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03/02/2022 | FRANCE | N°20LY00476

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 03 février 2022, 20LY00476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Séquoia a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la communauté d'agglomération Roannais Agglomération à lui verser la somme de 53 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction du marché public de travaux de réfection du parquet sportif de la halle André Vacheresse à Roanne.

Par un jugement n° 1807710 du 5 décembre 2019, ce tribunal a partiellement fait droit à sa demande et a condamné la communauté d'agglomération Roannais Agglomération

à lui verser la somme de 1 000 euros en remboursement des frais qu'elle a engagés pour pré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Séquoia a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la communauté d'agglomération Roannais Agglomération à lui verser la somme de 53 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction du marché public de travaux de réfection du parquet sportif de la halle André Vacheresse à Roanne.

Par un jugement n° 1807710 du 5 décembre 2019, ce tribunal a partiellement fait droit à sa demande et a condamné la communauté d'agglomération Roannais Agglomération à lui verser la somme de 1 000 euros en remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 février 2020 et 4 janvier 2022 la société Séquoia, représentée par Me Palmier, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a limité son indemnisation ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération Roannais Agglomération à lui verser la somme de 30 038 euros TTC en réparation du préjudice correspondant au manque à gagner subi du fait de son éviction du marché ou, subsidiairement, de porter à 3 000 euros l'indemnisation des frais exposés pour présenter son offre, assortie des intérêts légaux à compter du 25 juillet 2018 et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération la somme de 4 000 euros au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de répondre aux moyens, fondés, tirés de la non-conformité de l'offre retenue aux exigences du CCTP et de l'absence de capacités techniques et professionnelles de la société attributaire ;

- il n'a pas relevé d'office le moyen tiré de ce que son offre a été écartée pour un motif irrégulier ;

- elle avait une chance sérieuse d'emporter le marché puisqu'elle a remporté sur les six dernières années l'ensemble des marchés auxquels elle a candidaté portant sur des parquets destinés à la pratique du basket ou du hand-ball par des sportifs professionnels et que celle de la société attributaire, qui de surcroît n'était pas qualifiée ni assurée pour exécuter les prestations, était irrégulière ;

- la somme de 30 038 euros qu'elle demande en appel au titre du manque à gagner subi correspond au bénéfice net que lui aurait procuré ce marché ;

- elle est fondée à demander en outre la somme de 5 000 euros pour réparer le préjudice résultant de sa perte de référence professionnelle ou, subsidiairement, la somme de 3 000 euros en remboursement des frais qu'elle a exposés pour la présentation de son offre.

Par un mémoire enregistré le 13 novembre 2020, la communauté d'agglomération Roannais Agglomération, représentée par Me Cabanes, conclut au rejet de la requête, à l'annulation du jugement attaqué et à la condamnation de la société Séquoia à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission de réponse à des moyens ;

- le tribunal a relevé d'office le moyen, non-fondé, tiré de ce que l'offre de la société Séquoia a été écartée pour un motif irrégulier ;

- en raison de l'irrégularité de son offre, la société Séquoia était dépourvue de toute chance d'être attributaire du marché ;

- les moyens tirés de l'absence de capacités techniques et professionnelles de la société attributaire et de la non-conformité de son offre aux exigences du CCTP sont inopérants ;

- la société Séquoia n'établit pas la réalité et le montant des préjudices allégués.

Un mémoire enregistré le 9 janvier 2022, présenté pour la communauté d'agglomération Roannais Agglomération, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;

- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Monaji, représentant la société Séquoia et celles de Me McDonagh, représentant la communauté d'agglomération Roannais Agglomération.

Considérant ce qui suit :

1. Pour la réfection du parquet de la salle de basket de la halle André Vacheresse, située à Roanne, la communauté d'agglomération Roannais Agglomération a attribué le 6 juin 2018 à un groupement d'entreprises constitué notamment de la société Aubonnet et fils, sans publicité ni mise en concurrence préalables, un marché de travaux publics, pour un montant de 187 000 euros HT. La société Séquoia a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la communauté d'agglomération à lui verser la somme de de 53 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction du marché. Par un jugement du 5 décembre 2019, ce tribunal a jugé que la procédure était entachée d'irrégularité pour le motif, non contesté en appel, tiré de ce que les raisons techniques invoquées par la communauté d'agglomération Roannais Agglomération ne l'autorisaient pas à passer, sans publicité et mise en concurrence préalables, le marché litigieux. Le tribunal, qui a estimé que la société Séquoia, si elle n'était pas dépourvue de toute chance d'emporter le marché, n'avait pas droit à l'indemnisation de son manque à gagner en l'absence de chance sérieuse d'emporter le marché, a condamné la communauté d'agglomération Roannais Agglomération à lui verser la somme de 1 000 euros en remboursement des frais exposés pour présenter son offre. La société Séquoia demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a limité son indemnisation. La communauté d'agglomération Roannais Agglomération, par la voie de l'appel incident, demande son annulation.

2. Lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce marché, il appartient au juge, si cette irrégularité est établie, de vérifier qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et les préjudices dont le candidat demande l'indemnisation. Il s'en suit que lorsque l'irrégularité ayant affecté la procédure de passation n'a pas été la cause directe de l'éviction du candidat, il n'y a pas de lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à raison de son éviction.

3. Le cahier des clauses techniques particulières imposait au titulaire de fournir et poser un " parquet sportif " pour la pratique du basket notamment, constitué de panneaux de parquet en bois massif dont il précisait les caractéristiques techniques et l'épaisseur. S'il ne définissait pas expressément les modalités de pose du parquet, il résulte de l'instruction, en particulier de deux courriels des 25 avril et 5 juin 2018 du responsable du service " maintenance, énergie, entretien " de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération adressé à la société Séquoia et d'un article publié le 31 mai 2018 dans un journal régional, que le cahier des clauses techniques particulières avait été rédigé pour un parquet fixé au sol. Il résulte de la décomposition du prix présentée par la société Séquoia dans son offre qu'elle proposait de fournir un parquet en bois massif démontable ou modulaire et de le fixer uniquement en périphérie au moyen de plinthes. Ainsi son offre ne correspondait pas aux attentes de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération. En l'absence de lien de causalité entre les préjudices invoqués par la requérante à raison de son éviction et l'irrégularité de la procédure que la communauté d'agglomération Roannais Agglomération a organisée pour l'attribution du marché et l'irrégularité qu'elle allègue de la candidature et de l'offre du groupement attributaire, sa demande d'indemnisation ne peut qu'être rejetée.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des parties, que la communauté d'agglomération Roannais Agglomération est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à indemniser la société Séquoia des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre et à demander l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée devant le tribunal par la société Séquoia et de sa requête d'appel.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Séquoia la somme demandée au même titre par la communauté d'agglomération Roannais Agglomération.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1807710 du tribunal administratif de Lyon du 5 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Séquoia devant le tribunal administratif de Lyon et sa requête d'appel sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Roannais Agglomération au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Séquoia et à la communauté d'agglomération Roannais Agglomération.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.

2

N° 20LY00476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00476
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère direct du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CABINET PALMIER - BRAULT et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-03;20ly00476 ?
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