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29/02/2024 | FRANCE | N°23LY03181

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 29 février 2024, 23LY03181


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



L'association APIRJSO - La Couronnerie a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 septembre 2021 par lesquelles le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne-Franche-Comté et le président du conseil départemental de la Nièvre ont, conjointement, d'une part, prononcé la cessation totale et définitive de l'activité de l'EHPAD Les Ocrières au terme d'une période d'administration provisoire de quatre mois et, d

'autre part, désigné les administrateurs provisoires de cet établissement.



Par un jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association APIRJSO - La Couronnerie a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 septembre 2021 par lesquelles le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne-Franche-Comté et le président du conseil départemental de la Nièvre ont, conjointement, d'une part, prononcé la cessation totale et définitive de l'activité de l'EHPAD Les Ocrières au terme d'une période d'administration provisoire de quatre mois et, d'autre part, désigné les administrateurs provisoires de cet établissement.

Par un jugement n° 2103019 du 8 août 2023, le tribunal administratif de Dijon a annulé les arrêtés conjoints du 16 septembre 2021 de l'ARS Bourgogne-Franche-Comté et du département de la Nièvre.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête enregistrée le 9 octobre 2023 sous le n° 23LY03181, l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne Franche-Comté, représentée par la SELAS Akilys avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2103019 du 8 août 2023 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de rejeter les conclusions de l'association APIRJSO - La Couronnerie ;

3°) de mettre à la charge de l'association APIRJSO - La Couronnerie une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'ARS de Bourgognes Franche-Comté soutient que :

- c'est à tort que le tribunal s'est fondé, pour annuler la décision, sur ce qu'elle serait entachée d'erreur de fait ;

- les autres moyens invoqués par l'association en première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, l'association APIRJSO - La Couronnerie, représentée par Me Cocquebert, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'ARS de Bourgogne Franche-Comté sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association APIRJSO - La Couronnerie soutient que c'est à juste titre que le tribunal a relevé qu'elle n'a pas méconnu les injonctions qui lui ont été adressées.

Par ordonnance du 15 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2023 à 16h30.

II°) Par une requête enregistrée le 9 octobre 2023 sous le n° 23LY03185 et régularisée le 13 octobre 2023, l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne Franche-Comté, représentée par la SELAS Akilys avocats, demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n° 2103019 du 8 août 2023 du tribunal administratif de Dijon.

L'ARS de Bourgogne Franche-Comté soutient que :

- c'est à tort que le tribunal s'est fondé, pour annuler la décision, sur ce qu'elle serait entachée d'erreur de fait ;

- les autres moyens invoqués par l'association en première instance ne sont pas fondés ;

- l'exécution du jugement risque en outre d'entrainer des conséquences irréparables au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, dès lors qu'elle compromettrait le retour à un fonctionnement normal de l'EHPAD.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, l'association APIRJSO - La Couronnerie, représentée par Me Cocquebert, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'ARS de Bourgogne Franche-Comté sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association APIRJSO - La Couronnerie soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal a relevé qu'elle n'a pas méconnu les injonctions qui lui ont été adressées, les moyens invoqués par l'ARS ne pouvant dès lors être regardés comme sérieux ;

- en outre, l'exécution du jugement n'apparait pas de nature à entrainer des conséquences difficilement réparables.

III°) Par une requête enregistrée le 9 octobre 2023 sous le n° 23LY03193, le département de la Nièvre, représenté par la SELARL Earth avocats, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 2103019 du 8 août 2023 du tribunal administratif de Dijon et de rejeter les conclusions de l'association APIRJSO - La Couronnerie ;

2°) à titre subsidiaire, de différer de douze mois à compter de l'arrêt à intervenir les effets de l'annulation ;

3°) de mettre à la charge de l'association APIRJSO - La Couronnerie une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département de la Nièvre soutient que :

