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01/02/2024 | FRANCE | N°22LY03727

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 01 février 2024, 22LY03727


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La SAS Guerbaa Plâtrerie a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2017, des pénalités correspondantes et des amendes.



Par un jugement n° 2004443 du 7 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



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Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 décembre 2022 et 6 juillet 2023, la SAS Guerbaa Plâtreri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Guerbaa Plâtrerie a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2017, des pénalités correspondantes et des amendes.

Par un jugement n° 2004443 du 7 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 décembre 2022 et 6 juillet 2023, la SAS Guerbaa Plâtrerie, représentée par Me Tournoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des amendes pour une somme de 10 509 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de fait et d'erreurs de droit ;

- l'avis de mise en recouvrement est irrégulier en ce qu'il ne permet pas de comprendre les motifs de l'amende infligée ;

- la facture du 31 décembre 2015 ne correspond pas à une opération fictive et elle n'en est pas l'auteur ;

- l'administration ne pouvait pas abandonner l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts au titre des exercices clos en 2016 et 2017 et maintenir celle au titre de l'exercice clos en 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 18 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Guerbaa Plâtrerie, qui exerce une activité tous corps d'état du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle l'administration l'a assujettie à des rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée au titre des exercices clos en 2015, 2016 et 2017 et lui a adressé un avis de mise en recouvrement du 16 décembre 2019 portant sur des amendes d'un montant de 10 509 euros. Elle relève appel du jugement du 7 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de ces amendes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La SAS Guerbaa Plâtrerie soutient que les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de fait et d'erreurs de droit. De tels moyens ne relèvent pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé. Ces moyens doivent, dès lors, être écartés.

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement :

3. Aux termes de l'article R.*256-1 du livre des procédures fiscales : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. (...) Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. (...) ".

4. La SAS Guerbaa Plâtrerie soutient que l'avis de mise en recouvrement du 16 décembre 2019 ne permet pas de comprendre les motifs de l'amende de 10 509 euros appliquée dont le montant ne correspond pas au montant des amendes mentionnées par la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable et qui renvoie à un document ne donnant pas les motifs des chiffres retenus.

5. L'avis de mise en recouvrement du 16 décembre 2019 en litige mentionne que la SAS Guerbaa Plâtrerie est redevable d'une somme de 10 509 euros au titre d'amendes, terme mis au pluriel, établies au titre de la période d'octobre 2014 à décembre 2015 et se réfère à trois documents, à savoir la proposition de rectification du 30 novembre 2018, la réponse aux observations du contribuable du 11 mars 2019 et la lettre d'information du 15 octobre 2019. La proposition de rectification à laquelle il fait référence en premier lieu, indique qu'il sera fait application d'une amende de 50 % sur le fondement du 2 du I de l'article 1737 du code général des impôts au titre d'une facture de 20 000 euros correspondant à l'acquisition par la SAS Guerbaa Plâtrerie d'un fourgon et de divers matériels auprès de la SARL Guerbaa. La réponse aux observations du contribuable, à laquelle se réfère en deuxième lieu l'avis de mise en recouvrement, indique, quant à elle, qu'il sera fait application de l'amende de 100 % prévue à l'article 1759 du code général des impôts en cas de non révélation de l'identité des bénéficiaires des distributions, faute pour la société d'avoir fourni le nom du ou des bénéficiaires des distributions dans le délai de trente jours de la réception de la proposition de rectification, à hauteur des revenus distribués de 5 509 euros, 8 774 euros et 6 564 euros maintenus au titre, respectivement, des exercices clos en 2015, 2016 et 2017. Il résulte de l'instruction, par décision du 24 septembre 2019, prise sur recours hiérarchique de la société, l'inspectrice principale des finances publiques a, d'une part, ramené à 5 000 euros le montant de l'amende du 2 du I de l'article 1737 notifiée à hauteur de 10 000 euros et, d'autre part, limité à 5 509 euros, soit au montant des distributions de l'exercice clos en 2015, le montant de l'amende de 100 % de l'article 1759 assise initialement sur le montant cumulé des distributions des exercices clos en 2015, 2016 et 2017. Enfin, la lettre d'information relative aux nouvelles conséquences financières des rehaussements du 15 octobre 2019, à laquelle se réfère l'avis de mise en recouvrement en troisième lieu, indique qu'elle concerne l'amende du 2 du I de l'article 1737 du code général des impôts d'un montant de 5 000 euros et l'amende de l'article 1759 du code général des impôts de 5 509 euros en renvoyant au courrier du 24 septembre 2019 mentionné ci-dessus, lequel informe la SAS Guerbaa Plâtrerie de l'abandon de l'amende pour non désignation des bénéficiaires de distributions pour les exercices clos en 2016 et 2017 et de la remise de la moitié de l'amende pour facture fictive ramenant celle-ci à 5 000 euros. Dans ces conditions, eu égard aux références contenues dans l'avis de mise en recouvrement du 16 décembre 2019 dont aucune n'est inexacte, la SAS Guerbaa Plâtrerie, qui ne conteste pas avoir reçu la décision du 24 septembre 2019, ne peut être regardée, en l'espèce, comme ayant été privée de la possibilité de contester utilement l'avis de mise en recouvrement quand bien même cet acte donne le montant cumulé des amendes. Par suite, les dispositions précitées de l'article R.*256-1 du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues.

