ou si elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que M. et Mme A... sont assujettis aux impôts cantonaux et communaux et à l'impôt fédéral direct depuis le 4 mai 2009. Dès lors qu'ils sont regardés comme résidents fiscaux suisses au regard de la loi fiscale suisse, il convient d'appliquer à leur cas le premier des critères subsidiaires énoncé au 2 de l'article 4 et de déterminer l'Etat où ils avaient le centre de leurs intérêts vitaux, c'est-à-dire celui avec lequel leurs relations personnelles étaient les plus étroites.

7. Il résulte de ce qui a été dit précédemment au point 2 que M. et Mme A... possédaient, au cours des années en litige, des liens familiaux étroits en France en raison de la présence de leurs parents et qu'ils disposaient de deux maisons d'habitation en France dont une qu'ils occupaient régulièrement. Par suite, M. et Mme A... doivent être regardés comme ayant eu des relations personnelles plus étroites avec la France qu'avec la Suisse, au sens des stipulations précitées, au cours de la période vérifiée et étaient, dès lors, fiscalement imposables en France au cours de cette période.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de leur demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge en droits et pénalités pour les années 2012 et 2013. Les conclusions qu'ils présentent aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au demeurant, non chiffrées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 mai 2021.

2

N°19LY01128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01128
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Lieu d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MOULINIER, DULATIER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-05-27;19ly01128 ?
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