- le jugement est irrégulier pour insuffisance de motivation sur le point de savoir si la même décision aurait pu être prise en l'absence des motifs regardés comme erronés ;

- les injonctions adressées à l'association n'ont pas été respectées, mettant en cause la santé, la sécurité et le bien-être des résidents ;

- subsidiairement, la prise d'effet dans le temps de l'annulation devrait être reportée d'au moins 12 mois, afin de ne pas compromettre le redressement de l'établissement.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, l'association APIRJSO - La Couronnerie, représentée par Me Cocquebert, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du département de la Nièvre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association APIRJSO - La Couronnerie soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal a relevé qu'elle n'a pas méconnu les injonctions qui lui ont été adressées ;

- la demande de report dans le temps des effets de l'annulation doit s'entendre comme visant au sursis à exécution du jugement, sans que la base légale en ait été précisée, ces conclusions étant en tout état de cause irrecevables faute d'être présentées par requête distincte.

Par ordonnance du 15 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2023 à 16h30.

IV°) Par une requête enregistrée le 9 octobre 2023 sous le n° 23LY03194, le département de la Nièvre, représenté par la SELARL Earth avocats, demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement n° 2103019 du 8 août 2023 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de mettre à la charge de l'association APIRJSO - La Couronnerie une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département de la Nièvre soutient que :

- à titre principal, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, les injonctions adressées à l'association n'ont pas été respectées, mettant en cause la santé, la sécurité et le bien-être des résidents, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal ;

- à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le moyen précité est sérieux et l'exécution du jugement risque de compromettre le redressement de l'établissement.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, l'association APIRJSO - La Couronnerie, représentée par Me Cocquebert, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du département de la Nièvre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association APIRJSO - La Couronnerie soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal a relevé qu'elle n'a pas méconnu les injonctions qui lui ont été adressées, les moyens invoqués par l'ARS ne pouvant dès lors être regardés comme sérieux ;

- en outre, l'exécution du jugement n'apparait pas de nature à entrainer des conséquences difficilement réparables.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration.

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stillmunkes, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- les observations de Me Francia, représentant l'agence régionale de santé de Bourgogne Franche-Comté,

- les observations de Me Gebre, représentant le département de la Nièvre ;

- et les observations de Me Cocquebert, représentant l'association APIRJSO - La Couronnerie.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Résidence Caffet a bénéficié d'une autorisation pour la gestion de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Les Ocrières sur le territoire de la commune de Saint-Amand-en-Puisaye. Par arrêté du 30 juillet 2020, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne Franche-Comté et le président du conseil départemental de la Nièvre, au vu notamment de la fusion-absorption intervenue le 31 octobre 2019 de l'association Résidence Caffet par l'association APIRJSO La Couronnerie, ont transféré à cette dernière l'autorisation de l'association Résidence Caffet. L'association APIJSO-La Couronnerie a précisé dans sa demande de première instance qu'elle avait antérieurement pris en charge la gestion de l'EHPAD depuis 2017, dans le cadre d'un mandat de gestion. A la suite de plusieurs signalements reçus durant l'année 2020, une inspection a été diligentée les 22 et 23 février 2021. Par courrier du 8 avril 2021, le directeur général de l'ARS et le président du conseil départemental, ont informé l'association APIRJSO La Couronnerie de ce qu'ils envisageaient de lui notifier des prescriptions et recommandations. Au terme de cette procédure contradictoire, une lettre d'injonction datée du 30 avril 2021 a été adressée à l'association sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles aux termes duquel " I.- Lorsque les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil méconnaissent les dispositions du présent code ou présentent des risques susceptibles d'affecter la prise en charge des personnes accueillies ou accompagnées ou le respect de leurs droits, l'autorité compétente en vertu de l'article L. 313-13 peut enjoindre au gestionnaire d'y remédier, dans un délai qu'elle fixe (...) ". En tenant compte des manquements qui avaient été rectifiés, sept groupes d'injonctions ont été définis, portant sur le circuit du médicament, le statut des infirmiers, les projets de vie des résidents, l'organisation des soins, la gouvernance de l'établissement, la prévention des risques et le signalement des maltraitances. Estimant que ces injonctions n'avaient été qu'imparfaitement mises en œuvre, le directeur général de l'ARS et le président du conseil départemental ont, par décisions conjointes du 16 septembre 2021, d'une part, prononcé la cessation totale et définitive de l'activité de l'EHPAD Les Ocrières au terme d'une période d'administration provisoire de quatre mois et, d'autre part, désigné les administrateurs provisoires de cet établissement. Par ailleurs, par un arrêté ultérieur du 23 février 2023 qui n'est pas en litige dans la présente instance, les mêmes autorités ont transféré l'autorisation à un autre organisme à compter du 1er mars 2022. Par le jugement attaqué du 8 août 2023, le tribunal administratif de Dijon a annulé les deux décisions précitées du 16 septembre 2021.