Sur l'amende de l'article 1737 du code général des impôts :

6. Aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ; / 2. De la facture, le fait de délivrer une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle (...) ".

7. En premier lieu, la SAS Guerbaa Plâtrerie a comptabilisé en charges, à la date du 31 décembre 2015, une facture d'un montant total de 20 000 euros correspondant à l'acquisition d'un véhicule Renault Master Fourgon immatriculé BZ-727-SM et d'un ensemble de matériel auprès de la SARL Guerbaa. Il résulte toutefois de l'instruction que cette dernière a fait l'objet d'un avis de clôture de liquidation par décision du 9 octobre 2015 puis d'une radiation le 29 octobre 2015 publiée au BODACC le 18 novembre 2015. Elle n'était pas, ainsi, en capacité le 31 décembre 2015 d'émettre cette facture ni, d'ailleurs, d'encaisser le règlement de 20 000 euros. Si l'administration a admis que le matériel était en possession de la société requérante, il résulte de ce qui précède qu'il n'a pu être cédé le 31 décembre 2015. De plus, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que le véhicule Renault a été mis en circulation le 30 novembre 2011 au nom de la société DIAC, qu'il a été donné en location à la SARL Guerbaa et que c'est seulement le 8 avril 2016 qu'il a été acquis, directement auprès de la société DIAC par la SAS Guerbaa Plâtrerie, qui l'a alors inscrit dans le tableau des immobilisations n° 2054 de la liasse fiscale de l'exercice clos le 31 décembre 2016 pour une valeur de 2 110 euros HT. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que la facture du 31 décembre 2015 était fictive.

8. En second lieu, l'amende fiscale pour facture fictive prévue par les dispositions précitées ne peut être mise à la charge que de la personne ayant délivré la facture fictive, redevable de cette amende, égale à 50 % du montant de la facture. Si la personne dont le nom figure sur une facture est présumée être celle qui l'a délivrée, cette présomption peut être combattue par l'administration comme par la personne en cause. Si l'une ou l'autre établit qu'une facture fictive a été délivrée non par la personne dont le nom figure sur cette facture, mais par une autre personne, l'amende fiscale ne peut être mise à la charge que de cette dernière.

9. La SARL Guerbaa, qui a fait l'objet d'un avis de clôture de liquidation par décision du 9 octobre 2015 puis d'une radiation le 29 octobre 2015 publiée au BODACC le 18 novembre 2015, ne peut être l'auteur de la facture du 31 décembre 2015. Si la SAS Guerbaa Plâtrerie soutient que le dirigeant de la SARL Guerbaa serait l'auteur de la facture, elle ne l'établit pas. Dans ces conditions, la SAS Guerbaa Plâtrerie doit être regardée comme ayant délivré la facture du 31 décembre 2015. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a mis à sa charge l'amende pour facture fictive.

Sur l'amende de l'article 1759 du code général des impôts :

10. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ". Aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées (...) ".

11. L'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts a pour seul objet de sanctionner le défaut de réponse à une demande de désignation des bénéficiaires de revenus distribués. Il est constant que la SAS Guerbaa Plâtrerie n'a pas répondu dans le délai de trente jours qui lui était imparti à la demande de désignation des bénéficiaires des distributions constatées à l'issue du contrôle sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts formée dans la proposition de rectification. C'est donc à bon droit que l'administration a appliqué l'amende, sans qu'y fassent obstacle les circonstances que la société requérante a répondu après le délai de trente jours et que l'amende n'a été finalement appliquée qu'aux seules distributions de l'exercice clos en 2015 sur recours hiérarchique de ladite société.

12. Il résulte de ce qui précède que la SAS Guerbaa Plâtrerie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles en tout état de cause relatives aux dépens, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Guerbaa Plâtrerie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Guerbaa Plâtrerie et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03727


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03727
Date de la décision : 01/02/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-04 Contributions et taxes. - Généralités. - Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;22ly03727 ?
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