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11/01/2024 | FRANCE | N°22LY02316

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 11 janvier 2024, 22LY02316


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2002969 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire, enregi

strés les 28 juillet 2022 et 31 août 2023, Mme A... B..., représentée par Me Tournoud, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2002969 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 juillet 2022 et 31 août 2023, Mme A... B..., représentée par Me Tournoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier ;

- les premiers juges ont considéré à tort que la proposition de rectification identifie les bénéficiaires de revenus distribués à hauteur de la somme de 28 900 euros ;

- l'administration n'apporte pas la preuve qu'elle a appréhendé les distributions occultes en l'absence d'identification des bénéficiaires par les pièces de procédure et en l'absence de maîtrise seule ou conjointe de l'affaire avec son époux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 août 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La société DCR Najah, entreprise de maçonnerie générale dont Mme B... était la gérante non salariée et détenait 40 % des parts, le reste des parts étant détenu par sa fille, et au sein de laquelle son époux occupait un emploi salarié, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, au terme de laquelle le vérificateur a constaté que des sommes avaient été prélevées sans justification dans la trésorerie de la société par Mme B... et son conjoint. M. et Mme B... ont, en conséquence, été assujettis, au titre de l'année 2013, à un complément d'impôt sur le revenu résultant notamment de l'imposition entre leurs mains sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts d'une somme de 46 228 euros correspondant au solde de virements et chèques bancaires débités du compte bancaire de la société non imposés dans la catégorie des traitements et salaires ainsi qu'aux prélèvements sociaux. Mme B... relève appel du jugement du 23 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes, auxquelles son foyer fiscal a été assujetti au titre de l'année 2013.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 613-3 du code de justice administrative : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction. ". Aux termes de l'article R. 613-1-1 du même code : " Postérieurement à la clôture de l'instruction ordonnée en application de l'article précédent, le président de la formation de jugement peut inviter une partie à produire des éléments ou pièces en vue de compléter l'instruction. Cette demande, de même que la communication éventuelle aux autres parties des éléments et pièces produits, n'a pour effet de rouvrir l'instruction qu'en ce qui concerne ces éléments ou pièces. ".

3. Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.

4. Dans son mémoire introductif d'instance devant le tribunal administratif, Mme B... a seulement soutenu que la proposition de rectification du 15 décembre 2016 était insuffisamment motivée en l'absence de précision de l'identité des bénéficiaires des revenus distribués permettant de savoir si l'imposition était établie au nom de l'un ou l'autre des époux. L'instruction a été close par ordonnance à la date du 4 février 2022. Il ne ressort pas du dossier de première instance que le tribunal administratif a diligenté une mesure supplémentaire d'instruction, et ainsi il n'avait pas à rouvrir l'instruction suite à une telle mesure. Dans son mémoire enregistré le 25 mai 2022, Mme B... a soutenu qu'il n'était pas démontré qu'elle avait appréhendé les distributions occultes de la société DCR Najah. Toutefois, la requérante n'établit ni même n'allègue qu'elle n'était pas en mesure de faire état de ce moyen nouveau avant la clôture de l'instruction. Ainsi, le tribunal administratif n'était pas tenu de communiquer le mémoire du 25 mai 2022 parvenu au greffe du tribunal postérieurement à la clôture de l'instruction et a pu s'abstenir de soumettre ce mémoire au débat contradictoire en se limitant à le viser, en l'absence de réouverture de l'instruction, sans entacher son jugement d'une omission à statuer.

5. En second lieu, la requérante soutient que les premiers juges ont entaché leur jugement d'une dénaturation de ses écritures et de pièces. Un tel moyen ne relève pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé.

6. Les moyens tirés de l'irrégularité du jugement doivent, dès lors, être écartés.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

8. En cas de refus de la proposition de rectification par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé.

9. Il résulte de la proposition de rectification du 15 décembre 2016 que le vérificateur a retenu que la société DCR Najah a versé aux époux B... la somme totale de 63 300 euros au titre de l'année 2013, que le vérificateur a toutefois déduit de cette somme le montant de 17 072 euros correspondant aux salaires de l'époux de Mme B..., et qu'il a considéré que le surplus, soit 46 228 euros, constituait des revenus distribués imposables sur le fondement des dispositions précitées. La requérante ne conteste que la somme de 28 900 euros correspond à des virements bancaires dépourvus du nom de leur destinataire.

10. Pour justifier que les distributions occultes de la société DCR Najah ont été appréhendées par Mme B... et son époux, le vérificateur s'est fondé sur les déclarations du conjoint de la requérante recueillies lors de la vérification de comptabilité de la société DCR Najah selon lesquelles les virements bancaires dépourvus du nom du destinataire concernaient lui-même et Mme B.... La requérante ne conteste pas dans ses écritures la teneur de ces déclarations retranscrites dans la proposition de rectification du 15 décembre 2016. Cet aveu de M. B..., qui, au cours de la période d'imposition en litige, était l'époux de la requérante soumis à une imposition commune, et a été l'interlocuteur désigné lors de la vérification de comptabilité de la société, est opposable à Mme B.... Il en résulte que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension par Mme B... et son époux des distributions occultes de la société DCR Najah. Le moyen de Mme B... tiré de ce qu'elle ne serait pas avec son époux le maître de l'affaire doit être écarté comme inopérant dès lors que l'administration fiscale ne s'est pas fondée sur cette qualité pour imposer les distributions au nom du foyer fiscal.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées, ainsi que, en tout état de cause, celles relatives aux dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 janvier 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02316


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02316
Date de la décision : 11/01/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.

Procédure - Voies de recours - Appel.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-11;22ly02316 ?
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