Sur la régularité du jugement :

2. Après avoir cité les textes applicables et longuement analysé les motifs des décisions contestées, le tribunal a estimé qu'ils étaient entachés de plusieurs erreurs de faits et qu'il ne résultait pas de l'instruction que la même décision de cessation définitive d'activité aurait été prise au vu des seuls motifs non viciés, cette décision devant dès lors être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, celle portant désignation d'administrateurs provisoires. Ce faisant, le tribunal a suffisamment motivé son jugement.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles : " I.- L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation contrôle l'application des dispositions du présent code par les établissements et services sociaux et médico-sociaux et lieux de vie et d'accueil mentionnés à l'article L. 312-1 et par les autres services de leurs organismes gestionnaires qui concourent, dans le cadre de l'autorisation, à la gestion desdits établissements, services et lieux de vie et d'accueil (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " I.- Lorsque les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil méconnaissent les dispositions du présent code ou présentent des risques susceptibles d'affecter la prise en charge des personnes accueillies ou accompagnées ou le respect de leurs droits, l'autorité compétente en vertu de l'article L. 313-13 peut enjoindre au gestionnaire d'y remédier, dans un délai qu'elle fixe (...) / Cette injonction peut inclure des mesures de réorganisation ou relatives à l'admission de nouveaux bénéficiaires et, le cas échéant, des mesures individuelles conservatoires, en application du code du travail ou des accords collectifs. / II.- S'il n'a pas été satisfait à l'injonction dans le délai fixé et tant qu'il n'est pas remédié aux risques ou aux manquements en cause, l'autorité compétente peut prononcer, à l'encontre de la personne physique ou morale gestionnaire de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil, une astreinte journalière et l'interdiction de gérer toute nouvelle autorisation relevant de ladite autorité. (...) / III.- Une sanction financière peut en outre être prononcée en cas de méconnaissance des dispositions du présent code. (...) / V.- S'il n'est pas satisfait à l'injonction dans le délai fixé, l'autorité compétente peut alternativement ou consécutivement à l'application des II, III et IV précédents désigner un administrateur provisoire pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois, renouvelable une fois (...) ". Aux termes de l'article L. 313-16 du même code : " I.- Lorsque la santé, la sécurité, ou le bien-être physique ou moral des personnes accueillies ou accompagnées sont menacés ou compromis, et s'il n'y a pas été remédié dans le délai fixé par l'injonction prévue à l'article L. 313-14 ou pendant la durée de l'administration provisoire, l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation peut décider la suspension ou la cessation de tout ou partie des activités de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil dans les conditions prévues aux articles L. 313-17 et L. 313-18. / (...) / III.- Lorsque l'établissement, le service ou le lieu de vie et d'accueil relève d'une autorisation conjointe, les décisions prévues au I sont prises conjointement par les autorités compétentes. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-17 du même code : " En cas de suspension ou de cessation définitive de l'activité d'un établissement, d'un service ou d'un lieu de vie et d'accueil, la ou les autorités compétentes pour délivrer l'autorisation ou, en cas de carence, le représentant de l'Etat dans le département prennent en tant que de besoin les mesures nécessaires à la continuité de la prise en charge des personnes qui y étaient accueillies. / Elles peuvent désigner à cette fin un administrateur provisoire dans les conditions prévues au V de l'article L. 313-14 (...) ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les mesures en litige portant placement de l'établissement sous administration provisoire et cessation de son activité au terme de ce placement, ne sont légalement possibles qu'à la double condition que les injonctions formulées n'aient substantiellement pas été respectées et qu'il en résulte un risque pour la santé, la sécurité ou le bien-être physique ou moral des personnes accueillies.

4. Il résulte de l'arrêté précité du 30 juillet 2020 qui a transféré à l'association APIRJSO-La Couronnerie la gestion de l'EHPAD Les Ocrières, que celui-ci a une capacité d'accueil en hébergement complet de 53 personnes âgées dépendantes et de 12 personnes atteintes d'Alzheimer ou d'une maladie apparentée, outre 4 places pour l'accueil temporaire de personnes âgées atteintes d'Alzheimer ou d'une maladie apparentée, soit un total de 69 places, dont une part importante pour des patients atteints de pathologies lourdes et appelant un suivi particulier.

5. L'inspection diligentée en février 2021 à la suite de signalements qui émaneraient de personnels de l'établissement et évoquaient de graves dysfonctionnements, a souligné l'existence d'une carence en matière de gouvernance et de management des soins, des manquements dans l'utilisation des outils institutionnels de pilotage et les procédures internes et une faiblesse du dispositif de gestion des risques. Les reproches essentiels portent sur l'insuffisance et la mauvaise organisation des moyens ainsi que sur l'existence de faits de maltraitances physiques et psychologiques qui n'ont pas été pris en compte et sur la mauvaise réalisation des soins. Au terme d'une procédure contradictoire, sept groupes d'injonctions ont été définis en avril 2021, portant sur le circuit du médicament, le statut des infirmiers, les projets de vie des résidents, l'organisation des soins, la gouvernance de l'établissement, la prévention des risques et le signalement des maltraitances. Les décisions litigieuses de cessation d'activité et de désignation d'une administration provisoire se fondent sur ce que toutes ces injonctions n'ont pas été suivies d'effets. Le premier reproche porte sur l'absence de contrôle par un infirmier des médicaments avant distribution. Le deuxième sur la situation d'infirmiers qui ne sont pas régulièrement inscrits à l'Ordre. Le troisième porte sur l'insuffisance de sécurisation des soins et de réévaluation des projets de vie des résidents. Le quatrième sur l'insuffisance du livret destiné à l'accueil des intérimaires et étudiants infirmiers, en particulier sur la maltraitance et sur le travail en collaboration. Le cinquième sur une faille de gouvernance et l'absence d'intérim organisé des fonctions de direction. Le sixième sur l'absence de suivi des incidents et maltraitances et de réflexion sur leur prévention. Le septième, enfin, sur l'absence de formation des personnels à la détection et à la gestion des cas de maltraitances.

6. En premier lieu, l'inspection a constaté que l'équipe se composait de nombreuses personnes non diplômées, intérimaires ou simples stagiaires, avec un fort turn-over, et le rapport d'inspection souligne l'absence d'infirmiers pendant une partie des journées, ce qui compromet l'encadrement médical des soins et crée un risque de maltraitance institutionnelle. Les première, deuxième et quatrième série d'injonction sont relatives à ces difficultés. La première série d'injonctions porte sur le circuit du médicament et notamment de ceux ayant le caractère de stupéfiants dont la traçabilité doit être garantie, afin de s'assurer d'un contrôle infirmier effectif sur leur distribution et leur administration. La deuxième série d'injonctions exige que soit vérifié que les postes d'infirmiers sont effectivement occupés par des professionnels régulièrement inscrits à l'Ordre. Enfin, la quatrième série d'injonctions porte sur l'accueil et l'encadrement des stagiaires et intérimaires, afin de garantir leur formation et d'éviter qu'ils soient irrégulièrement chargés de missions relevant d'un professionnel diplômé. Sur ces points, les décisions contestées notent tout d'abord l'absence persistante de contrôle infirmier avant la distribution et l'administration des médicaments, ces missions étant prises en charge par d'autres personnels. Les patients sont des personnes âgées dépendantes, dont certaines en soins palliatifs, le suivi précis de leur traitement étant dès lors particulièrement important. Ainsi que l'a relevé le tribunal, la distribution et l'administration des médicaments demeurent possibles par des personnels non infirmiers, étant simplement précisé qu'ils pourraient faire appel à un infirmier en cas de doute. Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'injonction ne peut ainsi être regardée comme ayant été pleinement exécutée. Ensuite, les décisions relèvent que tous les infirmiers n'ont pas justifié de leur inscription régulière à l'Ordre. Si le tribunal a relevé que trois des cinq infirmiers ont finalement justifié d'une telle inscription, la situation des deux autres, qui avait spécialement été relevée, n'est pas régularisée et l'injonction sur ce point ne peut ainsi être regardée comme satisfaite. Enfin, les décisions relèvent un cumul d'insuffisances dans l'accueil des intérimaires et stagiaires, faute d'utiliser le livret d'accueil spécialement élaboré pour les stagiaires, faute de contacts suffisants avec l'Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) et faute d'indications précises suffisantes sur la répartition des missions de soins et sur les attendus en matière de prévention des maltraitances sous forme d'une définition de la " bientraitance ". Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'exigence de prévention de la maltraitance faisait l'objet du sixième groupe d'injonctions notifiées et son seul rattachement au quatrième groupe, dans les décisions contestées, pour des raisons de présentation, est sans incidence sur leur légalité. Par ailleurs, l'explicitation des attendus en termes de bientraitance des personnes accueillies doit être au cœur des missions de l'établissement et l'explicitation de ces attendus à destination des personnels appelés à intervenir dans l'établissement est donc une exigence importante. La circonstance, relevée par le tribunal, que l'établissement a souhaité promouvoir un esprit de " collaboration " ne suffit par ailleurs pas à rendre sans objet l'impératif de présentation précise de la répartition des tâches en matière de soins médicaux selon le statut de chaque intervenant. Il est enfin vrai que l'établissement a pris contact avec l'IFSI mais il n'est pas établi que le livret d'accueil préconisé serait effectivement utilisé, le tribunal ayant simplement relevé qu'un autre projet de livret serait encore en cours d'examen, sans que soit établie de manière effective une information claire et complète des stagiaires équivalente à celle dispensée dans le livret préconisé. Il résulte de ce qui vient d'être dit que c'est à juste titre que l'ARS et le département ont constaté que l'essentiel des injonctions restant en litige concernant l'organisation des moyens humains et des soins médicaux n'étaient pas régulièrement mises en œuvre.

7. En deuxième lieu, la mission d'inspection a relevé que le directeur est remplacé par une directrice par intérim. Le rapport d'inspection a en particulier constaté le défaut d'organisation des équipes, la mauvaise vision d'ensemble de l'établissement par la direction ainsi que la mauvaise diffusion générale de l'information, l'ensemble de ces éléments aggravant le climat délétère qui s'est développé au sein des équipes. Le groupe d'injonction n° 5 porte sur les carences en matière de gouvernance, en exigeant une diffusion adéquate de l'information et l'organisation de réunions de direction, la mise au point d'un organigramme clair avec explicitation des missions de chacun, de façon cohérente avec des délégations précises, ainsi que l'organisation d'une continuité de la direction. Ainsi que l'a souligné l'ARS en défense, lors d'une réunion organisée le 30 août 2021 par l'ARS et le département avec l'association, celle-ci a admis " la fragilité de l'équipe de direction, qui se résume à la directrice adjointe, recrutée le 27 mars 2021, assurant les postes de directeur et de cadre de santé, non pourvus de façon continue depuis plus d'un an " Les décisions contestées relèvent l'incohérence et le peu de lisibilité dans l'attribution des compétences de direction en matière budgétaire et de soins. Elles relèvent également que, si quelques réunions ont été organisées, les comptes rendus restent très sommaires et ne font pas apparaitre de réelle transformation dans l'organisation. Enfin, elles relèvent l'absence de continuité organisée de la direction en cas d'intérim. Les seules circonstances, relevées par le jugement, qu'un protocole de continuité de la direction a été établi, dont l'ARS a au demeurant contesté qu'il lui ait jamais été transmis, et qu'un " pré-diagnostic " de gouvernance aurait été effectué par un cabinet de conseil en 2020, dont la mise en œuvre serait envisagée, ne suffisent pas à établir, pas davantage que la seule référence faite par l'association à des indications sommaires dans une fiche de poste, que les injonctions précitées concernant la gouvernance de l'établissement auraient été entièrement mises en œuvre.

8. En troisième lieu, la mission d'inspection a notamment relevé l'absence durable de réévaluation des projets de vie des résidents, le mauvais respect de leur rythme de vie par application indifférenciée d'une organisation stéréotypée sans individualisation et le mauvais suivi de leur état de santé et des épisodes dépressifs. Le troisième groupe d'injonctions porte ainsi sur la mise en place ou la réévaluation des projets de vie, le respect des rythmes de vie, le repérage du risque suicidaire, la formation des infirmiers à la dialyse, le rassemblement et la transmission au médecin des informations sur la pandémie Covid-19 et la finalisation d'un protocole opérationnel sur les cas d'urgence. Les décisions en litige, qui ont été prises sur dossier sans nouvelle inspection sur place, se bornent ici à relever que, si un planning d'établissement des projets de vie était exigé dans un délai de quinze jours, seules trois révisions ont été engagées. Sur ce point, le tribunal a au contraire relevé qu'un calendrier avait été établi en mai 2021 et qu'à la date des décisions en litige la révision de 37 projets de vie aurait été engagée. Aucun élément précis sur ces projets n'a toutefois été fourni par l'association. La matérialité du manquement relevé concernant les projets de vie n'est, dès lors, pas établie concernant la mise au point d'un calendrier prévisionnel, mais l'effectivité de sa mise en œuvre n'est en revanche corroborée par aucun élément.

9. En quatrième lieu, la mission d'inspection a relevé que des faits de maltraitance physiques et psychologiques qu'elle qualifie de " distincts et avérés ", n'ont pas fait l'objet d'enquête interne ni de mesure correctrice et qu'il y a un défaut de déclaration sans délai d'événements indésirables graves. Elle évoque à titre d'exemple la gestion de l'incontinence, qui peut frapper les personnes âgées dépendantes et doit être prise en charge dans le respect de leur dignité. Les groupes d'injonctions n° 6 et n° 7 portent ainsi sur la gestion des risques et la prévention des maltraitances, en exigeant un recueil des plaintes, réclamations et incidents, avec analyse et suivi, ainsi qu'en informant, en sensibilisant et en formant spécialement tout le personnel, notamment sur l'obligation de signalement, et en mettant en place des procédures formalisées d'identification et d'anticipation, outre des comités de retour d'expérience. Les décisions contestées soulignent l'absence de procédures suffisantes de recueil, d'analyse et de suivi des incidents, réclamations et signalements, l'insuffisance des procédures d'identification et d'anticipation des risques et situations de maltraitance, ainsi que du retour d'expérience et, enfin, l'absence de formation adaptée des personnels. Le jugement se borne à relever la validation d'une " fiche de sécurité " et la création d'un comité de vigilance et des risques, tout en notant l'absence de mise à jour du document de prévention et de gestion des risques et sans constater la moindre action concrète et effective d'analyse et de suivi ni aucun élément sur la formation effective des personnels. Le constat fait dans les décisions selon lequel les injonctions concernant la gestion et la prévention des risques, et notamment des maltraitances, n'ont été qu'insuffisamment mises en œuvre n'est ainsi pas erroné.

10. Il résulte des points 4 à 9 qui précédent que, si quelques erreurs de fait peuvent être relevées, essentiellement concernant l'existence d'un calendrier prévisionnel de réévaluation des projets de vie, les autres manquements constatés, qui portent sur l'insuffisance structurelle des moyens en personnel et de la gestion des soins, ainsi que de la gouvernance de l'établissement, et enfin sur l'insuffisante attention aux risques et aux maltraitances, tous éléments qui sont de nature à affecter la santé, la sécurité et de le bien-être des personnes accueillies, suffisent à fonder légalement les décisions. Il résulte de l'instruction que l'ARS et le département auraient pris les mêmes décisions s'ils s'étaient fondés sur les seuls manquements établis. C'est dès lors à tort que, pour annuler les décisions attaquées, le tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de l'erreur de fait.

11. Il appartient dès lors à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens invoqués par l'association, tant en première instance qu'en appel.

Sur les autres moyens invoqués par l'association :

12. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles : " (...) / III.- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant de la compétence du directeur général de l'agence régionale de santé, les contrôles prévus à la présente section sont effectués par les personnels des agences régionales de santé mentionnés aux articles L. 1421-1 et L. 1435-7 du code de la santé publique et les autres personnes susceptibles de les assister. / IV.- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant de la compétence du président du conseil départemental, les contrôles prévus à la présente section sont effectués par les agents départementaux mentionnés à l'article L. 133-2 du présent code dans les conditions définies par la présente section. / V.- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant d'une autorisation conjointe, les contrôles prévus à la présente section sont effectués de façon séparée ou conjointe par les agents mentionnés aux II à IV du présent article, dans la limite de leurs compétences respectives (...) ".

13. D'une part, aux termes de l'article L. 1421-1 du code de la santé publique : " Les pharmaciens inspecteurs de santé publique, les médecins inspecteurs de santé publique, les inspecteurs de l'action sanitaire et sociale, les ingénieurs du génie sanitaire, les ingénieurs d'études sanitaires et les techniciens sanitaires contrôlent, dans le cadre de leurs compétences respectives, l'application des dispositions du présent code et, sauf dispositions spéciales contraires, des autres dispositions législatives et réglementaires relatives à la santé publique (...) ". Aux termes de l'article L. 1435-7 du même code : " Le directeur général de l'agence régionale de santé peut désigner, parmi les personnels de l'agence respectant des conditions d'aptitude technique et juridique définies par décret en Conseil d'Etat, des inspecteurs et des contrôleurs pour remplir, au même titre que les agents mentionnés à l'article L. 1421-1, les missions prévues à cet article ; il peut également désigner des experts pour les assister. Il peut, dans les mêmes conditions, leur confier les missions prévues à l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles. Les inspecteurs et contrôleurs de l'agence disposent des prérogatives prévues aux articles L. 1421-2 et L. 1421-3 du présent code (...) ".

14. D'autre part, aux termes de l'article L. 133-2 du code de l'action sociale et des familles : " Les agents départementaux désignés à cette fin par le président du conseil départemental ont compétence pour contrôler le respect, par les bénéficiaires et les institutions intéressées, des règles applicables aux formes d'aide sociale relevant de la compétence du département (...) ".

15. Il résulte de l'instruction que l'inspection diligentée en février 2021 a été réalisée sous la direction, d'une part, s'agissant de l'ARS de Bourgogne Franche-Comté, de Mme D... et de Mme A..., toutes deux inspectrices régulièrement désignées par le directeur général de l'ARS, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 1435-7 du code de la santé publique, par arrêté du 3 octobre 2016 et, d'autre part, s'agissant du département de la Nièvre, de Mme B... et de Mme C..., toutes deux régulièrement missionnées par décision du président du conseil départemental du 15 février 2021. Contrairement à ce que soutient l'association, les inspecteurs désignés par le directeur général de l'ARS sur le fondement de l'article L. 1435-7 du code de la santé publique peuvent être choisis en dehors des corps mentionnés à l'article L. 1421-1 du même code, dès lors qu'ils remplissent les conditions posées par les articles R. 1435-10 et suivants du même code et notamment les articles R. 1435-12, R. 1435-13 et R. 1435-15, ce qui n'est pas contesté en l'espèce. Le directeur général a suffisamment précisé la nature des missions susceptibles de leur être confiées, qui peuvent être, comme en l'espèce, les missions prévues par l'article L. 1421-1 du code de la santé publique et l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'association, rien ne faisait obstacle à ce que le président du conseil départemental désigne spécialement, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 133-2 du code de l'action sociale et des familles, deux agents pour assurer une mission d'inspection, ces dispositions n'exigeant pas que la désignation soit effectuée uniquement de manière générale et pérenne. Enfin, le directeur général de l'ARS a suffisamment précisé les missions confiées aux agents désignés, ce qu'il a pu faire par renvoi à des dispositions textuelles définissant des missions. Le moyen tiré de ce que l'inspection aurait été réalisée par des agents ne disposant pas de la compétence requise doit, ainsi, être écarté.

16. En second lieu, eu égard aux manquements précités, qui portent sur les moyens et la gouvernance de l'établissement ainsi que sur la gestion et la prévention des risques et des maltraitances, d'une part, les injonctions adressées à l'association pour la bonne gestion de l'établissement ne peuvent être regardées comme ayant été entièrement satisfaites, d'autre part, il en résulte un risque pour la santé, la sécurité et le bien-être des personnes accueillies. Dès lors, c'est sans erreur de fait ni erreur d'appréciation que, par les décisions contestées, le directeur général de l'ARS de Bourgogne Franche-Comté et le président du conseil départemental de la Nièvre ont désigné une administration provisoire et prévu la cessation d'activité de l'établissement au terme de cette administration provisoire.

17. Il résulte de tout ce qui précède que l'ARS de Bourgogne Franche-Comté et le département de la Nièvre sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé leurs décisions du 16 septembre 2021.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement :

18. Le présent arrêt se prononçant au fond sur les conclusions de l'ARS de Bourgogne Franche-Comté et sur les conclusions du département de la Nièvre, leurs conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement contesté sont sans objet.

Sur les frais liés au litige :

19. L'association APIRJSO - La Couronnerie étant la partie perdante dans les présentes instances, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'ARS de Bourgogne Franche-Comté et par le département de la Nièvre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2103019 du 8 août 2023 du tribunal administratif de Dijon est annulé.

Article 2 : Les conclusions de première instance et d'appel de l'association APIRJSO - La Couronnerie sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23LY03185 de l'agence régionale de santé de Bourgogne Franche-Comté ni sur les conclusions de la requête n° 23LY03194 du département de la Nièvre.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'agence régionale de santé de Bourgogne Franche-Comté et par le département de la Nièvre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la santé, du travail et des solidarités, à l'agence régionale de santé de Bourgogne Franche-Comté, au département de la Nièvre et à l'association APIRJSO - La Couronnerie.

Délibéré après l'audience du 12 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 février 2024.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY03181-23LY03185-23LY03193-23LY03194


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03181
Date de la décision : 29/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-03-01-05 Aide sociale. - Institutions sociales et médico-sociales. - Établissements - Questions communes. - Établissements d'hébergement des personnes âgées, des adultes handicapés.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : ARCHYS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-29;23ly03181 ?
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